, Mahmoud Dicko, Au final, l’imam le plus célèbre du Mali a livré un plaidoyer pro-domo évitant les petites phrases et les propos tranchants. Cependant, derrière la voix douce et l’appel à l’unité, le religieux prend date et s’apprête à reprendre son bâton de pèlerin.
Après avoir, avec ses alliés du mouvement M5, soulevé les foules contre le président Ibrahim Boubakar Keïta, ce qui avait conduit au coup d’Etat du 20 août 2018, Mahmoud Dicko avait dit « Je retourne dans ma mosquée. » Ce dimanche 28 novembre 2021, il est sorti de son silence et a posé la première pierre de son retour sur la scène politique en convoquant ses fidèles devant son nouveau Centre pour la paix et le vivre ensemble au Sahel.
La transition droit dans le mur…
Officiellement, c’était une cérémonie de bénédiction pour éviter « La désintégration du Mali ou son effondrement » et pour demander l’unité de tous : « les forces vives, les autorités de la transition, les enfants de son pays pour un sursaut national afin de sauver l’essentiel de notre pays qui traverse une situation difficile aujourd’hui. » S’il a tenu a rappelé que les colonels sont « ses fils », en revenant à maintes reprises sur la situation délétère que connaît le Mali, l’imam a pris acte de l’échec des autorités de la transition. En citant l’exemple du cercle de Niono dans le centre du pays, où les champs sont brûlés, où les déplacés sont de plus en plus nombreux, où « tout est mélangé, on ne sait plus qui est qui, les choses vont de mal en pis », il a rappelé aux autorités leur impuissance à ramener la sécurité. D’une manière politiquement très correcte, une grande partie de son propos à consister à demander aux colonels et au Premier ministre, Choguel Maïga : « Où vous emmenez nous ? Droit dans le mur ? »
Règlement de comptes
L’autre grande partie de son discours a été consacrée à la justification de ses actes depuis le coup d’Etat de 2012 jusqu’à aujourd’hui. Quelques jours avant ce grand rendez-vous, sur les réseaux sociaux avaient fleuri nombre de publications l’accusant de tous les maux. Dans une vidéo, notamment, il lui était reproché d’être un « ennemi du Mali » et d’avoir rencontré l’ambassadeur de France, Joël Meyer pour fomenter des coups tordus ! (Le french bashing étant très en vogue dans le Sahel actuellement). Sans ne jamais mentionné ce document, Mahmoud Dicko a relaté les circonstances de sa rencontre avec l’ambassadeur de France, mais cela se passait… en 2012 sous le mandat d’Amadou Toumani Touré ! D’autres écrits anticipant les propos du religieux prévoyait un grand discours pour dénoncer « le complot international en cours d’exécution contre le Mali, une action minutieusement préparée par la France puisqu’elle n’arrive pas à digérer les attaques frontales dont elle a été la cible de la part des autorités maliennes. ». Il n’en a rien été, au contraire, l’imam Dicko a demandé aux autorités maliennes d’être plus mesurées avec la Cedeao afin de trouver un terrain d’entente. Sous entendant ainsi que le Mali n’avait actuellement pas les moyens d’être isolé sur la scène internationale ni de faire face aux nouvelles sanctions que l’organisation sous-régionale pourrait imposer après le 12 décembre.
Enfin dernier coup de pied de l’âne, il a exprimé ses regrets d’avoir contribué au départ du président Ibrahim Boubacar Keïta, un homme qui lui avait toujours montré du respect et qui l’avait aidé moralement et financièrement lors du décès de sa mère. Une manière de dire qu’il avait poussé un ami à la sortie pour le remplacer par d’autres qui n’étaient ni aussi vertueux ni à la hauteur des enjeux.
Le Sahel prend l’eau de toutes parts
Tout au long de ce discours, l’imam Dicko a fredonné cette petite musique « Je ne peux pas rester assis en regardant mon pays sombrer. » Mais que peut-il faire ? Qui sont ses alliés ? Ou sont ses troupes ? Comment créer le sursaut national qu’il appelle de ses vœux ? A-t-il encore une légitimité populaire pour agir ? Autant de questions sans réponse qui peuvent être interprétées comme un aveu de faiblesse.
Le constat est chose aisée. Le Sahel craque de toutes parts, avec les massacres de civils au Niger, les attaques contre des bases de gendarmerie au Burkina Faso, une situation économique et sécuritaire de plus en plus dégradée au Mali…
Mais qui possède les solutions pour éloigner le danger terroriste au Sahel ? Apparemment personne !
Mali : la junte surveille étroitement l’imam Dicko