Le torchon brule à nouveau entre les deux frères ennemis ivoiriens. Laurent Gbagbo devrait faire savoir, via un porte parole autorisé, ce mardi matin à Abidjan qu’il refuse la grâce présidentielle octroyée par le président ivoirien Ouattara samedi dernier 7 août
Le président ivoirien Alassane Ouattara aannoncé avoir accordé sa grâce à son prédécesseur et ancien rival Laurent Gbagbo, sous le coup d’une peine de vingt ans de prison dans son pays à la suite de la crise post-électorale de 2010-2011. L’opération de communication avait été rondement menée, l’annonce faite samedi soir, veille d’un dimanche et d’un lundi fériés, à l’occasion du 62e anniversaire de l’indépendance de la Côte d’Ivoire, mais sans que les principaux médias puissent recouper l’information auprès des principaux intéressés. Seul RFI dans sa revue de presse « Afrique » du week end, toujours bien informé, avait noté qu’il s’agissait là d’ « un faux pas vers la réconciliation ».
« Dans le souci de renforcer la cohésion sociale, j’ai signé un décret accordant la grâce présidentielle à M. Laurent Gbagbo », avait déclaré Alassane Ouattara. Sauf quel le chef de l’état ivoirien n’avait pas demandé son avis au principal intéressé. Lequel devait faire savoir ce mardi matin qu’il n’est pas question pour lui d’accepter d’être gracié d’une condamnation qui, selon lui, a été prononcée par défaut et en dehors de tout cadre légal: aucune convocation n’avait été remise à Laurent Gbagbo; la possibilité d’un appel n’avait pas été ouverte; et enfin et surtout « le casse » de la BCAO qui avait valu à l’ancien Président ivoirien une condamnation à vingt ans de prison en 2018, l’aurait été sans la moindre preuve (1). La manoeuvre judiciaire était en effet grossière à la veille d’échéances politiques importantes.
Pas de grâce pour les prisonniers politiques
Le chef de l’État ivoirien a également annoncé avoir demandé « qu’il soit procédé au dégel de ses comptes et au paiement de ses arriérés de ses rentes viagères ». Autant dire que Laurent Gbagbo ne pourra pas, compte tenu de son refus de la grâce présidentielle, récupérer ses arriérés financiers.
Clairement la situation se tend de nouveau à Abidjan. D’autant que l’alliance conclue entre les deux formations politiques des anciens Présidents Gbagbo et Bédié semble plus forte que jamais. <ce mardi matin, journal Le Temps, proche parmi les proches de Laurent Gbagbo, qualifie cette grâce de « fausse route », et dénonce « une absence criante et injustifiée de volonté à aller résolument à la réconciliation ». Selon lui, « Ouattara laisse les Ivoiriens sur leur faim. On pensait qu’il allait libérer tous les prisonniers civils et militaires. Que neni ! », lancera encore Le Temps.
Le refus du pouvoir de libérer tous les prisonniers politiques a certainement pesé dans la décision de Laurent Gbagbo de fermer la porte à un éventuel compromis avec son rival de toujours
(1) Vingt ans de prison et 329 milliards d’amendes pour avoir fait ouvrir les coffres de la banque centrale des Etats de l’Afrique de l’ouest en pleine cris epost-électorale de 2010-2011. C’est le verdict prononcé vendredi par le président du tribunal qui jugeait notamment l’ex-président Laurent Gbagbo et trois de ses ministres.