La guerre des clans fait rage en Algérie, sans qu’aucun arbitre ne puisse tenter la moindre médiation entre le clan présidentiel et une partie des services secrets algériens. Ces luttes de sérail ont lieu au mépris des règles non écrites du pouvoir algérien et se traduisent par l’emprisonnement de dizaines d’officiers supérieurs et l’interpellation des propres enfants des généraux en exil. Le parcours de Farid Bencheikh, placé samedi dernier en détention provisoire après avoir été évincé de ses fonctions à la tète de la police en début d’année et dont on annonçait une nouvelle affectation au plus haut niveau, témoigne du désordre qui règne au plus haut niveau de l’État algérien.
La cour militaire de Blida a placé en détention provisoire Farid Bencheikh, l’ancien directeur général de la Sûreté nationale (police algérienne) proche de l’entourage du président Tebboune. Ce haut gradé est accusé de conspiration contre les institutions de l’État algérien. « Il aurait collaboré avec des responsables français et des activistes étrangers, annonce la presse officielle, pour orchestrer des attaques médiatiques coordonnées contre la présidence et l’armée algériennes ». L’information est notamment relayée par une journaliste du grand quotidien algérois El Wattan, surnommée « la générale », connue pour sa proximité avec les proches du général Toufik, le tout puissant patron de l’ex DRS pendant un quart de siècle jusqu’à son éviction en 2015 par feu le président Bouteflika.
Ces toutes dernières années et après un long purgatoire provoqué par l’éviction de leur patron, ces hauts cadres formés durant les années noires (1992-1998) par une lutte sans merci contre la violence islamiste, sont revenus au coeur de l’appareil sécuritaire. Le patron de l’armée, à savoir actuellement le général Chengriha, à qui revient traditionnellement le rôle du recours ultime, semble actuellement trop affaibli, y compris physiquement, pour mettre de l’ordre dans une situation préoccupante pour l’unité et la sécurité de la nation algérienne.
L’axe Paris Alger
Une certitude, le général Bencheikh, alors en fonctions à la tète de la police, a toujours entretenu de fort bonnes relations avec ses interlocuteurs français. Il est vrai qu’entre Paris et Alger rêgnait une sorte de lune de miel, du moins jusqu’à la décision d’Emmanuel Macron de rallier les positions de Rabat sur la marocanité du Sahara.
Mais de là à imaginer une conspiration née de ces liens anciens et confiants entre ce grand flic et ses collègues à Paris, il y a un sacré fossé que la justice de Blida n’hésite pas à franchir. L’objectif de ce tribunal militaire aux ordres de certains clans est de répondre coup pour coup aux initiatives d’un Président Tebboune tout juste réélu et fort actif. En effet, quelques nominations sont intervenues très récemment, notamment à la tète des services extérieurs (ou DGDSE), qui ont été décidées par la Présidence. Ces promotions ainsi que la mise à l’écart du numéro 2 de cette même DGDSE furent considérées comme des mauvaises façons par l’ex garde rapprochée du général Toufik, ou du moins par son noyau dur qui, nostalgique de ses prérogatives passées, rêve de refonder le régime algérienen sa faveur.