Jean Yves Le Drian, qui représenterait « la gauche » du macronisme, incarne sans aucun doute la politique étrangère la plus réactionnaire qui ait été menée ces vingt dernières années
Si un patron du Quai d’Orsay sous le quinquennat de Nicolas Sarkozy avait soutenu même un centième des positions publiques de Jean Yves Le Drian et affiché les mêmes amitiés que lui pour les despotes les plus corrompus de la planète, toutes les bonnes consciences de la gauche humaniste auraient protesté. Et ces défenseurs des droits humains auraient eu raison. La médaille d’or que Le Drian a obtenu sans contestation en matière de ventes d’armements n’excuse pas son cynisme assumé et son indifférence revendiquée aux droits démocratiques.
L’ancien ministre de François Hollande devenu un des conseillers les plus écoutés d’Emmanuel Macron multiplie les jugements définitifs sur l’impartialité de la justice irakienne -celle qui condamne à mort et qui torture les français djihadistes- ou sur les élections présidentielles parfaitement régulières qui auraient permis à Ali Bongo d’être élu président. Autant de déclarations inédites dont personne, ou presque, ne s’offusque.
L’aile « gauche »!
Pire, jean Yves Le Drian, nous explique-t-on, incarnerait l’aile gauche du macronisme qu’il songerait à organiser en un véritable courant ! Il y a sans doute un mot de trop dans ce portrait un peu bâclé du Breton. Après avoir donné les clés de l’Afrique à l’armée française alors qu’il était ministre de la Défense, Le Drian s’est constamment appuyé dans sa politique africaine sur les chefs d’état les moins démocrates du continent, qu’il s’agisse du tchadien Déby ou du mauritanien Aziz. Sous prétexte que les forces sécuritaires de ces deux dictateurs seraient les seules au sein du G5 Sahel à pouvoir combattre le terrorisme.
Le voici désormais, notre cher ministre, qui s’affiche, comme un allié décomplexé de ce nouveau axe autoritaire qui va de l’Arabie Saoudite aux Emiratis et à l’Egypte sous le parapluie protecteur de Donald Trump et de la droite israélienne.
On découvre notre ministre plus belliqueux que jamais qui en sous-mains, arme les Séoudiens dans, leur guerre meurtrière au Yémen ou soutient discrètement en Libye un maréchal Haftar décidé à transgresser les accords internationaux difficilement patronnés par l’ONU.
L’honneur perdu du Quai
Face au soulèvements populaires à Alger et Khartoum, le quai d’Orsay a témoigné, ces dernières semaines, d’une totale frilosité. Dans le dossier algérien, la France a tenté de sauver la mise du président déchu, Abdelaziz Bouteflika, alors que les signes se multipliaient d’une fin annoncée du régime.
Après les violences des derniers jours au Soudan qui ont fait plusieurs dizaines de victimes et où l’on vu le Conseil militaire de transition, encouragé par le chef d’état égyptien, le maréchal Sissi, rompre les accords conclus avec l’opposition, le Quai d’Orsay a pondu un communiqué d’eau tiède qui restera dans dans les annales. « La France, apprend-on, rappelle son attachement à ce que la transition fasse l’objet d’un large consensus soudanais et rappelle au Conseil militaire de transition sa responsabilité première dans la sécurité de tous les Soudanais. » Quelle fermeté! Quelle défense intransigeante des principes!
Rarement l’encéphalogramme du Quai d’Orsay aura été aussi plat. Et rarement aussi l’autorité d’un ministre des Affaires Etrangères aura été aussi minée en interne et aussi discréditée chez ces peuples étrangers qui veulent, d’Alger à Khartoum et en Afrique francophone, rester les amis de la France des droits de l’homme.