A partir de ce début janvier c’est une véritable course contre la montre qu’ont engagé les grosses écuries politiques marocaines en prévision des cruciales prochaines élections législatives où les islamistes, pour la première au pouvoir, s’apprêtent à remettre leur mandat en jeu. Il faut dire que lors des élections communales qui se sont tenues le 4 décembre 2015, le parti du chef du gouvernement islamisite Abdelilah Benkirane n’a pas du tout été sanctionné par les électeurs pour une gestion assez rigoriste des finances publiques. Au contraire, le PJD a pu rafler toutes les grandes villes et réaliser une véritable percée dans les campagnes où il a été jusqu’à ce dernier scrutin très peu présent. Qui pourra alors arrêter la marche triomphale des islamistes vers un deuxième mandat ?
Le PAM va-t-il changer de nom ?
Alors que l’on pensait que le PAM, premier parti du royaume en termes de sièges remportés lors des dernières élections communales du 4 septembre, s’acheminait vers un troisième congrès tout en repos, voilà que ses dirigeants s’étripent en public et sur les pages des sites web. C’est le vice-président de la Chambre des représentants, le trublion Abdellatif Ouahbi qui se lance le premier dans une autocritique à la fois du référentiel, de l’identité et du nom du parti fondé par le principal conseiller du roi Fouad Ali El Himma il y a de cela huit années. Sortie qui n’est pas passée inaperçue et qui a suscité une vive réaction de la part d’un autre dirigeant en retrait, mais réputé être très proche de l’homme fort du parti, Ilyas Omari. Mais au-delà de ces passes d’armes musclées entre leaders du PAM, c’est la dénomination même d’Authenticité et Modernité qui est aujourd’hui remise en cause par une partie de ses cadres. D’après des sources bien informées au sein du PAM, un groupe de cadres ambitionne de rebaptiser le parti afin de se débarrasser d’un éventuel « passif » et clarifier le positionnement idéologique.
Stratégie de reconquête pour l’Istiqlal
De son côté, le parti nationaliste dont le leader Hamid Chabat était jusqu’à tout récemment l’un des plus grands pourfendeurs de la politique du gouvernement et de la personnalité de son chef est ostensiblement revenu a de meilleurs sentiments envers le PJD. Mis groggy par les islamistes lors des communales et notamment dans son fief de Fès où il a subi une cuisante défaite, le secrétaire général de l’Istiqlal Hamid Chabat a insufflé depuis à son parti une nouvelle ligne de conduite, essayant de ménager un peu plus le gouvernement et se démarquant totalement des autres partis de l’opposition, principalement du PAM et de l’USFP. D’ailleurs, la plus ancienne formation politique du royaume chérifienne multiplie les clins d’œil en direction des islamistes. Une nouvelle stratégie qui vise à positionner le parti de l’Istiqlal au milieu de l’échiquier politique comme il l’a toujours été. Ce qui lui a de tout temps réussi électoralement.
Ramid pour le parti et Benkirane pour la primature
La question a été tranchée par les instances dirigeantes du PJD qui dirige le gouvernement depuis 2012. Les islamistes sont prêts à batailler ferme afin de pouvoir rempiler lors de la prochaine législature, et avec comme candidat naturel au poste du chef de gouvernement, l’actuel patron du parti Abdelilah Benkirane. Le PJD pour ne pas changer son règlement intérieur et permettre à Benkirane de briguer un troisième mandat à la tête du parti, a décidé de repousser la tenue de son congrès de quelques mois, c’est-à-dure juste après les prochaines élections législatives afin de rendre possible au cas où le PJD remporte cette échéance, la reconduction de Benkirane à la primature. Concernant le parti, c’est le ministre de la Justice considéré comme l’un des faucons du parti qui serait en position de force pour succéder au charismatique Benkirane.
Qui arrêtera le PJD ?
C’est la question qui taraude l’esprit de plusieurs observateurs, mais également de nombreux pontes du makhzen, soucieux de l’équilibre qui a toujours prévalu sur la scène politique marocaine depuis l’indépendance. Aucune des formations politiques en compétition aujourd’hui n’est en mesure de mettre à mal la popularité du chef du gouvernement et de son parti. Même les syndicats et les mouvements de revendications sociales n’arrivent pas écorner leurs image. Un vrai casse-tête si le royaume veut éviter de se retrouver avec un parti hégémoniste qui plus est, est d’obédience islamiste.