Lors de sa visite de trois jours en Tunisie, Emmanuel Macron va distribuer des bonnes paroles et promettre quelques conversions de la dette.
Ce n’est guère un mystère. Le chef d’état français n’a pas de tendresse particulière pour le président tunisien, Beji Caïd Essebsi, « ce vieillard de 92 ans », dit-il en privé, qui n’aura pas été une priorité dans l’agenda international surchargé qui est le sien. Entre le jeune président français qui prétend dessiner la carte du monde au pas de charge et le vieux routier de la politique tunisienne, qui, entre deux séances de dialyse, gère son pays comme une épicerie familiale, l’entente parait impossible. Ce n’est pas l’ambassadeur nommé par la France, Olivier Poivre d’Arvor, un mondain qui prépare son prochain mariage avec une charmante tunisienne, qui va aider le président français à trouver les mots justes et les projets pertinents avec ses interlocuteurs tunisiens.
Retombée de coke
C’est un peu le destin de la Tunisie de passer toujours après l’Algérie et le Maroc. Certes, durant la parenthèse du printemps arabe, le modèle tunisien fut au coeur de l’actualité internationale et les gouvernements de Nicolas Sarkozy firent un effort notoire, 350 millions d’euros de dons et de prêts, pour aider la jeune démocratie tunisienne. Mais l’euphorie est retombée et les dirigeants tunisiens ont le sentiment d’être négligés à nouveau, alors qu’ils paient aujourd’hui la lourde facture économique et sécuritaire d’une transition semée d’embuches. La Tunisie a plus besoin que jamais de l’aide de leurs amis français et la France semble lointaine.
Quand aujourd’hui les occidentaux regardent vers la Tunisie, c’est pour tenter de gérer, au mieux, le brulant dossier libyen. La proximité historique entre la Tunisie et la Libye, la présence sur le sol tunisien de nombreux réfugiés libyens, dont des intermédiaires influents, la complémentarité économique entre les deux pays expliquent que Tunis soit incontournable pour toute tentative de médiation à Tripoli. Ce n’est pas un hasard si ces derniers mois, les services français ont trouvé en Tunisie des relais utiles pour faire avancer l’offre de médiation qu’Emmanuel Macron tente entre les protagonistes de la crise libyenne, notamment pour rapprocher les forces islamistes de la région de Misrata et l’entourage du général Haftar.
L’émissaire que le gouvernement tunisien a envoyé à Paris pour préparer la visite du président français, le ministre islamiste du développement économique, a fait passer len janvier e message suivant. Que le Président français vienne à Tunis pour parler de la Tunisie, et non pas du dossier libyen.
Sans marges de manoeuvre budgétaires et privé de toute affinité particulière pour le pays du jasmin, Emmanuel Macron est condamné à distribuer quelque bonnes paroles à une Tunisie hantée par le spectre de Ben Ali. Comment l’aider avec juste quelques bonnes paroles à ne plus douter d’elle même et de sa transition démocratique?