La Cour constitutionnelle a procédé à l’examen des 1585 candidatures à la députation qui avaient été enregistrées par l’Autorité Nationale des Élections. Seulement 78 d’entre elles ont été invalidées.
Les neuf juges constitutionnels ont examiné les 1585 dossiers de candidatures sous le tamis des articles 37, 134 et 135 du code électoral. Ils ont notamment vérifié la présence de formalités substantielles comme les casiers judiciaires, la moralité, les affaires judiciaires pendantes, les atteintes à l’ordre publique et la participation à des rebellions.
Les juges devront également se prononcer, avant le 3 décembre, sur la validation des vingt-deux candidatures à la présidentielle.
Même si des personnalités de premier plan ont été touchées par ces invalidations, dont des membres du parti présidentiel, on est néanmoins étonné de constater que seulement 78 cas d’invalidations ont été prononcés: 51 au titre de l’ article 37 pour défaut de pièces substantielles et 27 pour des questions judiciaires. On peut se demander notamment si l’obligation de se mettre en disponibilité pour les agents de l’ État, souvent candidats favorables au pouvoir, a bien été respectée.
Quelques rares invalidations du coté des groupes armés
Une douzaine de candidats ont été invalidés pour des motifs de soutien à des groupes rebelles. Parmi ceux-ci on notera l’invalidation de Armel Ningatoloum Sayo, qui avec son mouvement Révolution justice a créé le désordre dans le nord-ouest depuis de nombreuses années, ce qui ne l’ empêche pas d’être membre du gouvernement par intermittence. Parmi les candidats invalidés, il y a essentiellement des chefs anti balaka à la tète de milices qui s’en étaient pris aux groupes armés de la « Séléka », essentiellement animée, elle, par des musulmans (1).
En revanche, aucun membre se revendiquant des groupes armés de Ali Darass ( UPC), d’ Al Khatim (MPC) et de Abdoulaye Hissen (FPRC), n’ a été invalidé. Le récent pacte de réconciliation et de paix signé, le 10 novembre, avec le président Touadera en est peut être la cause.
Des élus rattrapés par leur passé judiciaire
Il aurait été anormal de ne pas sanctionner des personnalités qui ont défrayé la chronique depuis de nombreuses années et qui occupaient néanmoins des postes clés dans l’actuelle Assemblée nationale. On citera :
Mathurin Dimbelet- Nakoe, actuel deuxième vice-président, qui a été rattrapé par son passé judiciaire et son activisme à l’assemblée nationale.
To Sah Be Nza, actuel questeur, qui a un riche passé judiciaire dans les Antilles françaises et notamment en Guyane où il a été associé aux condamnations de l’ancien ministre Louis Bertrand, Mondafrique en avait rendu compte. La Cour a tenu compte de ses condamnations françaises.
Jean-Pierre Mandaba, président de la commission Production, Ressources naturelles, qui avait avoué avoir touché un pot-de-vin de 40 millions de FCFA, dans la délivrance de permis miniers à des entreprises chinoises. Il ne sera donc ni candidat pour les législatives mais également pour la présidentielle pour laquelle il était candidat.
Un scrutin qui s’annonce agité
Les 1507 candidats à la députation validés vont entrer en campagne, à compter du 12 décembre, pour les 140 sièges à pourvoir. La campagne électorale sera très particulière avec un territoire national occupé aux trois-quarts par des groupes armés, une saison des pluies qui rend tout voyage terrestre périlleux et la mobilisation des moyens de l’ Etat pour les candidats MCU, le parti présidentiel.
A titre d’exemple la confrontation dans la circonscription de Boali, entre le premier ministre Firmin Ngrebada et Bertin Béa le Secrétaire général du parti KNK de François Bozizé, sera à grands risques de dérapage et de troubles quasiment inévitables.
Le verdict pour les invalidations concernant l’élection présidentielle est attendu pour le 3 décembre. Les Centrafricains retiennent leur souffle…
(1) Au cours de l’année 2013 émergent les anti-balaka, une constellation de milices villageoises qui se mobilisent d’habitude contre les éleveurs dont le bétail piétine leurs champs. Elles ont initialement été mobilisées par François Bozizé et ses proches, notamment des militaires de sa garde présidentielle, pour protéger la région de Bossangoa dont ils sont tous originaires, contre les exactions de la Séléka constituée essentiellement de « musulmans