Arrivé au Gabon le 23 Mars, le chef de l’exécutif du Gabon, Ali Bongo, a du être évacué d’urgence vers Londres le 4 Avril dernier. Une chronique de Jocksy Ondo Louemba.
Le samedi 23 mars 2019, Ali Bongo était de retour à Libreville capitale du Gabon. Le retour de l’héritier d’Omar Bongo avait été minutieusement préparée comme aux plus belles années du « parti unique ». La télévision nationale « publique » diffusait des chansons à la gloire d’Ali Bongo aux paroles drolatiques, la capitale du Gabon était parée aux couleurs nationales.
Des « supporters » payés 5000 Francs CFA, près de 7 euros, étaient disposés tout au long du parcours de l’Aéroport à sa résidence de la Sablière. La mobilisation était assurée par le Parti Démocratique Gabonais, mais aussi par des « fidèles » d’Ali Bongo dont son directeur de Cabinet qui dispose d’une « association à tout faire » la très célèbre Association des Jeunes Volontaires pour l’Emergence (AJEV).
Les agents du service public avaient été contraints « sous peine de sanctions graves » de se rendre à l’Aéroport de Libreville pour acclamer le chef de la junte gabonaise.
Un bien étrange protocole
Lorsque Ali Bongo parait, le regard vide et s’appuyant sur une canne, il est bien encadré par ses services de sécurité. Son frère, le colonel Frederic Bongo, patron de la Direction générale des Services Spéciaux, supervise le tout en ordonnant même aux journalistes de s’effacer pour qu’Ali Bongo puisse voir « le peuple » qui a été payé pour venir ou contraint de le faire.
A côté d’Ali Bongo quelques « Happy fews » dont son directeur de cabinet, le Premier Ministre, la ministre de la Défense. Beaucoup de ministres sont tenus à distance « parqués dans un coin ».
Peu après son arrivée, Ali Bongo reçoit énormément notamment ses alliés politiques, des leaders religieux, des présidents d’institutions. Un des proches collaborateurs du chef de l’exécutif du Gabon confie « Ali Bongo travaille vraiment d’arrache-pied, c’est impressionnant ». Sans s’adresser à la nation, Ali Bongo préside son premier conseil des ministres depuis 6 mois et prend des plusieurs mesures notamment la suppression des bourses d’étude dans l’enseignement supérieur (celles du secondaire ayant déjà été supprimées) pour plus de 95% des bacheliers, drôle de mesure pour celui qui avait pourtant déclaré que son septennat serait celui de la jeunesse et qui a créé un « ministère de l’égalité des chances » mais Ali Bongo n’est pas à une contradiction près.
« La réforme des bourses » est mal accueillie par les élèves gabonais qui descendent dans la rue, les forces de sécurité matent la contestation procèdent à des arrestations et le gouvernement décide de l’arrêt jusqu’à nouvel ordre des cours dans les établissements publics.
Face à cette grogne, Ali Bongo demeure silencieux, normal il a quitté le Gabon depuis le 04 avril 2019. p
Un fin de mandat hypothétique
Où se trouve celui qui était pourtant attendu à Bongoville dans son fief du Haut Ogooué le 05 avril 2019 pour recevoir des soins traditionnels tékés conformément au rite du Djobi ? Un faisceau d’informations indique Londres. Comment vas Ali Bongo ? Mal selon plusieurs sources. Un officier supérieur de la Garde Républicaine nous a confiés en requérant le plus strict anonymat : « Les treize jours de présence du Patron ont été éprouvants pour lui, il a été surchargé de travail, déjà qu’il est très diminué physiquement, franchement je ne pense pas qu’on retrouvera un jour l’homme combatif et vigoureux que nous avons connu, je ne le vois pas assister au défilé militaire du 17 Aout comme il le faisait ». Un autre haut cadre de la Présidence de la République confie : « Je ne pense pas qu’Ali finisse son mandat, pas l’homme que j’ai pu voir, je suis choqué qu’on le trimballe ainsi on devrait le laisser tranquille c’est une honte » non sans fustiger « Un groupuscule avide de pouvoir prêt à tout pour garder leurs privilèges quitte à détruire l’héritage d’Omar Bongo : la paix ».
A Paris, plusieurs personnes bien introduites et au fait des « affaires africaines » évoquent des séquelles irréversibles et assurent que des tractations pour assurer « l’Après Ali » sont déjà en cours. L
L’armée toujours fidèle
Il serait néanmoins prématuré de déclarer la fin d’Ali Bongo et de son régime. « Le clan Bongo » entend bien jouer la montre jusqu’à la dernière seconde. Si le scénario de la « Bouteflikatisation » du Gabon est bien engagé comme nous l’avons prédit en Octobre dernier, il n’en demeure pas moins que contrairement à l’ancien Président algérien, l’armée gabonaise est complètement acquise au clan Bongo et reste prête à faire à nouveau le coup de feu en cas de tentative de soulèvement populaire. Quant aux « services » gabonais dont nous avons déjà détaillé les méthodes, ils veillent au grain au Gabon comme à l’étranger. N
Une chose est sure, Ali Bongo ne se représentera pas en 2023 pour deux raisons : le code électoral impose une visite médicale à tous les candidats y compris au président sortant (meme son père Omar s’y soumettait) et exige que les candidats soient en bonne forme physique et psychologique et surtout il sera « obligé » de faire campagne. Si pour la première disposition il sera possible de « s’arranger » et de clamer qu’Ali Bongo se porte comme un charme, il sera impossible pour lui (alors âgé de 64 ans) de « subir » une campagne électorale de 14 jours avec des meetings et plusieurs déplacements dans un pays de plus de 200.000 km2.
La solution pourrait bien être la continuation de la « dynastie Bongo » avec l’arrivée au pouvoir de Nourredine Bongo fils d’Ali et de Sylvia Bongo véritable régente du Gabon.