Joyau du patrimoine mondial de l’Unesco, le site archéologique de Baalbeck au Liban est plus que jamais menacé par les conflits qui ravagent la région. En novembre 2023, la décision du ministre libanais de la Culture de retirer le « Bouclier bleu » qui protégeait Baalbeck avait déjà suscité de vives inquiétudes. Aujourd’hui, alors que les risques de destruction s’intensifient, cette mesure apparaît plus préoccupante que jamais. Avec l’évacuation de Tyr récemment demandée par l’armée israélienne, c’est l’ensemble du patrimoine libanais qui semble désormais en péril, rendant plus cruciale que jamais la mobilisation pour le protéger.
Inscrit sur la liste du patrimoine mondial depuis 1984, le complexe de temples romains de Baalbeck est l’un des sites archéologiques les plus impressionnants au monde. Avec ses colonnades monumentales et ses sanctuaires gigantesques dédiés à Jupiter, Bacchus et Vénus, il témoigne de la grandeur de l’architecture romaine à son apogée.
Mais aujourd’hui, ce joyau est plus que jamais en péril. Situé dans la plaine de la Békaa, près de la frontière syrienne, Baalbeck se trouve au cœur d’une zone de conflit. En août 2024, des frappes aériennes israéliennes ont eu lieu à proximité immédiate du site, faisant craindre des dommages irréparables. Déjà, le dôme de Douris, un vestige médiéval proche du complexe, a été sévèrement endommagé.
La décision prise en novembre 2023 par le ministre libanais de la Culture Mohammad Mortada de retirer le « Bouclier bleu » qui protégeait Baalbeck suscite aujourd’hui une vive inquiétude. Ce symbole international, destiné à identifier les biens culturels à protéger en temps de guerre, est certes avant tout une protection symbolique. Il signale que le site est un patrimoine culturel précieux et non une cible militaire, mais n’offre aucune protection physique en cas d’attaque. Cependant, sa suppression avait déjà suscité l’incompréhension et la consternation de la communauté internationale et des défenseurs du patrimoine. Car dans le contexte actuel de conflit, même une protection symbolique est un rempart essentiel. Privé de ce « Bouclier bleu », Baalbeck apparaît encore plus vulnérable, rendant sa sauvegarde plus urgente et cruciale que jamais.
Pourtant, des mesures ont été prises localement pour tenter de sécuriser le site. Contacté par Ici Beyrouth, M. Bachir Khodr, gouverneur de Baalbeck-Hermel, a assuré que les Forces de sécurité intérieure (FSI) avaient ratissé la zone. Selon lui, il n’y aurait « ni armes ni présence physique dans l’enceinte des ruines de Baalbeck » et des patrouilles régulières y veilleraient. L’ambassadeur libanais Moustapha Adib aurait également obtenu une aide d’urgence de 100.000 dollars de l’Unesco pour protéger le site, notamment en déplaçant certaines pièces et en installant des sacs de sable anti-éclats.
Mais la menace n’en reste pas moins critique. Les violentes secousses provoquées par les bombardements font toujours trembler les structures plurimillénaires de Baalbeck. Les colonnes vacillent, des blocs de pierre se détachent des murs. À terme, les fondations mêmes des temples pourraient être fragilisées, mettant en péril la stabilité de l’ensemble.
Et Baalbeck n’est malheureusement pas un cas isolé. L’évacuation de Tyr récemment demandée par l’armée israélienne fait redouter que tous les trésors archéologiques du Liban ne soient en danger. De Byblos à Anjar en passant par Saïda, de nombreux sites majeurs se trouvent à portée des frappes.
L’action des Blue Shields
Face à cette situation de plus en plus préoccupante, la sauvegarde du patrimoine libanais est devenue un enjeu crucial. Car au-delà de leur valeur historique et esthétique, des sites comme Baalbeck incarnent la mémoire et l’identité du pays. Leur perte serait un désastre culturel aux conséquences incalculables.
Pour les protéger, la communauté internationale doit impérativement renforcer sa mobilisation. Le cadre juridique défini par la Convention de La Haye, qui interdit d’attaquer les biens culturels sauf « nécessité militaire impérative », doit être strictement appliqué par tous les belligérants. Sur le terrain, l’action des Blue Shields, ce réseau mondial de professionnels du patrimoine, sera déterminante pour sécuriser les sites, former les acteurs locaux et coordonner l’aide d’urgence.
Mais en attendant des jours meilleurs, le sort de Baalbeck et des autres joyaux archéologiques du Liban semble plus que jamais suspendu au hasard des bombardements. Entre espoir et fatalisme, les défenseurs du patrimoine refusent pourtant d’abandonner ce combat vital pour la sauvegarde de notre héritage universel. Car accepter en silence la destruction de tels trésors, ce serait résigner notre mémoire aux aléas des conflits et des intérêts particulie