De Conakry à Nairobi, de La Java à l’Olympia, l’Afrique culturelle rayonne cette semaine sur plusieurs scènes du monde. Hip-hop conscient à Paris, hommage au makossa, patrimoine en débat au Kenya, et voix diasporiques en fusion : notre sélection traverse les rythmes, les mémoires et les résistances du continent.
Le 3 mai, Djanii Alfa fait vibrer Paris avec Jour de Paix
Le rappeur guinéen Djanii Alfa dévoile son nouvel album Jour de Paix lors d’un concert exceptionnel à La Place, centre névralgique du hip-hop parisien. Une soirée à la croisée de la musique, de la conscience et de l’engagement.
Le 3 mai 2025, la scène de La Place, en plein cœur de Paris, accueillera l’une des voix les plus puissantes du rap africain contemporain. Djanii Alfa, figure emblématique du hip-hop engagé guinéen, y présentera Jour de Paix, un album attendu, tranchant et habité, à l’image de son auteur. Plus qu’une simple release party, l’événement s’annonce comme un manifeste en actes, une performance où musique et mémoire s’entrelacent, portée par une scénographie immersive et des musiciens en live.
Depuis ses débuts, Djanii Alfa a su faire du micro un outil de résistance. Son rap, nourri par les réalités de Conakry, les espoirs et les colères d’une jeunesse marginalisée, ne cède ni à la facilité, ni à l’effet de mode. Albums après albums — Sicario, Chef Rebel, Rêves d’Afrik — il a imposé une parole sans concession, dénonçant la corruption, les violences d’État, les dérives autoritaires et le silence complice des puissances occidentales. Avec Jour de Paix, il franchit un cap : celui d’une écriture plus intériorisée, mais tout aussi tranchante, où la paix est pensée non comme une accalmie, mais comme une conquête.
Chaque titre de l’album creuse les contradictions d’un monde abîmé, entre désillusions politiques, drames migratoires et fraternités discrètes. “La paix, c’est un effort, pas une absence de bruit”, confie-t-il dans un entretien récent. Cette ligne, à elle seule, résume l’âme de l’album : un cri lucide, tendu vers l’avenir sans oublier les luttes du passé. Porté par un subtil alliage de rap et de rythmes mandingues, l’opus fait dialoguer tradition et modernité, enracinement et ouverture. On y croise Kaporal Wisdom, slameur togolais à la verve puissante, la chanteuse Sia Tolno au grain de voix incandescent, et même le beatmaker français Dany Synthé, pour une touche européenne qui élargit encore la portée du projet.
Le choix de La Place n’est pas anodin. Ce centre culturel, devenu un pilier du hip-hop hexagonal, incarne l’énergie de la diaspora, l’effervescence des jeunes scènes et l’hybridation des influences. C’est dans ce lieu emblématique que Djanii Alfa a choisi de faire résonner Jour de Paix, en écho à ses combats mais aussi comme un geste de transmission. Sur scène, les visuels projetés retraceront les luttes guinéennes, mêlant archives, graphismes et créations contemporaines. Le concert se fera narration, le flow deviendra mémoire.
Au-delà de la musique, c’est toute une trajectoire que célèbre ce rendez-vous parisien. Celle d’un artiste multiple, qui refuse les cases et les compromis. Arrêté à plusieurs reprises pour ses textes, Djanii Alfa incarne une forme de dissidence poétique, une colère articulée, qui n’oublie jamais de tendre la main. Il intervient dans des centres éducatifs, anime des ateliers d’écriture, multiplie les dialogues avec les jeunes générations. Sa voix est celle d’un continent en mutation, écartelé entre violences systémiques et désirs de renouveau.
Jour de Paix n’a rien d’un slogan. C’est une œuvre mûrie, un album forgé dans l’expérience, nourri de lectures, d’engagements et de blessures. Il refuse le spectaculaire et cherche la justesse. C’est là que réside sa force : dans cette capacité à faire exister une parole droite, qui bouscule sans accabler, qui éclaire sans simplifier. Le 3 mai, cette parole prendra corps, portée par un public acquis à sa cause, mais aussi curieux de ce rap franc, où le verbe est une promesse d’avenir.
Ben Decca fête 40 ans de carrière le 4 mai à l’Olympia
Le 4 mai 2025, Ben Decca, légende de la musique camerounaise, fête ses 40 ans de carrière avec un concert unique à l’Olympia. Une soirée événement pour célébrer un parcours musical ininterrompu.
Quarante ans de mélodies inoubliables, de refrains en duala repris aux quatre coins du monde, de rythmes chaloupés qui traversent les générations : c’est ce que Ben Decca célèbrera le 4 mai 2025 sur la scène mythique de l’Olympia. Figure majeure du makossa, ce style urbain né au Cameroun, le chanteur s’est imposé au fil des décennies comme un ambassadeur d’une Afrique élégante, sensible et résolument moderne. Avec sa voix feutrée, son goût de l’harmonie et une exigence musicale constante, il a su faire danser les corps tout en apaisant les cœurs. L’Olympia, haut lieu de la chanson francophone, s’apprête ainsi à accueillir un pan vivant de la mémoire musicale du continent africain.
Né à Douala dans une famille d’artistes, Ben Decca fait ses débuts dans les années 1980, au moment où le makossa entame sa grande mue. Influencé par les musiques traditionnelles, le jazz, la rumba congolaise et le funk américain, il affine une esthétique propre, faite de délicatesse, de précision et d’émotion. Très vite, il s’impose avec des titres devenus classiques — Na sengui bobe, Souffrance d’amour, Amour à sens unique — qui racontent les heurts et bonheurs du sentiment amoureux avec une pudeur rare. Chantée en duala, en français ou en anglais, sa musique transcende les barrières linguistiques pour toucher un public large, fidèle et transgénérationnel.
La diaspora camerounaise, particulièrement présente en France, en Belgique, au Canada ou aux États-Unis, voit en lui une figure tutélaire, témoin et acteur d’une histoire musicale qui ne cesse de s’écrire. Mais Ben Decca n’a jamais été un artiste figé dans la nostalgie. Il a su évoluer sans se trahir, renouvelant ses arrangements, collaborant avec les nouvelles voix de la scène africaine, et explorant d’autres registres comme l’afro-zouk ou l’afrobeat. À chaque étape, il a préservé l’essence de son art : cette manière unique de chanter l’amour, la famille, l’exil ou l’espoir sans grandiloquence, mais avec une intensité qui touche au cœur.
Ce concert à l’Olympia ne sera pas une rétrospective figée. On annonce des invités de marque, à commencer par sa sœur Grace Decca, chanteuse phare du même mouvement, ainsi que d’autres figures du makossa, du bikutsi ou du hip-hop camerounais. Des duos inédits, des medleys revisités, des hommages aux pionniers disparus : la soirée promet d’être riche en émotions et en surprises.
Le 4 mai 2025, c’est donc toute une histoire qui s’écrira sur scène. Celle d’un homme, d’un genre musical, d’un continent en mouvement. Ceux qui seront présents n’assisteront pas seulement à un concert : ils vivront un chapitre de la grande épopée musicale africaine.
Elikya fait résonner l’espoir à La Bellevilloise, 6 mai
Le 6 mai 2025, le groupe Elikya investit La Bellevilloise pour un concert solidaire dédié à la République Démocratique du Congo. Une soirée engagée, festive et spirituelle, où musique et espérance se rejoignent pour soutenir un pays en quête de paix.
Ce 6 mai, les murs de La Bellevilloise vibreront d’une ferveur rare. Le collectif Elikya — « espoir » en lingala — y donnera un concert solidaire en soutien à la République Démocratique du Congo. Fondé il y a plus de dix ans sous l’impulsion du père Claude Anyigba, Elikya rassemble des artistes venus d’horizons multiples, réunis par une même foi dans la puissance transformatrice de la musique. Chant, percussion, souffle, prière : tout concourt ici à faire du concert un acte de communion.
Le répertoire mêlera gospel congolais, rythmes afro-fusion, harmonies jazz et incantations chorales. Des titres emblématiques comme Nzambe na nga ou Africa Rise s’élèveront, portés par des voix puissantes et habitées. Sur scène, le live band multipliera les nuances, les chœurs répondront aux percussions, et le public sera invité à devenir lui aussi acteur du chant. À La Bellevilloise, pas de séparation entre scène et salle : l’émotion se partage, le rythme circule, le corps suit l’élan du collectif. Car pour Elikya, chanter, c’est guérir — ensemble.
La soirée portera une ambition double : artistique et humanitaire. Alors que la RDC traverse de nouvelles tensions politiques et que l’est du pays demeure en proie à des conflits armés, le groupe choisit de répondre par l’action concrète. Les recettes du concert seront intégralement reversées à des associations œuvrant sur le terrain, notamment dans les domaines de l’éducation, de la santé et de la protection des femmes. L’art, ici, ne se contente pas de dire : il agit.
Elikya, qui rayonne entre la France, la Belgique et le continent africain, incarne une diaspora active, connectée, porteuse d’un héritage en mouvement. C’est cette double fidélité — aux racines congolaises et à une vision universelle de la solidarité — qui fait la singularité du collectif.
Le concert du 6 mai rappelle que les tragédies du monde ne doivent pas engendrer le silence, mais des chants. Que l’espoir, même fragile, peut se dire, se danser, se transmettre. Que la diaspora congolaise, forte et diverse, a encore mille choses à offrir — et à chanter.
DestYs envoûte La Java le 7 mai
Le 7 mai 2025, l’artiste DestYs investit La Java pour une performance électrisante. Un concert aux confins de l’afro-électro, du spoken word et des musiques urbaines, dans l’un des lieux mythiques de la scène alternative parisienne.
La Java, haut lieu des musiques hybrides et des nuits engagées de Paris, accueillera le 7 mai une artiste qui bouscule les formats, les genres et les sens. DestYs, franco-béninoise à la trajectoire fulgurante, y présentera une performance scénique qui dépasse les codes du concert classique. Entre beat électro, textes tranchants et présence incandescente, elle impose un style brut, poétique et radicalement contemporain. Sa voix rauque, ses mots jetés comme des incantations et ses textures sonores aux accents d’Afrique de l’Ouest composent une expérience totale, à la fois sensorielle et politique.
Longtemps slameuse, DestYs conserve une écriture affûtée, incisive, où se croisent français, fon et anglais dans une langue-monde qui dit l’exil, la mémoire, la révolte et l’amour. Sa musique mêle afro-techno, samples documentaires, voix enregistrées sur le terrain et textures digitales, dans une alchimie rare saluée par la critique. Son dernier EP, Racines Numériques, en témoigne, c’est une plongée dans les racines d’un corps diasporique, augmenté de machines et de souvenirs.
Sur scène, DestYs s’entoure d’un live band électro et de choristes-performeurs pour une performance organique. À La Java, le public ne sera pas spectateur mais pris à parti, invité à entrer dans la transe, à bouger, à ressentir. L’espace scénique devient zone de vérité, de libération et de fusion. Ce qu’elle compose, ce sont des cérémonies modernes, où les beats cognent, les voix s’élèvent, les corps s’ancrent.
Mais ce qui distingue DestYs, c’est sa manière de faire résonner l’intime et le politique. Dans ses textes comme dans ses beats, elle aborde les féminicides en Afrique de l’Ouest, les violences d’État, les mémoires mutilées, les récits qu’on tait. Elle ne cherche pas à plaire, elle cherche à dire. Sa force tient à cette insoumission. La scène devient ainsi un territoire de lutte et de beauté, un lieu de réappropriation des corps et des identités.
Paris célèbre l’Afrique en musique le 8 mai
Le 8 mai 2025, Paris vibrera aux sons du continent africain avec deux concerts exceptionnels : Janydia au Village Talents d’Afrique dans le cadre de la Foire de Paris, et Etienne Mbappé au Baiser Salé avec son projet Country-Side.
C’est une double onde musicale qui traversera la capitale ce 8 mai, portée par deux artistes aux univers aussi contrastés que complémentaires. D’un côté, Janydia, étoile montante des musiques afrodescendantes, investira le Village Talents d’Afrique pour un show vibrant et habité ; de l’autre, Etienne Mbappé, maître de la basse jazz camerounaise, livrera une performance tout en délicatesse au Baiser Salé. Deux concerts, deux ambiances, mais une même puissance expressive au service de la mémoire africaine, de ses luttes, de sa beauté.
Sur la grande scène de la Porte de Versailles, Janydia incarnera la jeunesse engagée d’une Afrique diasporique en pleine affirmation. Originaire de Martinique et nourrie par les traditions d’Afrique centrale, elle mêle soul, chant créole, percussions ancestrales et textures électroniques dans une fusion inédite. Sa voix, à la fois rageuse et caressante, porte les combats de ses aînées. Dans le cadre de la Foire de Paris, son concert est un appel à l’ancrage, à la transmission, à l’amour comme force politique. Ancrée, son dernier titre, en sera le manifeste.
À quelques encablures, dans l’intimité du Baiser Salé, Etienne Mbappé offrira une respiration tout aussi précieuse. Avec Country-Side, son nouveau projet, le bassiste dévoile une facette plus intérieure de son art. Loin des tournées internationales et des feux de la virtuosité, il revient à l’essence, aux souvenirs d’enfance et berceuses maternelles des villages camerounais. Chaque morceau se tisse comme une confidence. Sa basse, jouée avec des gants noirs, devient souffle, récit, caresse. Une musique organique, savante, d’une émotion contenue qui touche au spirituel.
Entre l’énergie solaire de Janydia et la profondeur contemplative de Mbappé, c’est toute l’étendue des formes musicales africaines qui se donne à entendre. La première fait danser et penser ; le second invite à l’écoute lente, à la résonance intime. Mais tous deux partagent un art sincère, sans artifice, où chaque note est un acte, chaque silence une mémoire. La scène, pour eux, est un lieu de lien : à soi, aux autres, à l’histoire.
Le 8 mai 2025, Paris sera traversée par ces deux voix singulières qui, chacune à leur manière, redessinent les contours d’une création africaine exigeante et libre. Qu’on choisisse la ferveur populaire de la Foire de Paris ou la douceur feutrée d’un club de jazz, on repartira nourri. D’images, de sons, d’émotions vraies.
À Paris, la nuit du 9 mai danse au rythme des Suds
Le 9 mai 2025, Paris se pare de mille sons venus du Sud : Sandrine Nnanga en concert live, Fé Bougé l’Océan Indien au Dôme de Paris, et une grande fête pour les 40 ans de l’Axé afro-brésilien.
Ce soir-là, la capitale devient un archipel musical où se croisent Afrique centrale, îles de l’océan Indien et carnaval de Bahia. Trois lieux, trois ambiances, mais une même pulsation venue du Sud global, entre romantisme soul, grooves insulaires et transe tropicale. À commencer par Sandrine Nnanga, étoile montante de la soul africaine, qui livrera un concert intimiste et intense dans un format inédit. Originaire du Cameroun, la chanteuse s’est imposée comme une voix singulière mêlant makossa, R&B et influences francophones. Portée par son dernier album Amour Libre, elle convoquera ses racines, l’amour et la résilience dans une performance élégante, tissée de cordes acoustiques et de silences. En prime, des formules VIP permettront au public de vivre l’expérience au plus près, entre loges et confidences backstage.
Plus au sud de la ville, le Dôme de Paris accueillera la troisième édition de Fé Bougé l’Océan Indien, événement phare pour les diasporas ultramarines et tous ceux que les rythmes insulaires font vibrer. Du séga réunionnais au maloya malgache, en passant par le salegy comorien et les fusions afrobeat, le line-up explosif célèbrera la mémoire, la danse, le feu des îles. Dans une ambiance de kermesse volcanique, artistes, danseurs, chorégraphes et DJ offriront un spectacle total où la langue créole se chante et se danse. Ce rendez-vous annuel est aussi politique. On y vient en famille, entre amis, pour bouger, pour se rappeler, pour exister.
Enfin, à quelques stations de métro, les 40 ans de l’Axé afro-brésilien seront fêtés à La Java, située au 105 rue du Faubourg du Temple, 75010 Paris. Né à Salvador de Bahia dans les années 1980, ce genre flamboyant fusionnant samba-reggae, frevo et pop tropicale sera à l’honneur dans une soirée qui fera bloc. DJs brésiliens installés en Europe, danseurs professionnels, décor aux couleurs de la rue bahianaise : tout sera réuni pour recréer l’énergie contagieuse de l’Axé dans ce qu’elle a de plus joyeusement politique. Car si l’on danse, c’est aussi pour se rappeler que l’Axé est né comme un cri, un chant d’affirmation noire et populaire face à l’effacement culturel. Et que cette musique, comme toutes celles célébrées ce soir-là, porte en elle des résistances, des histoires et des fêtes.
Paris, ce 9 mai, se fera donc caisse de résonance des Suds. Une ville-monde qui ouvre ses bras aux sonorités qui la traversent, la réveillent, la réchauffent.
Nairobi au cœur des patrimoines africains vivants
Du 6 au 9 mai 2025, Nairobi accueille la Conférence internationale sur le patrimoine culturel en Afrique. Quatre jours de réflexion et d’échanges réunissant chercheurs, artistes et décideurs autour de l’authenticité, de la transmission et de la souveraineté culturelle.
La capitale kényane s’apprête à devenir l’épicentre d’un débat essentiel pour l’Afrique contemporaine. Du 6 au 9 mai, la Conférence internationale sur le patrimoine culturel en Afrique réunira à Nairobi un large éventail d’acteurs venus du continent et de la diaspora. Scientifiques, artistes, représentants institutionnels, activistes culturels et chefs traditionnels croiseront leurs voix pour repenser les enjeux liés à la mémoire, aux héritages matériels et immatériels, dans un contexte mondial où les luttes pour la restitution, la réappropriation et la narration autonome se font plus vives que jamais.
Organisée par une coalition panafricaine d’institutions muséales, de centres de recherche et de collectifs culturels, cette conférence entend sortir des approches verticales pour proposer des stratégies durables, contextualisées et souveraines. Elle interrogera en profondeur la notion d’authenticité : qu’est-ce qu’un patrimoine authentique dans une Afrique urbaine, diasporique, métissée ? Comment concilier fidélité aux racines et dynamisme créatif ? À travers panels, performances, expositions et ateliers, les participants chercheront à dépasser les clivages entre modernité et tradition, sacré et profane, oralité et technologies numériques.
Parmi les temps forts, la question des restitutions occupera une place centrale. Des délégations du Nigeria, du Bénin et de la RDC viendront présenter les avancées concrètes obtenues en matière de rapatriement d’œuvres d’art. Des juristes, des curateurs et des anthropologues proposeront des outils juridiques, logistiques et curatoriaux pour aller au-delà des simples retours symboliques. La restitution y sera envisagée non comme une fin en soi, mais comme un acte fondateur d’une nouvelle souveraineté culturelle africaine.
Autour des débats académiques, Nairobi vibrera aussi au rythme d’événements artistiques parallèles. Des expositions immersives, des projections de documentaires et des concerts viendront élargir le champ d’expression de la conférence. Un pavillon consacré aux jeunes artistes africains permettra de découvrir comment les générations émergentes, entre arts numériques, installations sonores et créations plastiques, se réapproprient le patrimoine comme outil de création, de subversion et de résilience. Le patrimoine y sera vivant, transformable, critique et ancré dans le présent.
L’événement marquera également plusieurs lancements majeurs, dont celui d’une plateforme numérique panafricaine dédiée à la documentation des patrimoines menacés, et la présentation officielle de la future Maison du Patrimoine Africain, à Dakar. La conférence sera inaugurée par une personnalité panafricaine de premier plan, dont l’intervention est très attendue pour donner le ton d’un rendez-vous à la fois stratégique et symbolique.
Ce qui se jouera à Nairobi, au-delà des échanges d’expertise, c’est une réaffirmation de la capacité du continent à se penser lui-même. Dans une Afrique en pleine mutation, cette conférence incarne une volonté politique : sortir de la seule logique réparatrice pour entrer dans une dynamique créative, autonome, plurielle. Une Afrique qui ne demande pas la parole, mais qui la prend — et qui la transmet.
Le 7 mai, Paris accueille le NOW! Film Festival
Du 7 au 11 mai 2025, le cinéma L’Arlequin accueille le NOW! Film Festival, ex-NollywoodWeek. Au programme : films nigérians et africains, débats, gastronomie afro et soirées Afrobeats, pour célébrer un cinéma libre, audacieux et en pleine expansion.
C’est devenu un rendez-vous incontournable pour tous les amoureux du cinéma africain contemporain : NollywoodWeek, désormais rebaptisé NOW! Film Festival, revient à Paris du 7 au 11 mai 2025 pour une édition prometteuse et foisonnante. Installé au cœur du quartier Montparnasse, au cinéma L’Arlequin, le festival met à l’honneur le meilleur du cinéma nigérian, mais aussi des productions venues de toute l’Afrique et de ses diasporas. Cinq jours de projections, de rencontres, de saveurs et de sons pour célébrer une industrie en pleine mutation et une créativité sans cesse renouvelée.
Le coup d’envoi sera donné le 7 mai avec la projection très attendue de The Legend of the Vagabond Queen of Lagos, film d’ouverture déjà salué dans plusieurs festivals africains. Réalisé par une jeune cinéaste en rupture avec les codes du genre, ce long-métrage mêle satire politique, esthétisme débridé et narration féministe. Une entrée en matière audacieuse, à l’image de ce que NOW! veut défendre : un cinéma libre, insolent, multiple.
Les jours suivants, le festival proposera un programme dense, alternant longs-métrages, courts, films d’animation et panels de discussion. Parmi les œuvres en compétition ou en avant-première, plusieurs titres illustrent la diversité des tons, des esthétiques et des enjeux du cinéma africain d’aujourd’hui :
– Blackout, thriller sous tension, met en scène un Lagos paralysé par des coupures d’électricité récurrentes. Ce récit haletant explore les formes de résistance populaire qui émergent face à l’inertie du pouvoir, en croisant suspense et chronique sociale.
– La Nuit du 7 Juin plonge dans un huis clos familial bouleversé par la guerre civile. Secrets enfouis, trahisons intimes et mémoire traumatique s’entrelacent dans un drame subtil sur la filiation et la vérité.
– After 30 adopte un ton plus introspectif : cette chronique urbaine suit une trentenaire célibataire dans la mégalopole de Lagos, entre pressions sociales, désillusions amoureuses et quête d’indépendance. Un film générationnel porté par une écriture sensible et des dialogues justes.
– Sierra’s Gold, quant à lui, embarque le spectateur dans une fable écologique tournée en Sierra Leone, où l’exploitation illégale des ressources naturelles réveille des légendes anciennes. Un récit onirique aux images puissantes, entre tradition et conscience environnementale.
– Enfin, Le Troc mise sur l’humour et la satire interculturelle : cette comédie franco-nigériane réunit deux familles que tout oppose — langue, classe sociale, valeurs — autour d’un échange mal ficelé. Le film aborde avec légèreté les frictions de la mondialisation, les stéréotypes et les malentendus qui en découlent.
Mais NOW! investit aussi les espaces de vie. Un coin gastronomie afro proposera chaque jour plats traditionnels et street food revisités, pendant que les soirées Afrobeats feront danser festivaliers et curieux jusqu’à tard dans la nuit. Panels et rencontres avec les réalisateurs offriront des moments de réflexion sur la place du cinéma africain dans les récits mondiaux, la circulation des œuvres, le rôle des femmes derrière et devant la caméra, ou encore les enjeux de production dans les pays du Sud.
Le 11 mai, dernière journée du festival, sera consacrée aux familles, avec des séances pour enfants mettant à l’honneur les studios d’animation africains émergents. Le festival s’achèvera dans une ambiance festive avec une Afrobeats Party ouverte à tous, dans une volonté de faire dialoguer la création cinématographique et la culture populaire urbaine.
À travers sa sélection, NOW! Film Festival continue de déconstruire les clichés encore trop persistants sur Nollywood. Loin des seules comédies tournées à la va-vite, la programmation met en lumière des œuvres à la croisée du divertissement, de l’engagement social et de la recherche esthétique. Des films comme Out in the Darkness, The Weekend, Soft Love, For Amina, The Fire and the Moth ou Olùmòtàn – Stories We Are Not Supposed To Tell illustrent cette nouvelle génération de cinéastes africains qui veulent faire du cinéma un outil de transformation culturelle.
En offrant une plateforme à ces voix multiples, NOW! s’impose comme un espace de visibilité mais aussi de consolidation. Car derrière l’effervescence des écrans, ce sont des industries, des talents, des récits et des imaginaires africains qui prennent leur place dans le paysage global. Et Paris, le temps d’un festival, devient la vitrine de cette Afrique qui filme, qui rêve, qui raconte, et qui refuse d’être figée dans le regard des autres.
Netflix lance Go!, série coup de poing sur la jeunesse sud-africaine
Diffusée depuis le 21 mars 2025 sur Netflix, Go! suit un jeune sprinteur de Johannesburg propulsé dans un lycée d’élite. Une série tendue et politique sur la réussite, les fractures sociales et l’identité, portée par une narration nerveuse et lucide.
Depuis sa mise en ligne le 21 mars 2025 sur Netflix, Go! s’est imposée comme l’une des séries les plus regardées de la plateforme. Produite en Afrique du Sud par Ten30 Films, écrite par Thuli Zuma et réalisée par Tristan Holmes, elle plonge dans le quotidien tendu et contrasté d’un adolescent noir issu des quartiers populaires de Johannesburg. Avec un format court — six épisodes de 24 à 31 minutes — et une mise en scène nerveuse, elle capte l’attention dès les premières secondes.
Le héros, Siya « Bolt » Gumede, est un jeune sprinteur repéré pour ses talents athlétiques exceptionnels. Il décroche une bourse pour intégrer St. Judes, un lycée privé prestigieux de Johannesburg, réservé aux élites blanches et aisées. Mais le rêve de progression sociale se heurte vite à une réalité complexe, faite de racisme latent, de pressions familiales, de loyautés conflictuelles et de dérives urbaines. Le quotidien de Siya, incarné avec intensité par le jeune acteur Thandolwethu Zondi, oscille entre deux mondes : celui du mérite sportif et de l’avenir à construire, et celui, plus trouble, de son quartier, gangrené par la pauvreté et les logiques de survie.
La série déploie un double récit puissant : d’un côté, l’initiation d’un adolescent noir dans un espace codifié par les élites ; de l’autre, la tentation du repli et de la débrouille dans un environnement où l’on vit au jour le jour. Go! ne propose pas de morale facile. Elle interroge sans relâche : comment réussir sans trahir ? comment rêver quand tout autour semble voué à l’échec ? comment exister entre deux mondes qui s’excluent mutuellement ?
Visuellement, la série alterne entre le formalisme glacé du lycée et la chaleur chaotique du township, entre la course sur piste et les courses de rue. Chaque scène est construite pour faire sentir la vitesse, le risque, l’urgence. Le travail sur les cadres et les contrastes est saisissant. Les dialogues, entre anglais, zoulou et français (grâce à une excellente version doublée), sont d’une justesse rare. Aucun personnage n’est caricatural : la mère épuisée mais digne, le frère en marge, l’entraîneur ambigu, les camarades hostiles ou fascinés… tous participent à cette fresque sociale, sensible et tendue.
Go! est un drame initiatique profondément politique qui dit l’Afrique du Sud d’aujourd’hui, avec ses inégalités héritées de l’apartheid, ses élans de modernité, ses contradictions internes. Mais son propos dépasse largement le cadre local. Ce que vit Siya, c’est aussi ce que vivent des milliers de jeunes à travers le monde : la pression de réussir, les conflits de loyauté, la difficulté d’habiter plusieurs mondes à la fois.
La bande-son, entre afrobeats et trap, soutient cette tension permanente entre espoir et désillusion. Le montage est incisif, parfois brutal, et le récit ne ménage ni son personnage principal ni le spectateur. Pas de paternalisme ici, mais une volonté de montrer, sans détour, ce que signifie grandir entre précarité et promesses creuses.
Disponible en version originale sous-titrée (français, anglais, allemand, turc, ukrainien, zoulou) et en version française intégrale, Go! s’inscrit dans la nouvelle vague de fictions africaines promues par Netflix, après Queen Sono, Blood & Water ou Shanty Town. Mais elle s’en distingue par son ancrage radical dans le quotidien, son ton plus sec, et son refus du spectaculaire facile.
Avec Go!, l’Afrique du Sud donne une leçon de narration : rapide, tendue, lucide. Une série qui court vite, mais qui prend le temps de dire l’essentiel. Le portrait sans concession d’une jeunesse debout, en déséquilibre, qui court pour exister, pour fuir, pour choisir. Une série qui marque.