Fondé entre 1933 et 1935 dans un style néo-soudanais, le marché de Sandaga était autrefois un lieu emblématique et le cœur battant de Dakar, accueillant plus de 900 vendeurs proposant une variété de produits, de l’alimentation à l’artisanat. Il existe différentes théories sur l’origine de son nom. Parmi les plus répandues, il y a celle qui affirme que le nom du marché dérive de « dang ga », faisant référence à un arbre qui embellissait ses environs et servait de repère. Bien qu’il ait été inscrit sur la liste des sites classés du patrimoine national du Sénégal depuis 2006, et qu’il ait résisté aux intempéries et à un incendie en 2013, en août 2021, le marché de Sandaga a été démoli, mettant fin à son histoire riche et colorée.
L’exposition, spécifique au site, ouvre ses portes pour raconter l’identité extraordinairement vivante de ce marché historique de Dakar, véritable symbole et cœur de l’économie informelle, qui vit, et survit, malgré sa démolition complète et la reconstruction en cours.
Sous la direction de Mohamed A. Cissé, Dem Dikk/Viavai comprend le travail des artistes italiens Stefania Gesualdo, qui vit à Dakar depuis plusieurs années, le duo Jukai (Marta Fumagalli et Riccardo Pirovano), actuellement basé à Berlin, et Djibril Dramé, artiste visuel sénégalais.
Jukai présente la série de travaux « Architectures sociales », à travers laquelle il explore le lien entre l’homme et l’environnement construit, en utilisant le béton comme médium artistique central. Utilisant des matériaux récupérés du chantier du marché, les œuvres capturent l’interaction quotidienne entre l’être humain et le contexte urbain, reflétant l’impact des petites actions sur la réalité environnante.
En plus des œuvres en béton, Jukai a transformé les données de mouvement enregistrées au marché de Sandaga en une installation de pulsations lumineuses, dont le rythme correspond à la vitalité du marché. À travers la pièce faiblement éclairée, l’installation interactive encourage les visiteurs à reconsidérer leur relation avec le consumérisme et les dynamiques socio-culturelles complexes qui influencent nos vies.
Si, à travers son travail, Jukai se concentre sur l’impact humain sur le cadre environnant, les œuvres de Stefania Gesualdo explorent comment les transformations urbaines influencent les personnes et les territoires. Utilisant le chantier de Sandaga comme symbole emblématique de transition et d’adaptation, la série « Recherche d’une position confortable » narre la complexité de la vie quotidienne dans des espaces en constante évolution. Dans ces contextes, la recherche d’une position confortable devient une métaphore de la résistance à la destruction et à la construction.
Cette négociation permanente entre territoires et personnes est racontée dans la tapisserie présentée par l’artiste qui représente, dans la partie supérieure, la façade mythique du marché, et, dans la partie inférieure, une des scènes de vie faites d’échanges et de relations qui fluctuent et s’adaptent. La tapisserie a été l’objet d’une performance à travers laquelle l’artistea entièrement décousu la façade du marché, laissant seulement visibles les vendeurs restant à exercer leurs activités, gardiens de la mémoire de Sandaga.
Enfin, Djibril Dramé présente des clichés photographiques de scènes de vie d’un angle particulier du marché: « Ruuk diskees ». C’est un lieu où les adolescentes et les femmes de Dakar vont pour orner leurs garde-robes d’effets sensuels. Bien qu’il soit séparé du bâtiment principal, il est encore aujourd’hui une partie intégrante du marché. La mère de Djibril était une vendeuse là-bas et à travers ses œuvres, l’artiste souhaite rendre hommage à elle, ainsi qu’à toutes les autres vendeuses, pour leur résilience, comparable à celle du marché de Sandaga.
« À travers des installations interactives, sonores et visuelles, les artistes ont habilement capturé la complexité et la vitalité du marché Sandaga, offrant un regard intime et engagé, sur son atmosphère unique et les histoires qui le rendent aussi plein de sens et si aimé des dakarois « , déclare le commissaire Mohamed A. Cissé. « Cette exposition célèbre non seulement le passé et le présent du marché Sandaga, mais aussi son avenir, incarnant l’espoir et la détermination d’une communauté qui continue à prospérer malgré les défis. Avec « Dem Dikk/Viavai », nous nous joignons à la narration de ce bâtiment emblématique, en promouvant son héritage et sa beauté unique pour les générations futures. »
En se concentrant donc sur sa mémoire en tant que patrimoine historique, sur ses transformations au fil des ans et sur son moment actuel de transition, sans oublier l’impact social sur le territoire dû à sa présence/absence, les œuvres des artistes visent à maintenir le marché en vie et à transmettre son dynamisme non pas à travers sa structure physique, mais à travers les sensations et les sons qui lui sont propres, en tant que patrimoine culturel immatériel.
Istituto Italiano di Cultura di Dakar – 48, Rue Léon Gontran Damas Fann Résidence
Tel: +221 33 8067 75 14 | email: iicdakar@esteri.it
Lundi – Samedi: 10:00 – 17:00 Entrée libre