Tchad : La loi d’amnistie trahit les victimes d’abus

La pseudo loi consacre l’impunité et récompense les auteurs d’abus

(Nairobi, le 14 décembre 2023) – Au Tchad, une nouvelle loi d’amnistie privera les victimes de leurs droits à demander justice et renforce l’impunité, a déclaré Human Rights Watch aujourd’hui. Adoptée par un conseil national de transition le 23 novembre 2023, cette loi retire la possibilité d’engager des poursuites à la suite de la violente répression menée par les forces de sécurité lors de manifestations organisées par la société civile et les partis d’opposition.

Le 20 octobre 2022, les forces de sécurité ont tiré à balles réelles sur les manifestants, ont tué et blessé des dizaines d’entre eux, et ont passé à tabac et poursuivi des personnes jusque dans leurs maisons. Les autorités ont arrêté des centaines d’hommes et de garçons et les ont conduits à Koro Toro, une prison de haute sécurité située à 600 kilomètres de N’Djamena, la capitale du pays. Plusieurs détenus sont morts lors du trajet vers le centre de détention, certains à cause du manque d’eau. À Koro Toro, les manifestants ont subi d’autres abus, y compris de la torture et des mauvais traitements infligés par d’autres détenus. Les détenus ont été enfermés pendant des mois avant d’être finalement libérés ou graciés. Les autorités tchadiennes n’ont pas mené d’enquêtes pénales rapides, efficaces et indépendantes sur les violations des droits humains.

« Cette loi d’amnistie a été adoptée pour protéger les personnes contre des poursuites, envoyant ainsi comme message aux Tchadiens que les auteurs d’abus peuvent commettre des meurtres sans en subir les conséquences », a expliqué Lewis Mudge, directeur pour l’Afrique centrale à Human Rights Watch. « Ce processus constitue un affront aux principes fondamentaux de l’État de droit et a été mené avant même que les victimes ne soient reconnues et que les responsables ne soient identifiés. »

Depuis le décès de l’ancien président Idriss Déby en avril 2021, le gouvernement de transition dirigé par son fils, le général Mahamat Déby, a à plusieurs reprises violemment réprimé des manifestations appelant à un régime démocratique civil. Le gouvernement a notamment pris pour cible les partis d’opposition. Les violences du 20 octobre 2022 ont atteint un niveau jamais vu auparavant.

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