Mamy Ravatomanga aurait blanchi 138 millions d’euros à Maurice

Maminiaina Ravatomanga, dit Mamy, PDG du conglomérat malgache SODIAT, a été arrêté vendredi après-midi par la Financial Crimes Commission (FCC) de Maurice à la clinique privée où il était hospitalisé depuis une semaine. Proche de l’ancien président malgache déchu Andry Rajoelina, il est soupçonné d’avoir transféré 7 316 116 760 roupies mauriciennes — soit l’équivalent de 138 258 933 euros — de Madagascar vers Maurice. Les fonds, déposés sur les comptes bancaires de plusieurs sociétés enregistrées à Maurice et dans des comptes offshores sur l’île, seraient issus d’activités criminelles.
 
Correspondance, Vel MOONIEN
 
« Ces sommes sont soupçonnées d’être les produits d’activités criminelles commises à Madagascar sur plusieurs années et impliquant plusieurs juridictions à travers le monde », a expliqué la FCC dans un communiqué. L’institution précise également avoir obtenu une ordonnance de saisie pénale sur les fonds détenus sur ses comptes personnels et ceux de ses nombreuses sociétés.
 
La FCC a par ailleurs rouvert une enquête connexe, initiée en 2011 à l’encontre de Mamy Ravatomanga, puis classée en 2013 faute de coopération des autorités malgaches. Un autre protagoniste local, David Jean Christian Thomas, coordinateur de SODIAT, a lui aussi été arrêté dans la nuit pour entente délictueuse en vue de blanchir 20 milliards de dollars américains.
L’homme d’affaires doit être formellement inculpé de blanchiment d’argent devant le tribunal de district de Port-Louis après son interrogatoire. Ce vendredi, ses avocats ont présenté un certificat médical affirmant qu’il devait rester sous surveillance médicale pendant au moins une semaine.
 
Le milliardaire avait déjà attiré l’attention du public deux semaines plus tôt, lorsqu’il avait débarqué à Maurice dans des circonstances suspectes à bord d’un Cessna — appartenant à l’une de ses sociétés, dont un appareil aurait déjà servi à exfiltrer Carlos Ghosn du Japon — sans autorisation de l’aviation civile malgache. Il était accompagné de membres de sa famille et de l’ancien Premier ministre malgache Christian Ntsay, quelques heures avant que Andry Rajoelina ne soit exfiltré par les forces militaires françaises.
 
Jeudi, Mamy Ravatomanga a saisi la Cour suprême mauricienne pour demander la levée de l’interdiction de voyager qui lui a été imposée. Dans une déclaration sur l’honneur rédigée par Me Gilbert Noël — le même avoué qui l’avait accueilli à l’aéroport — Mamy affirme être la cible d’une vendetta politique en raison de ses liens avec Andry Rajoelina. Il soutient également que l’enquête actuelle est identique à celle menée il y a sept ans par le Parquet national financier (PNF) en France, qui l’avait alors blanchi de toute accusation.
 
Enfin, il affirme que l’Ile Maurice viole son statut diplomatique, puisqu’il est consul honoraire de la Côte d’Ivoire et de la Serbie. Il cite à cet égard une lettre adressée par l’ambassade de Côte d’Ivoire à Prétoria au ministère mauricien des Affaires étrangères, dans laquelle Abidjan   se dit prête à l’accueillir, lui et sa famille. Sur ce point, Port-Louis affirme n’avoir reçu aucune communication officielle.
Quelques jours plus tôt, l’un de ses avocats — également député de la majorité gouvernementale — avait présenté à la FCC une note de l’ambassade de Madagascar à Maurice indiquant, selon les médecins du milliardaire, qu’il devait être évacué, faute de pouvoir recevoir les soins médicaux appropriés sur le territoire mauricien.