Les compromissions de Tony Blair avec Khadafi

Si de nombreuses enquêtes ont été menées en France sur les liens entre Sarkozy et Khadafi qui ont conduit au procès très médiatique auquel on assiste aujourd’hui à Paris contre l’ex Président français, les compromissions de Tony Blair sont moins connues.

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Un ancien ambassadeur français en poste à Tripoli avant d’être nommé dans d’autres pays arabes racontait volontiers comment il s’était retrouvé invité dans la vaste tente où Khadafi recevait jusque tard dans la nuit. Ce soir là, Tony Blair avait fait une apparition. Quand ce dernier était reparti, feu le Guide libyen s’était tourné vers ses proches et vers l’ambassadeur en souriant: « Ce Blair, il nous aura couté fort cher ».

« Si vous avez un endroit sûr où vous rendre, affirme Tony Blair, amical, au chef de l’État libyen, vous devriez y aller car ceci ne va pas se terminer sans violence. »

Une certitude,  L’ancien premier ministre britannique serait bien intervenu auprès du «Guide suprême» juste avant les bombardements en Libye. C’est du moins ce qu’il ressort des retranscriptions de deux conversations téléphoniques dévoilées ce jeudi par le Parlement britannique. Le contenu de ces deux coups de fil, passés à deux heures d’intervalle le 25 février 2011, ont été remis à la commission des Affaires étrangères par Tony Blair lui-même. L’ancien premier ministre avait été auditionné dans le cadre d’une enquête parlementaire le 11 décembre dernier, après la parution d’un livre, début septembre, affirmant que l’ancien aurait tenté en 2011 de sauver le chef d’État libyen.

Lors de ces deux conversations, à son initiative, Tony Blair dit à Kadhafi, en parlant du leader libyen à la troisième personne: «S’il existe un moyen de partir, il devrait le faire maintenant. Il faut qu’il montre qu’il accepte le changement et qu’il se retire pour que ce changement s’opère sans violence.» Et d’insister, plus direct: «Si vous avez un endroit sûr où vous rendre, vous devriez y aller car ceci ne va pas se terminer sans violence.» «Où doit-il aller? Il n’a pas de mandat», répond Kadhafi en parlant de lui à la troisième personne. «Je n’ai pas le pouvoir ou de mandat, je ne suis pas le président, je n’ai aucun poste à quitter», dit-il plus loin, alors qu’il fait face à une révolte populaire dans son pays.

Le khadafiste qui règna entre Paris et Tripoli

 
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Nicolas Beau
Ancien du Monde, de Libération et du Canard Enchainé, Nicolas Beau a été directeur de la rédaction de Bakchich. Il est professeur associé à l'Institut Maghreb (Paris 8) et l'auteur de plusieurs livres: "Les beurgeois de la République" (Le Seuil) "La maison Pasqua"(Plon), "BHL, une imposture française" (Les Arènes), "Le vilain petit Qatar" (Fayard avec Jacques Marie Bourget), "La régente de Carthage" (La Découverte, avec Catherine Graciet) et "Notre ami Ben Ali" (La Découverte, avec Jean Pierre Tuquoi)