Le centrafricain Touadera, un loup déguisé en agneau 

Le régime de Faustin-Archange Touadéra en Centrafrique, alors qu’une Présidentielle doit avoir lieu le 28 décembre, cultive l’illusion d’une paix restaurée, avec des grâces présidentielles libérant des centaines de détenus pour masquer une répression ciblée qui broie les dissidents sous le poids d’une détention arbitraire et de campagnes de désinformation. 
 
La rédaction de Mondafrique
 
Christian Dondra qui croupis toujours à Ngaragba, tandis que le Dr Dominique Désiré Erenon, spécialiste constitutionnel et président du MDSP, endure près de trois mois de détention arbitraire, sont les otages emblématique d’un pouvoir qui s’attaque à toute voix dissonante.

Clémence pour tous, sauf les ennemis

Touadéra parade avec des libérations massives de plus de 800 prisonniers à Ngaragba, gestes censés incarner la réconciliation nationale et soulager des geôles surpeuplées.  Pourtant, cette magnanimité s’arrête net devant des figures comme Erenon, détenu sans comparution, alors que des détenus ordinaires regagnent la liberté.  Cette sélection impitoyable transforme la grâce en outil propagandiste, verrouillant les cellules des voix critiques pendant que le régime feint l’apaisement.
 
Christian Dondra, frère du candidat à l’élection présidentielle Henri-Marie Dondra, a été arrêté pour un prétendu complot d’assassinat et transférés à Ngaragba dans une procédure opaque qui pue la politique plus que la justice.  Frapper les proches plutôt que l’adversaire direct instille une terreur familiale, rappelant que défier Touadéra expose tout un lignage à l’arbitraire judiciaire. Comme Erenon, il illustre un système où les inculpations de sûreté de l’État servent de prétexte à l’élimination des rivaux.

Le cas Erenon : trois mois d’opacité et de mensonges

Le Dr Dominique Désiré Erenon, expert en droit constitutionnel, marque ses 75 jours de détention à la SRI, un lieu clos où les interrogations des Centrafricains sur son sort se heurtent au silence des autorités.  Les allégations apparaissent de manière farfelues sans investigation : chronologies fausses, absences de preuves, fabrications pures pour exercer une pression psychologique.
 
Cette campagne de désinformation autour d’Erenon, relayée sur les réseaux, n’est pas fortuite : elle discrédite un universitaire respecté qui aurait pu gêner les manœuvres politiques de Touadéra. 
En liant Erenon à des complots internationaux imaginaires, le régime espère justifier sa détention illimitée, tout en semant le doute chez les citoyens.  Cette stratégie hybride – prison physique et empoisonnement médiatique – étouffe la dissidence sans procès public, confirmant que Touadéra gouverne par la peur plutôt que par la loi.

Une population otage 

Les cas Dondra et Erenon dessinent un archipel carcéral où la SRI, Ngaragba et le camp de Roux deviennent des sites pour oppresser les opposants ou leurs proches en hors de toute légalité.  Touadéra, qui se targue d’être un homme de paix, instrumentalise quasi ouvertement la justice, la gendarmerie et alimente en sous main des rumeurs pour neutraliser toute voix politique critique.
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Nicolas Beau
Ancien du Monde, de Libération et du Canard Enchainé, Nicolas Beau a été directeur de la rédaction de Bakchich. Il est professeur associé à l'Institut Maghreb (Paris 8) et l'auteur de plusieurs livres: "Les beurgeois de la République" (Le Seuil) "La maison Pasqua"(Plon), "BHL, une imposture française" (Les Arènes), "Le vilain petit Qatar" (Fayard avec Jacques Marie Bourget), "La régente de Carthage" (La Découverte, avec Catherine Graciet) et "Notre ami Ben Ali" (La Découverte, avec Jean Pierre Tuquoi)