Depuis le 26 juillet, la population nigérienne, volontiers décrite habituellement comme pacifique voire fataliste, est en train de démentir crument sa réputation pour manifester son soutien massif à la junte.
Qu’il s’agisse de leur adhésion au renversement du pouvoir socialiste ou à l’espoir de jours meilleurs sur le front de l’insécurité, les Nigériens, notamment les jeunes et les femmes, sortent quotidiennement dans la capitale et, de plus en plus, dans toutes les villes du pays, pour se lever contre les pressions exercées par la Communauté des Etats d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et son mentor français Emmanuel Macron. La sévérité inédite des sanctions de la CEDEAO et la menace d’une intervention militaire extérieure ont fait naître une ferveur patriotique jamais vue dans ce pays, que la junte au pouvoir n’avait sans doute pas anticipée.
Cette mobilisation galvanise le Conseil national pour la Sauvegarde de la Patrie (CNSP) et le conforte dans la raideur de ses positions, malgré les ouvertures diplomatiques constatées ce week-end à Niamey à travers l’accueil de deux délégations onusiennes et ouest-africaines.
Samedi soir, le général Abdourahmane Tchiani, le tombeur du Président Mohamed Bazoum détenu dans sa résidence du Palais depuis presque un mois, a d’ailleurs prononcé un discours à la nation très ferme à l’endroit de l’étranger mais qui s’inscrit dans la tradition des coups d’Etat régulateurs dont le dernier a abouti à l’élection du socialiste Mahamadou Issoufou en 2011.
Dans la matinée, une opération d’enrôlement de volontaires civils au stade Seyni Kountché à Niamey a dû être reportée devant l’affluence : impossible d’enregistrer les dizaines de milliers de jeunes hommes – parmi lesquels quelques femmes – qui avaient répondu présent.
«Les gens sont motivés pour défendre la patrie. Mais ce n’est pas un recrutement militaire. Au niveau de la CEDEAO, nous voulons leur dire par cette mobilisation que ce ne sera pas une guerre entre les militaires nigériens et eux. Ce sera une guerre entre la population nigérienne et eux. Pour qu’ils puissent entrer sur le territoire nigérien, il faudra qu’ils passent sur nos corps, nos cadavres», a dit à Reuters Younoussa Hima, co-organisateur de la mobilisation des jeunes pour la défense de la patrie.
Le Président Tinubu insulté à Zinder
L’objectif des militants de la société civile impliqués dans cette opération était de créer une base de données répertoriant les volontaires pouvant être mobilisés en cas d’attaque extérieure en tant que médecins, infirmiers, secouristes ou chauffeurs.
A 850 kilomètres à l’est, la jeunesse de Zinder, l’ancienne capitale du Niger connue pour son tempérament frondeur, a rempli le stade de la ville et hué en haussa le nom du Président du Nigéria voisin, Bola Tinubu. Zinder est le fief politique de Mohamed Bazoum et celui du premier leader démocratique nigérien Mahamane Ousmane, candidat malheureux à la présidentielle de 2021. Jusqu’ici, l’influence de ce dernier avait contenu les ardeurs contestataires locales. Le couvercle semble avoir sauté.
A Niamey et Gaya, près de la frontière du Bénin, les Nigériennes ont manifesté pour demander le départ du contingent français.
Contagion populaire
Petit à petit, la contagion gagne tout le pays, débordant les formations politiques, y compris de l’opposition. Libération, espoir, patriotisme, fierté : les sentiments exprimés par les participants confortent les organisateurs de ces rassemblements, des acteurs connus de la société civile nigérienne. La junte se retrouve ainsi à la fois soutenue et surveillée, dans un contexte de forte revendication de justice.
Dans son discours à la nation, le président du CNSP a vu dans la spectaculaire mobilisation populaire l’expression du sentiment de «libération de l’écrasante majorité du peuple nigérien», qu’il a juré de ne pas trahir. Il a ensuite réaffirmé que le CNSP n’avait pas pour ambition «de confisquer le pouvoir». «Le CNSP adhère pleinement au principe du libre choix des gouvernements par les peuples. Mais pour que le peuple puisse choisir ses dirigeants, il faut un système transparent dans lequel les opposants ne sont pas emprisonnés ou exilés, dans lequel une véritable alternance est possible et dans lequel la société civile peut librement s’exprimer et manifester sans être inquiétée.»
Ce passage du discours du général Tchiani fait directement allusion aux douze ans de gouvernance socialiste marqués par le harcèlement et l’emprisonnement des militants de l’opposition, la vie en exil du chef de file du parti Lumana, Hama Amadou, sous le coup de poursuites judiciaires incessantes, et les interdictions quasi systématiques des manifestations de la société civile.
En ce qui concerne la transition, le général a annoncé l’ouverture d’un dialogue national inclusif des forces vives de la nation pour « structurer les nouveaux élans de patriotisme qui renaît au Niger. » Ce dialogue devra aboutir dans un délai de 30 jours à des propositions concrètes sur les principes et priorités de la transition «dont la durée ne saurait aller au delà de trois ans.»
La France dans le viseur
Réagissant aux sanctions qui privent les Nigériens de médicaments, de vivres et de transactions financières, le chef de la junte a estimé qu’elles n’étaient pas «pensées dans une optique de recherche de solutions, mais pour nous mettre à genoux et nous humilier.» Sans nommer la France, il a dénoncé «un plan visant le démantèlement de notre pays» dans lequel «la CEDEAO s’apprête à agresser le Niger en mettant sur pied une armée d’occupation en complicité avec une puissance qui est étrangère à notre espace communautaire et à notre continent. Ceux qui ont pris ces sanctions cruelles et menacent de tuer des milliers de Nigériens espèrent ainsi les diviser et imposer à notre vaillant peuple leur volonté.»
Se disant disponible au dialogue, il a affirmé que «toute approche coercitive ignorant la quête de souveraineté, de sécurité et de bonne gouvernance exprimée clairement par la population revient à ignorer les dynamiques profondes en oeuvre dans les pays sahéliens, abandonnés à leur propre sort depuis plus de dix ans par ceux là mêmes qui, au lieu de les aider à combattre les maux qui les assaillent, veulent aujourd’hui les agresser.»
«Ni le CNSP ni le peuple nigérien ne veulent d’une guerre et demeurent ouverts au dialogue. Mais qu’on nous comprenne bien : si une agression devait être entreprise contre nous, elle ne sera pas la promenade de santé à laquelle certains croient», a assuré le général, regardant la caméra pour énumérer les héros de la geste militaire nigérienne.
Le peuple nigérien n’est pas entendu par la CEDEAO et cela me désole.
De quel droit les membres de la Cedeao veulent attaquer militairement le Niger alors certains « présidents » de ces pays ont été imposés par l’ancien colonisateur ?
Merci de le lui avoir rappelé. Il s’agit de nos vaillants guerriers qui avaient combattu l’homme blanc depuis les PREMIÈRES heures de l’invasion des blancs en Afrique et SINGULIÈREMENT au NIGER.
Il n’a pas énumérés les héros de la junte mais plutôt nos ancêtres guerriers qui a leurs époque ont combattu l’homme blanc.