Le timing d’intervention du Président Algérien Tebboune et de l’ancien Premier ministre français, Dominique de Villlepin, dans les médias français et algérien dénote d’une volonté manifeste des deux cotés de la Méditerranée de maintenir des liens entre la France et l’Algérie au delà de l’actuelle crise. Sur fond d’une négociation discrète entre les deux Présidences française et algérienne pour la libération de l’écrivain Bouallem Sansal dont témoignent les déplacements à Alger, ces dernières semaines, de la conseillère Maghreb d’Emmanuel Macron et du patron des services extérieurs français.

Hélas, le microcosme parisien qui croit bien faire d’entretenir un brouhaha hostile à la nation algérienne et qui pensent favoriser ainsi la libération de l’écrivain, mettre du feu sur les braises franco-algériennes. En écho, des voix algériennes jouent de l’appartenance de l’écrivain au comité éditorial de la revue d’extrême droite « Frontières » pour alimenter la détestation d’une partie de l’opinion algérienne envers la France et rendre impossible tout apaisement entre Paris et Alger.
Depuis la fin du mois de juillet passé, les relations entre les deux pays ont atteint un niveau de crise jamais égalé mais pas encore au bord de la rupture. La reconnaissance de la marocanité du Sahara occidentale par le président français cet été est la principale cause de la discorde actuelle qui a provoqué le rappel de l’ambassadeur d’Algérie de Paris. La détérioration des relations entre les deux pays s’est accompagnée des joutes verbales provocatrices des personnels politiques dans les médias français et algérien.

Bruno Retailleau, le ministre de l’intérieur fraîchement installé à la place Beauvau, tente un bras de fer en expulsant un agitateur algérien qui s’en prend violemment à l’opposition algérienne en France, sans passer par la voie judiciaire. Alger refuse l’accès à son territoire et renvoi l’expulsé en France. La droite et l’extrême droite haussent le ton en proposant des mesures de rétorsion sur plusieurs dossiers: la rétention des Algériens coupables de délits sur le territoire français, les visas de la nomenklatura qui dispose de fait d’un droit d’entrée permanent en France, les soins médicaux dont les élites algériennes profitent largement à Paris ou encore les biens mal acquis que certains dignitaires ont acheté à Paris ou ailleurs. Côté algérien, on prépare des contre attaques sur la restriction de l’usage du Français dans l’administration officielle tel que le journal officiel, des mesures dans le domaine économique et commerciaux.
Tout récemment un site algérien, « Twala », a révélé que les autorités françaises ont fait embarquer, le 13 février, l’ancien directeur de cabinet du président Tebboune, Abdelaziz Khellaf, sur un vol à destination d’Alger après lui avoir fait passer une nuit à l’hôtel IBIS. Les raisons de ce refus d’entrer sur le territoire n’ont pas été données. Il s’agit clairement d’envoyer un signal clair aux autorités algériennes de l’état d’esprit du gouvernement franaçis.. La personnalité refoulée n’est pas un citoyen ordinaire puisqu’il s’agit de l’ancien directeur de cabinet du président algérien.
Dans le même ordre d’isées, on se souvient que des Algériens, de retour sur le territoire français, se sont plaints de « traitements dégradants » dans les aéroports parisiens. L’affaire a été prise au sérieux à Alger puisque l’ambassadeur de France avait été convoqué au ministère des affaires étrangères pour s’entendre dénoncer « des traitements provocateurs, dégradants et discriminatoires » qu’auraient subis des ressortissants algériens.
Un climat délétère corrompt les relations entre les deux pays, et peu de voix réconciliatrice, hélas, se font entendre.
Le « poil de Mu’awiya » de Tebboune
Le 3 février passé, le président algérien s’est donné, avec une large ouverture d’esprit, dans une interview accordée au quotidien français « l’Opinion » abordant en larges les grands thèmes des relations internationales, s’agissant des relations avec le nouveau locataire de la maison blanche, de la Chine, la Russie, sans oublier la France, avec laquelle l’Algérie a des liens historiques, culturels, qui ne sont plus à justifier. Le président Algérien voulait, à travers un média ayant pignon sur rue en France, s’adresser à l’opinion française eainsi qu’à l’opinion internationale.
Pour évoquer la nécessité du maintient du lien entre son pays et la France, le président algérien évoque la métaphore « je maintiens le cheveu de mu’awiya » une expression à forte charge symbolique utilisée dans la culture diplomatique musulmane comme une vertu de la part de celui qui s’oppose au ruptures brutales par volonté de sagesse et de clairvoyance. Mu’awiya fut le premier khalife omeyyade à Damas connu pour sa gestion diplomatique de l’empire musulman Ommeyade. « c’est mon état d’esprit pour ne pas tomber dans une situation qui deviendrait irréparable » se justifie le président algérien.
Les « fils qui se tissent » de Dominique De Villepin
Le 9 février du mois en cours, l’ancien premier ministre français et ancien secrétaire général à l’Elysée du président Chirac, Dominique De Villepin, était l’invité de la chaîne internationale algérienne (AL24), dépendant de la présidence, en s’adressant à l’opinion publique algérienne et à la diaspora algérienne à l’étranger, n’avait de viser que renouer le dialogue avec un pays central au Maghreb et important sur l’échiquier Africain.
Ces tirs croisés médiatiques soulèvent la nécessité le maintien des liens en dépit des désaccords profonds sur des dossiers brûlants entre la France et l’Algérie. Conscient des enjeux géopolitiques régionaux et internationaux et de l’histoire commune aux deux pays, la nécessité de dépasser les obstacles s’impose comme réalité avérée. Le silence du président français est complice, du fait qu’il est condamné de garder le silence contenu de la fragilité de son gouvernement constamment menaçait par le glaive de la mention de censure de l’extrême droite au parlement.
En écho à la métaphore de président Tebboun évoquant « le poil de Mu’awiya », l’ancien premier ministre Français, Dominique De Villepin, plaide pour que «les fils se tissent à nouveau ». La comparaison fait raison dans ce jeu de langage qui est similaire dans sa forme expressive mais subtile et avisé dans son fond de pensée. L’ancien ministre des affaires étrangères a fait une démonstration de son style diplomatique habituel. « La responsabilité, qui la notre, chacun à notre place, c’est de faire en sorte que les fils puissent se tisser à nouveau, Je n’ignore pas les difficultés, les obstacles. Mais ce que je sais, c’est que notre volonté doit être trés forte. » .
Dans son interview à AL24, l’ancien premier ministre français met l’accent sur la nécessité du dialogue en se basant sur le partage du socle commun « la langue, l’histoire y compris l’histoire tragique, j’ai grandi avec le poids de cette histoire », Sans renier le passé colonial, Dominique De Villepin voit aussi d’autres horizons d’opportunités citant « le partenariat, entre la France et l’Algérie des défis formidables, l’Algérie a des capacités, des richesses, La France a des atouts, qui, misent ensemble peuvent constituer des chance de croissance, d’ouverture au monde, des chances pour la stabilité, à la fois de l’Afrique mais aussi des régions du monde ».
Le contentieux mémoriel, encore et toujours
La crise multidimensionnelle couve encore et les dissensions ne se sont totalement apaisées. Des dossiers sont en attente, économiques et commerciaux, mais aussi ceux relevant de la mémoire. « Nous avions beaucoup d’espoirs de dépasser le contentieux mémoriel » précise le président algérien. « Trouver des voix qui nous permettent de régler ces difficultés, Parce que tout ce qui est entre les deux peuples est trop important ». répond De Villepin, La similitudes des arguments des deux interviews s’alignent dans une logique de la démarche de dialogue.
Il est vrai que beaucoup voient dans la démarche de De Villepin comme une tentative de positionnement politique en vue des échéances politiques de 2027. Prend à rebours la politique du président Macron au Maghreb comme en Afrique. ce qui pourrait servir ses ambitions présidentielles.
Le président algérien exprime le souhait de renouer un dialogue franc, tout en se démarquant d’une partie du personnel politique français. « Personnellement, je distingue la majorité des français de la minorité de ses forces rétrogrades et je n’insulterai jamais votre pays », note le président algérien.
Des deux cotés de la Méditerranée, des voix s’élèvent pour ne pas insulter l’avenir. Des deux cotés aussi, des forces nationalistes et identitaires jouent la politique du pire.
RépondreTransférer
|