Le 63e anniversaire du 19 mars 1962 marquera-t-il une nouvelle étape dans la reconnaissance par la France des faits historiques de la colonisation en Algérie ? Le Général de Gaulle, alors dernier président du Conseil de la IVeme République, avait déclaré au peuple algérien dans son discours prononcé au Forum d’Alger le 4 juin 1958:« Je vous ai compris ». Le président Emmanuel Macron pourra-t-il comprendre que le temps est venu de la reconnaissance des crimes coloniaux par l’Etat français ?
Lyazid BENHAMI, écrivain

Le 19 mars 1962 à midi, le cessez-le-feu de la guerre d’Algérie est proclamé. Il fait suite aux Accords d’Evian signés la veille, 18 mars 1962, et marquant la fin de 132 ans de présence française en Algérie. Krim Belkacem signe au nom du Gouvernement Provisoire Algérien, le GPRA, et côté français au nom de la République française par Louis Joxe, Robert Buron et Jean de Broglie. Ces Accords ont mis fin à la guerre d’Algérie et répondent ainsi au désir des Algériens de recouvrer leur liberté.
63 ans après la fin de la guerre, que reste-t-il de l’histoire commune entre l’Algérie et la France ? Pour les Algériens force est de reconnaître qu’il est parfois plus difficile de construire une nation que de recouvrer l’indépendance. L’État moderne algérien a pris forme et s’est consolidé depuis cette période. En France, il subsiste encore des déceptions parmi certains nostalgiques de l’Algérie française. Des blessures restent encore béantes auprès de français d’Algérie ou d’anciens supplétifs de l’armée française. Les nouvelles générations des deux côtés de la Méditerranée sont attentives au traitement de la question mémorielle. La guerre de libération et ainsi que toute la période de la colonisation ont marqué cette histoire si douloureuse.
Aujourd’hui, il est essentiel d’aborder sans complaisance l’histoire entre la France et l’Algérie, sans détour mais avec sérieux et justesse académiques. Cela permettra d’apaiser les mémoires et les consciences, et ainsi permettre aux générations actuelles et futures d’aborder l’avenir de manière plus serein et de donner la chance au vivre ensemble de s’exprimer sous son meilleur visage. Les grandes nations confrontent leur passé avec honnêteté : reconnaître les faits historiques renforce leur grandeur et dissipe les poisons mémoriels.
Le devoir de mémoire
Comme le Général de Gaulle, en son temps sur la question de la décolonisation, le président Emmanuel Macron pourra-t-il comprendre à son tour que c’est le moment de reconnaître les vérités historiques ? Depuis son élection, sa politique mémorielle des petits pas semble insuffisante.
Aujourd’hui, il est toujours question de courage politique. Emmanuel Macron entendra-t-il la voix des nouvelles générations de Français et de Franco-Algériens en attente de cette reconnaissance ? Le général avait estimé que le choix menant à l’indépendance de l’Algérie s’imposait. Est-ce que le président Macron en fera autant sur le volet de la reconnaissance des crimes coloniaux ?
Ici il n’est pas question d’une attitude quelconque à adopter à l’égard d’un pouvoir quel qu’il soit, mais ce sujet concerne autant le peuple algérien que le peuple français.
En évitant d’examiner la vérité historique, c’est donner raison à certaines voix révisionnistes qui se frayent un chemin dans nos sociétés en crise.