Quinze jours après le coup d’Etat qui a vu un putschiste en chasser un autre, le pouvoir d’Ibrahim Traoré, le nouveau maitre du Burkina, n’est toujours pas stabilisé. L’homme fort de la nouvelle junte doit faire face à de nombreuses difficultés et défis. Aura-t-il la capacité et le temps de les surmonter ?
Lorsqu’en septembre 2021, un coup d’Etat avait porté Paul-Henri Damiba au pouvoir, l’armée et les Burkinabè s’étaient très vite résolus à acter le putsch et la fin de Roch Marc Christian Kaboré. Sous les mandats de ce dernier, la situation sécuritaire s’était dégradée d’une façon telle qu’une sorte de consensus s’était créé autour de « ça ne pourra pas être pire ». Et pourtant le lieutenant-colonel Damiba l’a fait ! Peu avant sa chute, après huit mois de pouvoir, « zéro pointé » était le slogan qui lui collait à la peau.
Un navire en pleine tempête
Lors du putsch, malgré sa jeunesse, 34 ans et son grade, le capitaine Traoré a réussi à déjouer le principal écueil. La difficulté consistait à obtenir avec le moins de dégâts possibles la reddition de Damiba et des forces spéciales qui lui sont restées fidèles. Selon des sources de Mondafrique, contrairement aux dénégations du Quai d’Orsay, le Président du Burkina Faso était bien réfugié au camp des forces spéciales françaises. Mais la révélation du lieu de son repli par le camp de Traoré a mobilisé la population. Devant les troubles que cela risquait de créer, Damiba a été obligé de capituler et de s’exiler à Lomé.
Mais le plus dur reste à faire. Il lui faut réunifier une armée plus que jamais divisée après deux coups d’Etat et apaiser les tensions au sein d’une grande muette qui souffre depuis 2016, date du début des premières attaques djihadistes. Il lui faut combattre les groupes armés et obtenir des victoires dans cette guerre asymétrique. Il lui faut lutter contre la crise humanitaire grave qui sévit, apporter de l’aide à des populations en proie à la famine et aux presque 2 millions de déplacés internes. Toutes ces tâches sont titanesques.
Capitaine ou Président
Lors de ses premières interview, Ibrahima Traoré a déclaré, qu’il souhaitait passer le témoin à un président civil et repartir combattre sur le terrain. Sur ce point, les avis divergent. Le philosophe burkinabè, Jacques Batiéno écrit « le putschiste se doit assumer son statut. Il se doit de prendre les choses en main pour gouverner lui-même et montrer au peuple pourquoi, il en est arrivé là. Une parenthèse de gouvernance militaire, dans ce que j’appellerai un putschisme éclairé peut être salutaire par les temps qui courent. » A l’inverse, d’autres pensent que ce serait une trahison de la parole donnée.
Les assises nationales convoquées le 14 et le 15 octobre décideront si Ibrahim Traoré reste au Palais présidentiel ou s’il retourne combattre, même les bruits de couloir le donne partant pour le palais de Kosyam, rien n’est encore joué. D’autres noms circulent, comme celui du colonel Auguste Barry, qui fut un proche d’Isaac Zida, ancien Premier ministre de la transition (2014-2015). En attendant, le capitaine Traoré consulte tous azimuts, selon Africa Intelligence, il s’est entretenu avec des personnalités ivoiriennes et s’est entretenu avec le général Djibril Bassolé.
L’ancien patron de la diplomatie burkinabè a été éloigné du pays pour des raisons de santé depuis janvier 2020, mais il reste sollicité par les acteurs de la sous-région pour sa maitrise des questions sécuritaires et son réseau diplomatique.
Burkina, le capitaine Traoré en exclusivité