Le président mauritanien, Mohamed Ould AbdelAziz, qui doit quitter le pouvoir dans un mois a organisé, dans des conditions suspectes, la cession d’un gisement de fer prometteur à une entreprise australienne. Une chronique de nos confrères du site mauritanien Cridem
Alors que la Mauritanie est en pleine campagne électorale pour un scrutin prévu fin juin, tous les projecteurs sont tournés vers un gisement de fer dans la région de Fdérik au nord du pays, qui recèle des réserves de 30 millions de tonnes de minerai d’excellente qualité (63% fer). L’exploitation constitue véritable aubaine pour la SNIM, le fleuron de l’industrie minière en Mauritanie qui tente de sortir d’une période de vaches maigres.
Dans le plus grand secret, cette mine a été cédée –ou sur le point de l’être- à une entreprise étrangère, de surcroit australienne, dénommée BCM. Un accord conclu le samedi 24 mai entre ce groupe et la SNIM qui permet la création d’une société mixte dans laquelle l’entreprise nationale détient seulement 20% du capital.
Les 80% restants appartiennent à l’investisseur étranger et deux opérateurs privés mauritaniens qui seraient le gendre du président, Ould Msabou’e et Mouhidine Ould Sahraoui, le ‘’bâtisseur’’ de l’aéroport Oum Tounsi.
Une négociation secrète
Avant de se rendre à Zouérate, dimanche dernier, pour visiter les installations de la société minière nationale, la délégation australienne se serait rendue, dans le plus grand secret, dans la capitale économique où elle est allée rencontrer, seule, le patron de la SNIM. Et pour brouiller, les pistes, Ould Sahraoui a tenu à ne pas apparaitre à leurs côtés. Le gendre du chef de l’Etat n’était même pas logé dans le même hôtel avec ses nouveaux partenaires.
Pourquoi on ne pas avoir associé les différents compétents pour évaluer la transaction et l’exécuter dans les normes ? Qui a donné le feu vert pour l’exécution de ce contrat léonin? Si cette vente est faite dans l’intérêt du pays, pour quelle raison organiser des tractations secrètes ? Pourquoi une aussi importante décision à un mois de l’élection d’un nouveau président ? Autant de questions sans réponse qui renvoient à la panique qui a saisi l’entourage présidentiel à l’idée de quitter le pouvoir. On est en face d’une situation qui ressemble bien à celle de la cession de certaines activités du port autonome de Nouakchott à une société créée une journée avant l’acte de cession.
Il était une fois la Snim…
Les gisements de minerai de fer du Tiris ont été évoqués par El Bekri, auteur andalous du 11e siècle. D’ailleurs les populations locales avaient aussi connaissance de la présence du fer dans la région parce que l’un des Guelbs porte le nom de Guelb Lehdid (fer) et un autre Guelb El Meiss (aimant).
Les aviateurs des années 1940-50 ont parlé de graves perturbations de leurs instruments de navigation en survolant la Kedia d’Idjil, perturbations dues au magnétisme induit par le fer de la région.
Le premier gisement exploité par Miferma, ancêtre de SNIM, a été celui de Fdérik 1, à l’extrémité Ouest de la Kedia. Cette nouvelle activité minière, la première dans le pays, allait vite donner naissance à une ville : Zouérate qui boit, se nourrit, vit et respire du fer. Et la société (Echerika). C’est-à-dire la SNIM.
A la fin du siècle dernier, la Snim a connu de graves problèmes dus aux difficultés de démarrage de l’usine du Guelb Ghein et à l’épuisement des réserves des gisements de la Kedia (Fderik, Tazadit, Rouessa). La direction de l’époque avait décidé, malgré ses moyens limités, d’entreprendre un vaste programme de recherches minières. Ce programme avait été un grand succès
Il est urgent de sauver cette entreprise, naguère présentée comme le fleuron de l’industrie nationale et qui aujourd’hui bât de l’aile. Il importe de se mobiliser massivement pour faire échouer l’accord avec les Australiens qui nuit aux intérêts vitaux de la Nation.