La fondation ophtalmologique financée par Mohamed Bouamatou, homme d’affaires, mécène et actionnaire de Mondafrique, permet chaque année à des milliers de mauritaniens de retrouver une bonne vue dans un pays largement privé d’accès aux soins.
Voici le témoignage de Maryam Brodowski
Depuis des années je suis très incertaine lorsque je dois me mouvoir dans des lieux qui me sont peu ou pas connus ! Je ne suis pas particulièrement timide et pourtant chaque fois j’éprouve la même angoisse. Et si je ne trouvais pas l’endroit où je dois aller ? La personne que je dois rencontrer ? Avec le don particulièrement prononcé de me prendre les pieds dans le tapis même quand il n’y en a pas, j’entends déjà les quolibets des gens me voyant m’aplatir de tout mon long…
Cette angoisse me poursuit dans mes voyages même quand le lieu où je vais m’est connu… Quelques années passées et vous ne retrouvez plus rien à la même place… Devoir me servir d’un appareil automatique que je ne connais pas ou trouver un téléphone me semble un chemin plein d’embûches …. Ou bien dans ma panique je passe devant le guichet que je cherche et me précipite vers celui qui ne peut pas me servir !
Cette fois ci arrivée à l’aéroport de Francfort pour moi assez inconnu (j’étais parti de là une fois en 2001…) Autrement je pars et arrive toujours à Düsseldorf, je ne connaissais rien mais je trouvais tout, tout de suite. L’endroit où on récupère ses bagages et le point de Douane… Pas besoin de demander 5 fois mon chemin… Les panneaux indicateurs me suffisaient… J’étais fatiguée mais pas handicapée… J’étais « Alice au pays des merveilles »… Je vis même que ma valise n’était pas au rendez vous… Au lieu de me précipiter sur chaque valise ressemblant à la mienne pour ensuite le rouge au front la rendre à son propriétaire…
Tout était autre et j’avais une joie toute particulière a pouvoir sans peur trouver facilement mon chemin dans ce lieu inconnu… Et oui… J’avais depuis environ deux mois… Un œil « tout neuf »… Mon oeil opéré à la fondation Bouamatou… Et c’était mon baptême du feu, lâchée toute seule dans ce lieu compliqué qu’est un aéroport… J’aurais voulu pouvoir rentrer dans une pièce ou j’aurais été seule pour pouvoir prier en reconnaissance….
A la mémoire me revint une courte conversation avec un chauffeur de taxi a Nouakchott… Voyant que j’avais des difficultés à voir il me demanda : Tu vois mal Madame ? Oui répondis-je j’ai la cataracte… Oh répondit il tout excité, tu sais c’est rien du tout… Ma Maman qui vit très loin dans la brousse, on s’est aperçu qu’elle voyait très mal alors je l’ai amenée ici et elle a été opérée à la Fondation… Si tu savais comme elle est heureuse… Et, demandais-je elle est très pauvre ta Maman ? Oui, répondit il en riant, mais elle s’en fout maintenant, elle voit…. C’est tout ce qui compte… Oui moi aussi je voyais et ce bonheur me faisait oublier beaucoup de choses… Je pouvais aller prendre le train sans avoir peur de tomber sur une marche que je n’avais pas vu… Je n’avais plus peur de cette dépendance qu’entraîne une vue défaillante…
Arrivée dans ma ville je vis une affiche d’une organisation qui elle aussi opère en Afrique dans le tiers monde… On demandait des dons pour tous ces enfants qui sont eux aussi atteints de cette terrible cataracte et une fois de plus je remerciais Dieu que nous n’ayons pas besoin de cette organisation… Bien sur je suis très reconnaissante à Mohamed Ould Bouamatou sans lequel nous n’aurions cette fantastique organisation mais j’éprouve le besoin de rendre hommage au personnel qui se dévoue journellement pour que cette Fondation fonctionne… Du gentil gardien qui donne les numéros et m’avait expliqué la première fois où il fallait que j’aille pour mes lunettes… Mohamed qui a fait avec beaucoup de patience le premier examen et que j’avais l’impression de pousser au désespoir car chaque verre qu’il m’essayait ne m’aidait pas à voir mieux… Le médecin qui m’a opéré… Et dont je ne sais même pas le nom… Celui qui a fait l’échographie, l’infirmier qui très ponctuellement revenait pour me mettre des gouttes avant l’opération… A tous et pas seulement a ceux que je viens de citer j’éprouve le besoin d’exprimer ma reconnaissance…
Je vois…Même si le deuxième œil n’est pas encore opéré… Je savoure chaque arbre… Chaque couleur que je revois avec son intensité, je vois qu’à cette époque ci la nature est si belle avec les couleurs de l’automne… Combien de choses me réjouissent…
Une chose tout de même me rend un peu triste… Lorsque je vais à l’hôpital ophtalmologique je vois beaucoup de personnes pauvres, sans aucun doute possible indigentes, mais aussi beaucoup de gens aisés, voir riches qui se font opéré ou leurs parents car ils ont confiance… Et là je voudrais raconter une petite anecdote : Une femme est devenue tristement célèbre dans cette fondation. Elle avait été opéré et comme tout le monde elle avait du acheter les seules choses que la Fondation ne peut donner : Du Sparadrap, des compresses et des petites doses d’un antibiotique que l’on doit se mettre dans l’œil tous les soirs 12 fois de suite… Cela coûte une somme modique, le tout revient à 900 UM…. Somme modique pour beaucoup… Pour certains malgré tout, ce que la maman n’a pas tous les jours pour nourrir sa famille… Cette femme donna donc 2 Sets complets en demandant qu’on veuille bien les remettre a des patients indigents… Le personnel que je connais prétend que ce genre de dons ne fait malheureusement pas partie des habitudes des patients même fortunés… Ne serait ce pas une merveilleuse idée à promulguer… Pour ceux qui financièrement peuvent se le permettre… Donner pour ceux qui ont beaucoup de mal à réunir cet argent mais ne peuvent renoncer a ces produits…Le succès de l’intervention en dépend…
Voulez vous y réfléchir ? Je crois que cela vaut la peine… A propos je me suis renseignée chez un chirurgien privé… Pour ce genre d’opération il demande 60000 UM !
Maryam Brodowski maryambrodowski@yahoo.fr