Le prix Goncourt 2021, Mohamed Mbougar Sarr, critique le président sénégalais Diomaye Faye et son premier ministre Ousmane Sonko, tous deux victimes, selon lui, d’un « espoir irrationnel qu’ils ont suscité ».
Correspondance à Abidjan, Bati Abouè
Le romancier sénégalais Mohamed Mbougar Sarr, premier Goncourt subsaharien en 2021 s’est prononcé sur l’actualité politique du Sénégal et, particulièrement, sur son duo d’exécutif Diomaye-Sonko qu’il accuse d’avoir suscité un espoir irrationnel auprès des populations.
« Il y a eu beaucoup de déclarations d’intention, et une sorte de captatio benevolentiae permarnente dans leur discours. Ils demandent du temps et je peux le comprendre. Mais, alors qu’ils étaient dans l’opposition, ils ont tant affirmé qu’ils trouveraient des solutions presque immédiates aux problèmes sociaux de base qu’ils sont aujourd’hui prisonniers de leur zèle et de l’espoir irrationnel qu’ils ont suscité, aidés par la fin chaotique du précédent régime », assure-t-il à Jeune Afrique à qui il a accordé une interview parue dans sa toute dernière publication.
Mohamed Mbougar Sarr fustige également le discours radical du premier ministre sénégalais Ousmane Sonko qui n’a jamais été, assure-t-il, un adepte de la mesure et qui se rend compte bien malgré lui que le discours abrasif et populiste ne cadre pas avec la fonction de premier ministre.
Discours abrasif
« II n’y a pas de réelle surprise en ce qui concerne le ton utilisé en public par Ousmane Sonko, qui n’a jamais brillé par sa mesure ou son sens de la nuance. Ce style, dont je déplore certaines outrances, participe de son charisme et de sa popularité auprès de certains. Il y a cependant une grande différence entre être le fleuron abrasif et populaire d’une opposition et être Premier ministre. Je crois – j’espère – qu’il le sait », se moque Mohamed Mbougar Sarr.
Le romancier est en revanche surpris de constater que le nouveau régime cautionne l’impunité qu’il avait reprochée, dans l’opposition, à l’ancien président Macky Sall dont les « scandales et drames humains (…) n’ont toujours pas été éclaircis », accuse-t-il. D’autant que pour lui, la difficulté aurait immanquablement été d’exiger « la justice sans que cela tourne à la vendetta ».