La Libye à nouveau au bord de la guerre civile

Plusieurs scénarios sont envisageables dans la nouvelle vrise qui s’ouvre en Libye aux abords de Tripoli, la capitale libyenne: une confrontation armée étendue ou limitée, des négociations sous la menace pour redessiner les équilibres de pouvoir, ou une médiation temporaire sans résolution des causes profondes.

  • Concurrence entre milices pour le pouvoir et les ressources: L’attaque du siège de la Libyan Post, Telecommunications and Information Technology Company (LPTIC) et l’agression de son directeur général, originaire de Misrata,  s’inscrivent dans le contexte plus large du conflit permanent entre groupes armés de l’ouest libyen, particulièrement à Tripoli, pour l’influence et les ressources. Ces groupes se disputent principalement le contrôle de zones géographiques stratégiques, de ministères et institutions gouvernementales, ainsi que de sources de financement légales et illégales. Les récentes mobilisations sont perçues comme une tentative des forces de Misrata et leurs alliés de rétablir l’équilibre des pouvoirs dans la capitale, estimant que leur influence s’érode au profit de groupes tripolitains comme l’Appareil de soutien à la stabilité, accusé d’exploiter sa proximité avec le gouvernement Dbeibah pour consolider ses positions.

 

  • Stagnation politique et effondrement institutionnel: Le vide politique résultant de l’échec du processus politique à progresser vers l’unification du pays et l’organisation d’élections crée un terrain fertile pour le renforcement des milices et l’augmentation des violences. En l’absence d’une autorité centrale forte et d’institutions unifiées et légitimes, les factions armées recourent à la force militaire comme outil principal pour atteindre leurs objectifs politiques et économiques. Les mobilisations militaires interviennent dans un contexte de gel du dialogue entre les principales parties politiques et de persistance des divisions institutionnelles. Face à cette impasse, certains acteurs armés semblent voir dans les déploiements militaires un moyen de pression pour modifier les équations sur le terrain.

 

  • Héritages historiques et alliances mouvantes: Les séquelles des conflits passés (comme les guerres de 2014 et 2019-2020) et les anciennes alliances/rivalités (comme la coalition Fajr Libya ou les tensions entre Zintan et Misrata) continuent d’influencer le paysage actuel. Cependant, les alliances actuelles restent fluides et pragmatiques, avec l’émergence récente de nouveaux regroupements pro et anti-Dbeibah au sein même du camp occidental, complexifiant davantage la situation.

 

  • Facteur potentiel : Réaction aux mouvements de l’Armée nationale libyenne ?: Les mobilisations vers Tripoli ont coïncidé avec des déploiements de forces de l’Armée nationale libyenne sous le commandement du maréchal Khalifa Haftar dans les régions sud et ouest[3]. Bien que l’état-major ait nié toute intention hostile, ces mouvements ont probablement contribué à augmenter les tensions dans la région occidentale. Néanmoins, la motivation principale des mobilisations vers Tripoli semble découler des dynamiques de conflit interne entre factions armées de l’ouest, spécifiquement en réaction à l’incident de la LPTIC.nouvelle