- Mondafrique https://mondafrique.com/libre-opinion/ Mondafrique, site indépendant d'informations pays du Maghreb et Afrique francophone Tue, 22 Jul 2025 10:09:39 +0000 fr-FR hourly 1 https://wordpress.org/?v=6.8.2 https://mondafrique.com/wp-content/uploads/2017/11/logo_mondafrique-150x36.jpg - Mondafrique https://mondafrique.com/libre-opinion/ 32 32 Le massacre des Druzes annonce une dislocation possible de la Syrie https://mondafrique.com/libre-opinion/le-massacre-des-druzez-annonce-une-dislocation-de-la-syrie/ https://mondafrique.com/libre-opinion/le-massacre-des-druzez-annonce-une-dislocation-de-la-syrie/#respond Tue, 22 Jul 2025 07:49:46 +0000 https://mondafrique.com/?p=136842 Depuis le 13 juillet, les druzes, une minorité du Moyen-Orient, sont victimes d’exactions en Syrie. Face à ces massacres, Ahmed al-Charaa est-il complice, indifférent ou seulement dépassé ? Une chronique de Renaud Girard dans « Le Figaro », avec l’autorisation de l’auteur La tragédie qui frappe la communauté druze de Syrie depuis le 13 juillet 2025 – des centaines de druzes massacrés […]

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Depuis le 13 juillet, les druzes, une minorité du Moyen-Orient, sont victimes d’exactions en Syrie. Face à ces massacres, Ahmed al-Charaa est-il complice, indifférent ou seulement dépassé ?

Une chronique de Renaud Girard dans « Le Figaro », avec l’autorisation de l’auteur

La tragédie qui frappe la communauté druze de Syrie depuis le 13 juillet 2025 – des centaines de druzes massacrés par des bandes de djihadistes sunnites plus ou moins incontrôlées – constitue un sombre présage supplémentaire d’une possible dislocation confessionnelle de la Syrie.uLes druzes sont des Arabes qui professent une religion abrahamique ésotérique, proche du chiisme ismaélien. Pour les islamistes sunnites, les druzes sont des hérétiques qui méritent la mort. Minorité installée au Proche-Orient depuis des millénaires, la communauté druze est forte de 600.000 âmes en Syrie, 350.000 au Liban, 130.000 en Israël. Pour ménager leur survie, les druzes ont eu pour règle politique de toujours se montrer loyaux au pays où ils résident. En Israël, ils font leur service militaire depuis 1957. L’armée et la police israéliennes comptent aujourd’hui de nombreux officiers supérieurs druzes. Ils se marient entre eux, sans tenir compte des frontières.

Le djebel Druze est voisin du plateau syrien du Golan, annexé par Israël après sa victoire militaire de 1967 contre le régime baasiste de Damas. De nombreux civils druzes ont franchi la frontière pour se mettre sous la protection de l’armée israélienne. Pour des raisons de politique intérieure et de proximité géographique, l’État hébreu ne laissera jamais les islamistes sunnites commettre un génocide des druzes. Dans une forme d’avertissement, Tsahal a bombardé le ministère de la Défense syrien à Damas le 16 juillet 2025. Il est probable que, sans le reconnaître ouvertement, les autorités israéliennes actuelles songent à se constituer un nouveau glacis de sécurité dans le djebel Druze.

Frappée par les extrémistes sunnites

En revanche, lorsque la communauté alaouite (autre branche secrète dérivée du chiisme) fut, en mars 2025, dans la région de Lattaquié (nord-ouest de la Syrie), l’objet de massacres, de type génocidaire, perpétrés par des djihadistes sunnites, aucune des deux grandes puissances levantines géographiquement proches, à savoir la Turquie et Israël, n’a levé le petit doigt. La communauté chrétienne de Syrie, antérieure de cinq siècles à l’arrivée de l’islam, a également été frappée par les extrémistes sunnites. On se souvient de l’attentat contre l’église Saint-Élie de Damas, qui avait fait 25 morts, le 23 juin 2025.

Ce magnifique pays, à la population si hospitalière, risque de sombrer dans la spirale de la décomposition et de la guerre de tous contre tous

Renaud Girard

Face à ces massacres visant les minorités religieuses de Syrie, quelle est l’attitude de son nouveau président, qui a pris Damas le 9 décembre 2024, avec l’aide du régime turc d’Erdogan, idéologiquement proche des Frères musulmans ? Ahmed al-Charaa est-il complice, indifférent ou seulement dépassé ? Espérons que la troisième option est la bonne, dans la mesure où cet ancien militant d’al-Qaida, qui a su adopter le costume cravate et un discours nationaliste rassembleur, a été adoubé par les présidents Trump et Macron. On espère, mais on n’est pas sûr.

Sur la Syrie, nous n’avons aujourd’hui qu’une certitude. Il faut que, très rapidement, soit rétablie l’autorité de l’État central sur l’ensemble du territoire. Faute de quoi, ce magnifique pays, à la population si hospitalière, risque de sombrer dans la spirale de la décomposition et de la guerre de tous contre tous.

Quand le chrétien syrien Michel Aflaq inventa en 1940 le Baas, parti de la renaissance arabe, il était parfaitement conscient que les sociétés du Levant avait besoin d’un nationalisme fédérateur pour échapper à la fragmentation. Quand vous êtes une minorité ethnique ou religieuse dans un pays, quel qu’il soit, vous avez besoin de la protection d’un État fort. Feu le régime baasiste dictatorial syrien avait beaucoup de défauts, mais il avait au moins une qualité, celle de protéger les minorités et de garantir la liberté de culte.

L’exil ou la constitution d’un bastion

S’il n’y a pas chez vous d’État fort, que vous êtes une minorité et que vos enfants sont menacés par des bandes de barbus fanatisés, il ne vous reste plus que deux solutions : l’exil ou la constitution d’un bastion. C’est un dilemme qui fait passer aujourd’hui des nuits blanches aux élites kurdes, alaouites, druzes et chrétiennes de Syrie.

Le bastion kurde et le bastion druze auraient sans doute le moyen de tenir dans la distance. Le premier pourrait être aidé par ses frères kurdes de Turquie et d’Irak. Le second pourrait être protégé par Israël. En revanche, ne bénéficiant d’aucun allié (les Russes ayant quitté leurs anciennes bases militaires de Tartous et de Hmeimim), le bastion alaouite autour de Lattaquié ne résisterait probablement pas très longtemps au fanatisme sunnite. Quant aux chrétiens de Syrie, ils sont peu nombreux et beaucoup trop dispersés pour songer même à l’idée d’un bastion, à l’image du bastion maronite de la montagne libanaise.

Depuis 2011, l’analyse française du drame syrien a été marquée par un mélange d’ignorance historique, de manichéisme politique et de « wishful thinking » diplomatique

Renaud Girard

Lorsque, en 2014-2015, la révolution issue du « printemps arabe », semblait être en mesure de balayer le régime de Bachar al-Assad, et qu’il était évident que, dans l’opposition, les Frères musulmans avaient évincé les démocrates sincères, j’avais évoqué, dans cette chronique, les risques d’un génocide des alaouites, d’un exil forcé des chrétiens syriens vers le Liban, d’une destruction des églises, dans une ville qui avait pourtant vécu, jadis, la conversion de saint Paul. J’espérais évidemment me tromper. Je brandissais ce risque pour le conjurer. Je prie encore pour que les faits ne me donnent pas raison.

Il reste que, depuis 2011, l’analyse française du drame syrien a été marquée par un mélange d’ignorance historique, de manichéisme politique et de « wishful thinking » diplomatique. Nous, Français, nous avons toutes les raisons du monde pour détester la dictature. Mais, dans notre appréhension de l’Orient, nous ne devrions jamais oublier qu’il y a pire que la dictature politique. Il y a l’anarchie. Et il y a pire encore que l’anarchie : il y a la guerre civile.

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Renaud Girard: « Donald Trump n’est pas un coq sans tête » https://mondafrique.com/libre-opinion/renaud-girard-donald-trump-nest-pas-un-coq-sans-tete/ Wed, 09 Jul 2025 13:47:50 +0000 https://mondafrique.com/?p=133563 N’en déplaise à bon nombre de commentateurs, Trump n’est pas fou. C’est un dirigeant pragmatique, avec sa méthode. Elle consiste, dans une discussion, diplomatique ou commerciale, à demander gros, pour ensuite négocier. La Chine peut en témoigner. Que n’a-t-on pas entendu sur Donald Trump depuis qu’il est redevenu président des États-Unis, le 20 janvier 2025 ? S’il fallait résumer […]

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N’en déplaise à bon nombre de commentateurs, Trump n’est pas fou. C’est un dirigeant pragmatique, avec sa méthode. Elle consiste, dans une discussion, diplomatique ou commerciale, à demander gros, pour ensuite négocier. La Chine peut en témoigner.

Que n’a-t-on pas entendu sur Donald Trump depuis qu’il est redevenu président des États-Unis, le 20 janvier 2025 ? S’il fallait résumer les commentaires des bien-pensants, Trump est tout à la fois un fasciste, un fou et un incompétent.

Bien que confortablement élu, il représente un danger pour la démocratie ! Il a l’intention d’imposer ses décisions et ses nominations à l’État profond, quelle arrogance ! Il veut en finir rapidement avec la guerre russo-ukrainienne, quelle folie ! Il cherche à réindustrialiser les États-Unis par une politique de droits de douane, quelle incompétence ! Bref, Trump est une catastrophe planétaire. Il va provoquer l’éclatement de l’Occident et la plus grave crise économique sans précédent depuis 1929.

Depuis quelques jours, les commentateurs se sont calmés. Ils ne crient plus au loup. L’accord commercial provisoire signé à Genève entre la Chine et les États-Unis le 11 mai 2025 a rassuré les marchés. Ils sont plus hauts aujourd’hui qu’ils ne l’étaient la veille de l’annonce par Donald Trump de son projet d’augmentation des droits de douane. L’important est que Chinois et Américains ont décidé de poursuivre leurs négociations, afin de trouver un chemin pour équilibrer les échanges entre les deux premières puissances économiques de la planète.

Strict sur la non-prolifération

En politique étrangère, Trump avait promis, dans sa déclaration inaugurale, de ne pas commencer de guerre et de terminer celles qui étaient en cours. On ne sait pas encore si sa stratégie d’arrêter très rapidement la boucherie entre Russes et Ukrainiens sera couronnée de succès, mais force est de constater que, depuis que Trump est arrivé aux affaires, le mot d’ordre « paix » a remplacé le mot d’ordre « victoire » dans la bouche à la fois des Ukrainiens, des Européens et des Russes.

Beaucoup de bonnes âmes ont traité Trump de pion de la Russie, et certaines ont même insinué que Trump était « tenu » par le Kremlin, sur quelque obscure affaire. La réalité est que, lorsqu’il a annoncé sa volonté d’augmenter le budget militaire des États-Unis, le président Trump a invoqué non seulement la menace de la Chine dans le Pacifique, mais aussi celle de la Russie à l’est de l’Europe.

Par ailleurs, Trump a réussi à arrêter le conflit, qui ne cessait de s’intensifier, entre l’Inde et le Pakistan, après la fusillade terroriste (26 morts) dans la ville touristique de Pahalgam, au Cachemire indien, le 22 avril 2025.

Enfin, Trump a lancé des négociations de normalisation avec l’Iran, qui semblent en bonne voie. Le président américain a, pour le moment, refusé de se laisser entraîner, par son ami Netanyahou, dans une opération de bombardement aérien des sites nucléaires iraniens. À raison, Trump est strict sur la non-prolifération, mais il veut aussi donner une chance à l’Iran de redevenir la grande puissance commerciale qu’elle était du temps du chah.

La démocratie américaine fonctionne normalement

Il est évidemment trop tôt pour faire le bilan de la politique étrangère de Donald Trump. Force est néanmoins de constater qu’elle ne se laisse pas séduire par les sirènes néoconservatrices bellicistes, telles celles qui ont conduit aux catastrophiques interventions militaires « humanitaires » occidentales en Irak (en 2003 sous George W. Bush) ou en Libye (en 2011 sous Barack Obama).

En matière financière, il faudra attendre au moins un an avant de juger l’impact de Trump sur la première économie du monde. Il a cependant raison de dire que les déficits américains actuels ne sont pas tenables sur le long terme.

En termes de vie politique, la démocratie américaine continue à fonctionner normalement. Le New York Times et CNN continuent quotidiennement à accabler Trump de tous les maux. Dans ce grand pays fédéral, la Californie, démocrate, dont le PIB est supérieur à celui du Japon, continue à mener sa vie comme elle l’entend. La popularité de Trump descend (tout en demeurant le double de celles de Macron ou de Bayrou). Un couperet l’attend dans moins de dix-huit mois : les élections législatives de mi-mandat, où il pourrait fort bien perdre sa majorité à la Chambre des représentants, laquelle tient les cordons de la bourse. C’est le jeu de la démocratie et Trump s’y pliera comme les autres.Pour paraphraser Racine, Trump ne mérite pas, dans la sphère politique, ni cet excès d’honneur ni cette indignité. Il n’a peut-être pas la sagesse d’Eisenhower, mais il n’est pas non plus un coq sans tête.

On peut certes être sceptique face aux modus operandi de Trump. Ce n’est pas un homme politique classique. C’est le contraire de Talleyrand. Il n’est ni dissimulé ni calculateur. Il aime dire ce qui lui passe par la tête – ce qui lui vaut une réputation de sincérité dans l’électorat républicain américain, comme auprès de beaucoup de gens dans le monde.

Détestable est la manière dont il a reçu Zelensky le 28 février 2025 dans le Bureau ovale. Baroque est sa présentation d’un tableau avec des droits de douane nouveaux pour chaque pays du monde et sa manière de les négocier ensuite. Lassante est sa manière d’accabler de tous les maux ses prédécesseurs démocrates.

Mais il est clair que Trump a le mérite de proclamer haut et fort des vérités incontestables. Oui, il faut mettre un terme au massacre en Ukraine. Oui, la désindustrialisation des États-Unis est une réalité préoccupante. Oui, il est anormal que la Chine refuse de faire flotter sa monnaie. Oui, le Parti démocrate a été gangrené par le wokisme. Oui, il a raison de rappeler qu’il n’y a que deux sexes dans l’humanité.

Pour paraphraser Racine, Trump ne mérite pas, dans la sphère politique, ni cet excès d’honneur ni cette indignité. Il n’a peut-être pas la sagesse d’Eisenhower, mais il n’est pas non plus un coq sans tête.

Un gouvernant pragmatique

Qu’on le veuille ou non, il y a quand même une méthode Trump. Elle consiste, dans une discussion, diplomatique ou commerciale, à demander très gros, pour ensuite négocier. C’est ce qu’il vient de faire avec la Chine, dans le but de construire enfin une relation commerciale équilibrée.

Trump est un gouvernant pragmatique. Les circonstances qui évoluent ou les conseils qu’il reçoit peuvent le conduire à changer d’avis. Quel mal à cela ? Ceux qui le critiquent sont aussi ceux qui disent qu’il n’y a que les imbéciles qui ne changent jamais d’avis. L’important est qu’il n’ait pas pour le moment provoqué de désastre, ni économique ni géopolitique.

Nous, en Europe, nous avons des dirigeants qui sont à la fois instruits, réfléchis et mesurés. Mais, c’est bizarre, depuis vingt ans, nous ne faisons que prendre du retard sur l’Amérique. Sachons balayer devant notre porte et accepter que d’autres dirigeants puissent gouverner différemment que nous. Et, surtout, souvenons-nous qu’une politique ne se juge que dans la durée. Sur ses résultats, et non sur ses intentions.

 

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Dominique de Villepin dénonce l’arrogance du CRIF https://mondafrique.com/libre-opinion/dominique-de-villepin-denonce-larrogance-du-crif/ Tue, 08 Jul 2025 07:00:05 +0000 https://mondafrique.com/?p=136637 Dominique de Villepin a violemment critiqué le CRIF sur RMC le 4 juillet 2025, dénonçant son arrogance et son influence antirépublicaine après les attaques de Yonathan Arfi lors du dîner du CRIF. Il accuse l’association de se comporter comme un État dans l’État, menaçant la laïcité et la cohésion nationale. Le 3 juillet 2025, au très […]

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Dominique de Villepin a violemment critiqué le CRIF sur RMC le 4 juillet 2025, dénonçant son arrogance et son influence antirépublicaine après les attaques de Yonathan Arfi lors du dîner du CRIF. Il accuse l’association de se comporter comme un État dans l’État, menaçant la laïcité et la cohésion nationale.

Le 3 juillet 2025, au très chic Carrousel du Louvre, le Conseil Représentatif des Institutions Juives de France (CRIF) déroulait le tapis rouge pour son 39e dîner annuel, un événement où le Tout-Paris politique se presse pour prêter serment d’allégeance. Enfin, presque. Car Dominique de Villepin, lui, n’a pas eu besoin d’y poser un orteil pour faire trembler les dorures. Invité des Grandes Gueules sur RMC ce vendredi 4 juillet 2025 (voir vidéo en bas de l’article), l’ancien Premier ministre a dégainé une réplique qui restera dans les annales, visant directement le président du CRIF, Yonathan Arfi :

“Le CRIF devrait se rappeler qu’il n’est ni une institution d’État, ni un ministère des Affaires étrangères israélien. En France, on a encore le droit de critiquer un État, même Israël, sans être accusé d’antisémitisme. Le vrai danger, c’est cet amalgame systématique que vous faites entre juif et israélien, entre critique politique et haine raciale. Vous croyez défendre une communauté ? En réalité, vous la mettez en danger. Vous étouffez la liberté d’expression. Vous divisez le pays. La France n’est pas une extension du Likoud. Et vous n’êtes pas l’arbitre de ce qui peut être dit ou pensé ici”.

Boum. Un résumé qui claque comme un uppercut, et qui met en lumière l’arrogance d’une organisation qui, sous couvert de représenter la communauté juive française, se comporte comme un État dans l’État.

Un CRIF qui se rêve en censeur de la République

Reprenons. Lors de ce dîner, Yonathan Arfi, dans un élan de suffisance, a cru bon de qualifier de Villepin de “Mélenchon des beaux quartiers”. Une attaque mesquine, lancée devant un parterre de ministres et d’élus, qui n’a pas bronché – habitués, sans doute, à courber l’échine face à ce genre de sermon. Mais de Villepin, lui, n’a pas laissé passer. Sur RMC, il a démonté, avec la verve qu’on lui connaît, l’outrecuidance du CRIF. Car soyons sérieux : qui est ce CRIF pour se permettre de distribuer des bons et des mauvais points à des figures politiques de premier plan ? Une association, rappelons-le, qui prétend parler au nom de la communauté juive française – un sixième à peine de cette communauté, elle-même 1 % de la population hexagonale. Et pourtant, chaque année, c’est le même cirque : les politiques, de gauche comme de droite, se bousculent pour s’asseoir à la table du CRIF, comme si leur carrière en dépendait. Pathétique.uCe que de Villepin a pointé du doigt, c’est la confusion savamment orchestrée par le CRIF entre la politique israélienne, l’État d’Israël et la communauté juive française. Une équation toxique, qui nourrit l’amalgame et fragilise la lutte contre l’antisémitisme.

“Quand on préside une institution comme le CRIF, on a le devoir de respecter les principes républicains”,

a-t-il martelé. Et il a raison. En s’érigeant en gardien autoproclamé de la vérité, le CRIF prend le risque de diviser, de stigmatiser, et de réduire au silence ceux qui osent critiquer la politique de Netanyahu sans pour autant remettre en cause l’existence d’Israël ou la douleur de la communauté juive face au 7 octobre. Cette posture, c’est tout sauf républicain. C’est même un danger pour la cohésion nationale.

La laïcité à géométrie variable : où sont les catholiques ?

Et pendant ce temps, que voit-on ? Une République qui brandit la laïcité comme un étendard dès qu’il s’agit de pointer du doigt les musulmans ou de sermonner les catholiques, mais qui ferme les yeux quand le CRIF joue les petits chefs. Où est la cohérence ? Les catholiques, majoritaires en France, se voient régulièrement rappeler à l’ordre au nom de cette laïcité – un concept que certains soupçonnent de n’être qu’un faux nez pour la franc-maçonnerie et son agenda. Mais le CRIF, lui, peut se permettre de convoquer des ministres et de sermonner des anciens Premiers ministres sans que personne ne moufte. Deux poids, deux mesures. Et après, on s’étonne que la fracture sociale s’élargit.

Un CRIF qui falsifie et harcèle

Pire encore, de Villepin a rappelé un épisode sordide : les accusations mensongères portées contre lui par Arfi sur BFM, où il aurait soi-disant évoqué une “domination financière juive”. Des propos qu’il n’a jamais tenus, et pour lesquels l’Arcom a mis en demeure la chaîne, tandis que le conseil déontologique des journalistes a condamné cette manipulation. Mais Arfi, lui, n’a jamais présenté d’excuses. Au contraire, il persiste et signe, lançant ce que de Villepin qualifie de “chasse à l’homme” contre ceux qui osent penser différemment. Résultat ? L’ancien ministre, sa famille, ses enfants, reçoivent des menaces de mort quotidiennes. Voilà où mène l’arrogance du CRIF : à une polarisation dangereuse, à un climat de peur, et à une République qui vacille.

Pour une diplomatie française libre

Au-delà de cette passe d’armes, de Villepin a plaidé pour une diplomatie française qui retrouve son indépendance et son équilibre, loin des injonctions du CRIF ou des alignements atlantistes.

“La France doit être un bouclier pour tous ses citoyens”,

a-t-il insisté, rappelant l’urgence de défendre les otages français en Iran ou les prisonniers en Algérie. Mais pour cela, il faut cesser de plier face aux pressions, qu’elles viennent du CRIF ou d’ailleurs. La France, a-t-il conclu, doit redevenir une voix de la nuance, de la justice, et de l’humanisme républicain. Un message qui, espérons-le, résonnera au-delà des plateaux de RMC.

Le CRIF doit redescendre sur terre

Le CRIF peut bien se rêver en faiseur de rois, en arbitre des consciences républicaines, il n’en reste pas moins une association parmi d’autres. Sa légitimité ne dépasse pas celle que lui accordent ses membres – une fraction minuscule de la population française. Alors, qu’il cesse de se prendre pour le nombril de la République. Et que les politiques, pour une fois, aient le courage de lui rappeler qu’en France, la souveraineté appartient au peuple, pas à une poignée de convives réunis autour d’un dîner mondain.

*Source : Le Média 4-4-2

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Les Accords d’Abraham : les véritables perdants https://mondafrique.com/libre-opinion/les-accords-dabraham-les-veritables-perdants/ Sun, 06 Jul 2025 13:48:46 +0000 https://mondafrique.com/?p=136586 La totalité de la région est la seule perdante incontestable du jeu de dupes qui s’est joué au Moyen Orient.  Le Liban, déjà au bord de l’effondrement, s’est rapproché du précipice. La Syrie et l’Irak sont redevenus des terrains d’affrontements. Les régimes du Golfe, impatients de voir le Hezbollah affaibli, ont applaudi un incendie qu’ils […]

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La totalité de la région est la seule perdante incontestable du jeu de dupes qui s’est joué au Moyen Orient. 

Le Liban, déjà au bord de l’effondrement, s’est rapproché du précipice. La Syrie et l’Irak sont redevenus des terrains d’affrontements. Les régimes du Golfe, impatients de voir le Hezbollah affaibli, ont applaudi un incendie qu’ils devront peut-être bientôt éteindre chez eux.

Les Accords d’Abraham, présentés comme l’architecture d’un nouveau Moyen-Orient, se sont révélés creux sous les bombes. Aucune nouvelle alliance. Aucune stabilité. Rien qu’un morcellement régional toujours plus profond.

Quant au Hezbollah, il a observé, appris, et s’adapte. Loin d’être acculé, il se prépare — convaincu que la prochaine guerre, comme la précédente, exposera davantage les limites d’Israël que sa force.
« Quand la victoire se résume à la survie, chacun gagne. »
Mais dans une région avide de changement réel — paix, dignité, souveraineté — c’est là la plus tragique des illusions.

Et maintenant ?
Ce qui vient n’est pas la paix — c’est la préparation d’autres conflits.
L’Iran et le Hezbollah se réarment, se réorganisent, se réalignent.
Israël révise sa doctrine.
Trump reconditionne ses contradictions, tentant d’incarner à la fois le chef de guerre et le pacificateur.
Mais les tensions fondamentales demeurent : l’Iran ne se désarmera pas, Israël ne reculera pas, et les États-Unis ne retrouveront aucune crédibilité stratégique tant qu’ils sous-traitent leur politique moyen-orientale à Netanyahou.
La prochaine guerre n’éclatera peut-être pas demain — mais sa charpente est déjà dressée. Et lorsqu’elle arrivera, aucun discours, aucune frappe, aucun slogan de campagne ne masquera la vérité :
Ce n’était pas une victoire. C’était un avertissement.

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L’art touareg, un outil diplomatique des juntes du Sahel https://mondafrique.com/libre-opinion/sahel-lart-touareg-un-outil-diplomatique-des-juntes-militaires/ Fri, 04 Jul 2025 20:10:00 +0000 https://mondafrique.com/?p=136482 Lors de sa récente visite à Moscou, le président de la transition malienne, Assimi Goïta, a offert un sabre touareg au président russe Vladimir Poutine, en déclarant que cet objet symbolique lui permettrait de « neutraliser tous ses ennemis ». Quelques semaines plus tôt, le Premier ministre nigérien issu de la junte militaire, Lamine Zeine, offrait quant […]

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Lors de sa récente visite à Moscou, le président de la transition malienne, Assimi Goïta, a offert un sabre touareg au président russe Vladimir Poutine, en déclarant que cet objet symbolique lui permettrait de « neutraliser tous ses ennemis ». Quelques semaines plus tôt, le Premier ministre nigérien issu de la junte militaire, Lamine Zeine, offrait quant à lui un tableau d’art touareg au président rwandais Paul Kagame, tableau orné de la croix d’Agadez, emblème identitaire fort du peuple touareg.

Une chronique de Mohamed Ag Ahmedou

Ces gestes, hautement symboliques, pourraient être vus comme des marques de diplomatie culturelle. Mais dans le contexte actuel, ils révèlent surtout une profonde contradiction – voire une instrumentalisation cynique d’un patrimoine culturel millénaire – par des régimes qui, dans le même temps, répriment durement les communautés qui en sont les dépositaires.

Une reconnaissance de façade

L’art touareg, riche, raffiné, et porteur d’un imaginaire de liberté, est devenu un outil diplomatique pour les régimes militaires de Bamako et Niamey. Offrir un sabre ou un tableau à des chefs d’État étrangers, c’est vouloir incarner une Afrique fière de ses traditions. Mais cette mise en scène masque une réalité brutale : ces mêmes autorités, qui valorisent l’esthétique touarègue à l’international, n’hésitent pas à marginaliser, stigmatiser, voire persécuter les populations touarègues sur leur propre sol.

Au Mali, le pouvoir d’Assimi Goïta mène depuis des mois une campagne militaire féroce dans la région de l’Azawad. Sous prétexte de lutte contre le terrorisme, des villages entiers sont bombardés par des drones, et des civils touaregs sont pris pour cibles dans ce qui ressemble de plus en plus à une expédition punitive. Des mercenaires russes du groupe Wagner – désormais rebaptisé AFRICA CORPS – sont accusés de participer à ces opérations, semant la terreur et la désolation.

Cette répression vise principalement les régions à majorité touarègue, comme Kidal, Ménaka ou Tessalit, considérées par le régime comme des foyers de rébellion. Mais ce sont les civils, les nomades, les enfants et les anciens qui en paient le prix fort. Et pendant ce temps, à des milliers de kilomètres de là, un sabre touareg est offert en grande pompe au Kremlin, comme symbole d’honneur et de puissance.

Une marginalisation persistante au Niger

Au Niger, la situation n’est guère meilleure. La junte militaire au pouvoir depuis le renversement du président Bazoum maintient une centralisation autoritaire à Niamey, sans réel dialogue avec les régions sahariennes. Le geste du Premier ministre Lamine Zeine à Kigali, en offrant une œuvre touarègue, contraste avec l’absence de reconnaissance politique, économique et culturelle des Touaregs dans les sphères nationales. Leur présence dans les institutions est marginale, et leur voix, souvent étouffée.

L’art comme alibi politique

Ces gestes de diplomatie culturelle pourraient être porteurs d’unité et de respect. Mais lorsqu’ils sont déconnectés d’une volonté sincère d’inclusion et de justice, ils deviennent de simples outils de propagande. Ils servent à vernir une image internationale tout en consolidant un pouvoir autoritaire, ethnocentré, et souvent violent.

Si les juntes militaires du Mali et du Niger aiment l’art touareg, elles doivent aussi aimer les Touaregs. Elles doivent reconnaître leur droit à vivre en paix, à exister politiquement, et à participer pleinement à la vie de leur nation. Sinon, ces sabres, ces tableaux, et ces symboles ne seront que des trophées creux, offerts sur les cadavres d’une culture qu’on admire, mais qu’on refuse de respecter.

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Glazer: « Les Africains sont les vrais patrons de l’Afrique ! » https://mondafrique.com/libre-opinion/les-dirigeants-africains-sont-les-vrais-patrons-de-lafrique/ Fri, 04 Jul 2025 01:45:00 +0000 http://www.mondafrique.info/?p=2884 S’il y a bien un journaliste français qui connaît l’Afrique comme sa poche, c’est Antoine Glaser ! Rédacteur en chef pendant trente ans de la revue de référence « la Lettre du Continent », il a longtemps démêlé et analysé les « réseaux » d’influence de la France en Afrique. Dans un nouvel essai au […]

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S’il y a bien un journaliste français qui connaît l’Afrique comme sa poche, c’est Antoine Glaser ! Rédacteur en chef pendant trente ans de la revue de référence « la Lettre du Continent », il a longtemps démêlé et analysé les « réseaux » d’influence de la France en Afrique. Dans un nouvel essai au titre audacieux, « AfricaFrance » (Fayard), il revenait en 2014 pour expliquer comment le rapport de force s’est inversé, faisant de la France l’obligée des dirigeants africains passés maîtres du jeu.

Son propos face à Mondafrique que nous reproduisons est toujours d’actualité

Mondafrique : Dans un de vos livres vous décrivez la vision d’une Afrique soumise à la France comme un « leurre », véhiculé en grande partie par la notion de « Françafrique ». Pouvez-vous expliquer ?

Antoine Glaser : Les réseaux d’influence français en Afrique ont bel et bien existé. Mais c’est l’idée selon laquelle les dirigeants africains seraient de simples marionnettes aux mains de la France qui est erronée. Pendant la Guerre froide, la métropole cooptait les dirigeants africains. Une fois au pouvoir, ces derniers donnaient à Paris la priorité pour l’exploitation des matières premières présentes sur leur territoire, à un prix politique, en échange de leur impunité et de leur maintien au sommet de l’Etat. Les dirigeants français acceptaient alors toutes leurs turpitudes et fermaient les yeux sur les revendications de l’opposition. Le monde occidental voyait d’un œil bienveillant la main mise de la France sur son pré carré africain qui empêchait que les matières stratégiques ne tombent pas aux mains de l’URSS. Déjà pourtant à cette époque, plusieurs signes laissent voir que ce rapport de force n’est pas à sens unique. Au fur et à mesure, c’est avant tout un système d’échange de services qui se met en place entre l’ancienne puissance coloniale et sa « chasse gardée ». Longtemps, les caisses du parti gaulliste dépendaient largement des financements africains. Même chose pour les « Monsieur Afrique » des grandes entreprises françaises comme Elf dont l’enrichissement personnel et le maintien à des postes d’influence étaient indexés au bon vouloir des dirigeants africains. Prétextant régulièrement la « raison d’Etat », les responsables français ont de moins en moins touché au pouvoir des présidents africains. Peu à peu, l’ancien président du Congo, Omar Bongo, et l’ancien président ivoirien Felix Houphouët-Boigny sont ainsi devenus à bien des égards, les principaux sculpteurs de la politique africaine de la France. Pour preuve, à la moindre difficulté dans un pays voisin du Congo, la France faisait appel à Bongo qui décrochait sont téléphone, distribuait des mallettes pour calmer les véléités des opposants politiques etc. En échange, la France le laissait piquer dans la caisse et lui assurait le fauteuil présidentiel. Le rapport du « faible » au « fort » n’est donc pas forcément celui qu’on croit.

D’ailleurs, à partir de 1989, ce supposé rapport de soumission de l’Afrique à la France postcoloniale fléchit encore davantage. Des puissances émergentes comme la Chine ou l’Inde mais aussi certains pays européens qui soutenaient jusqu’alors Paris dans le maintien de son quasi monopole ont fait leur entrée sur le continent, concurrençant la France sur des marchés qu’elle dominait à 50 ou 60%. Mais ces quinze dernières années, marquées en plus l’arrivée de la crise économique, on assiste à un vrai renversement dans les relations de pouvoir entre la France et l’Afrique. Les dirigeants africains sont dans une position de maitrise et d’indépendance totale vis-à-vis de l’ancienne puissance coloniale. D’autant qu’ils ont désormais le monde entier dans leur salle d’attente.

Mondafrique : Comment cela se traduit-il concrètement dans les rapports diplomatiques entre Paris et ses anciennes colonies africaines ?

A.G. : Aujourd’hui la France est devenue l’obligée de plusieurs chefs d’Etat africains auxquels elle semble avoir fait allégeance. Le président du Tchad, Idriss Déby, est un bon exemple. A la fin des années 1980, il est devenu le protégé de Paris contre son adversaire Hissène Habré accusé d’être devenu l’allié des américains en autorisant l’implantation d’opposants au colonel Kadhafi dans le sud du pays. Une manœuvre qui contrevenait aux accords secrets passés à l’époque entre Mitterrand et « le Guide ». Véritable chouchou de l’armée française placé au sommet de l’Etat en 1990 par la DGSE, Déby s’est rendu depuis, aussi indispensable qu’intouchable. En menaçant Paris à plusieurs reprises de fermer la base militaire française de N’Djamena, il a pu se maintenir au pouvoir et faire disparaître son principale opposant Ibni Oumar Mahamat Saleh en février 2008 sans recevoir de critiques. Les militaires français ont par ailleurs largement bénéficié du soutien de l’armée tchadienne pendant la guerre au Mali, notamment dans le massif des Ifoghas, au nord. Difficile, dans ces conditions, de reprocher au président tchadien de s’être comporté en véritable « pompier pyromane » dans la région. Après avoir soutenu l’arrivée de François Bozizé au pouvoir en Centrafrique en 2003, et l’avoir fait chuter en 2013, le « faiseur de roi » tchadien est devenu un appui de taille pour Michel Djotodia, l’ancien chef des rebelles de la Séléka qui a récemment mis le feu aux poudres dans le pays. Côté français, silence dans les rangs. Et pour cause. Si l’armée souhaite lancer une intervention au sud de la Libye, elle aura besoin des militaires tchadiens. Bien équipés, ce sont pour la plupart d’anciens rebelles du nord réputés pour être d’excellents combattants. Avec l’argent du pétrole, l’armée de Déby ne cesse de se renforcer. Elle s’est notamment récemment dotée de deux hélicoptères biélorusses et de missiles Milan. Un allié décidément incontournable dans la lutte contre le terrorisme au Sahel, que la France n’a pas intérêt à se mettre à dos.

Dans la zone saharo-sahélienne justement, les chefs d’Etats africains se sont rendus incontournables sur un autre dossier : la libération des otages français. La famille Moulin-Fournier et le père Georges Vandenbeusch, détenus au Nigéria jusqu’en avril et décembre 2013, ont été relâchés avec l’entremise du président camerounais Paul Biya. Il a pour cela fait libérer des détenus de droits commun condamnés pour de petits trafics d’armes et mobilisé des chefs religieux pour jouer les intermédiaires. Les présidents nigérien et burkinabé Mahamadou Issoufou et Blaise Compraoré ont quant à eux été à la manœuvre pour la libération des otages français d’Arlit, au nord du Niger, en octobre 2013.

Enfin, sur le plan diplomatique, la France a toujours eu besoin de s’assurer les voix de ses « satellites » africains dans les différents organes internationaux. Elle y a d’ailleurs toujours disposé d’un bloc de 14 ou 15 pays africains votant en sa faveur comme un seul homme. Sans ces voix, la France n’aurait jamais pu obtenir l’autorisation de poursuivre ses essais nucléaires dans le pacifique contre l’avis de la Nouvelle Zélande ni de conduire la guerre d’Algérie contre l’avis des Etats-Unis. Paris mobilise aussi ces Etats pour faire voter les résolutions qu’elle souhaite voir adopter. On l’oublie souvent mais lors des débats sur le lancement de la guerre en Irak une bagarre intense a eu lieu entre Condolezza Rice et Dominique de Villepin pour convaincre l’Angola et le Cameroun de s’allier à leur cause. Encore plus fort, les dirigeants du pré carré français se sont mobilisés pour voter en bloc en faveur de la nomination de Boutros Boutros-Ghali contre l’avis des américains à la tête du secrétariat des nations unies en 1992. A l’époque, c’est l’ancien président ivoirien Houphouët-Boigny lui-même qui, depuis le bureau de Roland Dumas au Quai d’Orsay, a appelé personnellement tous ses homologues pour les enjoindre de voter pour le candidat de Paris. Même scénario pour l’élection de Christine Lagarde à la tête du FMI en 2011. Difficile dans ces conditions de demander des comptes aux dirigeants des ces pays sur la gestion de leurs finances publiques… Cette exception française ne laisse pas d’intriguer les pays qui briguent aujourd’hui un siège permanent au sein d’un Conseil de sécurité élargi. A l’ambassade du Japon en France, les experts africanistes planchent sur les réseaux français en Afrique dans l’espoir de s’assurer un jour, eux aussi, un bloc d’influence permettant d’accéder à la plus haute instance de l’ONU. Il s’agit aussi bien entendu pour Tokyo de riposter contre l’influence grandissante de la Chine en Afrique.

Mondafrique : Par quels moyens les chefs d’Etat africains exercent-ils leur influence directement sur le monde politique français ?

A.G. : En France, il existe des lobbies africains classiques à l’américaine. Mais surtout, de plus en plus de diplomates, hauts fonctionnaires et militaires à la retraite se mettent aujourd’hui au service des chefs d’Etat africains. Un épisode récent que je décris dans mon livre est très révélateur de ce nouveau phénomène de « pantouflage », c’est-à-dire de passage dans le privé. En janvier 2012, l’ancienne métropole se met en branle et organise une véritable cérémonie d’allégeance en l’honneur du tout nouveau président ivoirien Alassane Ouattara en visite d’Etat à Paris. Dans les salons de l’ambassade ivoirienne, il décore de l’ordre national de la Cote d’Ivoire les conseillers diplomatiques de l’Elysée, plusieurs anciens ambassadeurs à Abidjan et tous les responsables du dossier Côté d’Ivoire au Quai d’Orsay. L’ancien ambassadeur Jean-Marc Simon est de la partie. Quelques semaines plus tard, il devient conseiller de Ouattara. Même récompense pour l’ancien directeur de la coopération de sécurité et défense au Quai d’Orsay, engagé dans l’opération Licorne en Côte d’Ivoire, le général Bruno Clément Bollée. A titre privé, il est nommé fin décembre 2013, conseiller du président et chargé de la restructuration de l’armée ivoirienne. De même au Cameroun, le général Emmanuel Beth, ex-commandant de la force Licorne et ambassadeur de la France à Ouagadougou en 2010 est devenu le « Monsieur Afrique » d’un cabinet de lobbying et d’intelligence stratégique très en cours auprès de la présidence : ESL network France. Le palais d’Etoudi, où siège Paul Biya, est aujourd’hui « sous contrat d’accompagnement stratégique » avec ESL holding. Une vraie revanche pour ces présidents africains devenus les vrais patrons !

Mondafrique. Aujourd’hui, à part la France, aucune puissance occidentale ne possède de bases militaires sur le continent africain, à part à Djibouti. N’est-ce pas là encore le signe d’une permanence de la puissance française en Afrique ?

A.G. : Il est vrai que cela reste une exception. Les installations militaires allemandes ou américaines à Djibouti sont d’ailleurs avant tout tournées vers le Moyen-Orient, et non vers l’Afrique. Mais finalement pour la France, le besoin de maintenir des bases militaires en Afrique n’est-il pas aussi une marque de dépendance ? A l’évidence, ces installations ne servent pas qu’à garantir la protection des ressortissants français. En Centrafrique par exemple, on compte 600 binationaux pour 1600 soldats présents sur place. Donc, justifier le maintien d’une base militaire à proximité pour cette raison n’a pas de sens. En réalité, cette présence permet à la France de préserver ses intérêts économiques et stratégiques sur le continent et, en prime, de se maintenir au Conseil de sécurité de l’ONU. Forts de cette dépendance de l’ancienne métropole à leur égard, les dirigeants africains peuvent tirer beaucoup de ficelles et faire fléchir les dirigeants français sur plusieurs dossiers…

Nombre d’entre eux mènent déjà les français par le bout du nez. Aucun doute, le vrai patron dans la tour Elf et dans la tour Bolloré à Paris, c’est bien le président congolais Denis Sassou Nguesso. Dans mon livre, je décris d’ailleurs comment, lors de sa visite officielle à Brazzaville en mars 2009 Nicolas Sarkozy lance aux opposants congolais : « Total me dit : c’est Sassou. Bolloré me dit : c’est Sassou. Vous voulez que cela change. Soyez intelligents. Vous n’avez qu’à vous organiser ! » Honnêtement… qui maraboute qui ? Dans un environnement mondialisé, les dirigeants africains sont plus que jamais les maitres des relations entre la France et ses anciennes colonies. L’ex métropole a davantage besoin d’eux qu’ils n’ont besoin d’elle.

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Le risque de contamination radioactive au Moyen Orient https://mondafrique.com/libre-opinion/le-risque-de-contamination-radioactive-au-moyen-orient/ Thu, 26 Jun 2025 08:36:43 +0000 https://mondafrique.com/?p=136155  La stratégie militaire adoptée par les États-Unis et Israël, c’est-à-dire le ciblage des infrastructures nucléaires iraniennes soulève d’importantes préoccupations pour la sécurité environnementale et nucléaire des pays du Golfe. Bien que les frappes menées sur les sites de Natanz, Ispahan et Fordow n’aient, selon l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), entraîné aucune fuite radioactive, la […]

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 La stratégie militaire adoptée par les États-Unis et Israël, c’est-à-dire le ciblage des infrastructures nucléaires iraniennes soulève d’importantes préoccupations pour la sécurité environnementale et nucléaire des pays du Golfe.

Bien que les frappes menées sur les sites de Natanz, Ispahan et Fordow n’aient, selon l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), entraîné aucune fuite radioactive, la possibilité d’une nouvelle escalade militaire entre les deux pays pourrait mener au ciblage de sites nucléaires plus sensibles, tels que la centrale nucléaire de Bouchehr.

Située sur le Golfe Persique, la centrale de Bouchehr abrite plusieurs milliers de tonnes de matériaux nucléaires. Une attaque directe pourrait entraîner une fuite radioactive, affectant à la fois l’air et les eaux de la région. Même une frappe indirecte, visant les lignes électriques alimentant le réacteur, pourrait provoquer une importante contamination radioactive. Un tel scénario aurait des implications dramatiques pour les États de la région : en cas de pollution radioactive des eaux du Golfe, des pays tels que le Qatar, le Koweït et Bahreïn se retrouveraient privés d’eau potable en moins de 72 heures, dans la mesure où leur approvisionnement en eau repose quasiment uniquement sur des installations de dessalement utilisant l’eau du Golfe.

Par ailleurs, les risques environnementaux ne se limitent pas aux infrastructures nucléaires. Une frappe sur les terminaux pétroliers iraniens, notamment l’île de Kharg – située dans le Golfe et par laquelle transite environ 90 % des exportations de pétrole iranien – pourrait également contaminer les eaux. Une telle action risquerait de provoquer une riposte de l’Iran visant les infrastructures pétrolières du Golfe exploitées par les États-Unis ou des entreprises énergétiques internationales.

Dans un scénario extrême, bien que moins probable, ces tensions pourraient culminer par une fermeture temporaire ou prolongée du détroit d’Ormuz, principal point de passage stratégique pour le commerce mondial d’hydrocarbures. Un tel développement aurait des répercussions majeures sur la stabilité énergétique et sécuritaire de la région, et au-delà, sur l’économie mondiale.

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Une compétition internationale pour conquérir les ports africains https://mondafrique.com/libre-opinion/une-competition-internationale-pour-conquerir-les-ports-africains/ Mon, 23 Jun 2025 21:14:27 +0000 https://mondafrique.com/?p=136042  Le continent africain, continent de la terre, est aussi un espace entouré d’une mer et de deux océans, chauds. Immenses ouvertures maritimes, libres de toute contrainte climatique, pour son commerce, mais aussi immenses zones où se joue sa sécurité. Un article paru dans « La Tribune » et signé par Gérard Vespierre, Diplômé de L’ISC Paris, Maîtrise […]

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 Le continent africain, continent de la terre, est aussi un espace entouré d’une mer et de deux océans, chauds. Immenses ouvertures maritimes, libres de toute contrainte climatique, pour son commerce, mais aussi immenses zones où se joue sa sécurité.

Un article paru dans « La Tribune » et signé par Gérard Vespierre, Diplômé de L’ISC Paris, Maîtrise de Gestion et DEA de finances Université Dauphine PSL, analyste géopolitique, fondateur du média web Le Monde Décrypté www.le-monde-decrypte.com chroniqueur géopolitique IFDM 98.0, chercheur associé à la FEMO

Continent de 30 millions de kilomètres carrés, l’Afrique représente pratiquement deux fois la superficie du plus grand pays du monde, la Russie, mais, cerné par une mer, la Méditerranée, et deux océans, Atlantique et Indien. A l’opposé de l’empire russe, ce continent doit absolument entretenir une relation privilégiée avec la mer. Or cette vision géopolitique d’une Afrique maritime n’est nullement une vision dominante. Il convient donc de la rappeler et de la renforcer.

Le triple rôle de l’espace portuaire

 
Sur les 54 États structurant le continent, 38 soit un peu plus des deux-tiers, possèdent une façade maritime. Les 16 autres, démunis de débouché marin, créent donc une pression et une responsabilité sur les 38 ‘maritimes’ pour assurer le transit de leur commerce.

Ils assurent, en premier lieu, les flux d’importation et d’exportation pour son milliard et demi d’habitants, en 2024, mais doivent aussi se préparer à assumer la responsabilité du flux des besoins des deux milliards et demi projetés pour 2050.

En dehors de cette responsabilité de flux, les ports africains doivent naturellement assurer la réception, la transformation, et l’expédition des ressources halieutiques. La production annuelle de poissons dans les eaux des seuls pays côtiers de l’Afrique de l’Ouest est estimée à plus de 1,6 million de tonnes, et représente une valeur commerciale d’environ deux milliards d’euros.

Enfin, le troisième volet, plus récent, consiste pour les plateformes portuaires à organiser des hubs de développement industriel, à leur périphérie. Cette fonction nouvelle joue un rôle particulièrement important dans le développement économique des pays concernés, avec les bassins d’emploi associés.

Cette triple responsabilité, associée à l’importance de la géographie humaine du continent, et aux ressources du sous-sol, créent une attraction géopolitique mondiale vers ses ports, et particulièrement ceux de l’Afrique de l’ouest

Une compétition internationale

Le CESA, Centre d’Etudes Stratégiques de l’Afrique, estime que la Chine, à travers ses entreprises d’État, est impliquée dans 78 ports africains en tant que bailleurs de fonds, constructeurs ou opérateurs, soit 33% de l’ensemble des infrastructures portuaires du continent. Pratiquement la moitié ont déjà accueilli des escales ou des exercices militaires des forces navales de l’armée chinoise. Pékin a développé un plan stratégique visant à dynamiser les flux ente les produits chinois, et les matières premières africaines. La présence chinoise dans le secteur portuaire en africain est sans équivalent, ailleurs dans le monde.

Un autre acteur stratégique s’est impliqué depuis une vingtaine d’années : Les Émirats arabes unis. Leur principal opérateur, DP World, est aujourd’hui un acteur majeur. Le port de Ndayane, au Sénégal, en cours de développement par ce groupe, représente un projet de 1,2 milliard de dollars sur deux phases. Les EAU encourage également de nouveaux entrants sur le continent, comme Abu Dhabi Ports, très présent en Afrique de l’Est, leur zone d’influence naturelle, où ils rivalisent avec la Chine.

Le retrait relatif de la France

La France connaît un déclin dans le domaine portuaire et logistique en Afrique. La cession des actifs africains du groupe Bolloré Africa Logistics au groupe italo-suisse MSC en 2022 en est un exemple. Il a concerné principalement, la cession de 16 terminaux portuaires et de plusieurs entrepôts stratégiques.

Mais notre pays conserve néanmoins des atouts. Le géant mondial du transport maritime, CMA-CGM, reste un acteur prépondérant. Le groupe est très actif au Nigéria ainsi qu’au Cameroun, où il contrôle le port en eau profonde de Kribbi. On doit également citer le groupe Meridiam qui a inauguré en 2022, aux côtés du groupe Arise (Singapour), le nouveau terminal de conteneurs de Nouakchott. Ce terminal se positionne comme la porte d’entrée de la Mauritanie, mais aussi du Mali.

Ces choix, d’investissement ou de cession, reflètent les décisions stratégiques des entreprises, qui prennent naturellement en considération touts les aspects de risques.

Dangers maritimes et sécurité renforcée

Visibles et médiatisés, les actes de piratage sont les plus connus. Cependant, d’autres problèmes, comme le narcotrafic, les filières d’immigration illégales, ou la pêche illicite (manque à gagner de plusieurs milliards d’euros par an) et le trafic d’armes, posent de réels défis. Ces trafics financent et alimentent directement le chaos sécuritaire du Sahel, qui tend par ailleurs à métastaser vers le golfe de Guinée.p

Dès 2013 les organismes représentants l’Afrique de l’ouest, l’Afrique centrale, et la commission du Golfe de Guinée ont établi les bases d’une stratégie régionale commune, couvrant l’espace maritime du golfe de Guinée, connue sous l’appellation ‘Architecture de Yaoundé’. Le commandement pour l’Atlantique de la Marine Nationale participe à la sécurité de la région, en partenariat avec les États riverains, par le biais de l’opération Corymbe.

Il faut ajouter les menaces nouvelles des cyberattaques, dont l’augmentation représente un risque sans précédent pour les ports et les infrastructures critiques du continent. Parmi les nombreux projets de protection, on peut citer ‘Safe Seas for Africa’ financé par l’Union européenne, et mis en œuvre par plusieurs organismes internationaux (ONUDC, UNITAR-ISMI et l’OMI) visant à bâtir une cyber résilience, régionale, durable.

Ces menaces et risques conduisent, autorités portuaires, investisseurs, et utilisateurs, à élaborer des exigences de nature nouvelle dans le développement des infrastructures portuaires africaines, en particulier en Afrique de l’ouest.

Impérieuse nécessité de modernisation

D’Abidjan à Kribi, en passant par Lomé, Cotonou ou Douala, les plateformes portuaires se modernisent, s’automatisent. Il s’y ajoute désormais une sécurisation considérée comme une composante structurante de l’activité, et non plus comme une simple addition de systèmes.

Le port de Douala (PAD) qui assume à lui tout seul plus de 70% des échanges commerciaux du Tchad et de la Centrafrique, est désormais sécurisé, via l’action de partenaires locaux  telle que l’entreprise camerounaise PortSec SA. Les installations comprennent des systèmes de surveillances multiples, caméras, radars de navigation longue portée, et contrôles d’accès biométriques.

Afin de gérer les flux transitant par le corridor Douala-Bangui-N’Djamena, le PAD a mis en place une sécurisation globale incluant des escortes ponctuelles de convois. Les investissements engagés (près de 210 millions d’euros) et les process sécuritaires, attirent de plus en plus d’investisseurs à Douala. Le groupe Arise IIP doit y investir 350 millions d’euros pour la construction d’une zone industrielle dont l’activité profitera également à l’arrière-pays.

Le port de Cotonou, principale plateforme logistique du Bénin, est également au cœur d’un ambitieux programme de modernisation, doté de plus de 685 millions d’euros. Ces investissements concernent l’agrandissement du terminal de conteneurs, ainsi que l’installation de nouvelles grues permettant de réduire le temps d’attente. S’y ajoutent, la construction d’un terminal vraquier de 20 hectares et la création d’une zone logistique de 40 hectares.

Des milliers d’emplois indirects et induits seront créés, notamment dans les secteurs du transport, de la logistique et des services connexes. Ces aménagements permettront de porter la capacité annuelle du port de 12 à 20 millions de tonnes. Le Bénin améliorera ainsi sa compétitivité en tant que plateforme logistique régionale.

Les enjeux de développement économiques de l’Afrique, l’attrait de ses ressources minières, et les rivalités géopolitiques des puissances extérieures, conduisent à une mise en valeur accélérée des installations portuaires du continent. Ce processus est indispensable pour aider à résoudre les problèmes de niveau de vie de ses habitants, et apporter ainsi une forme de réponse aux déstabilisations intérieures. La mobilisation des grandes puissances géopolitiques du monde pourrait alors aboutir à un résultat très positif.

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Venance Konan voudrait juste comprendre la guerre en Iran https://mondafrique.com/libre-opinion/venance-konan-voudrait-juste-comprendre-la-guerre-en-iran/ Sun, 22 Jun 2025 21:41:59 +0000 https://mondafrique.com/?p=135961 Notre chroniqueur et écrivain, Venance Konan, qui vit à Abidjan, ne comprend pas les buts de guerre de l’armée israélienne et de son allié américain en Iran Dites-moi, Monsieur, vous qui savez tant de choses. Qui a le droit de fabriquer et de posséder la bombe atomique ? Vu ce à quoi ça sert, c’est-à-dire à […]

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Notre chroniqueur et écrivain, Venance Konan, qui vit à Abidjan, ne comprend pas les buts de guerre de l’armée israélienne et de son allié américain en Iran

  • Dites-moi, Monsieur, vous qui savez tant de choses. Qui a le droit de fabriquer et de posséder la bombe atomique ?
  • Vu ce à quoi ça sert, c’est-à-dire à détruire en masse, et peut-être même toute l’humanité si celles qui existent déjà étaient toutes utilisées, personne ne devrait avoir le droit d’en fabriquer.
  • Oui, mais il n’empêche que les Etats Unis, la France, le Royaume Uni, la Chine, la Russie, l’Inde, le Pakistan, Israël, la Corée du nord en possèdent.
  • C’est parce qu’ils ont la capacité d’en fabriquer et se sont donnés le droit de le faire.
  • Alors, pourquoi ce droit est-il refusé à l’Iran qui dit avoir aussi la capacité d’en fabriquer ?
  • C’est parce que les dirigeants de ce pays ont de longues barbes, entrent en transe dès qu’ils voient un bout de cheveux de femme, je parle bien des poils qui sont sur la tête et non ailleurs, pendent à tour de bras tous ceux qui sont contre leur régime, et surtout, ils disent que leur bombe atomique, c’est pour détruire Israël. Vous conviendrez avec moi que cela ne se fait pas. Vous pouvez chercher à détruire, je ne sais pas moi, par exemple le Togo, le Lesotho, des pays qui ne servent à rien et dont personne aux Etats Unis ou en Europe n’a entendu parler, ou bien, tiens, les Palestiniens par exemple. Oui, à quoi ça sert, un Palestinien, si ce n’est empêcher Israël de s’agrandir pour accomplir le dessein de Dieu ? Mais vouloir détruire Israël, la pointe avancée de la civilisation occidentale dans ce monde barbare du Moyen-Orient, mon Dieu, quelle folie !
  • Vous avez raison. Mais est-ce que le président d’un pays qui n’est pas en guerre contre un autre peut décider d’aller tuer le président de ce pays ?
  • Dans le monde civilisé, en principe non. Mais comme je vous l’ai dit, il s’agit ici d’un pays barbare dont les dirigeants portent de longues barbes, pendent leurs concitoyens à bout de potences dressées dans les rues, font la chasse aux homosexuels et ne supportent pas de voir un bout de cheveux déborder du tchador.
  • Mais il y a dans cette région beaucoup de barbus qui n’aiment ni les femmes, ni les homosexuels, pendent beaucoup ou coupent des têtes, qui découpent même parfois des journalistes par petits morceaux avant de les dissoudre dans de l’acide, et personne ne parle de les tuer. Et les civilisés vont même leur faire la bise.
  • Oui, mais eux, ils ont l’intelligence de ne pas appeler l’oncle Sam « grand Satan » et Israël et les autres pays occidentaux « petits Satan. » Mais surtout, ils ont le chic d’acheter beaucoup de choses, pas forcément utiles, à l’Occident, d’y investir tous leurs revenus, en achetant des clubs de football par exemple, et même d’offrir un avion au chef du pays que l’autre appelle « grand Satan ». Vous savez, une amitié, ça s’entretient. Et ils ne disent aucun mal d’Israël.
  • Je vous comprends. Effectivement il faut savoir à qui donner des cadeaux. Construire des mosquées en Afrique, c’est bien, mais acheter des Rafale en rafale, c’est plus utile. Mais, et c’est ma dernière question, qu’est-ce qu’une guerre préventive ? Est-elle reconnue par le droit international ?
  • Euh, voyez-vous, il y a le droit international, et le droit d’Israël. Ce sont deux choses différentes qu’il ne faut jamais confondre. Le droit international permet ou interdit ceci ou cela. Le droit d’Israël par contre, lui permet de s’autoriser tout. Notamment de frapper qui il veut. Comme Israël part du principe que tous ses voisins ne l’aiment pas beaucoup, ce qui n’est pas totalement faux, ce pays se dit donc techniquement en guerre contre tous ces voisins-là et même des pays plus éloignés. En tout cas tous ceux qui proclament qu’ils ne l’aiment pas. Alors, puisqu’il est en guerre, il se donne le droit de frapper le premier tous ceux qui peuvent le menacer. Ou pas. Comme la Syrie par exemple. Les tirs contre ce pays, c’est pour éviter que quelqu’un là-bas n’ait envie d’avoir envie de protester contre l’occupation d’une partie du territoire syrien. Laquelle occupation est juste pour prévenir que quelqu’un n’ait une mauvaise envie. Oui, dans cette histoire, avoir de mauvaises idées peut exposer à une guerre préventive. C’est clair ?
  • Oui, très clair. Et je comprends qu’Israël cherche à raser la barbe des dirigeants iraniens et que les Etats Unis fournissent la mousse à raser.

 

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Le Moyen Orient entre chute des Mollahs et chaos régional https://mondafrique.com/libre-opinion/israel-iran-entre-chute-des-mollahs-et-chaos-international/ Wed, 18 Jun 2025 06:00:00 +0000 https://mondafrique.com/?p=135717 Alors qu’Israël frappe pour la première fois en profondeur les infrastructures nucléaires iraniennes, le Moyen-Orient vacille entre basculement historique et chaos annoncé. Chute du régime ou guerre régionale ? L’opération de 2025 ouvre un nouveau chapitre explosif dans l’équation stratégique israélo-iranienne. Vendredi 13 juin 2025. Une date qui risque de s’ajouter à la liste fatidique […]

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Alors qu’Israël frappe pour la première fois en profondeur les infrastructures nucléaires iraniennes, le Moyen-Orient vacille entre basculement historique et chaos annoncé. Chute du régime ou guerre régionale ? L’opération de 2025 ouvre un nouveau chapitre explosif dans l’équation stratégique israélo-iranienne.

Vendredi 13 juin 2025. Une date qui risque de s’ajouter à la liste fatidique des années charnières du Moyen-Orient. Comme 1956, 1967 ou 1973, cette journée restera peut-être comme celle où l’équilibre régional a basculé. Pour la première fois, Israël a mené une frappe à grande échelle contre les infrastructures nucléaires iraniennes. Mais au-delà de l’effet militaire immédiat, une question domine tous les débats géostratégiques : cette frappe marquera-t-elle le début de la fin du régime iranien ou, au contraire, le point de départ d’un embrasement régional sans précédent ?

Entre optimisme messianique et réalisme tragique, la lecture du conflit oppose deux pôles : la promesse d’une chute du régime iranien et d’une ère plus consensuelle dans la région, ou le risque d’une guerre régionale prolongée, d’un chaos pétrolier, et d’un engrenage qui pourrait forcer les États-Unis à s’impliquer directement.

Ce qui distingue cette attaque des précédentes tentatives, c’est la volonté affichée par Israël d’aller jusqu’au bout. En quinze ans, l’État hébreu avait souvent pointé ses missiles vers Natanz ou Fordow, avant de renoncer à la dernière minute, dissuadé par Washington ou freiné par ses propres états-majors. Cette fois, la retenue a cédé place à la résolution : détruire la capacité nucléaire de l’Iran, quoi qu’il en coûte.

Puissance de feu et fragilité intérieure

Ce changement d’attitude s’explique par deux facteurs : d’une part, l’accélération sans précédent de l’enrichissement d’uranium par Téhéran, avec un degré de dissimulation tel que l’AIEA, pour la première fois en vingt ans, a publiquement dénoncé le non-respect des engagements iraniens. D’autre part, un contexte géopolitique qui a redistribué les cartes : l’échec du dialogue, l’impatience des faucons israéliens, et le feu vert implicite d’un Donald Trump revenu à la Maison Blanche, plus préoccupé de dissuasion que de diplomatie, mais jusqu’à un certain point.

La précision de la frappe – qui aurait atteint les entrées souterraines des sites de Natanz et potentiellement perturbé les centrifugeuses malgré leurs amortisseurs – révèle une chose : Israël ne veut plus temporiser. Il veut une interruption nette, durable, de la capacité nucléaire iranienne. Et il est prêt à en assumer le coût stratégique.

La réussite de cette opération dépend moins des explosions visibles que de l’effet souterrain qu’elles auront : sur les infrastructures, sur le programme nucléaire, mais surtout sur la perception iranienne de sa propre invulnérabilité. L’Iran a bâti son pouvoir sur une double illusion : l’intouchabilité de ses sites nucléaires, et la loyauté de ses cadres. Or la frappe israélienne remet en cause les deux.

Derrière l’efficacité apparente du Mossad et de l’unité 8200, se cache un fait plus dérangeant pour Téhéran : l’effondrement intérieur de la confiance. De nombreux responsables iraniens, exaspérés par leur propre régime, auraient collaboré avec Israël, facilitant les frappes chirurgicales qui ont tué les chefs des Gardiens de la Révolution et du haut commandement militaire. Le pouvoir iranien, désormais, vit dans la paranoïa. Chaque réunion est suspecte. Chaque général devient potentiellement une taupe.

Cette insécurité intérieure, si elle s’installe, ralentira la prise de décision et pourrait précipiter des erreurs fatales. Elle constitue le véritable gain stratégique israélien, au-delà des dégâts techniques.

D’un empire d’influence à un risque de vide régional

L’un des paris implicites de cette opération est que la chute ou l’affaiblissement de la République islamique aura un effet domino sur ses relais régionaux. Depuis des décennies, l’Iran contrôle ou influence des territoires entiers par milices interposées : le Hezbollah au Liban, les milices chiites en Irak, les Houthis au Yémen, et les restes d’alliés en Syrie.

En ciblant le centre nerveux de cette stratégie, le régime iranien lui-même, Israël espère briser l’épine dorsale d’un empire d’influence délétère. Or, les premiers frémissements semblent aller dans ce sens : affaiblissement visible du Hezbollah, recompositions politiques embryonnaires au Liban et en Syrie, retour d’un espoir timide dans des sociétés longtemps étouffées.

Mais ce frémissement ne garantit pas une stabilisation. Faire tomber un empire d’influence ne suffit pas à bâtir des démocraties. Le vide politique qui suivrait une chute rapide du régime iranien pourrait aussi engendrer un désordre prolongé, comme on l’a vu en Irak ou en Libye. Entre libération et chaos, la ligne est mince.

Paradoxalement, celui qui orchestre cette reconfiguration régionale est incapable de gérer sa propre maison. Benjamin Netanyahu, maître d’échecs au Moyen-Orient, est un joueur brouillon sur l’échiquier intérieur. À Gaza, ses choix sont dictés par des impératifs de survie politique, son refus dogmatique de tout État palestinien, et sa dépendance à une extrême droite messianique. Résultat : l’armée israélienne est engluée dans un bourbier moral et stratégique, sans plan de sortie.

Cette dissociation entre son habileté externe et son aveuglement interne pose une question cruciale : jusqu’où Israël peut-il aller sans s’effondrer moralement de l’intérieur ? Si les succès extérieurs servent à détourner l’attention des impasses locales, l’équation devient instable.

Au-delà de l’axe géopolitique, ce conflit a des implications globales : notamment sur le prix de l’énergie. L’Iran, acculé, pourrait chercher à punir l’Occident en provoquant une flambée du pétrole. Il lui suffirait de miner le détroit d’Ormuz ou de saborder quelques tankers pour bloquer les exportations. Le seul spectre de cette manœuvre suffit déjà à faire grimper les prix.

C’est peut-être ici que le lien avec Washington devient crucial : Trump, président en campagne permanente, pourrait être tenté de laisser Israël faire le sale travail… jusqu’au moment où une crise énergétique menacerait l’économie américaine. À ce moment-là, l’engrenage militaire deviendrait quasi inévitable.

Il faut reconnaître à Israël, cette fois, une relative retenue. Contrairement à Gaza, aucune frappe massive contre des civils. L’intention est claire : faire la distinction entre le peuple iranien et son régime. Netanyahu l’a dit dans une vidéo adressée aux Iraniens : « Vous n’êtes pas nos ennemis. Votre régime est notre ennemi commun. »

S’il ne convaincra pas les foules persanes, il plante néanmoins un message stratégique : Israël ne cherche pas la guerre contre un peuple, mais la fin d’un régime qu’il juge irresponsable. Ce discours, s’il trouve des relais au sein d’une jeunesse iranienne déjà frustrée et en colère, pourrait favoriser une dynamique interne de renversement.

Mais là encore, le renversement d’une dictature ne signifie pas l’avènement d’une démocratie. Le vide post-autoritaire est souvent rempli par l’instabilité, les luttes de pouvoir, voire la guerre civile. La vraie question est donc : que se passe-t-il après ?

Deux leçons majeures se dégagent de ce tournant :

1- Les régimes autoritaires semblent éternels… jusqu’à ce qu’ils s’effondrent d’un coup.

2- Mais au Moyen-Orient, la chute d’un tyran ne garantit ni la paix ni la démocratie, parfois seulement un désordre infini.

Le pari d’Israël est à double tranchant. Il peut précipiter la fin d’un régime néfaste et libérer des sociétés entières… ou plonger la région dans une guerre d’attrition sans issue. Il reste à voir si le coup de maître de Netanyahu au niveau stratégique n’ouvrira pas une boîte de Pandore plus vaste qu’il ne l’imaginait.

 

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