- Mondafrique https://mondafrique.com/libre-opinion/ Mondafrique, site indépendant d'informations pays du Maghreb et Afrique francophone Mon, 03 Mar 2025 06:31:48 +0000 fr-FR hourly 1 https://wordpress.org/?v=6.7.2 https://mondafrique.com/wp-content/uploads/2017/11/logo_mondafrique-150x36.jpg - Mondafrique https://mondafrique.com/libre-opinion/ 32 32 Petites astuces pour bien dépenser des biens mal acquis https://mondafrique.com/libre-opinion/petites-astuces-pour-bien-depenser-des-biens-mal-acquis/ https://mondafrique.com/libre-opinion/petites-astuces-pour-bien-depenser-des-biens-mal-acquis/#respond Mon, 03 Mar 2025 05:00:00 +0000 https://mondafrique.com/?p=128740 De pères en fils, de nombreux dirigeants africains, en particulier ceux des pays pétroliers, sont inquiétés par la justice française pour avoir mal acquis des biens qu’ils viennent dépenser en France. Dans cette nouvelle chronique pour Mondafrique, le journaliste et écrivain Venance Konan, lauréat du Grand prix littéraire d’Afrique noire 2012, revient, de manière détachée […]

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De pères en fils, de nombreux dirigeants africains, en particulier ceux des pays pétroliers, sont inquiétés par la justice française pour avoir mal acquis des biens qu’ils viennent dépenser en France. Dans cette nouvelle chronique pour Mondafrique, le journaliste et écrivain Venance Konan, lauréat du Grand prix littéraire d’Afrique noire 2012, revient, de manière détachée et humoristique, sur ces affaires politico-judiciaires et prodigue quelques « bons conseils » aux dirigeants africains incriminés pour bien dépenser leurs biens mal acquis. Quelques petites bonnes astuces pour passer entre les mailles du filet, même lorsque les biens ont été mal acquis.

Par Venance Konan 

Assez régulièrement, surgit, comme une épée de Damoclès que l’on promène sur la tête de certains de nos dirigeants, l’affaire dite des biens mal acquis. De quoi s’agit-il ? Certains de nos chefs sont accusés d’avoir mal acquis des biens de leurs pays pour aller faire la bamboula dans les pays européens, surtout en France. Effectivement, bon nombre de nos chefs, principalement d’Afrique centrale où le pétrole coule à flot, et leurs rejetons ont acheté en France de nombreux biens immobiliers, voitures, bijoux, tableaux de grands maîtres et autres babioles, avec de l’argent qui ne semble pas avoir été bien acquis.

Les frasques des fils à papa

Ainsi, Teodorin Nguema Obiang Mangue, fils aîné du président de la république équato-guinéenne et par ailleurs vice-président de ce pays, possède-t-il à Paris un hôtel particulier situé au 42, avenue Foch, de 5000 mètres carrés, de 101 pièces réparties sur cinq étages et d’une valeur estimée entre 45 et 90 millions d’euros. C’est par dizaines que l’on compte les voitures de luxe qu’il possède en France, aux Etats Unis et dans son pays. En novembre 2009, les douanes françaises avaient indiqué qu’il avait fait réexpédier vers son pays 26 voitures de luxe et 6 motos en provenance des Etats Unis, parmi lesquelles, on comptait sept Ferrari, cinq Bentley et quatre Rolls-Royce. En 2009, il a acquis en France 28 montres d’exception pour 10 millions d’euros, et lors de la vente aux enchères de la collection d’œuvres d’art d’Yves Saint Laurent, il a acquis 109 lots mis en vente, pour une valeur de 18 millions d’euros. Et c’est à peu près le même train de vie pour les rejetons des présidents Omar Bongo Ondimba et Denis Sassou Nguesso.

Pour les juges français, l’argent qui sert aux présidents et à leurs enfants à faire tous ces achats est détourné des caisses de leurs Etats et ils veulent qu’il soit restitué aux peuples de ces pays qui vivent pour la plupart dans la misère. Et honnêtement, l’Africain que je suis ne peut que se réjouir qu’il y ait une justice quelque part pour penser à moi.

La loi pour les plus faibles

Mais ce que j’aimerais savoir est ceci : les dirigeants africains sont-ils les seuls à détourner l’argent de leurs pays pour aller le gaspiller en France ? Les princes et émirs d’Arabie Saoudite, du Koweït, des Emirats Arabes Unis, du Qatar et des autres pétro-monarchies arabes qui vont faire des folies en France et partout en Europe et aux Etats Unis sont-ils tous des honnêtes citoyens de leurs pays ayant gagné leurs fortunes à la sueur de leurs fronts ? Leurs biens qu’ils vont exhiber en 0ccident sont-ils vraiment bien acquis ? Pourquoi la justice française ne jette-t-elle jamais un coup d’œil sur ces fortunes et ne s’intéressent qu’à celles des pays pétroliers africains ? Est-ce du racisme ?

Je crois que la différence réside dans la façon dont l’argent détourné est dépensé. Alors que les Africains achètent des maisons, des voitures et des montres de luxe, souvent de marques étrangères, des costumes, logent dans des hôtels de luxe, font la fête, les Arabes eux, achètent des grands hôtels, des grands châteaux, des grandes équipes de football, des avions et des bateaux de guerre, des chars, des radars, des missiles et autres armes dont ils n’ont le plus souvent pas du tout besoin. C’est là la différence. Le complexe militaro-industriel est le plus puissant lobby dans les pays occidentaux. Il faut le faire travailler. Le champagne, les costumes Smalto, c’est bien. Mais un avion Rafale, c’est encore mieux. Et les Africains n’achètent jamais de Rafale. Comment peut-on les respecter ? Alors, vous avez découpé en petits morceaux un de vos journalistes dans un consulat en Turquie ? Vous achetez dix avions, plus quelques frégates à chaque pays occidental qui en fabrique et vous êtes absous. C’est tout simple.

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Seidik Abba: les dérives du multipartisme intégral en Afrique https://mondafrique.com/libre-opinion/stop-au-devoiement-du-multipartisme-integral-en-afrique/ https://mondafrique.com/libre-opinion/stop-au-devoiement-du-multipartisme-integral-en-afrique/#respond Sat, 01 Mar 2025 16:00:00 +0000 https://mondafrique.com/?p=128618 Les Assises nationales du Niger, qui se sont achevées le 20 février 2025, ont proposé la limitation du nombre des partis politiques dans le pays à cinq au maximum, suscitant tollé, incompréhension et même de la réprobation. Pourtant, passés le choc et l’émotion légitimes provoqués par cette proposition iconoclaste, il faut regarder avec courage, sang-froid […]

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Les Assises nationales du Niger, qui se sont achevées le 20 février 2025, ont proposé la limitation du nombre des partis politiques dans le pays à cinq au maximum, suscitant tollé, incompréhension et même de la réprobation. Pourtant, passés le choc et l’émotion légitimes provoqués par cette proposition iconoclaste, il faut regarder avec courage, sang-froid et lucidité les limites objectives de l’absence de limitation du nombre des partis au Niger et ailleurs en Afrique. Brisons donc ensemble le tabou sur les revers du multipartisme intégral. 

L’éditorial de Seidik Abba, Rédacteur en Chef de Mondafrique

A la faveur du retour du multipartisme en 1991, (le pays avait déjà connu le multipartisme jusqu’en 1965), le Niger avait fait le choix de n’imposer aucune limitation du nombre des partis politiques. Résultat : lorsque le Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (CNSP) renverse le 26 juillet 2023 le président Mohamed Bazoum, le Niger comptait pas moins de 160 formations politiques.

Dans l’euphorie de l’avènement de la démocratie, d’autres pays africains avaient, comme le Niger, fait le choix du multipartisme intégral, à l’orée des années 2000. Le Sénégal se retrouve ainsi avec 339 partis politiques, le Tchad pas moins de 180 partis, le Bénin pas moins de 150. Mais, c’est bien la République démocratique du Congo (RDC), avec plus de 400 formations, qui illustre jusqu’à la caricature cette inflation du nombre de partis.

Le printemps des entrepreneurs politiques

Personne n’aurait trouvé à redire si le grand nombre des partis renvoyait à la vitalité de la jeune démocratie ; s’il s’inscrivait dans une diversité des idées à défendre, de projets politiques à incarner. Hélas, nulle part, il n’a été constaté la moindre adéquation entre le nombre des partis et le nombre d’offres politiques. Les partis sont devenus plutôt de petites chapelles tenues par des entrepreneurs politiques qui monnayent leur ralliement à la majorité au pouvoir ou qui font des chantages pour obtenir des maroquins dans le gouvernement ou des postes à la tête de grandes entreprises publiques ou parapubliques.

Curieusement les majorités au pouvoir formées non pas sur la base de programmes de gouvernement à fortiori de projets de société ne franchissent jamais le pas de se transformer en une seule formation politique. Au lieu que la majorité au pouvoir compte un seul chef, elle finit par avoir autant de chefs que de chefs de partis. Lorsque le chef du principal parti devient le chef de la majorité, les autres chefs des autres partis de la majorité deviennent des sous-chefs de la majorité et leur égo s’en trouve ainsi flatté.

Les dividendes de la limitation

Dans le contexte actuel et au regard de la pratique politique observée dans de nombreux pays africains, la limitation du nombre de partis politiques n’a rien anti-démocratique. Ce qui peut faire débat, ce sont les critères pour limiter le nombre de partis, mais surtout la définition du chiffre plafond. Les délégués aux Assises nationales nigériennes ont proposé de limiter le nombre de partis à cinq au maximum. Pourquoi pas trois ? Pourquoi pas six ? Rien ne justifie que le chiffre cinq ait été préféré aux autres.

Pour moi, c’est ici que le débat pourrait présenter de l’intérêt. Sortir du multipartisme intégral tant dévoyé reviendrait à imposer que leur nombre corresponde forcément aux offres politiques dans le pays. Le multipartisme non intégral aurait également l’avantage de permettre aux organes de tutelle de mieux exercer leur contrôle sur les activités des partis politiques.

Faute de personnel et de moyens, le ministère de l’Intérieur n’arrive pas, dans la pratique, à superviser les activités de 150, 180 voire plus de 400 partis politiques. Et comme le grand nombre ne fait pas automatiquement la qualité, il faut bien ouvrir le débat sur la limitation du nombre de partis politiques dans les pays africains.

La forme de multipartisme contrôlée me semble plus adéquate dans le contexte et la pratique politiques actuelles en Afrique. Au demeurant, l’exemple de la démocratique américaine dominée par deux grandes formations est bien là pour nous rappeler que la vitalité d’une démocratie ne se mesure pas à l’aune du nombre des partis.

 

 

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Ilyas El Omari: la banalisation d’Al-Qaïda par les Occidentaux https://mondafrique.com/libre-opinion/ilyas-el-omari-la-banalisation-dal-qaida-par-les-occidentaux/ https://mondafrique.com/libre-opinion/ilyas-el-omari-la-banalisation-dal-qaida-par-les-occidentaux/#respond Wed, 26 Feb 2025 17:53:55 +0000 https://mondafrique.com/?p=128440 Il est devenu évident qu’au cours des cinq dernières années, plusieurs capitales occidentales et non occidentales – notamment Londres et Washington – ont développé une dynamique visant à « normaliser » leurs relations avec Al-Qaïda qui, il n’y a pas si longtemps, apparaissait comme l’ennemi à abattre. Ilyas El Omari, ancien président du Conseil général […]

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Il est devenu évident qu’au cours des cinq dernières années, plusieurs capitales occidentales et non occidentales – notamment Londres et Washington – ont développé une dynamique visant à « normaliser » leurs relations avec Al-Qaïda qui, il n’y a pas si longtemps, apparaissait comme l’ennemi à abattre.

Ilyas El Omari, ancien président du Conseil général de Tanger-Tetouan-Al-Hoceima, patron de presse au Maroc et créateur notamment de Cap.info et de Cap.radio à Tanger

Pour lire l’article en arabe, il faut cliquer sur le lien ci dessous

https://capinfo.ma/

Al Qaida a inauguré l’ère du terrorisme moderne

Pour ceux dont la mémoire fait défaut ou qui sont désorientés par l’enchaînement rapide des événements, rappelons qu’il s’agit de l’organisation même qui a inauguré l’ère du terrorisme moderne avec les attentats du 11 septembre 2001 aux États-Unis. Pourtant, aujourd’hui, certains envisagent un dialogue avec elle et établissent même une distinction entre Al-Qaïda et Daech, prétendant que la première serait moins radicale et moins meurtrière envers les civils.

Al Qaïda, un interlocuteur reconnu

Cette évolution est d’autant plus troublante qu’Al-Qaïda était autrefois décrite comme l’incarnation même du terrorisme, l’organisation la plus impitoyable et extrémiste. Désormais, elle est conviée à des négociations et considérée non plus uniquement comme une menace à éliminer, mais comme un interlocuteur potentiel. Le Secrétaire général de l’ONU lui-même, a évoqué il y a quelques années sur l’éventualité d’un dialogue avec Al-Qaïda, a répondu que l’ONU était prête à discuter avec toute entité opposée au terrorisme – une déclaration pour le moins étonnante.

Lorsque la France et le gouvernement malien ont entamé des pourparlers pour libérer les membres d’Al-Qaïda détenus à Bamako, il n’a agi pas d’une simple tactique ponctuelle, mais d’une démarche s’inscrivant dans une tendance plus large. Des fuites ont même évoqué des versements atteignant 50 millions d’euros ou plus, des fonds qui pourraient, directement ou indirectement, profiteré à l’organisation.

Parallèlement, en Afghanistan, Al-Qaïda a retrouvé une légitimité. Après avoir vu le nombre de ses membres emprisonnés à Guantánamo, elle est réintégrée dans l’équation politique et dans les nouvelles structures de pouvoir. Aujourd’hui, les dirigeants afghans sont reçus dans différentes capitales et s’entretiennent avec des chefs d’État et des ministres, témoignant d’un revirement stratégique majeur.

La Syrie, laboratoire de cette banalisation

En Syrie, une transformation similaire s’est produite : celle qui figurait ici encore sur les listes internationales des terroristes les plus recherchées est désormais présentée sous un jour radicalement différent. Il est accueilli comme un leader ayant conduit une révolution populaire, bénéficiant d’une reconnaissance croissante sur la scène diplomatique, comme si sa nature profonde avait changé.

Que signifie cette évolution ? Elle semble converger vers la création d’un nouvel espace d’influence pour Al-Qaïda, situé à un carrefour stratégique aux frontières de l’Iran, de la Chine et de la Russie, où transitent des infrastructures majeures comme le gazoduc russo-chinois. Un territoire en formation, façonné pour servir des intérêts géopolitiques précis, notamment la préservation du projet israélien au cœur du Moyen-Orient.

En Afrique du Nord et dans le Sahel, le même schéma est reproduit. Alors que les rapports sécuritaires annoncent régulièrement le démantèlement de cellules affiliées à Daech, les actions contre Al-Qaïda restent peu médiatisées, bien que ce soit le groupe le plus actif de la région. S’agit-il d’une simple coïncidence, ou existe-t-il une volonté tacite de lui permettre de s’implanter durablement pour reproduire les scénarios afghans et syriens ?

Le leurre des Frères Musulmans

Cette situation n’a rien de nouveau. Après le 11 septembre, les Frères musulmans ont été mobilisés comme contrepoids à Al-Qaïda. Plus tard, lors du « Printemps arabe », ils ont accédé à des gouvernements grâce à des élections dont les résultats ont été influencés depuis des capitales occidentales.

Une fois leur rôle accompli, une autre mouvance, issue du même terreau idéologique, a été mise en avant pour affronter Daech. Le cycle se perpétue, remodelant les acteurs selon les impératifs du moment. Ce que beaucoup ignorent, et parmi ceux qui surfent sur ces dynamiques, c’est que le terrorisme, dans son essence, repose sur une idéologie fondamentale. On ne peut dissocier un hérisson de ses piquants ou, comme l’illustre parfaitement cette réflexion suite aux attentats de 2015 en France : « Élever un scorpion dans sa poche en espérant qu’il ne piquera que les autres est une illusion ; tôt ou tard, il finira par vous atteindre aussi. »

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Renaud Girard: Donald Trump donne raison au général de Gaulle https://mondafrique.com/libre-opinion/donald-trump-donne-raison-au-general-de-gaulle/ https://mondafrique.com/libre-opinion/donald-trump-donne-raison-au-general-de-gaulle/#respond Sun, 23 Feb 2025 16:59:31 +0000 https://mondafrique.com/?p=128179 Avec le retour de Donald Trump à la Maison Blanche, l’Amérique est en train de prendre un tournant stratégique, conceptualisé pour la première fois en 2011. A l’époque, le président Obama avait gentiment parlé de « pivot vers l’Asie ». Aujourd’hui, elle explique crûment à ses partenaires européens de l’Otan que c’est à eux d’assurer […]

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Avec le retour de Donald Trump à la Maison Blanche, l’Amérique est en train de prendre un tournant stratégique, conceptualisé pour la première fois en 2011. A l’époque, le président Obama avait gentiment parlé de « pivot vers l’Asie ». Aujourd’hui, elle explique crûment à ses partenaires européens de l’Otan que c’est à eux d’assurer la sécurité de leur continent face aux Russes, car elle veut concentrer ses efforts sur la zone Indopacifique. Pire, la Maison Blanche a lancé une négociation avec le Kremlin sur la guerre d’Ukraine, sans y associer les capitales européennes.

Renaud Girard, chroniqueur au Figaro,nous donne l’aimable autorisation de reprendre son éditorial

C’est d’autant plus cruel pour les Européens qu’ils avaient, à la demande de Washington, consenti d’importants sacrifices pour favoriser la cause de l’Ukraine, agressée par la Russie en février 2022. Ils ont cessé d’acheter du gaz russe pour faire tourner leurs industries, et ils se sont tournés vers le gaz de schiste américain, trois fois plus cher. Ils ont financé les budgets militaire et civil de l’Ukraine à hauteur de cent milliards d’euros. Ils ont retiré de Russie leurs grandes entreprises, qui ont dû vendre à perte la plupart de leurs actifs. A l’exception des Français, ils se sont mis à doubler leurs achats à l’industrie américaine d’armements.

Bizarrement surpris par une posture qui apparaissait clairement dans la campagne de Donald Trump, les leaders des principales puissances militaires européennes (Grande-Bretagne, Allemagne, Italie, Espagne, Pays-Bas, Danemark), se sont précipités à Paris le 17 février 2025. Ils étaient accompagnés du secrétaire général de l’Otan, du président du Conseil européen et de la présidente de la Commission européenne.

L’ombre du général de Gaulle 

Pourquoi Paris ? Pourquoi pas Bruxelles, où se trouvent les sièges de l’Union européenne et de l’Otan ? Eh bien, parce que Paris, depuis de Gaulle, est le siège d’une pensée stratégique unique en Europe : il est trop risqué de confier notre sécurité à l’Amérique, fût-elle notre amie, notre alliée ; nous devons nous-mêmes développer les moyens militaires et économiques de notre indépendance.Le président de Gaulle avait compris que l’Amérique ne pourrait jamais donner aux Européens des assurances éternelles et en acier. Car comme toute grande puissance, elle fait la politique de ses intérêts, ancrés dans sa géographie, son histoire, sa démographie, son économie. La démocratie américaine est évidemment sujette aux changements de stratégie, en fonction des désirs exprimés par son opinion publique.


Jeune officier, Charles de Gaulle avait vu l’Amérique s’engager, en 1917, auprès des démocraties européennes, pour combattre le militarisme germanique. Il avait vu son président, Woodrow Wilson, arriver à Paris un mois après l’armistice du 11 novembre 1918, y être reçu triomphalement, et y séjourner sept mois, jusqu’en juin 1920, pour négocier le traité de paix qui devait mettre fin, une fois pour toutes, aux guerres en Europe. Wilson signa le traité de Versailles, son œuvre qui désarmait les Allemands, mais subitement tombé malade, il ne réussit pas ensuite à le faire ratifier par le Sénat.

 La France pouvait dire adieu aux garanties de sécurité américaines. Clemenceau les avait invoquées pour expliquer au maréchal Foch qu’il n’était pas nécessaire que les alliés aillent jusqu’à Berlin pour détruire une fois pour toutes le militarisme allemand.

L’Amérique lente à bouger

La triste suite est connue : les banques américaines financèrent le réarmement allemand dans les années trente, et Washington objurgua Paris de ne pas bouger quand Hitler remilitarisa la Rhénanie en6 mars 1936, en violation flagrante du traité de Versailles. Lorsque les divisions nazies foncèrent vers Paris en mai 1940 et que le président Paul Reynaud appela l’Amérique au secours, elle répondit aux Français : « débrouillez-vous ! ». Il a fallu que les Japonais l’attaquent dans le Pacifique et que Hitler lui déclare la guerre en décembre 1941, pour que l’Amérique se mette enfin à bouger. Elle finira par libérer l’Europe occidentale, financer sa reconstruction, tout en la protégeant des appétits de Staline.


Ayant vécu l’humiliation de la défaite de 1940, de Gaulle s’est dit à juste titre : « plus jamais ça ! ». Après son retour au pouvoir en 1958, il développe une force de dissuasion nucléaire indépendante. En5 1966, il retire la France de l’organisation militaire intégrée de l’Otan (tout en demeurant dans l’Alliance atlantique), estimant que les armées françaises ne devaient obéir qu’à des généraux français. En refusant d’être le caniche de l’Amérique, de Gaulle a réussi à se faire respecter par elle, à être traité d’égal à égal. En février 1969, la première visite à l’étranger du nouveau président américain est pour de Gaulle.


Paris, c’est aussi la capitale du pays qui osa s’opposer, en 2003, à l’absurde aventure militaire anglo-saxonne en Irak, où s’engagèrent, comme des caniches, les Polonais, les Danois, les Baltes, les Norvégiens, les Roumains, les Bulgares, les Ukrainiens, les Géorgiens, etc.

 Paris,  capitale de l’autonomie européenne

Paris, c’est enfin le lieu d’invention du concept d’autonomie stratégique européenne. Combien d’années le président Emmanuel Macron l’a-t-il défendue en vain auprès de ses partenaires européens, ne recevant en retour que des sourires polis ? En 2021, l’actuelle première ministre du Danemark expliquait à un conseiller de Macron que Copenhague se sentirait toujours beaucoup plus proche de Washington que de Paris…

 
Emmanuel Macron a eu un bon réflexe en organisant le sommet de l’Elysée du 17 février 2025. L’autonomie stratégique européenne ne se construira pas du jour au lendemain. Elle passera par une industrie de défense proprement européenne. Elle exigera un réarmement moral et sans doute le rétablissement du service militaire.Mais une chose est sûre : plus cette autonomie s’accroîtra, moins nous irons pleurnicher à Washington, plus l’Amérique nous respectera ; et meilleures seront encore nos relations avec celle qui reste, pour des raisons aussi bien culturelles qu’historiques, notre vieille alliée de cœur.  

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Tunisie, souvenons nous de Khémaïs Toumi, amoureux de la liberté https://mondafrique.com/libre-opinion/tunisie-khemais-toumi-lamoureux-de-la-liberte/ https://mondafrique.com/libre-opinion/tunisie-khemais-toumi-lamoureux-de-la-liberte/#respond Sun, 23 Feb 2025 03:35:00 +0000 https://mondafrique.com/?p=20801 Alors que la Tunisie s’enfonce à nouveau dans une nuit sans fin avec la dictature aveugle de Kaïs Saied, souvenons nous de cette figure incontournable de l’opposition au régime du général Ben Ali que fut Khémaïs Toumi qui s’est s’éteint à Tunis dans la nuit du 20 au 21 juin 2018. L’hommage de Frédéric Brun […]

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Alors que la Tunisie s’enfonce à nouveau dans une nuit sans fin avec la dictature aveugle de Kaïs Saied, souvenons nous de cette figure incontournable de l’opposition au régime du général Ben Ali que fut Khémaïs Toumi qui s’est s’éteint à Tunis dans la nuit du 20 au 21 juin 2018.
L’hommage de Frédéric Brun et Nicolas Beau.
Notre ami Khémaïs nous a quittés en cette nuit sans lune. Le monde s’est soudainement assombri. Khémaïs était en effet un  forcené de la liberté, un amoureux de l’amitié, un pourfendeur de l’injustice. Jusqu’à la déraison…

Excès de vie !

Comment oublier ces journées de l’après Ben Ali où tout semblait possible! La joie de ce grand opposant qui regagnait la Tunisie en janvier 2011 au mépris des mandats d’arrêt qui n’avaient pas encore été effacés des ordinateurs de la police de la dictature! La table ouverte, les emportements salvateurs, les discussions fiévreuses qu’il animait, entre deux coupes de champagne, dans la suite louée à l’hôtel Sheraton, devenu durant l’hiver 2011 la joyeuse agora d’une Tunisie trop longtemps cadenassée et enfin réconciliée avec elle même.
Les tirs de barrages de quelques juges corrompus et insensibles au nouvel élan révolutionnaire l’empêchèrent de retrouver ses biens. Jamais Khémaïs ne fut saisi par le découragement ou le ressentiment. A l’attaque! Le monde de demain sera meilleur, il le croyait, et il avait la belle habitude de rêver sa vie.
Les accidents vasculaires qui l’avaient frappé n’entamèrent guère son optimisme. La maladie qu’il traitait par le mépris eut finalement raison de lui. C’est que malgré l’immense énergie qu’il a toujours manifestée, son état de fragilité lui était devenu insupportable. Mourir pour mourir, Khémaïs a choisi de mourir libre, avant que la dépendance ne le guette.

Le devoir d’amitié

Sa souveraineté d’homme l’a toujours rendu inclassable. Ce qui en fit un des opposants les plus irréductibles au général Ben Ali. Nombreux sont les adversaires de la dictature, même si certains l’ont oublié, qui lui doivent une fière chandelle financière. Les ouvrages comme « Notre ami Ben Ali » paru en 1999 ou « La Régente de Carthage » publié en 2009 n’auraient jamais existé sans sa force de persuasion et son sens politique. C’est Khémaïs qui eut la fantastique intuition que la dénonciation de la corruption du régime serait plus efficace que les pétitions en faveur des droits de l’homme qui, hélas, n’émouvaient plus personne.
Les amis de Ben Ali ne s’y trompèrent pas qui virent en Khémaïs Toumi l’homme à abattre. Via les réseaux de Charles Pasqua, le défunt ministre français de l’Intérieur qui n’avait rien à refuser à la dictature, le palais de Carthage fit tout pour obtenir son extradition en décembre 2002. Heureusement, des magistrats français courageux ne marcheront pas dans cette mascarade judiciaire et éviteront à Khémaïs, mais de peu, d’aller croupir dans les geôles tunisiennes.

Une générosité romanesque

Le citoyen du monde qu’il resta toute sa vie avait la passion de la fraternité. Seules ses deux filles, Nour et Yasmina, qu’il chérissait par dessus tout, pouvaient le détourner de son devoir d’amitié. Notre jeunesse en Tunisie ou en France, nos combats politiques qui ont suivi auront été indissociables de cette force d’entrainement qu’il manifesta dans des cercles d’amitiés toujours renouvelés. Sa générosité était inépuisable, surtout dans les pires moments de la vie. Le nombre et la qualité des personnalités qu’il a soutenues est impressionnante. Au détriment de sa propre survie financière, lui qui n’avait besoin de rien, sauf du superflu.
Libertaire aux accents bonapartistes, Khémaïs ne comptait ni son temps, ni son argent pour séduire des milieux les plus divers, dont certains sentaient le souffre et d’autres le jasmin. Ce grand militant percevait les enjeux politiques avec une intuition particulière et l’acuité des anciens trotskistes. Notre ami se mettait en danger constamment, et pas seulement au volant de sa voiture, mais dans des aventures quotidiennes politiques, personnelles ou professionnelles. Ce qui nous fascinait par dessus tout, nous qui avons adopté des existences plus conformes.
« Il y a une faille en toute chose, a chanté Leonard Cohen, c’est par là qu’entre la lumière ». Khémaïs était cette tache de lumière qui nous réconfortait dans un monde trop gris.
Qu’il repose en paix auprès de ses parents dans le cimetière de Grombalia au sud-est de Tunis.

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CEMAC, une zone économique toujours sous perfusion https://mondafrique.com/international/cemac-une-zone-economique-toujours-sous-perfusion/ https://mondafrique.com/international/cemac-une-zone-economique-toujours-sous-perfusion/#respond Sat, 22 Feb 2025 05:05:57 +0000 https://mondafrique.com/?p=127998 Convoqué en urgence par le président camerounais Paul Biya, sous la pression des bailleurs de fonds en particulier le Fonds monétaire international (FMI), le dernier sommet extraordinaire de Communauté économique et monétaire d’Afrique centrale (CEMAC) de décembre 2024 ne semble pas avoir réglé les problèmes que connaît la zone monétaire qui regroupe le Cameroun, la […]

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Convoqué en urgence par le président camerounais Paul Biya, sous la pression des bailleurs de fonds en particulier le Fonds monétaire international (FMI), le dernier sommet extraordinaire de Communauté économique et monétaire d’Afrique centrale (CEMAC) de décembre 2024 ne semble pas avoir réglé les problèmes que connaît la zone monétaire qui regroupe le Cameroun, la Centrafrique, le Congo, le Gabon, la Guinée-Equatoriale et le Tchad.

Dans ce texte que Mondafrique publie sous forme de Libre Opinion Djimadoum Mandekor, économiste, ancien directeur de 2012 à 2019 à la Banque centrale des Etats d’Afrique centrale (BEAC), regrette le retard pris dans l’application des décisions prises en décembre. L’économiste, auteur de « Pour sortir la BEAC de sa gouvernance défaillante. Promouvoir une banque centrale assurant l’intérêt général », paru aux Editions Jets d’Encre, en 2024, analyse les difficultés actuelles de la CEMAC et expose quelques pistes pour redresser la barre.

Djimadoum Mandekor, économiste, ancien directeur central à la BEAC (2012-2019)

16 décembre 2024-16 février 2025, deux mois se sont écoulés depuis le sommet extraordinaire de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC), à Yaoundé, le 16 décembre 2024. Dans l’ensemble, peu semble avoir été déjà fait pour la mise en œuvre des différentes résolutions, notamment dans le domaine des finances publiques et « en faveur de l’indépendance et du renforcement des capacités de la banque centrale, de la Commission Bancaire et des autres institutions communautaires ». Les retards éventuels risquent de compromettre la conclusion attendue par certains pays d’un accord avec le Fonds Monétaire International (FMI) dans la perspective de l’octroi d’un appui financier de cette institution multilatérale.

Crise de gouvernance à la Banque centrale

S’agissant de la Banque des Etats de l’Afrique centrale (BEAC), une des principales institutions de cet attelage communautaire, les actions déjà entreprises sont loin d’être dans le sillage des orientations fixées. L’information publiée sur les réseaux sociaux par la banque centrale communautaire, le 29 janvier 2025, sur l’audit de l’organisation très contestée du concours de recrutement de ses cadres supérieurs de mai 2022, pour favoritisme et népotisme, est à saluer. Cependant, le long délai enregistré entre les deux évènements démontre la faible inclinaison des parties prenantes de cette institution pour sa bonne gouvernance et son efficacité. Pourtant, un risque juridique fort existe sur cette affaire depuis son déclenchement.

De plus, la découverte dans le compte rendu du conseil des ministres du Gabon du 17 janvier 2025, du départ du membre gabonais de la structure de gouvernance de la BEAC, sans aucune communication de la part de la BEAC ou de la Commission de la CEMAC, les deux institutions concernées, replonge l’opinion dans l’opacité tenace dans la gouvernance sous-régionale.

Or, les règles de la BEAC stipulent que le relèvement d’un de ses dirigeants ne peut être décidé que par les Chefs d’Etat, sur avis unanime du Comité ministériel. Une interruption de mandat ne doit donc être imputable, principalement, qu’à une infraction aux « principes d’indépendance, d’impartialité et de neutralité inhérents à leurs fonctions » ou à une faute professionnelle lourde, notamment en matière de conflits d’intérêts.

L’inobservation de ces dispositions, sauf consultation à domicile secrète, contredit la volonté de transparence exprimée le 16 décembre 2024. Elle crée des suspicions légitimes sur des comportements peu avouables ainsi soustraits à un contrôle formel recommandé. Elle renforce aussi le doute élevé sur l’engagement réel des dirigeants de la CEMAC de l’obligation de rendre compte et la lutte contre l’impunité des responsables des institutions sous-régionales.

Cette éviction arrangée est aussi la résultante de fortes dissensions internes déjà apparues au sein du gouvernement de la banque centrale avant le départ du précédent gouverneur. Les tensions devenues vivaces, d’après la presse sous-régionale, en dépit du rappel à l’ordre aux concernés par le Président en exercice de la CEMAC, après le sommet extraordinaire d’avril 2024, proviendraient d’une lecture « anarchiste » et erronée de la notion de collégialité.

A l’analyse, certains membres de cet organe, chacun représentant son pays et étant nommé par la Conférence des Chefs d’Etat de la CEMAC, considèrent ne pas avoir à se soumettre à l’autorité du gouverneur. Ensemble, ils feignent d’ignorer que la collégialité (direction exercée de manière concertée), dans le contexte de l’indépendance d’une banque centrale appartenant à plusieurs pays, est axée sur la réalisation primordiale de l’intérêt général sous-régional, principalement la bonne gestion de la Banque centrale selon les normes requises, et non pas de celle d’un intérêt personnel ou d’un seul pays.

Nomination troublante d’un Gabonais au CA de la BEAC

La nomination d’un nouveau membre gabonais du Conseil d’administration de la BEAC, conseiller spécial du président de transition, vient également interroger sur la véritable préoccupation pour l’indépendance effective de la banque centrale. La totalité des membres dudit conseil étant composée de fonctionnaires des Etats, elle accrédite la mainmise politique quasi absolue sur les instances dirigeantes et de contrôle de la BEAC. Il est à noter que pour chaque pays membre considéré, les membres de ces instances ont entre eux des liens politiques et ethniques étroits.

La fréquence des scandales à la BEAC, rendus publics par la presse ou véhiculés par les rumeurs (concours de recrutement des cadres supérieurs de 2022, présumée implication d’un chef d’agence dans la circulation de faux billets en Guinée Equatoriale en 2024, surfacturation des billets d’avion, etc.) montre l’urgence de revoir drastiquement les modalités de fonctionnement et de désignation de ces responsables.

Les dysfonctionnements sont visibles dans toutes les institutions sous-régionales et prennent des fois des proportions insoutenables, notamment au GABAC (Groupe d’action contre le blanchiment d’argent en Afrique centrale). Les mauvais résultats de la sous-région dans ce dernier domaine, avec quatre de ses six pays figurant dans les dix pays du monde ayant le plus grand risque de blanchiment d’argent[1], ne sont sans doute pas fortuits. En effet, le GABAC indique sur son site internet que son dernier rapport d’activité porte sur l’exercice 2013-2014 !

Plus globalement, la CEMAC continue par ne pas briller par son désir de recouvrer sa pleine souveraineté monétaire, sans grand égard pour son obligation de rendre compte. Ainsi, une réunion extraordinaire du Comité ministériel, consacrée à « la réforme du cadre de coopération monétaire en Afrique Centrale », s’est tenue le 04 février 2025, à Douala (Cameroun).

Seul le gouvernement gabonais a heureusement communiqué sur ladite rencontre. Pour leur part, la Commission de la CEMAC et la BEAC, chargées depuis 2019 de ce dossier, sont délibérément restées muettes, malgré leur devoir d’information du public. Même quand ils sont publiés, les communiqués de presse de la BEAC sont de plus en plus squelettiques et sibyllins.

Attachement surprenant au FCFA

Jusqu’à présent rien ne confirme la réalité d’un projet en cours sur une révision de la gestion de la monnaie de la CEMAC. Comme rapporté par certains journaux et les bruits de couloir en 2024, en déphasage d’avec les bonnes pratiques internationales des banques centrales, les membres du gouvernement de la BEAC, sont surtout attachés à défendre l’augmentation de leurs salaires, le versement de primes de bilan, de démonétisation des billets, etc., proscrites dans les autres banques centrales.

Cette situation prospère, au détriment notamment de la consolidation régulière des ressources propres de la Banque, sans réaction nette connue de leurs organes de contrôle (Comité ministériel, Conseil d’administration, Comité d’audit, Collège de censeurs). D’ailleurs, le Collège des censeurs, redondant avec le Comité d’audit introduit en 2007, devrait être dissout.

L’organisation expresse du sommet extraordinaire de décembre dernier, sous la pression amicale des partenaires extérieurs (FMI, France, etc.) inquiétés, notamment, par les tensions de trésorerie publique et les risques d’une importante baisse des réserves en devises, prouve l’absence d’une réflexion interne sérieuse sur ce sujet. Cette infantilisation de la sous-région ne semble pas prêter à conséquence. Un rapport récent du Sénat français, sur les relations entre la France et les pays africains[2], évoque ainsi la réticence des chefs d’État africains à mener à son terme la réforme du franc CFA.

Le choix du statu quo par ces dirigeants,  alimenter par leur crainte de ne pas voir maitriser le processus de création d’une monnaie commune autonome, dénote de leur manque de confiance à l’égard de leurs propres cadres et responsables. Pourtant, l’inaction s’avère préjudiciable à leurs économies dont le déclassement pourrait encore s’aggraver à l’heure où la concurrence entre les pays et les régions du monde va s’accroître sous les coups de bélier de Trump. 

Pour espérer réaliser la pleine autonomie monétaire de la sous-région, accélérer le développement des pays membres et relancer leur intégration, une vaste réforme de l’architecture institutionnelle de la CEMAC, y compris dans le domaine monétaire, est indispensable. Et cela relève de l’urgence. Elle devrait notamment viser, très courageusement, la rationalisation des institutions et organismes spécialisés existants, avec, entre autres, l’unification des deux unions (économique et monétaire) et une révision profonde des modalités de recrutement des dirigeants des institutions afin qu’ils ne se considèrent plus comme des représentants de leur pays respectif et rendent explicitement compte de leur gestion et de leurs résultats à l’ensemble de la communauté.

L’élaboration d’un plan de réforme, incontournable pour arrêter le décrochage de la sous-région, devrait être confiée à un Comité ad hoc pluridisciplinaire intégrant un nombre significatif d’experts indépendants, afin de limiter les conflits d’intérêts liés à la participation exclusive des membres des organes des institutions actuelles.

Pour atteindre cet objectif, il revient aux chefs d’Etat de la CEMAC de sortir des sentiers battus, en privilégiant notamment la diversité et l’équité dans la nomination des dirigeants de ces institutions.

[1] Indice AML Bâle.13eme indice mondial des risques de BC-FT.

[2] Voir l’Afrique dans tous ses Etats. Rapport d’information. Sénat français. Janvier 2025

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Seidik Abba: « L’Union africaine à quitte ou double » https://mondafrique.com/libre-opinion/seidik-abba-lunion-africaine-a-quitte-ou-double/ https://mondafrique.com/libre-opinion/seidik-abba-lunion-africaine-a-quitte-ou-double/#respond Fri, 21 Feb 2025 22:32:44 +0000 https://mondafrique.com/?p=128042 Le passage de l’Organisation de l’unité africaine (OUA) à l’Union africaine (UA) en 2002 n’aura pas tenu toutes ses promesses de rupture et de meilleure efficacité. Entre absence de leadership dans la gestion des crises du continent et financement adossé à la charité internationale, l’UA semble être une organisation moribonde et chancelante. La nouvelle Commission, […]

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Le passage de l’Organisation de l’unité africaine (OUA) à l’Union africaine (UA) en 2002 n’aura pas tenu toutes ses promesses de rupture et de meilleure efficacité. Entre absence de leadership dans la gestion des crises du continent et financement adossé à la charité internationale, l’UA semble être une organisation moribonde et chancelante. La nouvelle Commission, avec à sa tête le Djiboutien Mahamoud Ali Youssouf, est attendue comme une occasion de la dernière chance pour redresser la barre.

L’Editorial de Seidik Abba, Rédacteur en chef de Mondafrique

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Disons-le avec franchise et dans les termes les plus adéquats : plus de vingt ans après son premier sommet fondateur en 2002 à Durban, en Afrique du Sud, l’Union africaine n’a pas tenu la promesse d’une rupture totale avec l’Organisation de l’unité africaine dont elle est l’héritière et qui était à l’époque perçue plus comme un « syndicat de chefs d’Etat » qu’autre chose.

Des succès au crédit de l’OUA

A l’analyse, on peut même dire que l’OUA aura finalement beaucoup mieux que l’UA. En effet, on peut mettre au crédit de la toute première organisation continentale africaine, créée le 24 mai 1963 à Addis-Abeba, en Ethiopie, d’avoir conduit le parachèvement de la libération de l’Afrique du joug colonial, d’avoir terrassé en avril 1994 le régime raciste sud-africain fondé sur la ségrégation raciale ainsi que de nombreux efforts en faveur de l’unité et de la solidarité africaine.

Sous l’égide de l’OUA, de nombreux intellectuels africains se sont précipités à Conakry aux côtés du régime d’Ahmed Sékou Touré qui venait de dire Oui à l’indépendance immédiate et non au maintien dans la communauté française lors du référendum de septembre 1958 proposé par le général de Gaulle. C’est au nom de cette même solidarité africaine que d’autres intellectuels africains se sont précipités à Bamako pour apporter soutien et assistance technique au Mali de Modibo Keita.

Il faut enfin mettre au crédit de l’OUA d’avoir pris en juillet 1964 au Caire la décision de consacrer l’intangibilité des frontières héritées de la colonisation.  Si cette décision peut aujourd’hui susciter de vifs débats voire la controverse, il faut reconnaitre qu’elle était la moins mauvaise pour cette époque. Après le changement de nom intervenu à Durban, l’Union africaine a-t-elle fait mieux que l’Organisation de l’Unité africaine ?

Changement cosmétique

Je n’en suis pas du tout sûr. A l’épreuve des faits, la nouvelle organisation s’est révélée être une énorme machine bureaucratique qui s’est dotée certes d’organes différents de ceux de l’OUA, mais qui n’auront finalement apporté aucune valeur ajoutée. Certes la Commission de l’UA a remplacé le Secrétariat général de l’OUA ; certes que le président de la Commission de l’UA a remplacé le SG de l’OUA ; certes que le Conseil de paix et de sécurité (CPS) a été créé alors qu’il n’existait pas du temps de l’OUA.

Mais, au final ces changements sont restés superficiels. Ils n’auront pas permis à l’UA d’assumer le leadership des crises africaines. L’impuissance de l’UA sur les guerres dans l’Est de la République démocratique du Congo (RDC), dans la guerre civile au Soudan, la longue crise en Libye, face au défi sécuritaire au Sahel en dit long sur son déficit d’efficacité.

Nul patriote africain n’aura oublié l’humiliation faite en 2011 à l’UA par l’OTAN qui avait alors choisi de lancer ses premières bombes sur la Libye qui alors qu’une délégation des chefs d’Etat africains mandatés par l’Afrique se trouvait déjà Nouakchott, en Mauritanie, en route pour la Libye.

Les chefs d’Etat africains avaient alors dû rebrousser chemin sans même avoir été prévenus par courtoisie par la France de Nicolas Sarkozy, la Grande-Bretagne de Tony Blair et les Etats-Unis de Barack Obama. Cet épisode avait illustré jusqu’à la caricature la marginalisation de l’Union africaine dans une crise africaine. Des acteurs non africains sont aujourd’hui encore en première ligne dans l’aggravation et la résolution des crises africaines.

Commission de la dernière chance

Porté à la présidence de la Commission de l’UA par son 38 ème sommet qui s’est tenu les 15 et 16 février 2025 à Addis-Abeba, le diplomate djiboutien Mahamoud Ali Youssouf aura donc la lourde responsabilité d’inverser la tendance actuelle d’une organisation en dessous des attentes des Africains.

Après les deux mandats de 4 ans du Tchadien Moussa Faki Mahamat, c’est une nouvelle ère qui s’ouvre pour l’organisation continentale avec l’entrée en fonction le 15 mars prochain du nouveau président de l’Union africaine. Ministre des affaires étrangères de son pays depuis 20 ans, M. Ali Youssouf aura besoin de bien plus que sa parfaite connaissance des arcanes de l’UA et ses qualités de technocrate polyglotte (anglais, arabe et français) pour redresser la barre.

S’il veut réussir là où ses prédécesseurs ont échoué le diplomate djiboutien n’aura aucun autre choix que d’engager des réformes structurelles et profondes pour assurer une meilleure efficacité à l’organisation. A peine installé dans son bureau, il lui faudra surtout reprendre en main la gestion des dossiers les plus urgents, notamment la guerre dans l’est de la RDC et la guerre civile au Soudan.

Ce qui suppose courage politique et leadership, mais aussi une refonte totale du Conseil de paix et de sécurité de l’UA. Mahamoud Ali Youssouf devra également régler rapidement l’épineuse question du financement des programmes de l’UA assurés aux deux-tiers actuellement par des partenaires extérieurs.

Avec sa vice-présidente, l’Algérienne Selma Malika Haddadi et ses six commissaires, le président de la Commission dispose de quatre années devant lui pour rétablir le rêve d’une Union africaine plus efficace et plus crédible que l’Organisation de l’Unité africaine. Ce pari-là n’est pas gagné d’avance.

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L’ivresse du pouvoir fabrique des demi-dieux en Afrique https://mondafrique.com/libre-opinion/livresse-du-pouvoir-fabrique-des-demi-dieux-en-afrique/ https://mondafrique.com/libre-opinion/livresse-du-pouvoir-fabrique-des-demi-dieux-en-afrique/#respond Thu, 20 Feb 2025 10:00:00 +0000 https://mondafrique.com/?p=127892 L’exercice du pouvoir prend parfois en Afrique des tournures iconoclastes, du Cameroun où Paul Biya cherche à 92 ans à succéder à lui-même, après avoir dirigé son pays pendant 42 ans, au Tchad où Mahamat Deby s’est fait bombarder maréchal comme son père auquel il a succédé par la force, en passant par la Guinée […]

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L’exercice du pouvoir prend parfois en Afrique des tournures iconoclastes, du Cameroun où Paul Biya cherche à 92 ans à succéder à lui-même, après avoir dirigé son pays pendant 42 ans, au Tchad où Mahamat Deby s’est fait bombarder maréchal comme son père auquel il a succédé par la force, en passant par la Guinée où le lieutenant-colonel Mamadi Doumbouya a été propulsé au grade de général de corps d’armée sans autre fait d’arme que celui d’avoir perpétré un coup d’Etat en septembre 2021. Dans cette remarquable Chronique, le journaliste et écrivain ivoirien Venance Konan, grand prix de littérature d’Afrique noire en 2012, explore, sur un ton détaché, humoristique et agréable à lire les facettes du pouvoir en Afrique, en précisant que, comme l’Américain Donald Trump, certains dirigeants africains sont en fait des demi-dieux.

Par Venance Konan. 

Il est arrivé, le nouvel homme fort que tout le monde attendait aux Etats Unis, ce pays où on ne sait plus qui est homme ou femme. Il est arrivé, Trump ! Un garçon pile, comme on dit du côté d’Abidjan. Il dit ce qu’il fait et fait ce qu’il dit. Que les transgenres et trans-machins dégagent de l’armée ! L’armée américaine, c’est une histoire de garçons piles. Il avait aussi dit qu’il ne voulait plus d’immigrés illégaux dans son pays, surtout les Haïtiens qui mangent les chiens et les chats de braves Américains. Il les a mis dans des avions et les a renvoyés chez eux. Il y a aussi des chiens et des chats dans leur pays. Qu’ils aillent les manger. Les autres, il les envoie à Guantanamo.

Biya vaut 100 professeurs d’université

Il est en train de mettre aussi le monde entier au pas. Surtout les Européens à qui il a dit de se débrouiller désormais pour assurer leur sécurité. Il a dit qu’il veut le canal de Panama. Il l’aura. Il a aussi dit qu’il veut le Groenland, le Canada et la bande de Gaza pour en faire une sorte de club Méditerranée. Il les aura. Il est fort, Trump. Les Gazaouis ne seront peut-être pas contents, mais de toutes les façons ils ne seront plus là pour protester.

On ne parle que de Trump depuis quelque temps, et l’on oublie qu’il n’est pas le seul homme fort dans ce bas monde. Eh oui ! l’Afrique en compte beaucoup qui sont infiniment plus forts que le président américain. Ainsi, j’ai lu à la « une » d’un journal camerounais ce titre : « A 92 ans, Paul Biya réfléchit comme 100 professeurs d’université. » Trump, aussi puissant qu’il est, peut-il se comparer à cet homme ? Lui Trump, il a besoin qu’un Elon Musk lui souffle ce qu’il doit dire. Pas Biya. Et puis, dans quatre ans, Trump sera obligé de débarrasser le plancher. Paul Biya, lui, il est là depuis plus de quarante ans et il y a des chances qu’il soit encore là. Normal pour un homme qui à 92 ans réfléchit comme 100 professeurs d’université. Bien sûr, des esprits chagrins se demanderont comment le Cameroun peut être dans cet état avec un tel génie à sa tête. Non, il ne faut pas voir les choses de cette façon. Il faut se dire plutôt qu’heureusement que Paul Biya était là. Sinon, la situation aurait été pire. Sans son intelligence et sa longévité au pouvoir, le Cameroun serait une vulgaire république cacaoyère ou makossa, où la guerre civile ne serait pas cantonnée à l’ouest du pays, mais partout, où la pauvreté ne toucherait pas qu’une partie de la population, mais TOUTE la population. Donc les chefs traditionnels camerounais et de nombreux autres Camerounais veulent que Paul Biya mette encore son cerveau supersonique au service de son pays et ils ont raison.

Les Deby, maréchal de père en fils

A côté du Cameroun, il y a le Tchad. Ce pays est dirigé par Mahamat Idriss Déby Itno, âgé de 41 ans en avril prochain et élevé à la dignité de maréchal le 9 décembre dernier. Son père, Idriss Déby Itno était le président du Tchad et avait lui aussi élevé à la dignité de maréchal peu avant qu’il ne soit trucidé sur le champ de bataille. Eh non, le bâton de maréchal ne protège pas des balles. Mahamat Idriss Déby Itno, disons Déby Junior, pour simplifier les choses, a pris la tête d’un conseil militaire de transition à la mort de son père, a court-circuité la constitution, et est devenu président. En langage plus clair, il a fait un coup d’Etat pour s’imposer et il a réprimé dans le sang ceux qui voulaient le contester, comme on fait dans tous les coups d’Etat qui se respectent. Quels sont les hauts faits d’armes qui justifient son élévation à la dignité de maréchal ? Il est le président, et c’est déjà ça. Cela justifie qu’il ait le grade le plus élevé dans l’armée.

Mamadi Doumbouya, le général d’opérette

En Guinée Conakry et au Mali, les galonnés qui ont pris le pouvoir se sont tous bombardés généraux. C’était avant que Déby Junior ne soit devenu maréchal. Il vient de leur montrer jusqu’où on peut aller lorsqu’on a le pouvoir, et surtout les fusils. Ne soyez donc pas étonnés que les généraux guinéens et maliens se bombardent bientôt maréchaux. Nos militaires, lorsqu’ils accèdent au pouvoir connaissent une accélération fulgurante dans l’évolution de leurs carrières militaires. Eyadema était un sous-lieutenant dans l’armée française, il est devenu général lorsqu’il a pris le pouvoir. Pareil pour Samuel Doe du Liberia qui est passé de sergent-chef à général en un rien de temps, et Mobutu qui a fini maréchal, etc.

Il n’y a pas de quoi s’étonner. Nos chefs deviennent très intelligents dès qu’ils accèdent au pouvoir. Ils réfléchissent alors comme cent professeurs d’université, même à 92 ans, maitrisent tout l’art de la guerre en un temps record au point de devenir des maréchaux. Bien sûr, être maréchal n’empêche pas de mourir sur un champ de bataille, mais il s’agit là d’un regrettable accident qui ne saurait empêcher un fils de maréchal de devenir lui aussi maréchal. Ça se transmet aussi par le sang. Quand on est chef en Afrique, on devient automatiquement un demi-dieu. Alors, vivent nos demi-dieux.

Venance Konan

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L’Intelligence Artificielle façon Musk, une arme de destruction massive https://mondafrique.com/libre-opinion/lintelligence-artificielle-facon-musk-une-arme-de-destruction-massive/ https://mondafrique.com/libre-opinion/lintelligence-artificielle-facon-musk-une-arme-de-destruction-massive/#respond Wed, 19 Feb 2025 07:17:07 +0000 https://mondafrique.com/?p=127789 Notre chroniqueur et ami Xavier Houzel est effrayé par les perspectives ouvertes par un Elon Musk, bras droit de Trump, qui tire « son pouvoir et son aura » de l’Intelligence Artificielle, « la sienne, bien entendu ». Elon Musk se présente aux États-Unis tel Protée, sachant tout du passé et du présent et doté du pouvoir de prophétie […]

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Notre chroniqueur et ami Xavier Houzel est effrayé par les perspectives ouvertes par un Elon Musk, bras droit de Trump, qui tire « son pouvoir et son aura » de l’Intelligence Artificielle, « la sienne, bien entendu ».
Xavier Houzel, spécialiste du Moyen-Orient et des questions pétrolières
Elon Musk se présente aux États-Unis tel Protée, sachant tout du passé et du présent et doté du pouvoir de prophétie et de la faculté de se métamorphoser : il nous propose tout à coup , avec Grock 3, l’IA soi-disant « la plus intelligente sur terre[i] » ! Comme il tire son aura et qu’il détient son pouvoir de l’IA, des innovations et des ruptures correspondantes, il commence par faire table rase du passé en tentant de remplacer en bloc une nuée de fonctionnaires américains par l’IA – la sienne, bien entendu. Il fait à cette occasion la chasse au renseignement, qu’il s’agisse du FBI ou de la CIA, ou du Fisc et de la sécurité sociale, car il lui faut les données de leur clientèle pour s’en approprier aussitôt les clés, pour les référencer et les faire mouliner avec ses propres algorithmes, qu’il s’agisse des électeurs ou des contribuables, c’est-à-dire de tous les citoyens, et cela sans autorisation de personne ni la moindre protection de la vie privée des gens. Ce qui est ahurissant !
Après l’Amérique du Nord, pourquoi ne pas s’attaquer au reste de l’Humanité, avec la force de frappe des USA ? Sans limites aucunes. Le vice-président Vance reproche dès aujourd’hui à l’Union Européenne de brider ladite IA pour en contrôler les dérives éventuelles ! Il préfigure alors ce que sera le « monde d’après ». Mais nous sommes à la fois loin de l’ère du Sud Global et de son heure et de l’invention d’un nouvel ordre mondial, éventuellement favorable au groupe des BRICS, tel que le conçoit un universitaire comme Bertrand Badie

L’IA va trop vite

Nous sommes aussi tout près d’un effondrement civilisationnel de l’ancien monde, parce que l’IA va trop vite ! La course se fait sur une corde raide. Une nouvelle forme de colonisation par la conformité des messages et par l’uniformité induite de la pensée risque de balayer toute volonté de rupture avant que les colonisés n’aient eu le temps de s’en prémunir. Nombre de métiers disparaîtront, d’autres les compenseront, comme jadis et depuis l’invention de la roue, là n’est pas la question ! Les philosophes et les théologiens se penchent sur le problème. Les flux migratoires, par exemple, devront être régulés pour éviter la « submersion » des civilisations par le nombre, et puis les naissances et puis la démographie….mais ce n’est pas l’IA qui y pourvoira ! La « démocratie » fonctionnera par algorithmes intercalés. Cela donne le vertige :  monsieur Vance semble vouloir le nier, en créant un tohu-bohu jamais atteint auparavant quand il morigène la vieille Europe à ce propos. Qu’il ait raison ou qu’il ait tort, à terme, ce sera le retour à l’ordre primordial, à la révision des échelles de valeurs et des rapports de forces. C’est dangereux.
Deuxième chuchotement d’Elon Musk, bruissant comme un méchant acouphène dans les oreilles présidentielles: l’armement et la monnaie (le sacro-saint Dollar), qui faisaient la puissance de l’Amérique, risquent d’être trappés d’obsolescence ! Le char de combat et l’avion de chasse « à coups de millions » n’auront plus besoin d’équipages ; ils seront impuissants devant les attaques de plus petits que soi « au prix d’une poignée de Dollars » ; seulement. Le drone est devenu intelligent ! Et même très intelligent (beaucoup plus malin que ne peut l’être un char, trop compliqué).

L’esprit de conquête

Le même Protée poursuit cependant en murmurant à l‘oreille du président que le réchauffement climatique va libérer des glaces – sous la double influence de l’homme et des cycles naturels tels que l’oscillation Nord-Atlantique – la plus grande partie des eaux et des continents inclus dans le Cercle polaire Arctique. Or ce rivage invisible borde des pays aussi variés que l’Alaska, le Canada, le Groenland, l’Islande, la Norvège, la Suède, la Finlande et la Russie (notamment la Sibérie). Les satellites de Starlink (près de 7.000 unités) disent que les icebergs y fondent à toute allure mais surtout qu’il existe, au-delà de cette ligne de démarcation, un No man’s land immensément riche encore à conquérir.
Nonobstant un traité datant de 1920 – celui de Svalbard, instauré pour réglementer l’inlandsis arctique[ii] – les Américains aimeraient bien bouter hors de l’Arctique les Russes et les Européens. En réalité, ce sont les Chinois que l’Amérique redoute le plus en Arctique, sachant que le « premier arrivé » pourrait y contrôler les eaux (la pêche), le sol (l’agriculture et les forêts), le sous-sol (les terres rares et les hydrocarbures) et les accès (la route du Nord sera bientôt ouverte aux tankers toute l’année). Les Chinois ont l’inconvénient d’être trop nombreux, ce qui se transforme en avantage quand il s’agit de peupler des pays vierges ! La région arctique a d’autre part un caractère stratégique évident depuis la guerre froide, les missiles balistiques de la Russie pouvant facilement passer par le pôle Nord vers le continent américain !
Ces considérations sont de nature à faire resurgir l’esprit de conquête qui anima jadis les ancêtres d’Elon Musk et de Donald Trump ! Aussi le tandem formé par le Sud-Africain et le pionnier yankee ne résiste-t-il pas à la tentation de mettre la main sur le trésor du Cercle Arctique Polaire. La population autochtone du Grand Nord Canadien, du Groenland ou de la Sibérie orientale qu’on nomme « les Esquimaux » est beaucoup moins nombreuse que les tribus « Indiennes » de la conquête de l’Ouest ou que les peuplades bantouphones de la Colonie du Cap.
C’est l’une des raisons pour lesquelles les États-Unis réclament sans vergogne aussi bien le Canada que le Groenland et c’est pourquoi ils se  retirent sine die – sans aucune explication valable – de traités tels que l’Accord de Paris de 2015, adopté dans le cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC), ainsi que de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), de la même manière que, le 8 mai 2018, le président américain d’alors, le même Donald Trump, avait annoncé le retrait des États-Unis de l’accord de Vienne, en accompagnant sa décision brutale de sanctions économiques accablantes contre l’Iran ! L’Europe s’était alors couchée, la France la première… anticipant ainsi sur son retour à la case zéro de l’ordre primordial (en vigueur lors du dernier refroidissement global, ou de la dernière glaciation terminée il y a 12.000 ans), quand le dominant primait obligatoirement sur le dominé – avant l’existence de  « nations », avant les « valeurs », avant Homère, avant Tocqueville ! Et voilà enfin pourquoi, Donald Trump et son équipe se précipitent chez MBS (qui a les sous, dont la Russie pourrait avoir besoin pour se remettre de la guerre et développer la Sibérie) pour y rencontrer le président Poutine. L’affaire de l’Ukraine sera une bonne affaire pour les trois : l’un sera remboursé en terres rares et l’autre en territoires. Trump veut à tout prix éloigner la Russie de la Chine et MBS, gardien au nom de son père des Deux Mosquées, veut être dans la cour des grands, sachant que les Russes sont ancrés aussi solidement à Mourmansk qu’ils entendent le rester aussi durablement à Vladivostok.
Pour le reste, les Russes et les Perses se méfient l’un de l’autre depuis toujours. Poutine est relativement isolé. Les Chinois ne sont pas invités. Quant aux Européens, ils sont anéantis. 

Les jeux de rôle de la diplomatie

Avec la fin du libre arbitre de l’homme (battu par plus intelligent que lui, mais pas obligatoirement par le plus fort), avec la fin de la diversité démocratique (tout le monde obéissant à la même intelligence supérieure), avec l’altération du principe de puissance (jusqu’alors caractérisé par la force), avec la dévalorisation de la notion de frontière (celles des traités, de celui de Berlin ou celui de Svalbard et d’une kyrielle d’autres lignes de partage négociées), avec la démonétisation des organisations internationales et de leurs chartes en déshérence, la communauté des nations risque de s’effondrer sous elle-même. Les traits des civilisations hier vivantes iront en s’estompant, à cause de l’IA, qui, entre temps, sera une « super IA » assistée d’ordinateurs quantiques « réagissant uniformément » et en temps réel. Justement, c’est imparable !
L’Histoire récente et la géographie sont certes encore prégnante de la colonisation des Phéniciens à Carthage, de celle de Rome sur le pourtour méditerranéen, des Chinois dans le Sud-Est Asiatique et jusqu’en Sibérie, des Ottomans, de la France ou de la Grande-Bretagne et du reflux – pour ne pas dire de la décadence – de leurs empires. On admet que sans le désastre de Diên Biên Phu et surtout sans la pantalonnade infligée à la France à 60 kms du Caire devant les menaces soviétiques et les semonces américaines du 7 novembre 1956 – lorsque « l’Opération Mousquetaire »  tourna à l’avantage diplomatique pour Nasser – la Guerre d’Algérie n’aurait jamais eu lieu. Oui, Nasser, le plus faible, a battu le plus fort, ce jour-là (la Grande-Bretagne, l’État Hébreu et la France, coalisés). Mais c’est épiloguer à revers et nous n’en sommes plus là ! Merci à Moscou et à Washington. La France, l’Angleterre, l’Allemagne sont aujourd’hui dans un même état de décrépitude sans qu’il n’y ait là de rapport avec la « décolonisation ». Avec la mondialisation, la téléphonie et internet, tout le monde colonise dorénavant tout le monde de multiples façons. Et j’ajoute, pour parler du faible qui bat le plus costaud, que l’Afghanistan a battu à plate couture successivement l’Union Soviétique et les États-Unis d’Amérique. Les colonisés d’hier sont les colonisateurs de demain, démarche à laquelle ils s’adonnent le plus souvent sans expérience ni mesure, directement ou par intermédiaire : les USA en sont l’exemple le meilleur. Au mieux, ils font des enfants « à la mitrailleuse » et ils investissent l’ancienne métropole.
La Diplomatie devrait enfin  pouvoir jouer. Mais alors sans IA et hors la vue de toute caméra. 
 

[i] https://www.ladepeche.fr/2025/02/17/intelligence-artificielle-4-choses-a-savoir-sur-grok-3-le-nouvel-agent-conversationnel-delon-musk-12518470.php

[ii] Ce dernier autorise ses signataires (le Canada, le Danemark, les États-Unis, l’Islande, la Norvège, la Russie, la Finlande, la Suède, la Chine et d’autres) à exploiter la zone arctique (pêche, chasse, tourisme, recherches scientifiques, industrie…). Exception faite à la Chine, pourtant signataire, n’ayant accès à aucun de ces droits.

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Donald Trump, l’idéologue de l’ultra libéralisme   https://mondafrique.com/libre-opinion/donald-trump-lideologue-de-lultra-liberalisme/ Mon, 17 Feb 2025 07:46:20 +0000 https://mondafrique.com/?p=127609 Trump est revenu au pouvoir le 20 janvier 2025. Depuis la fin de son précédent mandat et, plus particulièrement, durant toute sa campagne de réélection (qui a débuté en 2023), le nouveau président américain n’a cessé de répéter ce qu’il voulait faire s’il était réélu. Sa ligne de conduite semble claire et évidente avec ses […]

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Trump est revenu au pouvoir le 20 janvier 2025. Depuis la fin de son précédent mandat et, plus particulièrement, durant toute sa campagne de réélection (qui a débuté en 2023), le nouveau président américain n’a cessé de répéter ce qu’il voulait faire s’il était réélu. Sa ligne de conduite semble claire et évidente avec ses slogans « America First » et « We want to make America great again ».

Une chronique de Malek El Khoury

Durant le premier mandat de Trump, il avait la même politique. Il a toujours appliqué ce qu’il disait et disait ce qu’il appliquait. Ses caractéristiques sont claires. C’est un commerçant, une personne qui ne croit pas à l’efficacité des guerres militaires (qui est différent du soutien à l’armée), mais à celle de la guerre économique avec le dollar et les sanctions. C’est un négociateur. Comme tout homme d’affaires, il démarre en mettant la barre de ses exigences très haut, afin de pouvoir faire des concessions ultérieures qui sont partie intégrante de toute négociation.

Donald Trump n’aime pas perdre. Il a son caractère particulier et n’est pas toujours dans la logique de la solution win-win. En tous cas, il n’accepte pas de descendre en dessous d’un certain seuil, comme tout commerçant qui doit négocier le prix de son produit.

Le nouveau président français est transparent dans sa politique, dans ses objectifs et dans sa manière de fonctionner. Il sait très bien où il veut arriver. La grande inconnue dans la politique de Trump est la manière dont l’autre partie, la partie « adverse », discute et négocie avec lui. Trump fait ses calculs, mais il peut très bien se tromper. Dans ce cas il sortira un plan B ou un autre lapin de son chapeau, ou alors il augmentera la pression, puisqu’il est à la tête de la plus grande puissance de la planète et peut se le permettre. Certes, le résultat de cette « négociation » est totalement inconnu. Il souhaite tout le temps gagner, ce qui n’est, évidemment pas toujours possible. Trump est un pur produit de l’ultra-libéralisme économique, qui pense que tout peut s’acheter et se vendre.

En face de lui, il a une multitude de nations, de pays, d’entités institutionnelles (ONU, OTAN, ASEAN, UE, l’OCS, etc.) qui vont, eux aussi, ne pas vouloir perdre dans les négociations avec les USA et, au minimum ne pas perdre les acquis, longuement et durement obtenus à travers l’histoire récente. Ces entités sont autant attachées à leur souveraineté, individuelle ou collective. Elles ne souhaitent nullement devenir dépendantes des USA. Alliées, peut-être, mais pas soumises. Elles vont donc aussi utiliser les moyens de bord pour défendre leurs intérêts.

Or Trump, dès son retour au pouvoir, s’étant longuement et amplement préparé, paré de son expérience précédente avec l’administration américaine, et, surtout, n’ayant plus le souci de sa réélection, a foncé comme un taureau dans l’arène de la planète entière. Il a immédiatement tenté de mettre en application tout ce qu’il avait promis durant sa campagne. En l’espace de moins d’un mois, il a pris position par rapport à (presque) la terre entière (Canada, Mexique, Panama, Groenland, Europe, Chine, Russie, Proche-Orient, guerres en Europe et au Proche-Orient) et même à l’intérieur des USA (LGBT, migration, etc.).

Son équipe était déjà choisie et savait quoi faire. Il a fait comme d’habitude. Il applique ce qu’il a promis de faire. Il a décidé d’affronter le monde entier en même temps.

Cette politique a complètement déstabilisé le monde (sauf les dictatures, paradoxalement mieux préparées), car tout ce monde pensait qu’il allait étaler sa guerre contre la planète dans le temps. Comment vont réagir les autres, ceux qui se trouvent de l’autre côté de la table des négociations ?

Vont-ils s’unir, former un front uni, dialoguer chacun séparément en direct, discuter à partir d’entités dont ils font partie ? C’est cela la grande inconnue et non pas Trump. De plus, à part certains qui étaient prêts, la grande majorité semble être prise au dépourvu, comme l’Europe, par exemple. « Nous allons réfléchir pour essayer de trouver la meilleure solution ». Voilà la réponse de cette majorité désarçonnée par la rapidité et la clarté de Trump.

En fait nous nous trouvons dans une lutte idéologique politique profonde entre l’ultralibéralisme universel et les Etats-Nations enfermés dans ses frontières.

Le premier considère que l’argent peut tout faire et que l’objectif ultime c’est le profit maximal. L’accumulation de richesses est son moteur principal. Les frontières n’existent pas, les différences culturelles et autres critères non plus. Une monnaie commune simplifierait les échanges et permettrait une meilleure rentabilité. On pourrait donc associer l’idée de la création d’un empire américain avec pour Bible/Evangile/Coran l’ultralibéralisme et pour Dieu unique, l’Argent, de préférence le dollar américain.

 

Les Etats-Nations, de leur côté, sont basés sur des principes de frontières géographiques bien délimitées, d’une monnaie locale, et d’une homogénéité (linguistique, culturelle, religieuse, etc.) de ses citoyens (ce qui n’a presque jamais été le cas). Ceux-ci se trouvent actuellement dans une crise profonde (surtout pour les démocraties qui ont toujours eu de la peine à gérer leurs minorités). Ces Etats-Nations cherchent à préserver leurs différences culturelles, linguistiques, de mœurs et de rituels. Certains états ont jugé utile de se rassembler dans des entités plus larges pour mieux défendre leurs intérêts (comme l’UE ou l’EURO), puisqu’elles se ressemblent dans leur structure politique.

 

Dans ces Etats-Nations, il existe des mouvements d’extrême-droite qui se rapprochent de l’ultralibéralisme et qui ont actuellement le vent en poupe. Ceux-ci sont des alliés tacites de Trump, car ils ont la possibilité de « miner » l’ordre préétabli dans les Etats-Nations dits « démocratiques » et donc de faciliter la tâche de l’instauration du nouvel empire américain.

 

Qui l’emportera dans cette lutte idéologique ? Quelles sont les prochaines étapes ? L’ultralibéralisme semble avoir les idées claires, alors que les Etats-Nations semblent ne pas avoir de vision de leur avenir. Arrivera-t-on à une situation de statu quo ? de vainqueur-vaincu ? ou à un nouvel « ordre mondial », comme le prônent les USA depuis longtemps ?

 

Comme toujours, nous espérons le mieux et, surtout, que cette transition ne soit ni brutale ni noire comme certains la craignent.

 

 

 

Beyrouth le 16.2.25

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