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Le bitcoin est une boite noire

La question fondamentale qui se pose est de de savoir si c’est une monnaie, voire une monnaie virtuelle ou une crypto-monnaie. Une chronique de Dov Zerav
Le bitcoin a été créé en 2009 en pleine crise financière. Est-ce la manifestation de la défiance à l’égard d’un système financier et bancaire qui avait failli ? Huit ans après, c’est une exceptionnelle victoire sur une forme « d’ancien monde ». En commençant l’année à 1 000 $ et la terminant à près de 16 000, après avoir dépassé 18 000 $, 2017 est « the bitcoin year » !
Le succès du bitcoin est également une des nombreuses manifestations de la mondialisation qui fait de notre planète un grand village ; le bitcoin est devenu comme certaines expressions ou comportements un des éléments constitutifs du citoyen du monde.
L’explosion du bitcoin n’a été possible que grâce à l’internet. Le bitcoin est le bébé de la toile, de la dématérialisation croissante de notre monde, de la gestion en temps réel des mouvements financiers en tout point de la planète.
La monnaie assure trois fonctions :
Le bitcoin semble avoir les attributs d’une monnaie. Mais qu’en est-il de la crédibilité du bitcoin ? Normalement, il n’y a pas de création monétaire sans contrepartie. Toute monnaie a quatre contreparties possibles détenues par la banque centrale émettrice : l’or, les devises, les créances sur l’Etat et les créances sur les entreprises ; ils garantissent la valeur de la monnaie, et sa capacité à ne pas piéger l’épargnant. Il n’y a pas si longtemps, on pouvait encore aller au guichet de la banque centrale et échanger la monnaie en or. La confiance dans les Etats et les économies a accompagné le développement des monnaies. La spécificité du bitcoin est de bénéficier de la confiance de certains alors qu’il n’est gagé sur rien ! Formidable prouesse.
Un des problèmes essentiels du système qui s’est développé est l’absence totale de transparence. Le bitcoin ne relève d’aucun Etat, d’aucune banque centrale, d’aucune banque commerciale, d’aucune entreprise. Mais alors, qui a conçu et mis en place les logiciels informatiques qui créent les bitcoins et font fonctionner le système. ? Qui le contrôle ? Qui est l’auteur de l’algorithme censé plafonner le nombre de bitcoins à 21 millions ? Qui a compétence, qualité pour vérifier ? Les informations sur le produit et le marché ne sont pas disponibles ou vérifiables. Plus on approche le plafond des 21 millions, plus le cours monte, malgré les accrocs du marché, plus il est difficile d’en acquérir, plus les derniers entrants risquent d’être les grands perdants.
A un moment où les Etats et les autorités monétaires et bancaires traquent les paradis fiscaux, la fraude fiscale ou les activités criminelles ou illicites, comment faire pour éviter que le système ne devienne une formidable machine de blanchiment d’argent sale.
Le bitcoin s’est développé malgré des faillites de plates-formes frauduleuses, des piratages, de nombreuses manipulations…La multiplication par seize du cours du bitcoin durant l’année écoulée démontre au minimum un engouement, et peut-être la constitution d’une formidable bulle qui, à un moment ou un autre explosera. Pour marquer leur prudence à l’égard des marchés, les boursiers ont coutume de dire que les montagnes, quelles que soient leur hauteur, ne montent pas au ciel, et qu’il en est de même pour les cours de Bourse…
Cela explique la difficulté à comprendre : sommes-nous face à un nouveau jeu de hasard, comme au casino, ou en présence de l’émergence d’un mouvement qui va balayer de nombreuses idées reçues. La Bourse de Chicago a lancé un produit dérivé sur le bitcoin. Sommes-nous face à un phénomène identique aux hedge funds, subprimes, et autres produits spéculatifs ?
Quel que soit la fascination qu’exerce le bitcoin, le phénomène doit être pris au sérieux et ne peut être sous-estimé. Avec 17 millions de bitcoins en circulation, c’est une masse financière de près de 300 Mds$ qui est en jeu. Certains pourraient considérer que l’ampleur n’est pas importante au regard des 100 000 Mds$ en circulation dans le monde. Mais le monde ne peut se permettre, dix ans après la crise des subprimes, une nouvelle catastrophe. Les autorités doivent trouver les moyens de contrôler le phénomène, pour éviter qu’il ne soit utilisé pour des activités criminelles ou illicites, sans pour autant brider l’imagination particulièrement propice avec la dématérialisation.
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