L’Algérie aime les symboles historiques. Le lundi 5 Octobre, trente deux ans après les manifestation sanglantes du 5 octobre 1988, les militants du Hirak s’opposent au vote de la nouvelle constitution qui devrait être proposée au peuple algérien un 1er Novembre, début de la guerre de libération. Une bataille de dates? Pas seulement!
Une chronique de Mohand Tamgout
Tous les gouvernements à travers le monde planifient des stratégies pour combattre la Covid19 en déployant des moyens humains et matériels afin de réduire sa menace. Exception notable, le système algérien a fait de la pandémie un allié objectif dans la restriction des libertés et des revendications citoyennes qui ont tenté par une manifestation, le 5 octobre, d’ouvrir une nouvelle brèche contre le pouvoir. Résultat: vingt interpellations. La guerre a rerpis entre le pouvoir et le Hirak.
Le système qui a fait des concessions énormes à la communauté internationale, notamment la possibilité d’intervention militaire à l’extérieur, a choisi une date importante pour asseoir sa légitimité et marquer de sa marque le sceau de la « nouvelle Algérie ». Le 1er novembre, coup de départ de la guerre de libération, un référendum populaire devra adopter la nouvelle constitution. Cette dernière ne fait pas consensus au sein de la société civile, ni au sein des clans du système, même si tout débat public est écarté.
Cette énième constitution octroie au président les prérogatives d’un empereur et au peuple le rôle de spectateur. L’image est idyllique en apparence mais chaotique en substance, un président comme « paravent impérial » désigné par des militaires contre un vent sournois du hirak reprenant graduellement ses forces tout en maintenant sa dynamique en ordre de marche.
Si le système continue à faire des dates symboliques un fond de commerce électoral, il n’en demeure pas moins que l’adhésion à sa démarche ne trouve pas un engouement consensuel. Force est de constater qu’il va passer encore une fois en force puisqu’ayant l’assurance des puissances internationales compte tenu des concessions intégrées cyniquement dans la nouvelle constitution de sa « nouvelle Algérie ».
Habitué à la compromission, le système accepte l’attribution du rôle auxiliaire à son armée dans la gestion des conflits régionaux et internationaux. Faute de légitimité, il ne peut qu’approuver les recommandations des grandes puissances à défaut de défendre l’intérêt national en Libye et au Mali.
Quant à la pression populaire, elle reprend sa dynamique d’avant la Covid en maintenant ses revendications intactes: le départ du système illégitime et l’ instauration d’un état de droit, civil et démocratique. Contrairement au système, il ne bénéficie d’aucun soutien externe et compte seulement sur ses forces intérieures et sur sa détermination de conduire le processus jusqu’à son terme. « Antouma ma tkhaoufounach et Teboune ma Yahkamenach », vous (militaires) vous ne faites pas peur et Tebboune ne peut nous gouverner » tel était le slogan scandé ce lundi à Akbou et à Alger.
Le message est aussi limpide que l’eau de la roche. Ni les militaires ni sa façade civile ne peut nous arrêter la détermination d’une jeunesse prête à toute épreuve dans le cadre de la Silmya « pacifique ».
La puissance de la pression populaire du Hirak repose sur des forces intrinsèquement ancrées au sein de la société. Bien que disparates, elle a réussi à maintenir une opposition frontale au système lequel tente par tous les moyens pour aboutir à sa désintégration. La restructuration des services et le recours aux anciens officiers du DRS, pourtant bien rodés aux manipulations de tout acabit, n’a pas pu mettre bas une jeunesse déterminée à poursuivre son œuvre.
Loin des compromis, le système impose ses visions et ses actions. Il ne cherche aucune une solution politique ni aucun débat pour les revendications du Hirak. En revanche, il dispose d’un calendrier et carnet de route qu’il maintien à appliquer sur le terrain. Il compte sur ses moyens colossaux, les forces constituées (services de sécurité, l’armée, la police, gendarmerie), mais aussi d’une force persuasive mise au pas : la justice de Belkacem Zoghmati.
Le 05 Octobre2020 est le coup d’annonce du retour du Hirak rappelant les sacrifices de la jeunesse du 05 octobre1988 par l’intervention démesurée de l’armée dirigée par les DAF. Il s’agit d’une démarche subtile qui convoque l’histoire comme témoin oculaire lui rappelant le sang versé d’une jeunesse éprise de liberté sacrifiée sous l’autel des calculs politiciens d’un système aux abois. Le Hirak actuel intègre celui de 1988 pour l’inscrire dans la trajectoire de l’histoire qui se terminera forcement par l’aboutissement ses revendications légitimes.
A chacun ses dates historiques, le Hirak comme le système s’attèlent à justifier son existence, à réaliser ses objectifs. Le vainqueur est celui qui serait maintenir une endurance, disposant de ressources internes lui permettant de contre-carrer les assauts de son adversaire permanent. En Algérie, c’est toujours le peuple qui a écrit l’histoire à sa façon, avec sa lenteur, ses détournements, tout en sachant mettre à la fin son point final « L’histoire enseigne aux homme la difficulté des grandes tâches et la lenteur des accomplissements, mais elle justifie l’invincible espoir » dixit Jean Jaures