Mohamed Ag Ahmedou: « Alassane Ouattara, le candidat de la stabilité ».

La rumeur était persistante depuis plusieurs semaines. Ce Mardi 29 juillet, elle s’est muée en certitude. Alassane Dramane Ouattara, 83 ans, a annoncé en direct sur la Radiodiffusion Télévision Ivoirienne (RTI) qu’il briguerait un quatrième mandat présidentiel lors du scrutin prévu pour le 5 octobre 2025.

La chronique de Mohamed AG Ahmedou, éditorialiste engagé et un des meilleurs spécialistes de l’Afrique .

« Je suis candidat aux élections présidentielles du 5 octobre 2025. La Constitution me le permet, et ma santé aussi me le permet », a déclaré le chef de l’État ivoirien avec assurance. Un choix assumé, une réponse aux défis sécuritaires et sociaux Pour ses partisans, cette décision est moins un retour qu’une continuité. Alassane Ouattara incarne depuis 2011 une vision économique et sécuritaire qui a profondément transformé le paysage ivoirien.

« La Côte d’Ivoire est aujourd’hui un pôle de stabilité dans une région en feu », confie un colonel de l’armée basé à Korhogo

En un peu plus d’une décennie, l’accès à l’eau potable et à l’électricité a été généralisé dans les zones rurales, une prouesse saluée par la Banque africaine de développement et d’autres institutions régionales. Sur le front de la sécurité, dans un contexte régional marqué par l’instabilité sahélienne, le président Ouattara a mis en place un maillage inédit de radars de surveillance le long des frontières, selon des sources militaires ivoiriennes.

Cette infrastructure de défense vise à contrer les infiltrations jihadistes venues du nord, notamment du Burkina Faso et du Mali qui sont les pays voisins. .

Le poids d’un bilan, la promesse d’une continuité

Depuis l’annonce, les soutiens se multiplient au sein du Rassemblement des Houphouëtistes pour la Démocratie et la Paix (RHDP). Pour beaucoup, le président sortant reste le seul garant de la croissance et de la paix civile. Sous sa présidence, la Côte d’Ivoire a affiché l’un des taux de croissance les plus élevés du continent, avec une moyenne annuelle de 7 % entre 2012 et 2019, en dépit des crises politiques passées. « Les projets de Ouattara touchent le quotidien des Ivoiriens, surtout les plus modestes. L’eau, l’électricité, les routes… Il a changé la vie dans les campagnes », souligne un enseignant de Bouaké.

Même des figures traditionnellement critiques de l’opposition admettent en privé que l’homme d’État a su moderniser l’administration et rétablir la crédibilité de l’État ivoirien. Le spectre du pouvoir perpétuel ? Mais cette annonce ravive aussi les critiques. Certains observateurs dénoncent un retour à une logique de « démocratie verrouillée », où les dirigeants africains , civils comme militaires, tendent à pérenniser leur pouvoir. Paul Biya au Cameroun, 42 ans au sommet de l’État, en est l’exemple patent.

D’autres rappellent la manipulation institutionnelle derrière le coup d’État contre Mohamed Bazoum au Niger, que certains attribuent aux calculs de l’ex-président Issoufou Mahamadou, désireux de maintenir son influence.

Une candidature ambivalente

Dans ce contexte continental, la candidature de Ouattara peut apparaître ambivalente. D’un côté, elle est portée par un bilan économique et sécuritaire tangible. De l’autre, elle s’inscrit dans une tendance lourde en Afrique de l’Ouest : la raréfaction de l’alternance démocratique. Un homme d’État face à l’Histoire Reste que, pour une large partie de la population ivoirienne, Alassane Ouattara reste l’homme du moment.

« L’État fonctionne, les routes sont bitumées jusqu’aux villages les plus reculés. Pourquoi changer ? », interroge une commerçante de Daloa.

Si la présidentielle d’octobre s’annonce disputée, le président-candidat pourra s’appuyer sur un appareil d’État bien rodé et sur une image d’homme fort, compétent. « Je suis prêt. Ce sera mon dernier mandat », a-t-il lancé en conclusion de son intervention. Promesse de sagesse ou parole de campagne ? Le peuple ivoirien tranchera dans les urnes.