Bénéficiant du soutien actif des chefs de l’Etat de la Communauté Economique des Etats d’Afrique Centrale (CEEAC), de l’Algérie, de l’Afrique du sud et du Rwanda, l’ancien ministre des Affaires étrangères d’Idriss Deby Itno ( 2008-2017), Moussa Faki Mahamat a été élu à la présidence de la Commission de l’Union africaine, en janvier 2017. Ses débuts tranchent avec l’immobilisme de celle qui l’avait précèdé, la Sud-africaine Nkosazana Dlamini-Zuma ( 2012-2017).
L’Union Européenne méprisée
Avec son conseiller spécial, le Mauritanien Mohamed el Hacen ould Lebatt, Moussa Faki Mahamat a engagé une politique qui se veut indépendante des liens financiers extérieurs à l’Afrique. Peu importe les mascarades électorales, les violations aux droits de l’Homme, les biens mal acquis, les abandons des principes démocratiques! L’Union africaine de Moussa Faki Mahamat privilégie le soutien aux chefs d’État et le mépris des interventions non africaines et notamment de l’Union européenne et accessoirement de la France.
Son credo est que les crises africaines ne peuvent trouver une solution qu’avec les spécificités africaines, en dehors de toute ingérence extérieure .
Les chefs de l’Etat de la CEEAC n’ont rien à craindre de l’Union africaine. Les réélections controversées des chefs d’État du Burundi, du Congo, du Gabon, de Guinée Équatoriale, du Rwanda et du Tchad ne risquent pas d’être mises en cause. Les condamnations de l’Union européenne sont évidemment rejetées pour ingérence.
Quelques exemples récents sont éclairants.
La décision du président de la République démocratique du Congo (RDC), Laurent Kabila, de reporter les élections présidentielles au-delà de 2017, peut susciter la consternation en RDC et dans les instances onusiennes et européennes, cela n’empêche pas Moussa Faki Mahamat, aidé par le président algérien de la commission Paix et Sécurité, de soutenir Laurent Kabila et même de condamner les sanctions émises par l’Union européenne et l’Onu contre des dignitaires du régime congolais.
De même, le président gabonais, Ali Bongo Ondimba, peut aussi compter sur le soutien de l’Union africaine et son « falicitateur » Hacen oud Lebatt pour résoudre la crise issue de l’élection présidentielle de 2016. L’ancien président de la Commission de l’Union africaine, Jean Ping , doit se faire une raison. Les rapports et condamnations venant de l’Union européenne ou de l’Onu sont sans effet pour l’Union africaine.
En Centrafrique, le double discours du président Faustin-Archange Touadera, arrange aussi Moussa Faki Mahamat. C’est bien la Feuille de route de l’Union africaine, avec une influence indéniable du président tchadien, qui compte et non pas les initiatives venant de l’Onu et encore moins de l’ONG romaine Sant’Egidio. Les anciens chefs de l’Etat François Bozizé, Michel Djotodia voire Catherine Samba-Panza et d’autres prédateurs peuvent dormir tranquilles avec l’Union africaine.
En Angola, la succession du président angolais Eduardo Dos Santos, ne pouvait échapper au MPLA et à son candidat Joao Lourenço. Alors que l’Union européenne avait été préventivement interdite d’observation du processus électoral, la mission de l’Union africaine, dirigée par l’ancien premier ministre cap-verdien, José Maria Neves, n’avait rien trouvé à redire des préparatifs de cette nouvelle mascarade. Il faut rappeler que deux commissaires de l’Union africaine sont angolaises. Et que l’Angola apporte une importante contribution financière à l’organisation continentale.
Proximités algériennes
Le récent incident diplomatique de Maputo, lors du Sommet Afrique-Japon de la TICAD, avec la vive confrontation entre représentants du Maroc et de la Republique Arabe Sahraouie Démocratique, n’a suscité aucune réaction de l’Union africaine. Il est vrai que la proximité de Moussa Faki Mahamat avec l’Algérie et l’Afrique du sud ne lui facilitait pas la tâche.
Le prochain Sommet Union africaine-Union européenne, prévu à Abidjan fin novembre 2017, avec pour thème principal « la Jeunesse », va-t-il voir un remake de Maputo ? Les profondes divergences d’appréciation des deux organisations continentales concernant les droits de l’homme, les principes fondamentaux de la démocratie,
et le déroulement des processus électoraux vont probablement apparaître au grand jour. Les soutiens que l’Union européenne accorde aux mouvements citoyens tels que « Y en a marre » , » Balai citoyen », « Falimbi », » Lucha »…alimenteront probablement les reproches faits par le cartel des chefs d’État africains et leurs représentants à l’Union africaine.