Paris et Washington se pressent pour trouver une solution afin d’éviter une extension du conflit en cours dans la bande de Gaza — déclenché par l’attaque du 7 octobre du Hamas en Israël. La France et les États-Unis auraient reçu des informations concernant l’action d’Israël à mener une guerre au Liban, avec pour objectif le démantèlement de la machine militaire du Hezbollah libanais (soutenu par l’Iran). Les échanges de tirs entre l’État hébreu et le mouvement chiite pro-Téhéran sont quotidiens depuis le 8 octobre.
Un article de Philippe Abi-Akl, pour Ici Beyrouth
L’action diplomatique s’intensifie sur plusieurs fronts pour éviter une extension de la guerre de Gaza au Liban. Dans le communiqué émis à l’issue de la réunion qu’a eue à l’Élysée, le 19 avril, le président français, Emmanuel Macron, avec le Premier ministre sortant, Najib Mikati, et le commandant en chef de l’armée libanaise, le général Joseph Aoun, a souligné « l’engagement du président Macron à assurer le suivi des différents points », notamment en ce qui concerne la situation au Liban-Sud.
Aussi M. Macron a-t-il dépêché le chef de la diplomatie française,Stéphane Séjourné, dans la région pour protéger le Liban des risques imminents qui pèsent sur lui et exhorter les différentes parties à cesser les hostilités. Cette action intervient à la suite d’informations « précises et alarmantes » que Paris et Washington ont reçues concernant l’intention d’Israël de mener une guerre au Liban pour démanteler la machine militaire du Hezbollah afin d’assurer la sécurité de ses colonies.
M. Macron a ainsi chargé M. Mikati de transmettre un message « extrêmement urgent » au Hezbollah concernant la situation dangereuse au Liban-Sud et les préparatifs de guerre d’Israël, le compte à rebours ayant été enclenché. Washington et Paris redoutent ainsi que l’élargissement des affrontements ne soit un signe avant-coureur de la guerre, d’autant que des responsables israéliens se prononcent dans ce sens, notamment le ministre de la Défense, Yoav Gallant, qui avait affirmé que « la guerre était inévitable ». Selon des sources israéliennes, les répercussions de cette guerre seraient aussi dévastatrices pour le Liban que celles d’un tremblement de terre.
La visite effectuée par M. Séjourné à Beyrouth, dimanche, s’inscrit ainsi dans le prolongement des discussions menées à l’Élysée pour mettre en avant la nécessité d’une application pleine de la résolution 1701 du Conseil de sécurité des Nations unies pour sauver le Liban et éviter la guerre, mais aussi la nécessité d’élire un président de la République, sur base de la démarche des ambassadeurs du Quintette (États-Unis, France, Arabie saoudite, Égypte et Qatar) et de celle du bloc parlementaire de la Modération nationale, alors que la France a affirmé « ne pas avoir de candidat, mais soutenir la candidature de celui qui fera l’objet d’un consensus ». Au menu des discussions également, le dossier des déplacés syriens, qui constitue désormais une menace existentielle pour le Liban.
Ajustement de la position française sur celle de Washington
Selon des sources diplomatiques occidentales, « Paris a affiné sa proposition, sur base des remarques faites dans ce sens par Washington, de manière à l’aligner sur l’initiative américaine ». L’initiative française a été ajustée au cours d’une réunion à Washington qu’a eue l’émissaire américain, Amos Hochstein, avec l’envoyé spécial du président français pour le Liban, Jean-Yves Le Drian. Alors que l’initiative française met l’accent sur la nécessité d’arrêter les opérations militaires au Liban-Sud et de séparer ce front de celui de Gaza, l’initiative américaine est axée sur la délimitation des frontières terrestres et une entente sur les treize points litigieux le long de la Ligne bleue entre le Liban et Israël.
L’initiative française coïncide avec une proposition égyptienne pour un cessez-le-feu permanent. Selon des sources bien informées, Israël aurait accueilli favorablement l’accord-cadre. Idem pour le Hamas, d’autant qu’il répond à la majorité de ses revendications.
Il existe également une convergence vers des solutions novatrices dans le cadre d’un plan à long terme visant à résoudre les questions litigieuses, y compris celle de la création d’un État palestinien. L’initiative égyptienne marque le début d’une normalisation avec l’Arabie saoudite. Une démarche que Benjamin Netanyahou serait prêt à entreprendre pour renforcer sa position politique. Autant de signes qui laissent présager une atmosphère positive et un potentiel accord sur une trêve permanente. Dans ce contexte, les positions du Hamas attirent l’attention. Celui-ci avait affirmé qu’il adhèrerait à l’Organisation de libération de la Palestine (OLP), dirigée par le mouvement Fatah. Il s’était également prononcé en faveur de la formation d’un gouvernement unifié, englobant à la fois Gaza et la Cisjordanie. Le mouvement islamiste s’est également montré ouvert à l’édification d’un État palestinien souverain en Cisjordanie et dans la bande de Gaza, ainsi qu’au retour des réfugiés syriens conformément aux résolutions internationales relatives aux frontières de 1967. Le cas échéant, l’aile militaire du Hamas sera démantelée et la Chine accueillera des délégations du Fatah et du Hamas pour réaliser la réconciliation palestinienne.