La situation de la CEEAC est préoccupante

Le Sommet des chefs de l’Etat et de gouvernement de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique Centrale ( CEEAC), initialement prévu à Libreville, les 5 et 6 mars 2O18, a été reporté sine die. La CEEAC est en crise politique et financière, à l’image de la plupart des États qui la composent.

par Aza Boukhriss

Le président gabonais, Ali Bongo Ondimba, président en exercice de la CEEAC, n’avait pas ménagé ses efforts pour que ce Sommet puisse se tenir aux dates prévues.Il avait fait plusieurs missions dans quelques uns des onze États membres de l’organisation sous-regionale afin de convaincre leur chef de l’Etat d’assister à ce Sommet. Peine perdue, car de nombreuses défections étaient annoncées. Il est vrai que Paul Kagame a convoqué, à Kigali, un Sommet extraordinaire de  l’Union africaine, le 21 mars 2018.

Idriss Deby Itno incontournable
Le 26 février 2018, le président gabonais s’était rendu à Ndjamena pour rencontrer le président Idriss Deby Itno, président en exercice de la Communauté Economique et Monétaire des Etats d’Afrique centrale ( CEMAC). Avec ses deux anciens ministres des Affaires étrangères, Moussa Faki Mahamat, président de la Commission de l’Union africaine, Ahmad Allam-Mi, Secrétaire général de la CEEAC, le président tchadien est incontournable pour trouver des sorties de crise en Centrafrique et en RDC et apaiser les réactions de Teodoro Obiang Nguema Mbasogo, suite à la tentative avortée de coup d’Etat. Manifestement, les situations préoccupantes en RDC, au Burundi, en Guinée équatoriale et au Cameroun sont appréciées différemment selon les États de la CEEAC et pouvaient aussi justifier un report du Sommet. Les nombreux problèmes sécuritaires transfrontaliers, notamment entre l’Angola et la RDC, entre le Cameroun et la RCA, entre la RDC et la RCA, entre le Gabon et la Guinée équatoriale, entre le Tchad et la RCA et entre le Rwanda et la RDC ne facilitent pas l’intégration régionale.

Une crise financière résultant de la mauvaise gouvernance endémique
La comparaison de la CEEAC avec la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest ( CEDEAO) est significative sur la mauvaise gouvernance régnant en Afrique centrale, où les ressources naturelles sont bien plus importantes. Selon Ahmad Allam-Mi, le cumul des arrièrés des contributions nationales et de la contribution communautaire d’intégration est évalué, au 3 mars 2018, à 92 milliards de francs cfa. Le taux de recouvrement est passé de 73 % en 2013 à 11 % en 2017.

En Afrique centrale, alors que les problèmes s’accumulent et que les États s’enfoncent inexorablement dans des crises durables, les réunions inter-étatiques et thématiques se multiplient à un rythme peu commun. Les nombreuses organisations régionales, avec leurs comités techniques sectoriels, réunions de haut niveau, conférences ministérielles et missions de sensibilisation et d’appropriation sont largement improductives et essentielement alimentaires pour leurs participants. La plupart des décisions prises restent sans effet et tombent rapidement dans l’oubli. La mauvaise gouvernance en Afrique centrale met en péril l’intégration régionale et offre un terrain favorable au développement du terrorisme, de la piraterie maritime, des trafics intercontinentaux et de la paupérisation des populations abandonnées dans leur condition, de plus en plus misérable.