Rien ne va plus entre Ibrahim Traoré et Alassane Ouattara

Le capitaine-président du Burkina Faso, Ibrahim Traoré, qui recevait, mardi, les forces vives de son pays à Ouagadougou n’a pas tardé à s’en prendre à son homologue ivoirien, Alassane Ouattara, accusé d’abriter sur son sol un centre opérationnel qui coordonne les activités de terroristes et d’opposants burkinabè cherchant à déstabiliser son pays.

Correspondance à Abidjan, Bati Abouè

Rien ne s’arrange entre Alassane Ouattara et Ibrahim Traoré, le président burkinabè dont le pouvoir a été prolongé de 5 années, en mai dernier, à l’occasion d’assises populaires à Ouagadougou. Cette fois, le capitaine-président recevait les forces vives de la nation au lendemain du premier sommet de l’Association des Etats du Sahel qui a entériné la création de la Confédération Alliance des Etats du Sahel (AES), le samedi 6 juillet dernier dans la capitale nigérienne. Dans un discours fleuve, l’homme fort du Burkina Faso a expliqué l’Etat du monde tel qu’il le perçoit et les rapports de force géopolitiques qu’ils théorisent, illustrant son propos d’accusations sur la présence d’un centre opérationnel à Abidjan qui servirait de bases aux djihadistes et autres opposants qui tentent de déstabiliser son pays.

Le capitaine Ibrahim Traoré s’est également plaint des bases militaires françaises illégales qui seraient stationnées au Bénin et dont le but serait de déstabiliser le Niger, l’un des deux autres membres de la Confédération dont les frontières avec le voisin béninois restent hermétiquement fermées en dépit des enjeux économiques de la mise en service du pipeline chargé de distribuer le pétrole nigérien.

Le 19 avril dernier, une rencontre inédite à Niangologo, au Burkina Faso, entre les ministres ivoirien et burkinabè de la défense avait donné l’impression d’avoir réussi à décrisper les tensions politiques entre les deux pays et balayé les récriminations orchestrées de part et d’autre de la frontière. Malheureusement, les accusations sont reparties de plus belle des jours plus tard, dans un contexte qui rappelle celui des années 90 avec les confrontations entre Houphouët-Boigny et le capitaine Thomas Sankara. Cet autre leader burkinabè qui avait pris la tête de son pays après un coup d’état militaire y allait également gaiement avec le vieux crocodile de Yamoussoukro (nom donné au président ivoirien Houphouët-Boigny à cause de son amour pour ces mammifères) qui choisissait de ne pas répondre à chacune de ses critiques.

Et, visiblement, Alassane Ouattara semble avoir choisi cette posture. Ce qui n’enlève rien en revanche à la gravité des propos du président burkinabè qui dit avoir toutes les preuves de ce qu’il dit. « J’insiste et je persiste, nous n’avons rien contre les Ivoiriens mais contre ceux qui les dirigent. Il y a bel et bien à Abidjan un centre des opérations pour déstabiliser notre pays. Personne ne peut le nier. Et nous vous montrerons des preuves physiques pour que vous sachiez de quoi nous parlons », a affirmé le capitaine Ibrahim Traoré devant des milliers de burkinabè acquis à sa cause.

Le président burkinabè ne s’est d’ailleurs pas arrêté là puisqu’il a également accusé le Bénin d’abriter deux bases militaires françaises « dirigées contre nous », a-t-il précisé. Là également, il a dit détenir des preuves physiques de « 3.000 mètres de pistes aménagées pour l’atterrissage d’avions qui font descendre des instructeurs. Nous avons des enregistrements audios d’agents français qui dirigent ces centres d’opération, qui coordonnent les activités de terroristes et ce sont eux qui les aident à se soigner », a-t-il ajouté.

Mais aucune des deux capitales n’a démenti ces accusations. La Côte d’Ivoire qui a organisé un conseil de sécurité jeudi sous la présidence du président ivoirien a plutôt évoqué des problèmes liés à l’orpaillage clandestin et à ses conséquences sur les zones concernées. Le gouvernement ivoirien a même soigneusement évité de parler des 200 personnes de Bouaflé, 297 km d’Abidjan, empoisonnées au cyanure en raison desdites activités d’orpaillage.