Promesses et défis de la médiation du Qatar au Congo (RDC)

A peine signé à Doha, sous les auspices du ministère des Affaires étrangères du Qatar, le protocole de surveillance du cessez—le-le feu, liant le mouvement du 23 mars (M23) et le gouvernement de la République démocratique du Congo (Rdc) est violé, le lendemain. Tôt, le matin, du 15 octobre 2025, les forces loyalistes ont mené des assauts de fantassins à Kadasomwa, Lumbishi et Kasake, dans les espaces Nord et Sud du Kivu, avec le soutien d’avions de combat Sukhoi-25 et de vecteurs aériens téléguidés.

Des résidents de Twangiza témoignent des larguages de drones sur des objectifs civils en profondeur de zones à forte densité d’habitants. Là, encore, les témoins imputent l’action à l’armée régulière. A l’exception de dégâts matériels, la même source, citée par la Deutsche Welle, la radio publique allemande, constate l’absence de pertes en vies humaines.

Le premier signalement de l’entrave aux résolutions de la veille est venu de la mouvance politico-militaire dite Alliance fleuve Congo (Afc-M23), que soutiennent le Rwanda et l’Ouganda. La coalition dénonce des frappes ciblées, sur ses positions, malgré la décision formelle d’entériner la dynamique de la paix.

Un processus laborieux

Pourtant, à travers les coulisses des négociations de Doha, le réalisme prévaut.  La détente ne peut intervenir quelques heures l’arrangement. Echaudés au fil de deux décennies d’annonces à la va-vite et de solennités sans suite, les facilitateurs préfèrent privilégier la prudence de l’optimisme. Tous tablent, bientôt, sur la consolidation du dispositif de vérification du cessez-le-feu, grâce au concours de partenaires supplétifs, tels l’Union africaine (Ua), les Etats unis d’Amérique et le Président du Togo, en leur qualité d’observateurs du mécanisme.

La majorité des commentateurs craignent de nouvelles violations et doutent d’une mise en œuvre aisée de la déclaration de principe du 19 juillet, adoptée, au Qatar, par le gouvernement et la sédition du M23, dans la foulée de l’Accord de paix, établi, le 27 juin 2025, à Washington, sous l’égide de l’administration Trump, entre la Rdc et le Rwanda. Les clauses des deux textes comportent l’engagement mutuel, non seulement de diminuer le niveau de la défiance réciproque et de geler, à titre conservatoire, l’état de belligérance mais aussi de s’abstenir de toute propagande susceptible de favoriser l’appel à la haine. Néanmoins, en dépit de la somme de difficultés, le Qatar continue de travailler à la conclusion d’un règlement global.

Cumul de contradictions

Cependant, l’un des termes de l’entente du 14 octobre recèle un sujet d’incertitude qui compromet la réalisation du projet. Certes, le 10 octobre, avancée notable, Kinshasa se résout, à demander le désarmement des Forces démocratiques de libération du Rwanda (Fdlr), reconnaissant, de fait qu’elles opèrent contre les autorités de Kigali, à partir du territoire du Congo. Là, réside l’une des raisons majeures du conflit.  Or, la plupart des analystes contestent la capacité, par le pays d’accueil, de neutraliser une rébellion hutue mainte fois accusée de participation au génocide contre les Tutsis, en 1994. Sa reddition, véritable préalable à l’apaisement, ne semble à portée, d’où le scepticisme légitime quant à la levée de l’écueil. Autre obstacle de taille, Kinshasa peine à imposer ses directives aux milices qui l’aident à contenir l’offensive du M23, précisément le groupe des Wazalendo. D’ailleurs, la subordination des Fdlr, aux ordres de la capitale, n’est pas plus acquise. Enfin, complication non négligeable, Joseph Kabila, ancien Président, condamné à mort in absentia au grief de sa connivence avec l’Afc-M23, vient de créer, le 15 octobre à Nairobi, une énième plateforme d’opposition civile, « Sauvons la République démocratique du Congo ».

Patience, patience…

In fine, l’arrêt des hostilités, en vue d’une réconciliation durable, requiert le temps long et des trésors d’endurance. La médiation qatarie le sait, le chantier à venir est immense et dépasse les enjeux du champ de bataille. Il couvre la totalité des domaines de la gouvernance, dans un Etat souvent fantôme dont les richesses, l’étendue et la corruption structurelle entretiennent, depuis sa naissance, une interminable guerre de milices et d’ingérences.