Présidentielle, la victoire programmée de Brice Oligui Nguema

Le 12 avril 2025, les Gabonais sont à nouveau appelés aux urnes, officiellement pour mettre fin à la transition née du coup d’État ayant renversé Ali Bongo le 30 août 2023. Brice Oligui Nguema, qui s’est emparé alors du pouvoir, est candidat à sa propre succession.

Par Jocksy Andrew Ondo-Louemba

C’est comme une impression de déjà-vu. Depuis deux semaines, Brice Clotaire Oligui Nguema, qui a pris le pouvoir le 30 août 2023 après avoir renversé Ali Bongo dont il assurait la protection à la t!ète de la Garde présidentielle— est en campagne électorale. L’ancien commandant en chef de la Garde républicaine entend bien se faire élire à la tête du Gabon le 12 avril 2025, pour devenir un chef d’État « normal », du moins en apparence.

Une junte en costume cravate

Le 4 septembre 2023, lors de sa prestation de serment en tant que « président de la Transition », Brice Oligui Nguema avait promis qu’à l’issue de cette période transitoire, il rendrait le pouvoir aux civils, au terme d’une « élection libre et transparente ».

Au final, après avoir confié à nouveau l’organisation de l’élection au ministère de l’Intérieur, restreint les conditions de transparence du scrutin (notamment par la suppression des procès-verbaux opposables distribués aux candidats) et durci les critères d’éligibilité (limite d’âge, durée de séjour au Gabon, nationalité, filiation, situation matrimoniale), Brice Oligui Nguema s’est présenté à sa propre succession… sans avoir quitté l’armée.

Recyclage général des opposants

Pour sa campagne, Brice Oligui Nguema — qui bénéficie du soutien du Parti démocratique gabonais — a recyclé les soutiens et plusieurs opposants d’Ali Bongo. Sa campagne électorale reprend le même style graphique que celle de son prédécesseur, sans parler de l’usage d’une des anciennes chansons de campagne d’Ali Bongo !

La campagne de Brice Oligui Nguema, qui paralyse l’administration, s’accompagne également d’un déploiement impressionnant, pour ne pas dire d’une débauche de moyens et d’argent. Le public, payé en moyenne 5 000 francs CFA (soit près de 8 euros), est transporté pour participer aux différents meetings.

À cela s’ajoutent de nombreux gadgets de campagne, allant jusqu’à des congélateurs ornés de la photo du général-président…

La ruse plus que l’intelligence

« Je ne suis pas un bon orateur », a déclaré à plusieurs reprises Brice Oligui Nguema, qui se décrit lui-même comme un homme préférant « la ruse » à « l’intelligence », et se revendique comme un pragmatique, mieux encore : un bâtisseur, ayant « mis le pays en chantier ».

Brice Oligui Nguema se montre proche du peuple — et aime à le montrer. À un jeune en claquettes admirant ses baskets, il surprend tout le monde en se déchaussant pour offrir sa paire de baskets de marque au partisan extatique.

À Port-Gentil, le 10 avril 2025 — ville où il a longtemps vécu et étudié — Brice Oligui Nguema lance à un groupe de partisans euphoriques : « Je sais combien certains ici ont braqué pour une Jordan. Vous n’allez plus braquer. Je vais vous offrir des Jordan ! » Ces paires de baskets très tendance coûtent, en moyenne, plus que le salaire mensuel au Gabon…

Dubaï, le modèle

Brice Clotaire Oligui Nguema se voit déjà élu, et ses soutiens lui promettent une « victoire cash ». « Je n’ai pas d’adversaires. Mon adversaire, c’est la pauvreté, c’est le chômage », lance-t-il lors d’un rassemblement où il promet de faire du Gabon un émirat pétrolier et minier, et de doter la capitale du pays d’infrastructures « comme à Dubaï ».

Sûr de lui, Brice Oligui Nguema annonce déjà ce qu’il fera une fois devenu un chef d’État à part entière, et ne se voit pas perdre dans les urnes : « En sept ans, on a le temps de tout résoudre. Après sept ans, si rien n’est fait, chassez-moi », a-t-il déclaré lors d’un autre rassemblement.

Reste à savoir si tout se passera comme prévu…