Retourné à la vie civile après la passation des pouvoirs avec son successeur Mohamed Bazoum le 2 avril dernier, l’ex-président Mahamadou Issoufou rêve d’une retraite dorée qui pourrait être altérée par l’achat d’un grand terrain en 2019.
En cédant le fauteuil présidentiel le 2 avril dernier à Mohamed Bazoum, l’ancien chef de l’Etat nigérien Mohamadou Issoufou a tenu à assurer ses arrières. Il a ainsi placé ses plus fidèles compagnons aux principaux leviers de l’appareil d’Etat : Ouhoumoudou Mahamadou au poste de Premier ministre ; Alkache Alhada au ministère de l’Intérieur ; Alkassoum Indattou au ministère de la Défense. Issoufou s’est aussi préoccupé d’etre certain qu’il n’aura pas des soucis de fin de mois pour le reste de ses vieux jours.
Boulimie insatiable
Au moment de quitter le pouvoir, l’ancien président nigérien a déclaré à la Cour constitutionnelle nigérienne un patrimoine estimé à plus 2 milliards 339 millions soit près de 3,5 millions d’euros. Une somme énorme pour le président du Niger, pays le plus pauvre du monde, selon l’indice du développement humain (IDH) établi chaque année par le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD). Entre 2019 et 2020, le patrimoine de l’ancien président nigérien a progressé de près d’un million d’euros (plus d’un milliard de FCFA).
Dans sa quête insatiable de biens meubles et immeubles, Mahamadou Issoufou s’est offert en 2019 un terrain de 15000 mètres carrés achetés à près de 450.000 euros (300 millions de FCFA) à Tahoua, son fief du nord-ouest du Niger. Outre le prix de vente totalement inhabituel au Niger, l’identité de vendeur, qui n’est pas précisé dans la déclaration des biens d’Issoufou, suscite désormais la controverse. Selon une enquête de la société civile nigérienne, l’ex-président a acheté ce terrain de 15000 mètres carrés auprès de la Société des transports nigériens (SNTN), une structure détenue majoritairement par l’Etat. Or, la Constitution nigérienne interdit formellement au président en exercice d’acheter ou de vendre tout bien appartement à l’Etat. Depuis la révélation de cette acquisition immobilière, un branle-bas de combat s’est déclenché pour exiger une enquête sur les circonstances exactes de l’achat de ce terrain.
Syndrome Aziz/Ghazouani
C’est une affaire bien embarrassante pour le nouveau président nigérien qui s’est engagé le 2 avril dernier, jour de son investiture, à lutter sans merci contre la corruption et la délinquance financière sous toutes ses formes. Mohamed Bazoum avait même assuré qu’il sera intraitable dans cette croisade quels que soient les auteurs des faits. En le prenant au mot, Bazoum ne peut donc pas s’opposer à toute enquête sur les conditions troubles de l’acquisition par Issoufou de son vaste terrain de Tahoua. On se retrouverait alors au Niger comme en Mauritanie où le président Ould Ghazouani a laissé prospérer une enquête sur son prédécesseur Ould Abdel Aziz.
Toutefois, beaucoup doutent qu’on en arrive là dans le contexte nigérien. A la différence du schéma mauritanien, Mahamadou Issoufou s’est éloigné du pouvoir sans l’avoir véritablement quitté. En témoigne la protection que continue de lui assurer la garde présidentielle alors que la mission de ce corps autonome des forces armées rattaché à la présidence de la République est d’assurer exclusivement la sécurité du président de la république en exercice.
Outre Mahamadou Issoufou, Mahamane Ousmane et Salou Djibo sont deux autres anciens présidents nigériens encore en vie. Curieusement, eux n’ont pas droit à la protection de la garde présidentielle. Avec son statut particulier, Mahamadou Issoufou va-t-il se tirer de la mauvaise passe dans laquelle le met l’achat de ce vaste terrain de 15000 mètres carrés ?
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