Si la récente rencontre des membres de la CEDEAO pour se prononcer sur le dossier nigérien a été un échec, le bras armé de la France dans cette partie de l’Afrique reste l’Union Economique et Monétaire d’Afrique de l’Ouest (UEMOA). Les trois Etats du Sahel central – Mali, Niger et Burkina Faso, pourraient entamer bientôt leur retrait de cette institution.
Olivier Vallée
L’UEMOA est née en 1994, succédant à l’Union monétaire ouest-africaine créée au lendemain des indépendances, en 1963. La mission de cet organisme administratif apolitique était de libéraliser et de privatiser les économies de l’Union, qui regroupe 8 pays francophones fonctionnant avec le franc CFA (Bénin, Burkina Faso, République de Côte d’Ivoire, Guinée-Bissau, Mali, Niger, Sénégal et Togo).
Le noyau dur de la gestion financière était et reste la Banque centrale de l’Union, la BCEAO (Banque centrale des Etats d’Afrique de l’Ouest).
L’UEMOA participe aux réunions de la CEDEAO (Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest), l’organisation politique de 15 membres qui réunit francophones et anglophones, y compris le géant nigérian. Les deux organisations sont liées par des accords de coopération et tiennent des sessions communes. L’UEMOA s’est ralliée aux sanctions ordonnées contre le Niger après le coup d’Etat du 26 juillet, bloquant les comptes du Niger et exerçant une très forte pression sur la circulation des liquidités.
Mais cette lourde machinerie construite sur le modèle européen et financée par Bruxelles peine à démontrer son efficacité. Sa gouvernance est problématique. Le président de la Conférence des chefs d’Etats de l’UEMOA était le Président nigérien renversé Mohamed Bazoum. Son remplaçant n’a pas été nommé. Le président de la Commission de l’UEMOA, le Sénégalais Abdoulaye Diop, ne communique pas avec le gouverneur de la BCEAO, l’Ivoirien Jean-Claude Kassi Brou. Le monstre UEMOA est logé à Ouagadougou et la BCEAO trône à Dakar. Quant au Béninois Achille Talon, il bloque les réformes et exige une place accrue pour les fonctionnaires béninois dans l’appareil – juteux – de l’Union économique et monétaire.
Beaucoup espéraient que les crises entre la CEDEAO et les trois pays qui viennent de créer l’Alliance des Etats du Sahel contribueraient à clarifier les champs des différentes organisations : à l’UEMOA l’harmonisation économique et à la CEDEAO les problèmes politiques et électoraux. Rien n’en a été.
Si l’UEMOA se fracturait, dans le cadre d’un abandon du franc CFA par les trois mêmes pays, de nombreux prêts accordés par la Banque Ouest-Africaine de Développement, qui dépend de l’UEMOA, se verraient menacés de défaut de remboursement.