Deux semaines après la tournée africaine du premier ministre espagnol, Pedro Sanchez, qui s’est rendu au Sénégal pour tenter de décourager l’émigration vers l’Europe, une pirogue transportant 150 personnes en route pour les îles canaries a chaviré le dimanche 8 septembre à Mbour à 100 km au sud du Sénégal, créant un nouveau drame humain devant lequel les autorités du pays en particulier et les dirigeants africains en général restent encore impuissants.
Correspondance à Abidjan, Bati Abouè
Au moins 150 personnes étaient dans cette pirogue qui a quitté la plage de Mbour, au sud du Sénégal, le dimanche 8 septembre dernier. L’embarcation a chaviré 3 kilomètres plus tard jetant à la mer tous ses passagers. Ce nouveau drame de l’émigration clandestine intervient seulement deux semaines après le passage du premier ministre espagnol Pedro Sanchez dans la capitale sénégalaise.
Le dirigeant espagnol s’était rendu à Dakar dans le cadre d’une tournée africaine destinée à décourager le flot d’émigrés qui envahissent les îles Canaries à partir des côtes mauritanienne et sénégalaise. Mais le mal est bien trop profond et devant le manque de perspective dans leur pays, rien n’arrive à entamer la détermination des jeunes africains qui tentent quotidiennement, au prix de leur vie, leur chance de vivre et travailler en Europe.
Pour retrouver les naufragés, le Sénégal a déployé des marins qui poursuivent leurs recherches à l’aide de zodiac de sauvetage. Les pêcheurs traditionnels ont été les premiers à venir à la rescousse des passagers de l’embarcation naufragé. Mais jusqu’au lendemain 9 septembre, seulement 24 personnes – dont 3 sont encore en observation à l’hôpital- ont pu être sauvées, tandis que 5 corps sont venus s’ajouter aux quatre personnes noyées retrouvées dès dimanche par les pêcheurs.
Alors avec les heures qui passent, l’espoir s’amenuise forcément. D’autant que le bilan risque de s’alourdir car, pour l’heure, il n’y a aucune certitude sur le nombre exact des passagers – 150 ou plus ? – qui étaient à bord de cette pirogue. On sait en revanche que la pirogue a quitté l’une des plages de Mbour le samedi 8 septembre en milieu d’après-midi, en direction des îles Canaries. « C’est désastreux ce qu’il se passe à Mbour. Les pertes sont énormes. On ne peut pas imaginer des jeunes, même pas 30 ans, qui sont morts », a expliqué au correspondant de RFI Cheick, un Sénégalais qui affirme connaître une vingtaine de personnes ayant pris place dans la pirogue.
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Deux autres pirogues interceptées
À la morgue, le désespoir se lisait sur les visages des parents et amis venus s’informer pour certains ou débuter la procédure de retrait des corps pour d’autres. Souvent à ce chagrin se mêlait la colère de voir ces drames se répéter. L’impuissance des autorités à créer des emplois pour donner des raisons aux jeunes de rester dans leur pays est régulièrement pointée par les parents des victimes. Mais pour Mohamed Baro, conseiller municipal à Mbour, ce drame a également été alimenté par la limitation drastique des visas dans les consulats occidentaux. « C’est une catastrophe qui malheureusement va se reproduire car ces jeunes sont déterminés à partir. Il y a quelque temps, ces jeunes partaient de Gambie ou ailleurs, mais ce qui s’est passé hier, c’est qu’ils sont partis de la plage même de Mbour. En Afrique et au Sénégal particulièrement, nous avons toujours des difficultés pour obtenir des visas. Et ce ne sont pas d’habitude des badauds qui entreprennent le voyage, ce sont des enfants qui se débrouillent, qui ont un métier, qui devraient normalement voyager sans avoir besoin de vivre certaines péripéties », estime-t-il.
Signe de cette détermination, la marine sénégalaise a arraisonné deux pirogues transportant 421 passagers, dont 20 enfants alors que les recherches des corps de naufragés se poursuivait.