Le volte face libanais de Macron et Le Drian

Le principal trait marquant de la dernière visite de Jean Yves Le Drian à Beyrouth aura été son boycott des chefs de file de la classe politique traditionnelle, loin de la volonté exprimée jusqu’à présent par Emmanuel Macron de favoriser la formation d’un gouvernement. Et cela au profit « des forces de changement » au contour enore imprécis.

Un article de Michel Touma 

Des sources européennes citées par l’agence Reuters et la chaîne arabophone Al-Hadath font état de tractations entreprises loin des feux de la rampe afin d’aboutir à une entente sur des sanctions qui pourraient être imposées par l’Union européenne aux dirigeants et responsables politiques libanais qui font obstruction à la formation d’un nouveau gouvernement au Liban. Le cabinet de Hassan Diab, qui expédie actuellement les affaires courantes, avait présenté sa démission le 10 août dernier, quelques jours après la double explosion du 4 août qui avait détruit le port de Beyrouth et ravagé plusieurs vieux quartiers de la capitale. Depuis, le Liban est sans gouvernement et le leader sunnite Saad Hariri, chargé en octobre de former le nouveau gouvernement, n’a pu mettre sur pied son équipe ministérielle en raison de divergences avec le président libanais Michel Aoun, d’une part, et de l’attitude du Hezbollah qui, à en croire les sources de l’opposition libanaise, bloque la formation du gouvernement pour des considérations en rapport avec la ligne de conduite de l’Iran, d’autre part.

Selon les sources européennes susmentionnées, les sanctions de l’UE pourraient être mises en application d’ici un mois, le temps que mûrissent les discussions entamées à ce propos. Le cas échéant, elles seraient approuvées par 26 des 27 Etats membres de l’UE, la Hongrie ayant annoncé son opposition à toute sanction qui serait imposée à la formation politique chrétienne fondée par le président Aoun, à savoir le Courant patriotique libre dirigé par le gendre du chef de l’Etat, le député et ancien ministre Gebrane Bassil.

La France, de la bouche du chef du Quai d’Orsay, Jean-Yves Le Drian, avait souligné récemment la nécessité de mettre en place des « leviers de pression » au niveau de l’UE à l’encontre des responsables et dirigeants libanais qui font obstruction à la formation du gouvernement et à une sortie de crise au Liban.

Sanctions contre les dirigeants libanais  

La relance du projet de sanctions européennes est intervenue quelques jours après une récente visite éclair de M. Le Drian à Beyrouth, il y a une dizaine de jours,  qui a constitué un point d’inflexion dans la position de la France à l’égard du Liban dans le contexte de la crise actuelle. Le chef du Quai d’Orsay s’est contenté de tenir trois brèves réunions avec, successivement, le président Aoun, le chef du législatif Nabih Berry et le Premier ministre désigné Saad Hariri pour leur transmettre un « message d’une extrême fermeté », comme il l’a lui-même indiqué, et pour les informer de la décision de Paris d’imposer des « mesures restrictives », comme première étape, à l’encontre d’une quarantaine de personnalités qui entravent la mise en place d’une solution politique au Liban. La première de ces « mesures restrictives » est l’interdiction d’entrer en territoire français.

Le ministre français des Affaires Etrangères, lors de sa dernière visite, a limité ainsi ses contacts, parallèlement aux trois pôles du pouvoir précités, à ceux qu’il a qualifiés de représentants des « forces du changement », en l’occurrence des députés démissionnaires et un groupe de responsables politiques et de représentants de certains mouvements de la société civile qui réclament le départ des dirigeants actuels. En se montrant ainsi sélectif dans le choix des personnalités qu’il a rencontrées, en dehors du cercle officiel, M. Le Drian a voulu montrer d’une façon très explicite que la France a désespéré de la classe dirigeante actuelle et qu’elle mise plutôt désormais sur des responsables capables de mettre en place réellement des réformes et d’initier un plan de redressement susceptible de permettre à la population libanaise de sortir du marasme généralisé dans lequel elle se débat depuis plus d’un an et demi.       

 

 

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