Le virement à cent quatre vingt degrés de la gendarmerie malgache

La gendarmerie a fait piteusement amende honorable dans une vidéo en termes alambiqués, et a dû accepter un nouveau dirigeant désigné par les nouveaux hommes forts du Capsat et le nouveau chef d’État major imposé par le Capasat au ministre de la Défense, le général Démosthène Pikulas. Un article de Michel Galy
Andry Rajoelina, le président malgache que l’Assemblée nationale vient de destituer ce mardi, avait fait de la gendarmerie un outil de répression féroce, puisque depuis pendant trois semaines, ses membres n’ont pas hésité à tirer sur des civils désarmés, faisant 22 victimes selon l’ONU , auxquelles se sont ajoutés deux autres plus récemment.
Très grave dans le contexte très tendu à Antanarinivo, la gendarmerie a tué un militaire du Capsat insurgé, faisant basculer l’opinion et les autres armes du coté des insurgés. Seul le sang froid du colonel Michael Randrianirina du Capsat a empêche une riposte qui eut été sanglante .

Vers un pouvoir militaire?

Comme dans un remake de 2009, quand Andry Rajoelina a effectué un coup d’Etat éclair contre le président Ravalomanana, les autres corps d’armée et lieux de pouvoir miliaire se rallient provisoirement au Capsat, ainsi que les bases militaires de province .

Pour autant, devant la fuite de l’ex président Rajoelina( à Dubaï?), ainsi que du premier ministre Christian Ntsay( à l’île Maurice), avec une Assemblée et un Sénat à la légitimité incertaine, un gouvernement fantôme, on sent bien que la tentation,, périodique à Madagascar, d’un « Directoire militaire » est dans l’air.

Certes partout, militaires et jeunesse de la « Gen Z 261 » fraternisent. Pour autant ces derniers n’ont pas encore nommé de leaders, et refusent l’ancien personnel politique corrompu et discrédité.

Devant la très maladroite initiative macroniste d’avoir envoyé un avion militaire français exfiltrer Rajaoelina, les esprits s’échauffent et craignent une intervention militaire extérieure suivie d’un bain de sang. Un prétexte pour les militaires, ou innoveront ils en nommant un civil de consensus pour amener le pays vers des élections libres et justes- ce qui serait une première dans l’Histoire de la Grande Île ?
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Nicolas Beau
Ancien du Monde, de Libération et du Canard Enchainé, Nicolas Beau a été directeur de la rédaction de Bakchich. Il est professeur associé à l'Institut Maghreb (Paris 8) et l'auteur de plusieurs livres: "Les beurgeois de la République" (Le Seuil) "La maison Pasqua"(Plon), "BHL, une imposture française" (Les Arènes), "Le vilain petit Qatar" (Fayard avec Jacques Marie Bourget), "La régente de Carthage" (La Découverte, avec Catherine Graciet) et "Notre ami Ben Ali" (La Découverte, avec Jean Pierre Tuquoi)