Le Premier ministre Boubou Cissé a demandé mardi, dans un courrier de son directeur de cabinet à son ministre de la Sécurité, des explications sur l’emploi de la Force Spéciale Anti-Terroriste (FORSAT) dans des opérations de maintien de l’ordre pendant le week-end, marqué par deux jours d’émeutes à Bamako.
Il dit avoir constaté que la FORSAT a été utilisée « pour appuyer les unités des forces de sécurité déployées dans le cadre de la sécurisation des manifestations de désobéissance civile organisées par le M5-RFP », la coalition qui demande le départ du Président malien et l’organisation d’une période de transition pour reprendre les élections législatives contestées du printemps.
« Je vous instruis de procéder aux investigations nécessaires en vue de me préciser, entre autres : les raisons de l’engagement de la FORSAT, l’autorité ayant ordonné l’engagement de la FORSAT et le respect ou non de la procédure prévue en la matière. »
Des témoins affirment que la FORSAT est à l’origine de l’attaque, samedi soir, du siège de la mosquée de l’imam Mahmoud Dicko, où sont morts plusieurs fidèles qui essayaient d’empêcher l’arrestation de l’imam et la prise de la mosquée. Finalement, la FORSAT a rebroussé chemin mais laissé plusieurs cadavres derrière elle, 17 selon l’entourage de l’imam. Une photographie prise dimanche dans la cour de la mosquée montrait les préparatifs d’inhumation de plus de dix corps allongés sur des nattes.
Des actions commando qui ont fait une vingtaine de morts
Dans une conférence de presse mardi soir, les représentants du M5 ont accusé les autorités d’avoir organisé des tueries et dénoncé l’utilisation des forces spéciales antiterroristes « et des éléments parallèles », surtout dans la nuit du 11 au 12, marquée notamment par l’attaque de la mosquée de l’imam Mahmoud Dicko. Déplorant « une vingtaine de morts », ils ont annoncé le prochain dépôt d’une plainte devant la Cour Internationale de Justice.
Cette violence n’a rien changé aux objectifs de la coalition : mettre en oeuvre « des réformes profondes qui passent nécessairement par la démission d’Ibrahim Boubacar Keita. » Le mot d’ordre de désobéissance civile a été renouvelé, « dans le cadre de la loi », notamment une nouvelle prière collective ce vendredi au monument de l’Indépendance, « en hommage à nos martyrs. »
Plusieurs vidéos mettent en cause le comportement de la police
D’autres accusations contre les forces de sécurité circulent sur les réseaux sociaux maliens. Une vidéo tournée derrière une porte montre des policiers en train de voler une moto dans une maison de Bamako portail ouvert. Une autre vidéo, mardi, montre deux hommes en civil, visage contusionné, dans la cour de la mosquée de l’imam Dicko, battus par la foule après avoir volé des motos. Selon le commentaire qui accompagne la vidéo, ces hommes disent « être des agents du syndicat de la police » et ont été pris avec des bonbonnes de gaz lacrymogènes, effectivement photographiées en leur possession. Enfin, une troisième vidéo montre des agents de la garde nationale, en uniforme de maintien de l’ordre, filmés à leur insu samedi pendant les émeutes, en train de casser les vitres de voitures en stationnement.