Le président de la Transition du Gabon, Brice Oligui Nguema, est à Abidjan depuis jeudi pour une visite d’amitié de trois jours. Pour la première journée, le gabonais a pu s’entretenir, jeudi, avec un Alassane Ouattara habituellement sans concession avec les juntes militaires.
Correspondance à Abidjan, Bati Abouè
Toutes les juntes militaires ne se valent pas et il suffit de regarder le respect témoigné à Brice Oligui Nguema, le président de la Transition du Gabon, dans les différentes capitales africaines, pour le comprendre. Le gabonais a été reçu jeudi avec fastes, à son arrivée à Abidjan où il a rencontré, dans la soirée Alassane Ouattara, l’homme qui avait appelé, le 11 août 2023, la Communauté des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) à lever une armée pour remettre au pouvoir le président nigérien, Mohamed Bazoum, renversé par sa propre garde rapprochée.
Le président Alassane Ouattara avait ainsi voulu afficher son aversion pour les changements constitutionnels pour ne plus se coltiner l’image d’un homme porté au pouvoir par une rébellion à l’issue d’une crise postélectorale particulièrement meurtrière. Sauf que rien de tous ces repères-là n’a tenu quand il a fallu recevoir le président de la Transition du Gabon.
Brice Oligui Nguema s’était emparé du pouvoir le 30 août 2023 au Gabon en profitant de la contestation des résultats électoraux ayant proclamé Ali Bongo vainqueur plutôt que de déclarer son adversaire Albert Ondo Ossa élu. Ce coup de force ne lui avait cependant valu aucune admonestation de la communauté internationale et particulièrement la France qui s’était contentée d’une condamnation de principe.
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Oligui, le bon putschiste
De son côté, Alassane Ouattara avait pu s’entretenir au téléphone avec le nouvel homme fort du Gabon qui continue de tenir en laisse l’ancien président Ali Bongo et sa famille sans éveiller le moindre soupçon. Le général Brice Oligui Nguema s’est rendu à Abidjan avec une forte délégation comprenant une dizaine de ministres, dont le vice-Premier ministre, le ministre de l’Économie ou encore celui de l’Agriculture. Il a été accueilli par le président ivoirien Alassane Ouattara lui-même. Les deux responsables se sont entretenus par la suite pendant près d’une heure et ont pu évoquer « l’excellente relation » entre les deux pays qui partagent également des décennies « d’amitié et de partage » depuis les années Bongo père.
Prévenant sans doute la critique d’avoir une préférence pour la junte gabonaise, Alassane Ouattara a affirmé suivre avec « un grand intérêt » les étapes de la transition de ce pays ainsi que les « efforts déployés pour retourner à la normalité constitutionnelle en août 2025 ». Le président ivoirien a également salué le « climat apaisé » qui prévaut au Gabon et a souhaité un bon déroulement du dialogue inclusif prévu dans le pays.
Quel sort pour Ali Bongo ?
Pour sa part, le général Brice Oligui Nguema a demandé le soutien de son homologue ivoirien pour obtenir la levée des sanctions de l’Union africaine avant de remercier le président Ouattara pour son rôle dans la sous-région ouest africaine, notamment pour « le retour de mes frères d’armes et de leurs États au sein de la Cédéao » sans que l’on sache vraiment de quels états il s’agit, puisque le Mali, le Niger et le Burkina Faso qui sont sortis de la Cedeao le 30 janvier 2024 pour créer les Etats du Sahel n’ont, pour l’heure, affiché aucune intention de rejoindre la communauté sous-régionale.
Les deux hommes ont surtout promis de renforcer les échanges économiques des deux pays, notamment dans les domaines agricole, minier ou encore énergétique. Ils auraient également évoqué, dans les coulisses, les déboires d’Ali Bongo qui est toujours en résidence surveillée au Gabon pendant que son épouse et son fils sont détenus à la prison civile de Libreville. Selon des sources officieuses, Alassane Ouattara aurait plaidé pour un assouplissement de la mesure de détention de l’ancien président dont l’Etat de santé reste préoccupant.
Brice Oligui Nguema rencontrera la communauté gabonaise installée en Côte d’Ivoire et visitera le Centre national de recherche agronomique avant de s’envoler pour Libreville samedi.