Face à la destruction du patrimoine à Gaza, l’Institut du monde arabe présente – du 3 avril au 2 novembre 2025 – une collection archéologique exceptionnelle, témoignant de 5000 ans d’histoire. Entre préservation et mémoire, l’exposition rappelle que les trésors culturels survivent parfois aux violences humaines.
Gaza, territoire souvent résumé à ses conflits et ses tragédies, est aussi une terre chargée d’histoire et de culture, où se sont succédées les civilisations depuis l’âge du bronze jusqu’à l’époque ottomane. Pourtant, l’histoire riche et dense de cette région est aujourd’hui en péril, menacée par les destructions et les violences qui secouent régulièrement ce territoire. C’est dans ce contexte dramatique que l’Institut du monde arabe (IMA) à Paris accueille, du 3 avril au 2 novembre 2025, une exposition poignante intitulée « Trésors sauvés de Gaza – 5000 ans d’histoire ».
Présentée en partenariat avec le ministère palestinien du Tourisme et des Antiquités et le Musée d’art et d’histoire de Genève (MAH), cette exposition dévoile au grand public une sélection de 130 pièces archéologiques remarquables, sauvées de la destruction grâce aux circonstances complexes et aux aléas de l’histoire récente. Ces œuvres, parmi lesquelles des amphores, statuettes, lampes à huile, figurines, stèles funéraires et une mosaïque, sont datées de périodes variées, allant de l’âge du bronze jusqu’à la domination ottomane.
L’histoire des œuvres exposées mérite une attention particulière. Dès 1995, des fouilles archéologiques franco-palestiniennes avaient permis de mettre à jour d’importants vestiges historiques à Gaza. À la suite des violences successives et de l’instabilité chronique, le Musée d’art et d’histoire de Genève a été chargé, dès 2007, de préserver ces objets précieux. Devenu véritable musée-refuge, le MAH accueille actuellement près de 529 œuvres appartenant à l’Autorité nationale palestinienne, bloquées loin de Gaza en raison du conflit.
Parmi les trésors présentés figurent également des pièces issues de la collection privée de Jawdat Khoudary, célèbre collectionneur et mécène palestinien. En 2018, Khoudary avait généreusement offert cette précieuse collection à l’Autorité palestinienne, permettant ainsi de sauvegarder une partie essentielle du patrimoine gazaoui. Aujourd’hui, ces œuvres racontent une histoire différente de celle véhiculée par les actualités : elles dévoilent la profondeur culturelle d’une région souvent réduite à ses crises politiques et humanitaires.
Cette exposition est aussi un témoignage poignant des dommages infligés aux sites archéologiques et historiques par le conflit israélo-palestinien. Depuis octobre 2023, l’UNESCO a recensé des destructions ou des dégâts importants sur 69 sites culturels à Gaza, parmi lesquels figurent des édifices religieux, des bâtiments historiques et des sites archéologiques majeurs. L’exposition à l’IMA ne se contente pas de présenter ces trésors rescapés, elle propose également une cartographie précise de ces destructions ainsi qu’une série de photographies inédites issues des archives de l’École biblique et archéologique française de Jérusalem. Ces clichés, pris au début du XXe siècle, offrent un regard précieux et émouvant sur une Gaza aujourd’hui disparue.
Le parcours de l’exposition souligne avec force la nécessité vitale de protéger le patrimoine en situation de conflit. En exposant ces trésors, l’Institut du monde arabe entend préserver la mémoire collective palestinienne et sensibiliser le public à l’urgence de la protection du patrimoine mondial. Ces œuvres racontent une histoire complexe, mêlant civilisations antiques, périodes de paix et épisodes douloureux. Elles sont un rappel tangible que même dans les conditions les plus difficiles, la culture demeure un élément essentiel de résistance et de survie.