Gouri Abdelmalek alias « Khaled Abou Slimane », le chef du groupe terroriste qui a assassiné l’otage français Hervé Gourdel en Algérie, est un des anciens amnistiés de Bouteflika dans le cadre de la loi sur la concorde civile qu’il a fait voter dès son arrivée au pouvoir en 1999. Malgré de nombreuses activités criminelles perpétuées depuis lors, l’homme n’a pourtant jamais été inquiété. De quoi s’interroger sur la capacité des services de sécurité algériens, présentés comme le plus sûr allié de l’armée française dans la région, à combattre le terrorisme
Condamné en 1997 à 5 ans de prison pour soutien à un groupe terroriste, Gouri Abdelmalek alias « Khaled Abou Slimane », le leader du groupe terroriste qui a assassiné Hervé Gourdel, a été relâché en 1999 dans le cadre de la loi sur la concorde civile élaborée à l’époque par Bouteflika.
Un criminel connu
Fils aîné d’une famille modeste de la commune de Si Mustapha dans le département de Boumerdes à 60 km à l’est d’Alger, Gouri Abdelmalek est né en 1977. Il fut d’abord berger de montagne pendant plusieurs années avant de rejoindre les groupes terroristes sévissant dans sa zone. Arrêté à l’âge 20 ans et amnistié deux ans plus tard, il finit par prendre le maquis « non pas par conviction djihadiste mais par vengeance contre l’Etat qui ignore les pauvres et enrichit les fortunés » souligne un de ses anciens codétenus.
Alors qu’il ignore tout des préceptes religieux – « il ne connaît que quelques versets du Coran appris à l’école primaire » — il est promu adjoint d’Abdelmalek Droudkel, le chef autoproclamé d’AQMI (Al-Qaeda du Maghreb Islamique), une branche du mouvement d’Oussama Ben Laden. Il se distingue à partir de 2005 par une intense activité terroriste dans la région de Boumerdes. Là-bas, il perpétue des assassinats contre des gardes communaux, des anciens miliciens qui ont pris les armes contre ceux qui s’étaient proclamés des soldats de Dieu en semant la mort dans les régions les plus déshéritées.
L’antiterrorisme algérien en cause
Avec deux de ses anciens compagnons et voisins, les frères Khelifi, Youcef et Mohamed, il multiplie les actions de banditisme et procéde à des enlèvements d’enfants et de membres de grandes familles d’industriels de la région. Notons que depuis 2005, on rencense plus de 81 enlèvements perpétrés en Kabylie. Des évènements qui jusqu’à maintenant, n’avaient jamais défrayé la chronique. Les autorités n’ont en effet jamais voulu reconnaître que le terrorisme continue de sévir sur l’ensemble du territoire national. Or, il suffit de jeter un coup d’œil sur quelques titres de la presse algérienne pour se rendre compte que pas un jour ne passe sans que ne soit évoqué un accrochage entre les éléments de l’armée ou des services de sécurité avec des groupes terroristes. La plus sanglante action a eu lieu deux jours après les élections présidentielles dans la même région où a été enlevé Hervé Gourdel. C’était le 19 avril dernier. Un bus de transport militaire a été attaqué par un groupe terroriste. Onze militaires ont été tués. Deux semaines avant l’enlèvement du guide français, un camion militaire avait également été attaqué. Un soldat avait été tué et un autre blessé.
Par ailleurs, bien avant Hervé Gourdel, un autre ressortissant étranger (égyptien) avait été enlevé. Voyant que cette opération n’avait eu aucun écho médiatique, les ravisseurs ont fini par libérer leur otage après deux semaines de captivité.
Les attaques et assassinats perpétrées jusqu’ici n’ont pourtant jamais révélé l’existence du mouvement « Daech » (Etat islamique) en Algérie. C’est la première fois qu’une opération est attribuée à ce mouvement qui sévit en Irak et en Syrie. C’est pourquoi, de nombreux observateurs n’accordent pas le moindre crédit à la revendication de l’assassinat du ressortissant français par ce groupuscule. « Ce sont des bandits qui ne connaissent rien à l’Islam et qui cherchent une couverture pour leurs crimes. Comme avant eux, de nombreux chefs terroristes jouissent aujourd’hui d’importantes fortunes et de relations au sommet de l’Etat. Ces délinquants profitent de la conjoncture internationale pour attirer l’attention de l’opinion publique à la faveur d’un crime abominable comme ceux commis par d’anciens terroristes qui ont bénéficié de l’amnistie de Bouteflika pour légitimer une fortune mal acquise » note un observateur bien informé joint par téléphone.
Les compagnons d’hervé gourdel relâchés
Outre la question de l’identité du groupe qui a assassiné l’otage français, l’opinion publique algérienne est aujourd’hui sous le choc d’un crime qui semble lui avoir ouvert les yeux sur une réalité que le pouvoir en place tente de dissimuler. On s’interroge aussi sur la manière dont ont été traités les compagnons de la victime. Ces derniers n’ont subi aucune violence. Ils ont été relâchés sans que ne leur soit saisis ni argent ni téléphones portables, ni même leur véhicule et sans qu’ils ne soient chargés d’un quelconque message. L’enquête des services de sécurité se concentre désormais sur les accompagnateurs algériens.
Selon des sources proches des accompagnateurs, deux d’entre eux sont originaires d’El Asnam à Bouira, dont l’un est immigré. Le troisième est de Bechloul (Bouira). Le quatrième est un adolescent de 17 ans de Lakhdaria (Bouira) et le cinquième est de Boufarik à Blida. Interrogés par la Gendarmerie, ils ont été transférés à Blida pour les besoins de l’enquête.
Les enquêteurs cherchent à en savoir plus sur la relation entre Gourdel et ses amis algériens. Sur place, plus de 2000 soldats passent au peigne fin la région pour trouver le corps de la victime et ses assassins.