C’est désormais officiel. Le 9 juillet 2025,lors de la 58ᵉ réunion ministérielle de l’ASEAN tenue en Malaisie, l’Algérie a signé son adhésion au Traité d’amitié et de coopération (TAC), devenant ainsi partenaire de dialogue sectoriel de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est. Une première pour un pays d’Afrique du Nord, et une percée diplomatique majeure pour Alger. Une étape stratégique pour Alger
Lyazid BENHAMI
L’annonce, confirmée par le ministère algérien des Affaires étrangères, marque une nouvelle orientation dans la politique étrangère du pays. En intégrant l’ASEAN, bloc régional incontournable pesant plus de 3 600 milliards de dollars de PIB, l’Algérie cherche à diversifier ses alliances et à renforcer sa présence sur la scène internationale hors de son environnement euro-méditerranéen traditionnel.
Le ministre des Affaires étrangères, Ahmed Attaf, présent à Kuala Lumpur pour la signature, a salué « une avancée structurante pour l’avenir économique et diplomatique de l’Algérie, tournée vers l’Asie, l’Afrique et les pays émergents. »
Pourquoi l’ASEAN s’intéresse à l’Algérie ?
Du côté asiatique, l’intérêt est clair : l’Algérie offre un accès stratégique aux marchés africains, une stabilité politique relative dans la région, et des ressources naturelles abondantes. Elle est également membre de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf), un atout de poids pour les économies asiatiques en quête de nouveaux débouchés.
Plusieurs pays de l’ASEAN, comme l’Indonésie, le Vietnam ou la Malaisie, voient déjà en l’Algérie un partenaire énergétique fiable, mais aussi un futur hub logistique entre les continents africain, européen et asiatique.
Le rôle clé d’Ahmed Attaf
À la manœuvre depuis des mois, Ahmed Attaf, chef de la diplomatie algérienne, a multiplié les déplacements et rencontres pour faire avancer ce dossier. Âgé de 71 ans, Attaf est un diplomate chevronné, passé par les ambassades d’Inde, de Yougoslavie et du Royaume-Uni, et ancien ministre des Affaires étrangères entre 1996 et 1999. Il a été rappelé au gouvernement en 2023 par le président Abdelmadjid Tebboune pour relancer la diplomatie algérienne sur la scène internationale.
Son retour aux affaires coïncide avec un activisme diplomatique remarqué : rapprochement avec l’Afrique, renforcement des liens avec la Chine, et maintenant ce tournant asiatique avec l’ASEAN.
Un partenariat prometteur mais exigeant
Ce partenariat ne signifie pas une adhésion pleine à l’organisation, mais il ouvre la porte à une coopération accrue dans des secteurs variés : énergie, agriculture, éducation, innovation, lutte contre les pandémies, sécurité maritime, etc.
Reste à savoir si l’Algérie saura transformer cette opportunité en partenariat durable. Des réformes internes restent nécessaires, notamment pour améliorer l’environnement des affaires et rassurer les investisseurs asiatiques.
Un pont entre l’Afrique et l’Asie
Avec cette entrée dans l’ASEAN, l’Algérie ambitionne clairement de devenir un pont stratégique entre l’Afrique, l’Asie et la Méditerranée. Une posture qui pourrait redéfinir son rôle diplomatique dans un monde multipolaire en pleine recomposition.
Comme l’a résumé un expert en relations internationales basé à Jakarta : « L’Algérie regarde vers l’Est, et l’ASEAN s’ouvre vers le Sud. Il y avait une fenêtre d’opportunité, ils l’ont saisie. »