Pour la première fois depuis la réélection controversée d’Ali Bongo Ondimba en 2016, un ministre français, Jean Baptiste Lemoyne, effectuera une visite officielle à Libreville, les 8 et 9 janvier 2020.
Jean-Baptiste Lemoyne, Secrétaire d’État auprès de Jean-Yves Le Drian, ministre de l’Europe et des Affaires étrangères, devrait être porteur d’un message d’Emmanuel Macron au Président gabonais. Le ministre français posera la première pierre de la nouvelle ambassade de France qui sera mieux adaptée aux réalités du XXI ème siècle. La cérémonie devrait être rehaussée par la présence de plusieurs ministre dont le Ministre d’État des affaires étrangères, Alain-Claude Bilie By-Nze, qui était, il n’y a pas si longtemps, un proche de Brice Laccruche ancien directeur de cabinet du chef de l’État, aujourd’hui dans les mains de la justice.
Des entretiens politiques et économiques
C’est avec un certain soulagement que Paris a appris le limogeage puis la totale disgrâce de Brice Laccruche, le » minot marseillais » au profil d’aventurier. Il n’est pas sûr qu’un ministre français ait fait le voyage de Libreville en sa présence au Palais du bord de mer.
Nul doute que cette visite ministérielle permettra de faire le point sur les relations économiques et financières entre les deux pays. La montée en puissance tous azimuths du Groupe singapourien Olam commence a inquiéter Paris, d’autant que le fils du couple présidentiel, Nourredin Bongo Valentin y a exercé encore récemment de très importantes responsabilités. Depuis le 5 décembre 2019, Nourredin Bongo Valentin est le » coordinateur des affaires présidentielles « . On peut y voir là un marché-pied vers la succession du père.
Les questions sécuritaires au premier plan
L’ inquiétude sur l’excroissance démesurée du groupe mondialisé Olam, relevant de la Cité-Etat de Singapour, est ravivée par le tout business sans réels profits pour l’amélioration de la situation de la population, de plus en plus précaire. Les contestations du dernier scrutin présidentiel ne sont pas éteintes alors que des manifestations contre la cherté de la vie ne sont pas exclure et peuvent se coaguler.
Le surprenant limogeage, le 16 octobre 2019, de Frédéric Bongo, demi-frère du chef de l’État, qui était le tout puissant chef du système sécuritaire du président Ali Bongo Ondimba, pourrait aussi faire partie des discussions.
Enfin, la montée en puissance de la piraterie maritime dans le Golfe de Guinée, notamment au large de Libreville et du Cameroun est une source d’inquiétude grandissante.
Jean-Baptiste Lemoyne avait inauguré une nouvelle base navale inter-Etats, le 29 juillet 2019 à Tica, près de la frontière camerounaise, dans la partie continentale de la Guinée Equatoriale. Ce déplacement de Jean-Baptiste Lemoyne avait quelque peu irrité le Palais du bord de mer, car une simple escale à Libreville n’était même pas au programme. Cette fois-ci, Jean-Baptiste Lemoyne passera une nuit à Libreville, signe que les relations entre les deux pays se sont bien décrispées.
L’Afrique centrale, sujet de préoccupation
Enfin, le président Ali Bongo Ondimba, en sa qualité de président en exercice de la Communauté économique des Etats d’Afrique centrale, en cours de restructuration, pourrait être un interlocuteur privilégié pour prodiguer des conseils de sagesse au président centrafricain, Faustin-Archange Touadera qui semble de plus en plus fébrile et paranoïaque avec le retour incognito à Bangui, à la barbe de ses services de renseignement, notamment russes, de l’ancien président François Bozizé, son ancien mentor, qui pourrait compromettre la stratégie du président Touadera pour sa réélection, en 2020-2021.
Si la situation présente du Gabon sera surtout au menu des discussions, en arrière plan, nul doute que l’avenir très préoccupant des Etats de la Cemac ( Cameroun, Centrafrique, Congo, Gabon, Guinée Equatoriale et Tchad) sera à l’esprit de ministre français, d’autant que la réforme du Franc CFA ne touche pas cette zone monétaire d’Afrique centrale.