La guerre éclair des Azéris pour reprendre le contrôle du Haut-Karabakh

Après deux précédentes guerres qui ont meurtri la région dont la dernière date de 2021 et donné lieu à des atrocités du coté azéri comme du coté arménien, l’heure est de nouveau à l’affrontement dans le Caucase. L’Azerbaïdjan a lancé mardi une opération militaire au Nagorny Karabakh, une modeste enclave au coeur de la vaste région du Karabakh. Longtemps occupée illégalement par l’Arménie qui avait profité de l’écroulement de l’URSS, la région toute entière appartient, d’après les résolutions de l’ONU et le droit international, à l’Azerbaïdjan qui en 2021, en a récupéré l’essentiel (voir la zone en vert sur la carte ci dessous).

Reste que la région du Nagorny Karabakh (voir la zone en orange sur la carte ci dessous), peuplée principalement par quelque 70000 Arméniens et sous contrôle militaire russe depuis le cessez le feu imposé par Moscou voici deux ans. refuse toute intégration à l’Azerbaïdjan et fait de la résistance armée. Or en vingt quatre heures d’une guerre éclair, les Azéris ont rétabli leur souveraineté sur le Haut Karabach

Un cessez le feu imposé par Moscou

Ce mercredi en fin de matinée et de façon totalement inattendue, les séparatistes arméniens ont déposé les armes. Cet arrêt des hostilités a été décidé après une médiation des forces russes de maintien de la paix et au moins 32 morts et plus de 200 blessés. Dès jeudi, les séparatistes arménieniens vont négocier une réintégration à l’Azerbaïdjan.

« Un accord a été conclu sur le retrait des unités et des militaires restants des forces armées de l’Arménie (…) et sur la dissolution et le désarmement complet des formations armées de l’Armée de défense du Nagorny Karabakh », a indiqué la présidence séparatiste, annonçant en outre de premiers pourparlers concernant « la réintégration » du territoire à l’Azerbaïdjan jeudi dans la ville azerbaïdjanaise de Yevlakh.

Stepanakert, RŽpublique du Haut-Karabakh, le 11 octobre 2020 aprs un bombardement dans la rue Sasuntsi Tavit, au centre-ville, dŽésertéŽe par une grande partie de la population.

Autant dire que dans une situation largement inextricable où deux peuples réclament une même terre depuis des temps immémoriaux, les Azéris éxigent le retrait « total et inconditionnel » des séparatistes arméniens armés qui, via le corridor de Latchine, acheminaient de l’aide humanitaire mais aussi des armements. Il s’agissait pour cette poignée d’irréductibles de préparer un bras de fer avec le régime de Bakou le jour où les Russes quitteraient ce territoire. Lorsque ce mardi matin, les Azéris lancent leur offensive armée,  six des leurs (deux civils et quatre policiers) ont été tués par l’explosion d’une mine placée à dessein récemment par les séparatistes.

Or à entendre les réactions des chancelleries occidentales, ce serait l’Azerbaidjan l’agresseur. Ce qui est choquant, quand on sait que « le groupe de Minsk », constitué voici trente ans par les Américains, les Français et les Russes était censé régler la situation instable provoquée par le coup de force arménien sur l’ensemble du Haut Karabakh. Ce qu’ils n’ont nullement cherché à faire en portant ainsi une part de responsabilité dans l’ouverture des hostilités en 2021 puis encore en ce mois de septembre 2023 

 « Des intentions génocidaires »

Ces dernières semaines, la guerre des mots avait précédé le langage des armes. La confrontation, par anathèmes interposés, ne présageait ne présageait rien de bon. L’avocat argentin et ancien procureur de la CPI), qui soutient aujourd’hui les forces séparatistes arméniennes, Luis Moreno Ocampo, publiait le 7 août un rapport de 28 pages concluant qu’un « génocide [était] en cours par la famine » Arméniens de l’enclave du Nagorny-Karabakh. Accusant le président azéri Ilham Aliyev d’« intentions génocidaires », ce juriste audacieux préconise l’ouverture d’une enquête contre ce dernier et cinq autres responsables de l’appareil sécuritaire de Bakou. À l’appui de sa démonstration, l’avocat mettait en avant la situation humanitaire désastreuse que connaissait les quelque dizaines de milliers d’arméniens de la ville de Stepanakert depuis la fermeture du couloir de Latchine qui relie cette enclave au coeur du Haut Karabakh et l’Arménie.

Cette version, très largement reprise par une presse française qui en 2021 avait déja pris le parti de l’Arménie sans grand souci d’équilibre, pêche au moins par trois graves omissions qui démontrent clairement que dans ce conflit, il n’y a pas les bons d’un coté et les mauvais de l’autre..

  1. Les forces armées arméniennes bloquaient l’accès des routes azéris vers l’enclave de Stepanakert
Un camion azéri, à l’entrée de la capitale du Karabach, bloqué par les séparatistes arméniens

La fermeture du corridor de Latchine, ces dernières semaines, a provoqué une situation humanitaire très difficile pour les Arméniens. Mais de là parler de  génocide, il y a un fossé de mauvaise foi. Les forces armées arméniennes elles aussi, ces dernières semaines, bloquaient tout accès des routes azéries vers Stepanakert en contribuant ainsi à affamer la population. Ainsi des camions qui transportaient de la farine destinée à la population civile de cette ville en souffrance depuis la commune d’Aghdam ont été bloqués des journées entières.

Ce quelques milliers de séparatistes ne cachent ni leur présence armée, ni leur volonté de s’opposer par tous les moyensà la restitution de leur territoire aux Azéris lorsque les Russes, d’ici deux ans d’après le cessez le feu, quitteraient les lieux   

2. Les camions « humanitaires » livraient aussi des armes aux séparatistes 

Au check Point contrôlé par l’Azerbaidjan, des civils arméniens sont autorisés, certes au compte goutte, à gagner l’Arménie pour des raisons médicales ou familiales 

par les autorités de Bakou La fermeture par Bakou du corridor de Latchine un peu vite accusées d’épuration ethnique a été décidée pour des raisons sécuritaires. C’est l’interpellation d’un combattant arménien, fiché comme criminel de guerre (voir ci dessous les atrocités commises par l’Arménie) qui a provoqué la décision brutale des Azéris. Une centaine d’arméniens est encore détenue parceque coupable de sabotage. 

Dans ce contexte de méfiance, aucune avancée n’a été constatée en matière d’élaboration des droits de la minorité arménienne dans la Nation azérie, une question qui conditionne un futur traité de paix entre les deux pays, une question dont se sont saisis à la cois la commission européenne et un groupe tripartie constitué par la Russie, l’Arménie et l’Azerbaîdjan.

 « La question centrale des pourparlers de paix est cette question des droits et la sécurité des Arméniens du Karabakh, explique au journal « le Monde » Zaur Shiriyev, analyste du Crisis Group basée à Bakou. Les acteurs internationaux aimeraient d’avantage de transparence dansle dialogue de Bakou sur ces droits, mais les partenaires occidentaux n’ont pas défini de mécanisme international ». Et ils ne l’ont pas fait depuis le groupe de Minsk! Il faut admettre que a question des doits des minorités, des arabes israéliens en Israël aux Basques ou aux Irlandais en Europe, sans parler des innombrabls conflits ethniques dans le monde, n’est pas une question simple 

3. De nombreuses atrocités ont été commises historiquement du coté arménien

La ville de Fuzouli, peuplée autrefois par des milliers d’Azéris et reconquise aujourd’hui par l’Azerbaïdjan, est en ruines

 « Trente ans d’occupation par l’Arménie ont fait de notre belle province du Karabach un champ de ruines », expliquant à Mondafrique voici un an, l’ancien ambassadeur d’Azerbaïdjan en France, Rahman Mustafayev. Lorsque les Azéris été chassés du Haut Karabakh dans les années 1990 par l’Arménie profitant de l’effondrement de l’URSS, près de 700000 réfugiés ont du prendre le chemin de l’exil, alors que la population azérie compte au total dix millions de citoyens.  L’heure est aujourd’hui à la reconstruction et au déminage, auquel le quai d’Orsay participe activement. Le pays quelque 750 millions de dollars par an pour réhabiliter ces villes fracassées. Des centaines de mines sont encore enfouies dans le sol qui ont provoqué la mort de près de deux cent personnes depuis le cessez le feu.

« Le temps apaisera ces blessures, conclut le diplomate,  mais nous n’oublierons pas ceux qui ont laissé leurs vies et leurs espoirs. Nous espérons que demain les Arméniens qui sont 50000 à vivre en Azerbaidjan retrouveront toute leur place dans notre nation. » .

La destruction culturelle du Karabach sous occupation arménienne