Emmanuel Macron ne fait plus rêver le Liban!

Le 17 janvier 2025, Emmanuel Macron foulait de nouveau le sol libanais pour sa troisième visite officielle depuis 2017. Pourtant, loin de l’élan d’espoir suscité après l’explosion du port de Beyrouth en août 2020, cette visite a mis en lumière l’échec patent de sa diplomatie au Liban et son incapacité à transformer les engagements en résultats. Retour sur une journée marquée par les profondes contradictions de la politique étrangère française.

 

Emmanuel Macron apparemment tendu a affiché un sourire crispé….

Le contraste est frappant entre les deux visites d’Emmanuel Macron à Beyrouth. En 2020, dans les ruines du port dévasté, il incarnait l’espoir d’une renaissance libanaise, promettant une aide française conditionnée à des réformes structurelles. Le 17 janvier 2025, sa promenade dans un quartier de Gemmayzé reconstruit prend des allures de mise en scène politique bien huilée. Accompagné de Jean-Yves Le Drian et sous haute sécurité, le président français s’est livré à un exercice convenu: dégustation de fatayers, bains de foule chaleureux et selfies avec les habitants.

Une opération soigneusement orchestrée qui n’a pas manqué de réjouir un public libanais toujours sensible à ces gestes d’amitié franco-libanaise. Les Libanais ont témoigné de leur attachement historique à la France. Le point d’orgue de cette réception a eu lieu à la Résidence des Pins, où l’élite libanaise conviée s’est adonnée à une frénésie de selfies avec le président. « Chacun voulait son Macron ! », a plaisanté un invité. Cette effervescence sur les réseaux sociaux illustre la popularité persistante de la France auprès des Libanais, qui perçoivent cette visite comme un signal d’engagement renouvelé, malgré les critiques.

Le quotidien L’Orient-Le Jour, dénonce pourtant une opération de communication bien huilée « Toujours entouré par sa sécurité et ses équipes rivées à leurs téléphones, le président français déguste des fatayers aux épinards au restaurant Le Chef, pendant que le gérant scande un vibrant « Vive la France ». Un membre de son cabinet immortalise la scène en prenant une vieille dame par la main pour la rapprocher de Macron : cette séquence sera reprise en boucle sur les réseaux sociaux. »

Certains Libanais pourtant observent la scène sans grande émotion. Christian, quinquagénaire en terrasse, est imperturbable. « J’ai vu ce que ça a donné en 2020. On pensait qu’il allait nous aider, mais il s’est contenté de légitimer notre gouvernement corrompu », lâche-t-il. Citant l’enquête du 4 août, les infrastructures de transport ou encore les relations avec le Hezbollah, il critique une politique orientée « pour la défense des intérêts français et de ses alliés ultra-riches ». Selon lui, si la France n’a plus la même importance au Liban face aux États-Unis et à l’Arabie saoudite, elle pourrait encore jouer un rôle, à condition de revoir ses priorités. « Mais la France a perdu son influence ici. »

Une diplomatie équivoque face au Hezbollah


La diplomatie française au Liban révèle ses contradictions. Derrière un discours prônant l’inclusion et le dialogue, Paris a toujours adopté une approche pragmatique controversée, notamment envers le Hezbollah. Bien que considéré comme un acteur politique incontournable, ce mouvement armé est surtout cénoncé pour son rôle dans l’affaiblissement de la souveraineté libanaise.

Un exemple marquant est la nomination de Nawaf Salam comme Premier ministre : si Paris l’a présentée comme une « victoire », le refus du Hezbollah de participer aux consultations a exposé les limites de l’influence française.

Le déplacement de Macron, affiché comme un soutien aux nouvelles autorités, s’inscrit dans une configuration où les États-Unis et Israël dictent largement les équilibres politiques. Ce décalage entre ambitions affichées et réalités souligne une politique étrangère en perte d’efficacité.

Crise d’influence en Afrique et avec l’Algérie

 Cette visite intervient alors que la France connaît un recul géopolitique majeur en Afrique. La reconnaissance de la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental en 2024 a été perçue comme une trahison par l’Algérie, aggravant une crise diplomatique latente. Les relations tendues se sont intensifiées début 2025 avec l’affaire Doualemn, un influenceur expulsé de France et dont le rapatriement a été refusé par Alger. Ce climat tendu illustre une perte d’influence progressive, renforcée par le retrait militaire français dans plusieurs pays du continent.

Lors de la Conférence des ambassadeurs, une déclaration maladroite de Macron a suscité l’indignation : « Je crois qu’on a oublié de nous dire merci. » Cette phrase, perçue comme paternaliste, a provoqué une levée de boucliers, renforçant l’idée d’une France déconnectée des réalités multipolaires.

Une diplomatie fragilisée

La fragilité politique de la France au début de 2025 affaiblit considérablement Emmanuel Macron sur la scène internationale. Après la dissolution de l’Assemblée nationale, suivie d’instabilité chronique et de l’absence de budget voté, la crédibilité du président est mise à mal. À cela s’ajoute une succession de quatre Premiers ministres en un an, qui illustre une gestion intérieure chaotique.

Ces difficultés se reflètent dans une vision diplomatique dépassée, marquée par un héritage postcolonial. Alors que Macron tente de préserver une image de leader d’envergure, notamment par des visites symboliques comme celle de Beyrouth, la France reste prisonnière d’une approche rigide, nécessitant une refonte pour retrouver sa pertinence sur la scène internationale.