En ce week-end pascal, les massacres de chrétiens perpétrés au nom de l’islam radical par Daech, par les shebabs somaliens ou par Boko Haram arrivent enfin à la une de l’actualité, les chaînes de télévision ayant épuisés tous les sujets sur le pilote fou de la Lufthansa
En ce week-end de Pâques, le pape François vient de pousser un coup de gueule contre « le silence complice » et « l’indifférence » face à la furie djihadiste contre les chrétiens d’Orient. Enfin! Saint Père, le tocson sonne certes un peu tard et le Vatican aurait pu se réveiller plus tôt.
Au début était Boko Haram
Les massacres de chrétiens ne datent pas d’aujourd’hui, mais ont vraiment débuté en 2009 dans un pays d’Afrique, qui se nomme Nigeria. Là, dans cette Afrique profonde, toujours en proie aux guerres religieuses et ethniques comme on le raconte à longueur d’antenne, Boko Haram a commencé à massacrer des chrétiens, à brûler des églises, provoquant parfois en riposte des massacres de mulsulmans. Sans susciter une grande indignation de la communauté dite internationale et des autorités morales du monde.
En plus d’être Africains, ces chrétiens sont, dans leur très grande majorité, évangélistes, cette religion bizarre où les fidèles peuvent se rouler par terre pour se repentir (le Nigeria en compte plusieurs dizaines de millions). Ils n’ont donc pas été clairement identifiés par les belles consciences occidentales comme appartenant totalement à la communauté mondiale. C’étaient simplement des noirs non musulmans qu’on éliminait. C’est d’ailleurs par ce nouveau concept de « non musulmans » que l’AFP a utilisé pour les 147 étudiants kenyans exécutés jeudi par les chebabs. Un qualificatif repris par France 2 et d’autres médias. Avant d’abattre froidement leurs victimes, les islamistes somaliens avaient pourtant séparé les musulmans des chrétiens en fonction de leurs habits, criant, selon des témoins « Bonnes vacances de Pâques! ».
Froideur élyséenne
Les médias français se passionnant pour la recherche de la deuxième boîte noire de l’A320, ce massacre méthodique n’a fait que quelques apartés dans les journaux télévisés. François Hollande, lui, s’est contenté d’un froid communiqué, comme il en produit à la chaîne et à tout propos, pour condamner indifféremment le ciel terroriste qui provoque des inondations dans le midi ou les djihadistes assassins: « Le président de la République exprime sa solidarité avec le peuple kényan, qui doit faire face au terrorisme le plus abject, celui qui s’attaque à la jeunesse, au savoir et à l’éducation ». C’était le moins qu’il puisse écrire. Quant à faire, c’est une autre paire de manches. La diplomatie française, qui se lance aujourd’hui dans une séance de rattrapage, s’est contentée de favoriser l’accueil en France de quelques dizaines de chrétiens irakiens persécutés. Et François Hollande n’a pas trouvé mieux que de recevoir mercredi à l’Elysée Bernard Henri Lévy avec une brochette de généraux kurdes, venant demander une aide militaire française pour arrêter le génocide chrétien. Ce qui démontre l’absence totale de pudeur de ce BHL qui, il faut le rappeler, a pressé Sarkozy d’intervenir en Libye où les armes françaises parachutées à l’aveuglette se retrouvent aujourd’hui entre les mains de Boko Haram. Pour y massacrer des chrétiens.
Tandis que le très athée François Hollande cherchait dans son dictionnaire l’adjectif idoine pour qualifier la tuerie kenyane (il lui en reste d’autres inemployés comme dégueulasse, abominable ou ignoble), le très protestant (non évangéliste) Barak Obama, lui, n’avait pas hésité en février à évoquer les croisades et l’inquisition pour dénommer la guerre sainte mondiale déclenchée par les djihadistes: « Souvenons-nous, avait-il déclaré au cours d’une journée nationale de prière, que pendant les croisades et l’inquisition, des actes terribles ont été commis au nom du Christ. Dans notre pays, nous avons eu l’esclavage, trop souvent justifié par la religion. » Ca a quand même le mérite d’être plus clair que les propos d’Hollande.
A cette occasion, les Américains ont d’ailleurs pu découvrir que leur président était protestant; alors que 25% d’entre eux le croyaient musulman, selon un sondage du Time.
Des dictatures protectrices
Si le monde occidental est tellement embarrassé dans sa dénonciation du massacre des chrétiens, c’est qu’il en est largement co-responsable par ses interventions en Syrie, en Irak ou en Libye, avec le Qatar, l’Arabie Séoudite, et même des pays comme la Turquie dont on commence à découvrir le trouble jeu aujourd’hui, qui ont fourni finances et armement aux djihadistes. Il faut aussi redire que le million et demi d’orthodoxes grecs, arméniens, syriaques et catholiques melkites vivaient en pays en Syrie sous la dictature d’Assad. Qu’il existait en Irak plus de huit cent mille chrétiens catholiques chaldéens et nestoriens en 2000 avant la chute de Saddam Hussein. Que les cinq à dix millions de chrétiens coptes d’Egypte étaient protégés sous Moubarak avant l’arrivée au pouvoir de Morsi et des Frères Musulmans, même si des flambées de violences se produisaient de temps à autre.
Et qu’au Nigeria, ce pays partagé entre un nord musulman et un sud chrétien, les affrontements religieux étaient plutôt rares avant l’arrivée de Boko Haram et de ses kalachnikovs. Mais ça, ce n’est pas très politiquement correct de le rappeler.