Mondafrique https://mondafrique.com/ Mondafrique, site indépendant d'informations pays du Maghreb et Afrique francophone Mon, 22 Sep 2025 16:54:36 +0000 fr-FR hourly 1 https://wordpress.org/?v=6.8.2 https://mondafrique.com/wp-content/uploads/2017/11/logo_mondafrique-150x36.jpg Mondafrique https://mondafrique.com/ 32 32 Referendum/Guinée : la chronique d’un fiasco annoncé https://mondafrique.com/international/referendum-guinee-la-chronique-dun-fiasco-annonce/ https://mondafrique.com/international/referendum-guinee-la-chronique-dun-fiasco-annonce/#respond Mon, 22 Sep 2025 13:31:38 +0000 https://mondafrique.com/?p=139160 Le dimanche 21 septembre, près de sept millions de Guinéens étaient appelés à s’exprimer sur le référendum constitutionnel. Censé légitimer une junte dirigée par Mamadi Doumbouya hors des clous constitutionnels depuis quatre ans, l’opération a tourné en un flop magistral. Leslie Varenne L’idée de modifier la Constitution est née dans la foulée du coup d’Etat […]

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Le dimanche 21 septembre, près de sept millions de Guinéens étaient appelés à s’exprimer sur le référendum constitutionnel. Censé légitimer une junte dirigée par Mamadi Doumbouya hors des clous constitutionnels depuis quatre ans, l’opération a tourné en un flop magistral.

Leslie Varenne

L’idée de modifier la Constitution est née dans la foulée du coup d’Etat du 5 septembre 2021. C’est une tactique bien connue et déjà fort usitée lors des putschs. Vis-à-vis des électeurs comme de la communauté internationale, elle permet de justifier de rester au pouvoir en dehors des clous constitutionnels.

Les arguments sont bien rodés : pour organiser une élection présidentielle libre, crédible et transparente afin de garantir la stabilité du pays, il est indispensable de se doter d’une nouvelle Constitution qui fixera les règles du jeu électoral et institutionnel. Imparable.

Un costume sur mesure

Bien entendu, modifier le texte fondamental et organiser un référendum prend du temps, Mamadi Doumbouya a usé du stratagème jusqu’à la corde. Il a réussi à tenir quatre longues années avant que la pression populaire et celle de ses partenaires internationaux ne devienne intenable. Au passage, le général au pouvoir en a profité pour appliquer l’adage « on n’est jamais mieux servi que par soi-même ».  Ainsi, le nouveau texte accorde une amnistie aux membres de la junte non seulement contre des poursuites judiciaires liées au coup d’Etat mais également aux autres actes commis pendant la transition ! Autre bonus : aucune clause particulière ne l’empêche de se présenter à la magistrature suprême contrairement aux promesses qu’il avait faites au lendemain du putsch et aux directives de la charte de la transition. Enfin, la nouvelle Constitution instaure un mandat unique porté à 7 ans au lieu de 5, mais est-ce une avancée si notable et qui empêchera de revoir la Constitution dans 6 ans ?

Même les oiseaux votent « Oui » !

En difficulté, fragilisé, sur la scène intérieure et à l’international notamment en raison des arrestations extrajudiciaires et des disparitions forcées, Mamadi Doumbouya avait absolument besoin d’une forte participation populaire à ce scrutin pour retrouver quelques couleurs. D’énormes moyens ont donc été mis en œuvre pour assurer la victoire du « oui ». Le pouvoir a organisé une vaste campagne publicitaire dans tous le pays avec des portraits géants du général-président. Craignant pour sa sécurité et ne se déplaçant jamais sans une armada pour le protéger, Mamadi Doumbouya n’a participé à aucun grand meeting. En revanche, ses ministres ont été mis à contribution, ils ont sillonné villes et villages pour prêcher la bonne parole et inciter les populations à aller voter « oui ».

Les Forces vives de Guinée, qui regroupent plusieurs partis dont celui du président Alpha Condé et celui de l’opposant Cellou Dallein Diallo, appelaient au boycott, mais, elles ont été interdites de campagne. Même des médias, pourtant consensuels, comme Guinée Matin ont été suspendus pendant la période électorale. Le décret de nomination des observateurs a été publié moins de 72 heures avant le vote et ceux envoyés par la CEDEAO ne sont venus que quatre jours avant. Ces délais limitent grandement la capacité des dits observateurs à mener à bien leur mission. Pour couronner le tout, le référendum s’est tenu sous haute supervision militaire. Quelque 45 000 soldats et un millier de blindés étaient déployés pour s’assurer du bon déroulement des opérations.

Comme si tout cela ne suffisait pas et que la menace pouvait aussi venir du ciel, la Guinée a fermé son espace aérien le jour du scrutin ! Loin d’être anodine, cette disposition donne la mesure de la paranoïa en cours au palais de Sékhoutouréya. Le journaliste en exil, Latif Diallo, a choisi l’humour pour commenter un tel dispositif : « il ne reste plus qu’à demander aux oiseaux de voter « oui » aussi ! »

Les jeux sont faits…

Las, même avec cette débauche de moyens, ce qui devait être le grand moment de légitimation du pouvoir de Mamadi Doumbouya a tourné au fiasco.  C’était écrit d’avance : entre appel au boycott de l’opposition et le rejet profond d’un régime militaire incapable de répondre aux urgences sociales et économiques, une grande partie de la population a boudé ce rendez-vous. D’après plusieurs sources guinéennes, dans le meilleur des cas, l’affluence dans les bureaux de vote a été décevante, dans les autres, elle a été catastrophique. Mais qu’importe… Les résultats officiels ne sont pas encore tombés, mais ils sont déjà connus. Le « oui » l’emportera haut la main, puisque même les oiseaux ont voté et la participation dépassera les 50% puisque c’est le quorum obligatoire pour valider la nouvelle constitution.

Pour autant, personne ni sur la scène nationale, ni sur le plan international ne sera dupe. Au contraire, ce référendum censé légitimer Mamadi Doumbouya le fragilise un peu plus et au lieu de stabiliser le pays, il ouvre une nouvelle phase d’instabilité.  Alors que la crise politique s’enlise, le pays court le risque de précipiter un autre chaos aux frontières d’une Afrique de l’Ouest déjà marqué par les incertitudes sécuritaires au Sahel et les tensions électorales en Côte d’Ivoire. Loin de clore la page du doute, ce référendum l’a ravivée, posant ainsi la question cruciale : combien de temps la Guinée pourra-t-elle encore marcher sur un  fil ?  

 

 

 

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L’Algérie après la reddition du Général Nacer el Djinn https://mondafrique.com/limage-du-jour/lalgerie-apres-la-reddition-du-general-nacer-el-djinn/ https://mondafrique.com/limage-du-jour/lalgerie-apres-la-reddition-du-general-nacer-el-djinn/#respond Mon, 22 Sep 2025 07:02:12 +0000 https://mondafrique.com/?p=139142 Alors que l’ex patron du contre espionnage algérien, démis de ses fonctions et emprisonné en mai dernier, avait été déclaré en fuite depuis jeudi après midi, l’information a mis en branle les réseaux sociaux à l’étranger comme en Algérie, avec des scénarios dignes des films hollywoodiens, tandis que les médias du pays observaient, médusés, cette […]

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Alors que l’ex patron du contre espionnage algérien, démis de ses fonctions et emprisonné en mai dernier, avait été déclaré en fuite depuis jeudi après midi, l’information a mis en branle les réseaux sociaux à l’étranger comme en Algérie, avec des scénarios dignes des films hollywoodiens, tandis que les médias du pays observaient, médusés, cette incroyable mobilisation sécuritaire qui a abouti à son arrestation. On a assisté également au renvoi du patron de la DCSA (renseignement militaire), jugé pourtant très proche du chef d’état major, le général Chengriha, qui lui en voulait pourtant depuis quelque temps en raison du rapport qu’il avait rendu voici un mois sur le moral désastreux des militaires algériens . 

Les rumeurs de la fuite du haut gradé à l’étranger en Espagne où le général el Djinn possède de nombreux biens immobiliers, se sont vite avérées un leurre. Les services de sécurité, convaincus de sa présence dans le périmètre de la capitale, ont engagé une chasse à l’homme à la hauteur de l’enjeu que représentait la capture d’un militaire qui détenait tant de secrets au coeur de l’2tat algérien. Trois jours durant, la traque est maintenue par un dispositif sécuritaire renforcé par l’ensemble de l’appareil sécuritaire  (DCSA , de la DGSI, police et gendarmerie).

Réuni d’urgence, le Haut Conseil de sécurité, la plus haute instance du pouvoir éxécutif algérien, donné ordre de l’arrêté dans les plus brefs délais. L’arrestation d’un nombre important d’éléments de son entourage au sein de la DGSI, son ancien service où des complices avaient pu lui faciliter sa fuite, témoignait d’une volonté  d’en déoudre du gnénéral Chengriha, le puissant patron de l’armée qui avait fait l’objet de campagnes de diffamatioon de la part des amis du général Djinn.

La fin d’une cavale médiatisée

C’est à travers des éléments de son entourage proche qu’il a été localisé le soir de la journée du samedi. La médiation s’est révélée constructive, le fugitive accepte la reddition sans usage de la force en exigeant la vie sauve et un procès équitable. Le sort du Général El Jen intéresse les différents clans du pouvoir effectif , civils comme militaires.

Certains seraient heureux de le voir partir avec ses secrets dans sa tombe. Pour eux, il est plus nuisible vivant tant que le personnage détient des secrets opérationnels des années de sang et connaissant l’architecture du pouvoir de l’intérieur. Pour d’autres, il est une arme destructrice dans le règlement de compte et contentieux liés aux équilibres au seins des sérails du pouvoir. Le plus grand gagnant est le chef d’État major, Said Chegriha.

Ce dernier aura à choisir entre une réaction soft en procédant à un assainissement au sein des service de sécurité principalement la DCSA, et une seconde plus hard centrée sur des purges plus larges dont il a le secret.

Le rapport de l’ex patron de la DCSA

C’est sous recommandation de l’État major général que les services de l’ex chef de la DCSA, le général major, Mahrez JRIBI qui vient d’être démis de ses fonctions a produit un rapport détaillé sur l’état des unités opérationnelles face à des éventuelles scénarios de crise locales ou régionales. Dans ce rapport, l’ex chef de la sécurité de l’armée préconise de trouver des solutions aux officiers supérieurs emprisonnés dont certains souffrent de pathologies chroniques ou d’autres sans jugement.

Deux généraux majors, Rachid CHOUAKI et Hadj LAAROUSSI sont décédés lors de leur détention à la prison militaire de Blida. Un nombre important d’officiers, au sein des services de sécurité, appréhendent les promotions tant que celles ci est devenue signe de fin carrière entre quatre murs. Un climat de paranoïa s’est installé qui porte atteinte au niveau d’efficacité de l’armée. 

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Xavier Houzel: « ce jour mémorable » de l’État palestinien reconnu https://mondafrique.com/libre-opinion/xavier-houzel-ce-jour-memorable-de-letat-palestinien-reconnu/ https://mondafrique.com/libre-opinion/xavier-houzel-ce-jour-memorable-de-letat-palestinien-reconnu/#respond Mon, 22 Sep 2025 06:35:40 +0000 https://mondafrique.com/?p=139136 Alors que la France s’apprête à reconnaître officiellement l’Etat palestinien ce lundi 22 septembre, en marge de l’Assemblée générale des Nations unies à New York, une décision, prise dans le cadre d’un sommet coparrainé par la France et l’Arabie Saoudite, notre chroniqueur et ami Xavier Houzel salue ce geste salvateur initié en grande partie Emmanuel […]

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Alors que la France s’apprête à reconnaître officiellement l’Etat palestinien ce lundi 22 septembre, en marge de l’Assemblée générale des Nations unies à New York, une décision, prise dans le cadre d’un sommet coparrainé par la France et l’Arabie Saoudite, notre chroniqueur et ami Xavier Houzel salue ce geste salvateur initié en grande partie Emmanuel Macron

En ce jour mémorable du 22 septembre 2025, demain, la France reconnaît à son tour l’autre État de Palestine, dont l’existence est aussi immuable dans la région que celle de l’État d’Israël – nom de Jacob et de ses enfants à l’origine des 12 tribus qui formèrent le premier royaume juif dans la Bible. Elle réparera de façon solennelle un manquement, à l’occasion de l’Assemblée générale des Nations Unies, soixante-douze ans après la Déclaration autoproclamée d’indépendance de la communauté politique des Juifs en Palestine, le 14 mai 1948.

Cet acte fondateur dit « Charte de l’indépendance » évoquait alors non seulement la déclaration Balfour du 2 novembre 1917 relative au Peuple Juif, mais il se référait aussi implicitement à la Charte des Nations Unies (26 juin 1945) qui mentionnait le droit des peuples à l’auto-détermination. Ce droit a été réaffirmé dans la Déclaration universelle des Droits de l’homme adoptée six mois plus tard par l’ONU le 10 décembre 1948. Emmanuel Macron ne pouvait pas faire moins ; le fait que la Grande-Bretagne – ô combien impliquée dans le problème depuis son origine – lui emboite le pas montre à quel point la démarche finalement s’imposait, et à une telle occasion.

On a reproché, mais à tort, au président Macron d’être de connivence avec Israël en ne procédant pas plus rapidement à la reconnaissance formelle de la Palestine, jusqu’alors sempiternellement figée en l’état futur d’achèvement ; on l’accusait d’avoir prévenu le Premier ministre israélien et son cabinet assez tôt pour qu’ils aient suffisamment de temps pour rendre un tel geste inopérant. Ce n’est pas le cas ; car cela aura permis aux dirigeants d’autres grands pays de réfléchir… et aux actuels dirigeants d’Israël de s’enferrer au-delà de l’admissible.

 

XH

 

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Les oscillations de l’Amérique, du Vietnam à l’Iran https://mondafrique.com/a-la-une/les-oscillations-de-lamerique-du-vietnam-a-liran/ https://mondafrique.com/a-la-une/les-oscillations-de-lamerique-du-vietnam-a-liran/#respond Mon, 22 Sep 2025 04:50:00 +0000 https://mondafrique.com/?p=139105 Depuis des décennies, la politique étrangère des États-Unis aujourd’hui comme hier oscille entre principes et expédients. La première puissance mondiale, impérialiste sans en avoir conscience, proclame de nobles objectifs pour les contredire dans la foulée. Alors que circulent des propositions visant à déplacer près de deux millions de Palestiniens de Gaza vers la Libye ou […]

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Depuis des décennies, la politique étrangère des États-Unis aujourd’hui comme hier oscille entre principes et expédients. La première puissance mondiale, impérialiste sans en avoir conscience, proclame de nobles objectifs pour les contredire dans la foulée. Alors que circulent des propositions visant à déplacer près de deux millions de Palestiniens de Gaza vers la Libye ou l’Éthiopie sous prétexte « humanitaire », Washington risque à nouveau la complicité dans la réécriture des identités par la force — une violation flagrante de l’autodétermination qu’il prétend défendre.

Les piliers de la stratégie américaine sont connus : défendre la démocratie et l’autodétermination, dissuader l’agression, maintenir des équilibres de puissance en Europe et en Asie, sécuriser les flux énergétiques, prévenir la prolifération et faire respecter le droit international. Mais, à maintes reprises, Washington chancelle dans leur application, laissant derrière lui une traînée de contradictions, d’engagements brisés et de contrecoups.

Le Vietnam fut l’archétype de ce vacillement. Les présidents successifs présentèrent la guerre comme un test de la détermination américaine : si le Sud-Vietnam tombait, le communisme se répandrait comme des dominos et la crédibilité américaine s’effondrerait. Pourtant, cette guerre censée préserver cette crédibilité la consuma au contraire, prouvant que lorsqu’un principe est appliqué de façon inconsidérée, il s’effondre sous son propre poids. Washington quitta non pas avec honneur mais avec épuisement, ses alliances intactes mais sa réputation marquée d’un bourbier.

Compromis et escalade dans le même souffle.

La Guerre froide enfanta aussi une inconsistance plus sombre : l’habitude de la CIA de renverser des gouvernements élus au nom de la stabilité ou de l’endiguement. En Iran en 1953, au Guatemala en 1954, au Chili en 1973, et ailleurs, les États-Unis sapèrent les démocraties qu’ils prétendaient défendre. Des années plus tard, des responsables présentèrent des excuses à certaines de ces nations, alors même que Washington les menaçait à nouveau. La contradiction devint éclatante lors de la récente guerre de douze jours entre Israël et l’Iran : tandis que Washington était assis à la table des négociations avec Téhéran, il larguait simultanément des bombes sur des forces alignées avec l’Iran à la demande d’Israël. Peu d’épisodes illustrent plus nettement l’oscillation américaine. 

« Vous pouvez toujours compter sur les Américains pour faire ce qui est juste — après avoir essayé toutes les autres options. »Churchill

L’Afghanistan cristallisa le prix de cette habitude. Dans les années 1980, sous la direction de William Casey, la CIA injecta des milliards pour armer les moudjahidines et saigner l’Union soviétique. La stratégie fonctionna à court terme ; quand les Soviétiques se retirèrent, l’Amérique en fit autant. La guerre civile s’ensuivit, les talibans montèrent, et al-Qaïda prospéra dans ce vide. Un triomphe par procuration devint le terreau du 11 septembre.

Après les attentats, Washington revint avec une force écrasante, renversa rapidement les talibans — puis vacilla pendant vingt ans entre contre-terrorisme, contre-insurrection, démocratisation et retrait, sans jamais définir de fin cohérente. Quand Biden tira enfin la prise en 2021, les talibans reprirent Kaboul plus vite que les Américains ne les avaient renversés. La sortie chaotique grava l’image d’une Amérique qui entre avec résolution mais sort avec improvisation, laissant alliés abandonnés et adversaires enhardis.

Un même schéma en Irak.

,En 2003, les États-Unis envahirent sur la base fausse d’armes de destruction massive. Saddam tomba, mais la guerre déstabilisa la région, renforça l’Iran et accoucha de Daech. Ce qui devait démontrer la fermeté ruina au contraire la crédibilité. Les renseignements parurent politisés, les principes malléables, et la guerre rejoignit le Vietnam au catalogue des avertissements historiques.

La Libye devait être différente : une intervention humanitaire rapide en 2011 pour empêcher un massacre à Benghazi. Elle réussit à éliminer Mouammar Kadhafi mais échoua à préparer l’après. Le pays sombra dans la violence factionnelle, terrain de jeu pour milices et mercenaires. Washington se félicita d’avoir sauvé des vies, puis détourna le regard tandis que l’État s’effondrait. L’intervention sans responsabilité devint un autre visage de l’oscillation : principe invoqué avec force, puis abandonné en silence.

Le Printemps arabe révéla ce vacillement en temps réel. En Égypte, Washington s’accrocha d’abord à Hosni Moubarak comme rempart, puis bénit la révolution populaire qui le renversa, tenta ensuite de travailler avec Mohamed Morsi, élu démocratiquement, et accepta finalement le coup d’État d’Abdel Fattah al-Sissi, rétablissant rapidement l’aide militaire. Le message aux peuples arabes était clair : le soutien américain à la démocratie est élastique dès qu’il se heurte à la « stabilité ». En Syrie, la « ligne rouge » d’Obama sur les armes chimiques se mua en élastique. Après l’attaque de la Ghouta en 2013, Washington choisit un accord de désarmement plutôt que des frappes — retirant les stocks déclarés mais échouant à dissuader les brutalités futures ou à résoudre la guerre. Dans les deux cas, le résultat fut le même : principes prêchés, exceptions pratiquées.

Le Yémen ajouta une autre strate. Pendant des années, Washington arma et conseilla l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis dans leur guerre contre les Houthis, tout en appelant à des cessez-le-feu et à une aide humanitaire. Trump approfondit le soutien à Riyad tout en se vantant de contacts secrets avec les Houthis via Oman. L’Amérique arma donc un camp tout en courtisant l’autre — à la fois parrain et médiateur. Le résultat ne fut pas un levier mais une incohérence : une guerre prolongée, une famine aggravée et une crédibilité américaine ternie.

Israël, une morale sélective.

Washington prétend défendre les droits universels et le droit international, pourtant alors qu’Israël commet ce que la plupart des experts qualifient de génocide et de crimes contre l’humanité à Gaza, les États-Unis se précipitent pour réapprovisionner en armes et protègent leur allié de toute responsabilité à l’ONU. Le soutien se transforme en indulgence, exemptant un allié des règles exigées des autres. Cette double norme sape la crédibilité mondiale. 

Plus récemment, le comportement de Trump en Alaska illustra l’oscillation dans le langage de l’apaisement. Selon des rapports, il aurait suggéré un cadre demandant à l’Ukraine de céder des pans de territoire — y compris des zones non occupées par la Russie — pour conclure un accord avec Vladimir Poutine. Ce fut une réédition au XXIᵉ siècle du principe de Munich : des concessions imposées au nom d’un autre pays, sans son consentement. Pour l’Ukraine, le message était que le soutien américain était conditionnel ; pour la Russie, que la coercition paie. De tels marchés n’apportent pas la paix, ils garantissent la prochaine guerre.

L’Accord de Taëf au Liban.

En 1989, les États-Unis aidèrent à négocier l’accord qui mit fin à la guerre civile libanaise et remania le système politique libanais. Un temps, il symbolisa un art de gouverner constructif. Mais Washington détourna vite le regard, tolérant la domination syrienne et intégrant ensuite le Liban dans ses confrontations plus larges avec l’Iran et Israël. Taëf devint un point de référence cité mais rarement défendu, laissant le pays dériver dans la paralysie.

Pourquoi l’Amérique vacille-t-elle si souvent ? L’explication réside en partie dans sa politique intérieure. Le cycle présidentiel de quatre ans et l’alternance partisane récompensent les revirements spectaculaires plutôt que la constance. Chaque administration se définit contre la précédente, dénonçant des traités une année pour les réintégrer la suivante, reclassant menaces et alliés comme s’il s’agissait d’une campagne domestique. Ce qui en ressort à l’étranger est l’impression que les engagements américains ne sont pas nationaux mais partisans — et que chaque élection réinitialise la boussole.

À travers tous ces théâtres, le schéma est clair. L’Amérique arme des insurgés puis recule devant le chaos qu’ils engendrent. Elle renverse des tyrans puis se lasse de reconstruire. Elle proclame les droits de l’homme puis exempte ses alliés. Elle négocie des accords puis les néglige. Les piliers sont bien définis mais rarement défendus avec discipline. Au lieu de constance, Washington confond le mouvement avec la stratégie, prenant les deals et les déploiements pour du leadership.

Le remède n’est pas mystérieux mais exige de la discipline. Cesser de proposer des raccourcis comme en Alaska qui bradent ce qui ne vous appartient pas. Assumer la longue queue des interventions comme en Afghanistan, en Irak et en Libye. Appliquer les règles autant aux alliés qu’aux adversaires pour que le droit international n’apparaisse pas sélectif. Préserver les accords comme Taëf plutôt que de les abandonner. Résister à la tentation de s’excuser une décennie puis de bombarder la suivante. Et ne jamais accepter le déplacement comme substitut à la justice — que ce soit à Gaza, en Libye ou en Éthiopie.

La réplique de Churchill saisissait autrefois la force particulière de l’Amérique : la capacité de s’embrouiller, de corriger le tir et finalement de « faire ce qui est juste ». Mais le monde est aujourd’hui moins indulgent. Les rivaux avancent plus vite, les alliés se protègent, les opinions deviennent cyniques, et les institutions s’affaiblissent lorsque le faiseur de règles ne les respecte pas lui-même. Faire ce qui est juste après toutes les mauvaises options n’est plus un luxe que l’Amérique peut se permettre.

L’épreuve du leadership est plus simple et plus difficile : faire ce qui est juste d’abord, avant le prochain vide, la prochaine contradiction, le prochain effondrement de crédibilité.

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Mali, les communiqués de victoire contestés https://mondafrique.com/international/mali-les-communiques-de-victoire-contestes/ https://mondafrique.com/international/mali-les-communiques-de-victoire-contestes/#respond Mon, 22 Sep 2025 04:31:00 +0000 https://mondafrique.com/?p=139075 Les forces armées maliennes (Fama) annoncent avoir mené, le 18 septembre, des actions de nettoyage, au nord-est de Sévaré.  Il s’agit surtout d’une « opération héliportée » dans une zone rurale, au nord-est de Sévaré (centre du pays). Des éléments de langage contestés https://t.me/veillesah/198M « Veille Sahélienne » Le communiqué revendique la neutralisation d’une dizaine de combattants […]

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Les forces armées maliennes (Fama) annoncent avoir mené, le 18 septembre, des actions de nettoyage, au nord-est de Sévaré.  Il s’agit surtout d’une « opération héliportée » dans une zone rurale, au nord-est de Sévaré (centre du pays). Des éléments de langage contestés

https://t.me/veillesah/198M

« Veille Sahélienne »

Le communiqué revendique la neutralisation d’une dizaine de combattants du Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (Gsim-Alqaïda). Selon ses termes, l’intervention ressortit au cadre de l’antiterrorisme et n’aurait entraîné aucune perte parmi les populations.

Cependant, un canal Telegram proche de l’Africa Corps émet un tout autre son de cloche. En l’occurrence, l’assaut a été planifiée et exécuté sous leur supervision, à l’aide d’un hélicoptère d’attaque de type Mi-24. La discordance entre le narratif des Fama et celui des supplétifs russes n’est pas nouvelle. Le lecteur attentif y décèle une compétition feutrée autour des bilans et des faits de bravoure.

De leur côté, des témoins de la région de Mopti, contestent le récit officiel. Ils affirment que seuls 2 éléments du Gsim ont été tués. Le reste des victimes seraient des habitants de Kondioli, commune de Fatoma. A en croire les survivants, le total des 9 morts résidait dans ce village, tous des civils, de sexe masculin, dont 2 enfants. Le bourg de Sossari, commune de Kounari, également visé, ne déplore pas de décès.

Une image diffusée par les relais d’Africa Corps montre la dépouille d’un jihadiste, gisant, à proximité de son arme.

La seconde frappe des Fama, en date du 19 septembre, près de Mourdiah, région de Nara, n’a pu être vérifiée.  Les riverains disent ne pas être en mesure de la confirmer.

Dans un contexte de blocus sur les livraisons de carburant, où la junte peine à restaurer la confiance hors des villes, chaque opération mal calibrée ou d’une publication maladroite peut exacerber la discorde des ethnies, brouiller les lignes de front et offrir, à l’insurrection islamiste, un terreau plus fécond en propagande et recrutement.

Depuis le début de l’offensive de la mousson au Mali, les communiqués des Fama perdent de leur crédibilité.

Document Fama : https://t.me/veillesah/200

Source russe: https://t.me/departamente/6276
Photo d’un cadavre : https://t.me/veillesah/201

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Deux sécuritaires maliens expulsés de France https://mondafrique.com/confidentiels/afrique/deux-securtaires-maliens-expulses-de-france/ https://mondafrique.com/confidentiels/afrique/deux-securtaires-maliens-expulses-de-france/#respond Mon, 22 Sep 2025 04:11:00 +0000 https://mondafrique.com/?p=139063 Ousmane Houmani Camara et Batné Coulibaly sont deux diplomates maliens en poste à Paris qui viennent d’être déclarés, le 17 septembre 2025, non désirables en France dans un contexte de tensions diplomatiques entre les deux pays. Le journal « Le Sphinx » Lieutenant-colonel de gendarmerie, Ousmane Houmani CAMARA est conseiller consulaire au Consulat général du Mali à […]

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Ousmane Houmani Camara et Batné Coulibaly sont deux diplomates maliens en poste à Paris qui viennent d’être déclarés, le 17 septembre 2025, non désirables en France dans un contexte de tensions diplomatiques entre les deux pays.

Le journal « Le Sphinx »

Lieutenant-colonel de gendarmerie, Ousmane Houmani CAMARA est conseiller consulaire au Consulat général du Mali à Paris depuis 2017. Paris le considère comme un membre des services de renseignement maliens opérant sous couverture diplomatique. Rappelons qu’Ousmane Camara, dit « Houmani », est cité dans l’affaire du journaliste du Sphinx, Birama Touré, enlevé puis assassiné alors qu’IBK était encore  au pouvoir. Les autorités actuelles continuent à étouffer ce dossier en refusant aux différents juges d’écouter les présumés protagonistes qui sont intervenus dans l’arrestation, la séquestration, la torture et la mort de notre confrère dans la cellule N° 4 de la Sécurité d’État.

Batné Ould Bouh Coulibaly (Contrôleur général de police) est depuis fin 2021 attaché de défense à l’ambassade du Mali à Paris. Il est aussi soupçonné par les autorités françaises d’appartenir aux services de renseignement maliens sous couverture diplomatique, ce qui justifie la mesure d’expulsion prise par la France.

Cette décision de la France intervient après l’arrestation à Bamako d’un diplomate français accusé d’activités de déstabilisation du Mali, ce que Paris dénonce comme un abus et violation de l’immunité diplomatique. Le diplomate français arrêté à Bamako le 14 août 2025 est Yann Vezilier, deuxième secrétaire de l’ambassade de France au Mali. Il est également officier de renseignement de la DGSE (Direction générale de la sécurité extérieure) officiellement accrédité auprès des autorités maliennes. L’expulsion des deux diplomates maliens est présentée comme une mesure de réciprocité dans ce bras de fer diplomatique croissant.

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La mémoire poétique de Gaza est indestructible https://mondafrique.com/loisirs-culture/gaza-la-memoire-poetique-est-indestructible/ https://mondafrique.com/loisirs-culture/gaza-la-memoire-poetique-est-indestructible/#respond Mon, 22 Sep 2025 03:00:45 +0000 https://mondafrique.com/?p=138519 Saintes-Maries-de-la-Mer, le 17 août 2025. Longue méditation sur un banc de l’église baroque. Ambiance médiévale embaumée de fragrances et d’encens. Les estivants, de tous âges, de toutes provenances, saturent l’espace. Le surtourisme vide le sanctuaire de sa quintessence spirituelle. Je pense à la Palestine, aux poétesses gazaouies pourchassées, traquées, liquidées en pleine jeunesse. Me reviennent […]

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Saintes-Maries-de-la-Mer, le 17 août 2025. Longue méditation sur un banc de l’église baroque. Ambiance médiévale embaumée de fragrances et d’encens. Les estivants, de tous âges, de toutes provenances, saturent l’espace. Le surtourisme vide le sanctuaire de sa quintessence spirituelle. Je pense à la Palestine, aux poétesses gazaouies pourchassées, traquées, liquidées en pleine jeunesse. Me reviennent les discussions avec Maya Abou al-Hayyat, Hend Jouda, Jouana Mustafa, Nida Younis, Asmaa Azayzeh au marché parisien de la poésie en juin 2025 (…) 
 
Une chronique de Mustapha Saha
Sociologue, poète, écrivain, artiste peintre, photographe.
 
Heba Zagout,
 
Heba Zagout, artiste peintre, née en 1984, dans le camp  de réfugiés de Boureij à Gaza, tuée le 13 octobre 2023, avec deux de ses quatre enfants. Ses toiles colorées, stylisées, pleines d’allégresse, représentent El Qods, avec ses minarets et ses clochers mitoyens, ses oliviers, ses figuiers,  ses orangers. Elle peint également des palestiennes vêtues de keffiehs et de robes traditionnelles, portant des clefs ou une colombe à la main.
 
Hiba Abou Nada.
 
Elle s’appelle Hiba Abou Nada. Elle est née le 24 juin 1991 à la Mecque. Elle est poétesse, romancière, nutritionniste.  Elle est  assassinée le 20 octobre 2023. Son récit « Oxygen isn’t for the Dead » n’est pas pour les morts, a pour toile de fond les printemps arabes. Révolutions trahies.
 
 
Fatima Hassouna.
 
Fatima Hassouna, poétese, photojournaliste, née le 2 mars 2000 à Gaza, fauchée avec dix membres de sa famille, au moment où son film, avec la réalisatrice iranienne Spideh Farsi, Put your Soûl on your Hand and Walk, Pose ton âme sur ta main et marche, est sélectionné au Festival de Cannes. Ses œuvres sont publiées par des journaux prestigieux, exposées dans des galeries renommées. On l’appelle l’Oeil de Gaza. Elle écrit : « Le monde est là dans sa vastitude. Gaza est une petite boîte. Nous sommes dedans. Le monde est si lointain. Je ne peux pas le visiter. Je voudrais voyager, explorer les immensité et revenir dans ma petite boîte. J’ai besoin de Gaza. Gaza à besoin de moi. Si je meurs, je veux une mort retentissante. Je ne veux pas être une brève dans un flash-info. Je ne veux pas être un chiffre anonyme dans une statistique. Je veux une mort qui retentit dans toute la planète, dans toutes les langues. Je serai une image omniprésente que rien ne peut effacer » (Fatima Hassouna, 2 août 224). 
 
« La photographe est partie. Elle a dit la vérité. Elle reste sans témoin. Sauf un témoin invisible. Pour attester qu’il n’y a plus de témoin. La photographe est partie après avoir dit la vérité. Elle est drapée des couronnes fleuries de sa robe de mariée. Elle se tait. Elle s’expose en silence au silence. Son nom perdure. Mais, qu’est qu’un nom ? Sa grande œuvre photographique s’exhibe en silence. Elle reste muette. Elle se contente de montrer des scènes de silence. Elle rattrape les images qui se dérobent devant son objectif. Elle met les images à nu. Dans ses récits photographiques, tout s’esquisse, tout s’annonce, tout s’interrompt, la naissance, l’amour, la mort, dans leur ordre cyclique, réversible, anhistorique. Il reste ses traces, 
inaltérables, impérissables, indissolubles.  Cette jeune femme est la légèreté même. Elle est unique. Elle exprime ce que la clarté du jour aura été hier, le jour passé. Elle est la mémoire graphique de la naissance de la lumière à la lumière photographique. Elle capte. Elle inscrit. Elle imprime. Elle voile. Elle dévoile. Elle perce l’énigme de l’ombre. » (Jacques Derrida, Aletheia, 1996, éditions William Blake and Co, tiré à part, 2025. Adaptation). 
 
Je glisse une photographie de Fatima Hassouna dans le cahier où je rédige ces lignes. La photographe, kefieh noir et blanc manteau sombre, est saisie dans la pénombre d’un immeuble bombardé, assise sur une chaise en fer rouillé déglinguée. Sa main tient fermement son appareil photo. Les décombres gisent par terre. Je perçois une clarté légère, une signature nébuleuse de l’ombre. Une lueur de chandelle. Elle est seule, indifférente au photographe qui la flashe. Une prégnante terrifiance plane dans l’air. Elle voit. Elle donne à voir l’interdit. Je ferme les yeux pour voir, pour savoir. Je ne discerne que l’esthétique, l’irisation du silence. 
 
Jacques Derrida relie ce phénomène à la  loi de phôs. Photôs, photographie, phosphore proviennent de la même racine. Le sionisme néantise Gaza à coups de bombes au phosphore. L’adjectif phosphoros signifie porteur de lumière. Phosphoros désigne aussi la planète Aphrodite, Vénus, l’étoile du berger. Les photographies de Fatima Hassouna sont infusées de phosphore. Certains instantanés me magnétisent, m’hypnotisent, me paralysent. Archives incomparables, inimitables, indélébiles. Son dernier cliché, un coucher de soleil.  Son absence-présence me lancine comme un hologramme. Je ne vois que son aura. Elle est seule dans son impalpable visibilité. De nouvelles photographies apparaîtront. Le festival de Cannes, la société du spectacle l’intrônisent déjà comme une icône. Elle ne sera bientôt qu’une valeur marchande. On parlera un peu d’elle, moins qu’elle ne l’a souhaité. Des documentaires, des livres lui rendront hommage. Puis, elle s’éclipsera. Elle sera toujours seule dans son attente de la lumière.
 
Amina al-Salmi.
 
30 juin 2025. Amina al-Salimi, surnommée Frans, est tuée dans le banbardement du Café Al-Baqa à Gaza. Un énorme cratère engouffre les cadavres de plusieurs dizaines d’écrivains, d’artistes, de journalistes, d’étudiants, d’ingénieurs, de médecins. Les deniers tableaux d’Amina al-Salmi sont des visages maculés de sang, des portraits noirs au fusain, des martyrs en agonie.
 
Dima Diab.
 
DIima Diab, vingt-six ans, écrivaine, conteuse, est assassinée, le 28 juillet 2025.  Et beaucoup d’autres plumes, connues et méconnues. Leurs œuvres transmissibles sans limites, reproductibles à l’infini, sont indestructibles. Ces créatrices, la tête recouverte du même châle de la dignité, sont l’âme éternelle de la Palestine.
 
 

Journal des derniers jours, d’Hiba Abou Nada.

 
« 7 octobre 2023. Nous pensons à nos petites affaires quotidiennes. Soudain, l’alarme nous arrache à nos réflexions banales. Les cours sont suspendus dans les écoles, les lycées, les universités. Les examens sont annulés. Le bruit des mitraillettes nous assourdit l’atmosphère. La chaîne El Jazeera affiche un bandeau rouge. La vie à Gaza se chambarde en un instant. 
 
« 8 octobre 2023. Nos comptes sur les réseaux sociaux sont des registres de décès, des demeures en deuil, des tentes de condoléances. Les cortèges funéraires se ramifient, se mêlent, s’étalent sur des kilomètres. Les américains menacent d’envoyer un porte-avion pour aider les sionistes. Nous en ferons un restaurant fottant. 
 
« 9 octobre 2023. Dans les guerres précédentes, nous anticipions les cibles sionistes. Cette fois-ci, il n’y a pas de schéma spécifique. Tout se bombarde sous feu nourri, du nord au sud. Des frappes aléatoires, meurtrières, dévastatrices. Un massacre collectif. Une boucherie totale. Nous nous attendons à une phase d »isolement absolu. Nous ne pourrons plus entrer en contact avec l’intérieur,  encore moins avec l’extérieur. L’infernal pilonnage ne fera aucune pause. Nous tenons bon. Nous restons libres dans nos têtes. 
 
« 10 octobre 2023. Nous sommes encore en vie. Nous comptons les morts et les rescapés. J’enveloppe la fleur d’oranger dans la prière pour les préserver du phosphore. Les morts, unis dans un amour intense, dissiperont les poussières. 
 
« 11 octobre 2023. Quand les mensonges seront démasqués, Gaza sera toujours vivante. Elle sera toujours la cité des savants, des poètes, des prophètes, des prodiges, des miracles. Nous résistons. Nous persévérons pour tous les opprimés de la terre. 
 
« 12 octobre 2023. Ce sont des arbres généalogiques entiers qui s’écroulent. Aucune branche n’est épargnée. Gaza, un cimetière à ciel ouvert. Nous regardons nos futurs en silence.
 
« 15 octobre 2023. Là-haut, nous bâtissons une nouvelle cité avec des médecins sans patients, des professeurs sans étudiants, des familles sans chagrin. Une nouvelle Gaza sans guerres.
 
« 18 octobre 2023. Des linceuls alignés par dizaines, voilà nos photos de famille. Ils ont vécu ensemble. Il s’en vont ensemble. 
 
« 19 octobre 2023. Ma liste d’amis se rétrécit. Elle n’est plus qu’un inventaire de sépultures. Mes amis s’envolent avec les éclats de roquettes. Je ne peux pas les retenir. Je ne peux pas les ramener sur terre. Je ne peux pas les consoler. Je ne peux pas les pleurer. Je ne sais pas quoi faire. Que faire devant cet abominable festin de la mort ?
 
« 20 octobre 2023. Nous attendons. la promesse de vérité » (Hiba Abou Nada, Journal des derniers jours). 
 
20 octobre 2023, en pleine nuit, Hiba Abou Nada est tuée avec toute sa famille par une frappe aérienne dans leur maison à Khan Younis.
 
 
 

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

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Le cinéma aficain engagé au Burundi du 22 au 26 septembre https://mondafrique.com/loisirs-culture/le-cinema-aficain-engage-au-burundi-du-22-au-26-septembre/ https://mondafrique.com/loisirs-culture/le-cinema-aficain-engage-au-burundi-du-22-au-26-septembre/#respond Sun, 21 Sep 2025 17:31:38 +0000 https://mondafrique.com/?p=139131 Gitega, capitale du Burundi, devient le cœur battant du cinéma africain engagé avec l’Impakt Film Festival. Projections, débats et rencontres y célèbrent la créativité des cinéastes du continent, dans une ambiance à la fois festive, critique et fraternelle. En septembre, la capitale burundaise se mue en véritable laboratoire d’images, de mots et de regards : du […]

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Gitega, capitale du Burundi, devient le cœur battant du cinéma africain engagé avec l’Impakt Film Festival. Projections, débats et rencontres y célèbrent la créativité des cinéastes du continent, dans une ambiance à la fois festive, critique et fraternelle.

En septembre, la capitale burundaise se mue en véritable laboratoire d’images, de mots et de regards : du 22 au 26 septembre, l’Impakt Film Festival investit Gitega et fait résonner les voix du cinéma africain contemporain. Bien plus qu’une simple sélection de films, l’événement s’impose comme un espace de réflexion collective, un lieu d’échange où la jeunesse, les créateurs et le public peuvent confronter leurs idées, interroger leur époque et inventer ensemble de nouveaux récits. Dans un pays où la parole est parfois contrainte, ce rendez-vous annuel offre un souffle d’audace et de liberté.

La diversité africaine

Depuis ses débuts, l’Impakt Film Festival a pour ambition d’être une vitrine de la diversité africaine, mais aussi un miroir des préoccupations sociales, politiques et culturelles qui traversent le continent. Chaque édition propose un panorama de fictions, de documentaires et de courts métrages, où se croisent des cinéastes confirmés et de jeunes talents prometteurs. La programmation, volontairement éclectique, fait la part belle à la création burundaise, mais accueille aussi des œuvres venues du Sénégal, du Rwanda, de la République démocratique du Congo, de l’Afrique du Sud, du Cameroun ou encore du Maghreb. Ces films, souvent inédits, témoignent d’une vitalité artistique impressionnante et d’un engagement sans faille pour les causes qui traversent l’Afrique d’aujourd’hui.

Ce qui fait la singularité de l’Impakt Film Festival, c’est avant tout la force de ses thématiques : droits humains, justice sociale, mémoire, environnement, identités, migrations, place des femmes ou de la jeunesse… Chaque projection devient prétexte à un débat ouvert, à une prise de parole. Les cinéastes viennent dialoguer avec le public, partager la genèse de leurs œuvres, débattre, parfois s’opposer : dans les salles obscures ou sous les étoiles, la magie du cinéma se double d’une dimension citoyenne. On y parle de la vie, de l’exil, des blessures de l’histoire, de l’espoir, de la capacité de l’Afrique à se réinventer, toujours.

Le festival ne se limite pas aux projections. Il investit la ville à travers des ateliers, des masterclasses, des rencontres professionnelles et des initiatives de formation pour les jeunes burundais. Ces moments de transmission permettent à une nouvelle génération de s’approprier le langage du cinéma, de découvrir les métiers de l’image, de s’exprimer avec une liberté rare. Dans les rues de Gitega, les affiches et les débats font vibrer la cité, rappellent que l’art peut être une arme pacifique, un instrument de dialogue, un outil d’émancipation.

L’ambiance, elle, est à la fois studieuse et festive : on y croise des étudiants, des journalistes, des passionnés de culture, des familles venues découvrir une histoire, des activistes, des curieux. Les soirées de clôture, ponctuées de concerts, de performances et de remises de prix, célèbrent le talent et le courage de celles et ceux qui osent raconter leur réalité, sans détours ni faux-semblants. Certains films sont récompensés, d’autres repartent auréolés de l’enthousiasme du public : tous laissent une trace, un écho, une envie de poursuivre la réflexion.

À l’heure où de nombreux festivals africains doivent composer avec les incertitudes politiques ou économiques, l’Impakt Film Festival s’impose comme un rendez-vous essentiel pour le Burundi et la région des Grands Lacs. Il prouve que la culture, même modeste, peut ouvrir des horizons, bousculer les consciences, relier les peuples. C’est ce souffle d’engagement, de beauté et de résistance que Gitega célébrera du 22 au 26 septembre, au cœur d’un festival qui ne cesse de grandir.

Informations pratiques :

Dates : du 22 au 26 septembre 2025
Lieu : Gitega, Burundi – divers sites et salles partenaires
Programme, horaires, billetterie et contacts : festival.impakt.bi / facebook.com/burundimpakt

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L’artiste togolais Yao Metsoko, entre magie et réalité https://mondafrique.com/loisirs-culture/lartiste-togolais-yao-metsoko-entre-magie-et-realite/ https://mondafrique.com/loisirs-culture/lartiste-togolais-yao-metsoko-entre-magie-et-realite/#respond Sun, 21 Sep 2025 16:54:56 +0000 https://mondafrique.com/?p=138466 Yao Metsoko, artiste peintre, né au Togo en 1965.  » je me suis installé en France en 1985. je peins et dessine depuis mon enfance, à 20 ans j’ai fait des rencontres qui ont boulversé ma vie et m’ont ouvert une voie très personnelle: Chagall, Clem Lawson, Ousmane Sow. » Yao Metsoko puise son inspiration dans […]

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Yao Metsoko, artiste peintre, né au Togo en 1965.

 » je me suis installé en France en 1985. je peins et dessine depuis mon enfance, à 20 ans j’ai fait des rencontres qui ont boulversé ma vie et m’ont ouvert une voie très personnelle: Chagall, Clem Lawson, Ousmane Sow. »

Yao Metsoko puise son inspiration dans son enfance, dans le trésor des symboles et des mythes, de la poésie et des mystères de la vie. Dans ses toiles et ses sculptures il construit des passerelles entre traditions et modernité, magie et réalité.

Un entretien avec Christophe Barreyre, éditeur, auteur de nombreux documentaires et ancien rédacteur en chef et producteur de l’émission Affaires sensibles sur France Inter

 

La Galerie africaine illumine Paris grâce à sa directrice, Aude Minart, grande passeuse d’Art!

Au 19 rue du Pont Louis-Philippe dans le quartier du Marais à Paris sont exposés peintres, sculpteurs, photographes, l’Afrique se déploie plurielle, foisonnante mêlant traditions revisitées et explorations avant-gardistes.

 

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Exclusif, le général Nacer el Djinn a été arrêté à Alger https://mondafrique.com/a-la-une/exclusif-le-general-nacer-el-djinn-a-ete-arrete-a-alger/ https://mondafrique.com/a-la-une/exclusif-le-general-nacer-el-djinn-a-ete-arrete-a-alger/#respond Sun, 21 Sep 2025 16:17:55 +0000 https://mondafrique.com/?p=139081 Un dispositif sécuritaire exceptionnel aura été été déployé pour parvenir à arrêter le général Nacer el Djinn, l’ancien patron du contre espionnage algérien en fuite depuis deux jours alors qu’il avait été placé en mai 2025 en détention puis en résidence surveillée. L’arrestation a eu lieu dans la matinée de dimanche dans la région d’Alger.  […]

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Un dispositif sécuritaire exceptionnel aura été été déployé pour parvenir à arrêter le général Nacer el Djinn, l’ancien patron du contre espionnage algérien en fuite depuis deux jours alors qu’il avait été placé en mai 2025 en détention puis en résidence surveillée. L’arrestation a eu lieu dans la matinée de dimanche dans la région d’Alger. 

Nacer el Djinn, de son vrai nom Abdelkader Haddad, avait été promu général il y a environ quatre ans, après son retour d’exil en Espagne. Il avait quitté l’Algérie à l’été 2018, au moment des purges lancées par le défunt chef d’état-major Ahmed Gaïd Salah.

Réhabilité par la suite, il s’était vu confier des postes stratégiques dans les services de renseignement. D’abord, il prend la direction du tristement célèbre centre de détention et d’interrogatoire « Antar », situé au cœur d’Alger, connu pour les exactions qui y auraient été commises. Puis, en juin 2024, il est nommé à la tête de la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), l’appareil central du renseignement algérien avant d’en être évincé en mai dernier, soit moins d’un an plus tard et avant d’être placé en détention piuis en résidence surveillée.

Un séisme au sein de l’armée

Dans le sillage de l’évasion du haut gradé, plusieurs arrestations et sanctions sont intervenues ce week end au sein de la DCSA, ce renseignement militaire qui est le bras armé de l’État major. Le chef de ce service prestigieux, chargé de l’arrestation et de la surveillance du général el Djinn, le général Mahrez Djeribi, a été notamment écarté de ses fonctions d’après plusieurs sources crédibles. Or il s’agit d’un des gradés les plus proches du général Chengriha qui l’avait désigné voici quelques mois en mettant fin à sa retraite puis promu au grade de général en juillet dernier.  

« Si la DCSA a vraiment joué un double jeu face à l’État-Major, alors que ce service est placé directement sous ses ordres et dispose des pouvoirs de l’ancien DRS du général Toufik en fonctions jusqu’en 2015, note un bon connaisseur du sérail algérien, c’est que l’institution militaire est devenue un bateau ivre ».

L’armée algérienne sous le choc de l’évasion du général el Djinn (suite)

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