Charles Pasqua avait bâti un formidable réseau de bandits corses en Afrique. Au nom, forcément, de la République et de la France
« Je préfère qu’on me prenne pour un voyou que pour un con ». Voyou, il le fut, mais toujours au nom de la grandeur de la France, tant cet ancien vendeur de pastis avait soif de respectabilité. Cagnottes pétrolières, rachat de casinos, diplomatie parallèle, commissions sur les ventes d’armes, Pasqua qui découvrit l’Afrique sur le tard, ne fut pas long à comprendre comment la Françafrique fonctionnait. Fondateur en 1958 avec d’autres du Service d’Action Civique (SAC), ce réseau de barbouzes et de malfrats qui prospéra à l’ombre de l’Etat au début de la Veme république, il avait été à bonne école. Les réseaux corses qu’il possédait en Afrique l’aidèrent également à se mettre au parfum des caisses noires.
Entre truculence et magouilles
On ne se sera pas ennuyé avec les hommes de « Mossieu Charles » en Afrique. « J’ai des amis corses et alors, ce n’est pas un délit ». Cette confidence émouvante de Charles Pasqua à Corse-Matin traduit une affection particulière pour des familles d ‘ « africains » dans l’île : les trois frères Feliciaggi et les deux frères Tomi. Au cinéma, les ams corses auraient joué le rôle de mauvais garçons ; de lourdes paupières, des lèvres épaisses. Leur impassibilité est traversés parfois par une lueur d’intelligence baptisée sur l’ïle de beauté de » vice du renard », ou surnommé encore « vice du berger ».
Les Feliciaggi sont officiellement trois, l’histoire en retiendra deux ; Nés au Congo de parents fonctionnaires, Charlie et Robert allient le meilleur et le pire des corses expatriés : l’esprit d’entreprise, l’énergie, la générosité clanique, mais aussi une propension à se sentir au dessus des lois. Robert qui fut abattu voici quelques années dur le tarmac de l’aéroport d’Ajaccio avait les yeux sombres et le geste lent. Deux fois ministre de l’Intérieur, Pasqua lui concéda quelques casinos et l’autre l’aidera à renflouer son mouvement « Demain la France »
Chez les Tomi, deuxième pilier du clan Pasqua, le plus connu est Michel, condamné dans la débâcle du casino de Bandol en 1996 à un an de prison. Toujours en piste, l’ami Tomi fait l’objet actuellement d’une procédure judiciaire, où il est mis en cause pour ses liens avec le président malien IBK.
Le roi du pétrole
Le baptême africain de Pasqua date des années 90/ Depuis le Conseil Général des Hauts de Seine qu’il préside, ke corse pousse ses pions. La société d’économie mixte, la SEM « Coopération 92 », multiplie les échanges avec l’Afrique, notamment le Gabon. Les premiers projets sont localisés dans la région natale du président gabonais d’alors, Omar Bongo.
Grace à son amitié avec feu Alfred Sirven, le grand manitou des commissions edurant ces années là, Pasqua se fait une petite place à l’ombre des puits de pétrole. Le Cameroun, où il est au mieux avec le président Biya, lu fait quelques faveurs. Le goupe Elf attribue quelques emplois fictifs à ses proches, dont le fidèle Daniel Leandri, dit « le tondu », flic de père en fils et dévoué corps et âme à Charles.
Le paradis angolais
Devenu une seconde fois ministre de l’Intérieur en 1993, Charles Pasqua se sent pousser des ailes et n’hésite pas à soutenir le régime angolais du président Dos Santos, qui tente de s’approvisionner en armes malgré l’embargo. Peu importe que ce chef d’Etat se proclame marxiste! Charlie n’est pas mesquin ! Et verra Pasqua aider Dos Santos en appuyant les activités de courtage d’un marchand d’armes, Pierre Falcone, qui organisera les livraisons depuis Paris.
Ce qui vaudra à « Mossieu Charles » quelques avantages sonnants et trébuchants, à l’origine d’une vaste enquête judiciaire menée par le juge Philippe Courroye, qui fut surnommée « l’Angolagate ». Comparaissant cinq fois devant les tribunaux, Charlie bénéficiera d’un non lieu; deux fois, il sera condamné à une peine avec sursis.
Peu lui importait au fond ! L’essentiel fut que la Cour de Justice de la République (CJR), composée de parlementaires et saisie pour des délits commis alors que Charles Pasqua était ministre va le gracier « au nom des éminents services rendus à la République ». Pour ce fils d’un modeste flic qui se rèvait en super notable à la présidence du Sénat, cette décision de la CJR aura été le plus bel hommage qu’il n’a jamais reçu.