Même le moins curieux des journalistes a compris que derrière les investissements massifs d’Areva en Afrique se cachaient de lourdes affaires de corruption.
Une affaire de clans politiques, de famille et copinage. Le tout pour pas loin de 3 milliards d’euros. Admettons que si toute le monde savait, tout le monde se taisait, gauche et droite dans un même élan. Alors qu’aujourd’hui « Atomique Anne », l’ancienne patronne du nucléaire civil, n’est plus qu’un gibier que l’on chasse : « Anne où est passé l’argent ». Tandis que, sur le bord de la route, gît la dépouille d’Areva attendant sa transfusion d’argent public.
Gisements fantômes
En ce qui me concerne c’est le 22 décembre 2011 dans « Bakchich », le journal mal élevé créé par Nicolas Beau, que j’ai écrit les premières lignes sur les étranges arrangements africains du colosse nucléaire. Pour faire comparaison, à vue de nez, le dossier avait une parenté avec la désopilante affaire des « avions renifleurs ». Nous sommes alors sous Giscard d’Estaing et la France est assez sotte pour investir des tonnes d’argent dans un système magique. Embarqué dans un avion la machine hoche de l’aiguille dès que l’aéronef survole un nid de pétrole. En réalité le « renifleur », sous une carrosserie élégante, se composait essentiellement d’une brique et d’une tringle de bois. Et c’est ainsi qu’Areva nous a fait rajeunir en investissant des fleuves d’argent dans des « gisements » fantômes.
Avatar dans cette affaire, pilotée entre autres par un élégant jeune noble nommé Sébastien de Montessus, existe en parallèle une histoire de voilier fantôme. Elle est la bienvenue car ce dossier en forme de nœud de vipères qui manquait gravement d’exotisme. Vous me direz que l’enjeu, le coût de ce voilier litigieux, le « Cape Arrow », est vraiment ridicule comparé au pactole engagé en Centrafrique et en Namibie, 7,5 malheureux millions de dollars pour le bateau.
Un yacht pour Montessus
La question qui se pose aujourd’hui, à propos de Sébastien de Montessus co-responsable du désastre d’Areva et œil du clan Sarkozy dans l’entreprise, c’est ce qu’il vient faire dans cette galère à voiles alors, qu’en théorie, son emploi du temps est blindé ? Résumons. En 2010 on voit d’abord Sébastien, grand amateur de voile et toujours dirigeant d’Areva, négocier l’achat du navire dont il est question « pour le compte d’amis ». Ses fidèles désignés sont aussi ses obligés. D’abord Haddis Tilahun un namibien qui a très largement bénéficié des investissements délirants d’Areva, et même obtenu la moitié d’une usine de dessalement dans laquelle « Atomique Anne » a jeté 800 millions par les fenêtres. On ignore pourquoi mais, aux côtés du sieur Tilahun, pourtant couvert de cash, apparaissent dans le dossier deux autres personnages comme acheteurs eux aussi, un belge et un français dont les affaires sentent le soufre… Mal intentionnés les juges, aujourd’hui en charge démonter la déconfiture d’Areva, soupçonnent l’excellent Montessus de s’être fait offrir un yacht à nos frais… Calomnie et rien n’est démontré. Et d’ailleurs ni Tilahun ni les aventuriers franco-belges n’ont immatriculé le navire à leurs noms.
Mais Mondafrique est en mesure de donner un coup de main à nos magistrats, dotés de si faibles moyens. Finalement c’est par un citoyen, si proche de Nicolas Sarkozy que c’est ce dernier qui lui a épinglé les insignes de chevalier de la Légion d’honneur, que le yacht a été immatriculé. Nous étions alors à l’instant précis où Areva fracassait sa tirelire et son avenir dans ses folies africaines. On était alors entre amis. Quant à Anne Lauvergeon, toujours amoureuse de l’Afrique, elle est retournée à la mine où elle pioche du minerai de bauxite dans une concession achetée par Xavier Niel. Une bonne mine de Guinée, au paradis d’Alpha Condé où Kouchner se refait une santé. Un nouvel Elysée.
https://www.bakchich.info/international/2011/12/22/a-l-ecoute-des-aventures-d-areva-en-centrafrique-59879